Dispendieux, ce cher président P. KLOBOUKOFF - Académie du gaullisme

Académie du Gaullisme
Président Jacques Myard
Secrétaire générale Christine ALFARGE
Président-fondateur Jacques DAUER
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Dispendieux, ce cher président





par Paul KLOBOUKOFF,
Pour analyser la situation économique du pays, on ne peut se passer de regarder dans le rétroviseur à l’aide des statistiques, des comptes publics et des comptes nationaux, dont les délais de production sont plus ou moins longs. Mais, trop souvent, seul le passé récent est l’objet d’attention. C’est pourquoi, je remonte ici jusqu’en 2017 pour souligner des caractéristiques lourdes de la gouvernance de l’actuel président qui ont un impact pesant sur les possibilités de développement de la France dans l’immédiat et dans les années à venir. Vu le niveau abyssal de l’endettement atteint à la fin du 1er quinquennat, on aurait pu attribuer à Jupiter la devise : « Après moi, le déluge ! ». Comme il s’est représenté en 2022 et a été réélu, ce serait maintenant « Encore moi, avec la menace de l’austérité ».  
Selon les séries de données publiées par le FMI (1) en octobre 2023, de 2017 à 2023, le PIB de la France a augmenté en valeur nominale de 2 231 Mds € à 2 372 Mds €, soit de + 6,3%. Sachant que sur cette période, l’inflation a atteint + 16,7%, la performance est plus que modeste. D’ailleurs, en volume, la progression du PIB n’a été que de + 5,8% en 6 ans, avec une chute due au Covid 19 entre 2019 et 2020 de - 7,7%, qui  a été en majeure partie compensée l’année suivante par une hausse de + 6,4%. Pour 2024, une progression du PIB de + 1,4% avait été prévue dans la loi de finances. Au début de cette année, cet objectif a été abaissé à + 1 % et il n’est pas assuré qu’il dépasse + 0,9%.
La période a aussi été caractérisée par de surabondantes dépenses publiques. En 2017, elles étaient déjà de 1 298 Mds €, soit de 56,5% de la valeur du PIB. En 2020, elles ont bondi à 61,3% du PIB, puis elles ont caracolé à 59,1% en 2021, 58,3% en 2022 et 56,8% en 2023. Selon les données de la Banque de France de mars 2023 (2), les  dépenses de soutien face à la crise sanitaire et de relance ont été de 84 Mds € en 2021 (dont 22,9 Mds pour la relance), 37,5 Mds en 2022 (dont relance : 22 Mds), et encore 12,5 Mds en 2023 (dont relance : 9,6 Mds). L’argent a coulé à flot. Sans que la magie de la « relance » se manifeste.
Les Autorités n’ont pas voulu augmenter la fiscalité, déjà très élevée, sans doute pour ne pas brider la croissance. Aussi, le taux des prélèvements obligatoires, qui était de 44,6% du PIB en 2017, a oscillé entre 43,8% et 45,2% pour s’établir à 44,9% en 2023 (2).
En conséquence, le déficit public, déjà consistant, a grossi. Selon les Comptes nationaux annuels de l’Insee publiés fin août 2023, ce déficit est monté de 3,1% du PIB en 2019 à 9,0% en 2020, 6,5% en 2021 et à 4,8% en 2022.
Dans « Les chiffres clés du budget 2024 », lesechos.fr a indiqué en octobre 2023 (3) que ce déficit serait de 4,9% en 2023, et que 4,4% étaient anticipés pour 2024. Vu la dégradation des prévisions de croissance, rien n’est moins sur.  
Profitant de taux d’intérêt anormalement/artificiellement bas, pour financer ses dépenses, Mr Macron a donc recouru massivement à l’endettement. Le FMI nos rappelle qu’en 2017 la dette publique brute française était de 2 254 Mds €, soit 98,1% de la valeur du PIB. En 2020, elle a bondi à 2 657 Mds, soit à 114,7% du PIB. Au 19 février 2024 à 18h15, le Compteur de la dette (4) indiquait un montant de 2 778 Mds €, soit une hausse de +  524 Mds en un plus de 6 ans, c’est énorme !
Ce sont de funestes records historiques, insensés, si on se souvient que  dans le Pacte de stabilité et de croissance (PSC), le traité de Maastricht avait fixé le 7 février 1992 les plafonds à ne pas dépasser à 3% du PIB pour le déficit public et à 60% du PIB pour la dette publique. Lors de la crise du Covid, la Commission de l’UE a suspendu le PSC en mars 2020, puis a prolongé la suspension deux fois, jusqu’à fin 2023. Aussi, au début de 2024, 12 états de l’UE devraient se trouver en procédures de déficit excessif. C’est pourquoi, le 10 février un accord plus accommodant a été conclu en urgence entre le Parlement européen et les états membres pour réformer le PSC. Théoriquement applicable à compter du 01/01/2025… il est déjà en pratique en 2024 pour « juger » les défaillances des états (5).  Un grand n’importe quoi a donc été autorisé par la Commission de l’UE et Mme von der Leyen pendant quasiment 4 ans. Étonnez-vous des résultats.  
Il y a quelques jours, dans un article sur lefigaro.fr intitulé : Agnès Verdier-Molinié : « Le gouvernement voit arriver le mur de la dette avec la remontée des taux d’intérêt » (6). La directrice de la Fondation Ifrap considère (à très juste titre) que nous ne pouvons pas continuer avec des niveaux de déficits comme cela ». Sinon, avec la remontée des taux d’intérêt, « la charge de la dette française pourrait s’envoler jusqu’à presque  100 milliards d’euros par an ». Les coupes budgétaires devraient alors être plus « violentes » que les 10 Mds € annoncés par le ministre Bruno Lemaire.
Pour la journaliste Bertille Bayard, « Faute de réformes structurelles, l’exécutif se condamne à n’avoir que le rabot pour limiter la dérive des finances publiques ». Elle l’a expliqué sur lefigaro.fr le 21 février dans un article intitulé « Bertille Bayart : Le rabot budgétaire, symptôme d’un « modèle » français à bout de souffle » (7). Pour elle, la coupe de 10 Mds est dérisoire : 0,4% du PIB et 0,8% des dépenses publiques. Très insuffisant, vu le niveau du déficit public. « Ce n’est même pas un tournant de la rigueur… Ce que l’exécutif a annoncé dimanche, c’est un bon vieux coup de rabot assorti, c’est de bonne guerre, d’une ou deux entourloupes politiques ». Moi, je ne crois pas que ce soit de bonne guerre.
Malheureusement, il n’y a pas que la croissance ramollo et le ravage des finances publiques à pointer du doigt. Force est de déplorer également le déficit commercial persistant de la France, qui exprime le manque de compétitivité de notre économie. A part les années 2019 et 2021, où la balance a été excédentaire respectivement de  + 0,51% et + 0,36% du PIB,  le déficit a été de rigueur, partant de - 0,77% du PIB en 2017 pour se situer à - 2,0% en 2022 et à - 1,23% du PIB en 2023 (1).
Une des raisons majeures en est la poursuite de « la désindustrialisation ». Selon les données de l’Insee (8), la part de la Valeur ajoutée (VA) des branches industrielles dans la VA  nationale est descendue de 13,83% en 2017 à 13,26 en 2022. Bêtement, l’Industrie n’a pas été soutenue et a été délaissée au profit du tertiaire, dont la VA représente, à elle seule, 80% de la VA totale.
Au sein de l’Union européenne, la faible part de la VA industrielle française est  descendue de 11,9% à 10,7% de 2017 à 2022 (9). La part de nos cousins germains a aussi diminué. Au contraire, les parts de l’Irlande, de la Suède, des Pays-Bas, de l’Espagne, ainsi que celles de la Pologne, de la République tchèque et des pays baltes ont considérablement augmenté. L’Italie avait déjà dépassé la France en 2017. Elle l’avait un peu plus distancée en 2022. Un nouvel ordre industriel s’installe en Europe, dans lequel la France recule.
D’où, notre forte dépendance vis-à-vis de l’extérieur, qui est tant décriée en ce moment, avec les appels répétés (désespérés ?) à la « souveraineté alimentaire » et à acheter français. Encore faut-il que nos producteurs soient protégés des concurrences déloyales qui se multiplient avec la prolifération des traités internationaux mal ficelés, afin que des produits français puissent être présentés aux  consommateurs, à des prix acceptables, de préférence.
 
*Paul KLOBOUKOFF  Académie du Gaullisme Le 26 février 2024
 
Sources et références
(1) World economic outlook   octobre 2023
(2) La situation d’ensemble des dépenses publiques à fin février 2023, selon le rapport annuel de la Cour des comptes      comptes.fr/sites/default/files/20230310-RPA-2023-situation-finances publiques-pdf
(3) Les chiffres clés du budget 2024 lesechos.fr/politique-societe/budget 2024-les-chiffres-cles-du-projet-de-loi-de-finances-du-gouvernement     maj le 03 octobre 2023
(4) Le compteur de la dette publique de la France compteur.net/compteur-dette-France/
(5) L’Europe trouve un accord sur le pacte de stabilité      lemonde.fr/economie/article/2024/02/10/l-europe-trouve….
(6) Agnès Verdier-Molinié : « Le gouvernement voit arriver le mur de la dette avec la remontée des taux d’intérêt » lefigaro.fr/conjoncture/agnes-verdier-molinié-le-gouvernement voit… maj le 19/02/2024
(7) Bertille Bayart : Le rabot budgétaire, symptôme d’un modèle français à bout de souffle lefigaro.fr/vox/bertille-bayart-dette-flechissement-de-la-croissance-le-modele-francais-de-budget-a-bout-de-siuffle    maj le 21févtier 2024
(8) Valeur ajoutée par branche. Données annuelles ce 1949 à 2022 insee.fr/fr/statistiques//63019734    le 31/05/2023
(9) Valeur ajoutée de l’industrie dans l’Union européenne : prix courants insee.fr/fr/statistique/213200577#tableau-figure1_radio/
     

© 01.03.2024

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