L’IRAk, HISTOIRE ET CONVOITIS

Par Amir ALFARGE,
Qand on pense de nos jours à L’Irak, c’est d’abord une photographie iconique qui vient à l’esprit. Devenus banals, la guerre, l’occupation américaine voir le pétrole, d’autres images ont également marqué les consciences, celles d’un pays d’une plus ancienne civilisation et de sa pureté. La Mésopotamie est un terme qui vient du grec et qui signifie « entre les deux fleuves ». Ces fleuves sont le Tigre et l’Euphrate. Actuellement, la plus grande partie de la Mésopotamie se trouve en Irak.
La terre mythique de ce pays est paradoxalement devenue quelque chose d’autre, l’incarnation d’une douleur, ce pays martyr riche et ancien, fixant une sorte de souffrance et de violence, montré jusqu’au cynisme le plus absolu, démultiplié et vendu sous toutes ses formes comme un symbole, un point de ralliement. Tout le monde connaît les événements actuels de ce pays, alors que la vérité sur son histoire, plus contrastée, semble être submergée par sa légende (servant également de caution et d’étendard à l’une des plus anciennes civilisations du monde). Pour être objectif, il faut replacer les choses dans leur contexte, à savoir : la place stratégique de l’Irak au MoyenOrient ainsi que ses importantes richesses minières.
Ainsi il est évident que la richesse de l’Irak est un des éléments de sa tragédie voir de la décision américaine d’occuper ce pays et de le martyriser. En effet, le pétrole était la cause première de la guerre déclenchée par les États-Unis contre l’Irak en 2003 car les grandes compagnies voulaient contrôler le marché pétrolier, ces compagnies ont joué un rôle important dans l’escalade de propagande qui a mené à la guerre de 2003. Cette attaque contre l’Irak, en réalité, s’inscrivait dans la vision stratégique du président Bush, celle du nouvel ordre mondial et d’un monde unipolaire.
L’Irak est incontestablement une des zones névralgiques les plus importantes du monde. Carrefour de deux continents, il représente un enjeu capital pour les puissances anglosaxonnes occidentales dont il assure la liaison avec l’Asie. Sa fabuleuse richesse pétrolière, accroît encore l’importance de cette zone et des voies qui y mènent. Le pétrole irakien a suscité maintes convoitises, le pays faisant déjà l’objet d’invasion durant les deux guerres mondiales. Pour rappel, l´Irak possède la deuxième réserve pétrolière prouvée au monde. L’histoire très mouvementée de ce pays depuis 1914 ne fait que traduire l’importance capitale de cette région et les convoitises multiples qui s’y déchaînent.
En effet, les Britanniques étaient les premiers à avoir mis les mains sur le pétrole irakien suite à la défaite des Turcs ottomans qui ont perdu la guerre en étant les alliés de l’Allemagne. L’empire ottoman fut dépecé et sa province irakienne se trouva sous l’influence collective et multiforme des puissances européennes, auxquelles s’ajoutaient les États-Unis. Alors que la France était la puissance dominante en Syrie, grâce à ses investissements économiques et culturels, les Britanniques occupaient l’Égypte depuis 1882 et avaient fini par jalouser cette présence française surtout après avoir senti l’odeur du pétrole arrivant de la région du Golfe et de cette terre d’Irak.
La réplique ne se fit pas attendre, les Britanniques misèrent sur une renaissance arabe fondée sur l’authenticité bédouine qui se substituerait à la présence ottomane et au succès de la francophonie. Ainsi le plan exécuté par Lawrence d’Arabie sur les princes de la dynastie hachémite fut réussi et les arabes acceptèrent une tutelle britannique « bienveillante ». Le gouvernement de sa majesté leur promit une « Arabie » indépendante, par rapport aux Ottomans et à une présence française qui n’était pas souhaitable pour les intérêts Britanniques.
Le 11 mars 1917, un corps expéditionnaire britannique entre à Bagdad, capitale de la Mésopotamie et en chasse les Turcs ottomans mettant un terme à toute présence française afin d’empêcher la France de s’approcher du trésor irakien. Pour fixer les limites entre l’Arabie britannique et la Syrie française, la négociation est confiée au Français F. Georges-Picot et à l’Anglais Mark Sykes. Kirkuk et la province irakienne de Basra seront placées sous administration directe des Britanniques, la région du Proche-Orient sera confiée aux Hachémites et partagée en deux zones d’influence et de tutelle, l’une au nord confiée aux Français, l’autre au sud, riche en pétrole aux Britanniques. Les Français ignoraient-ils l’importance du choix Britannique pour le désert arabique ? Préféraientils contempler une zone allant du Liban à la Syrie, leur faisant penser au sud de la France ? La France reçoit donc un mandat de Mosul, du Liban et de la Syrie alors que la Grande-Bretagne prend l’Irak. (Agrandi de Kirkuk cédé par les Français en échange d’une participation aux bénéfices de la région.) Un siècle après, le spectre d’un nouveau « pillage » de l’Irak resurgit. L’exploitation du pétrole irakien commence après la première guerre mondiale. Depuis maintenant plus d’une centaine d’années, la question du pétrole fait partie intégrante de la politique étrangère des pays anglosaxons. La place centrale de l’Irak au sein de ce territoire riche en pétrole ajoute une importance à son contrôle. La présence militaire étatsunienne dans la région témoigne depuis longtemps d’une volonté d’exercer un contrôle sur ce pays. Cette présence américaine tente de faire passer un traité d’ici au 31 juillet 2008 avec l’Irak dans lequel les États-Unis garderont plus de cinquante bases militaires.
Enfin, il est difficile de prétendre à une vision « objective » de la situation en Irak. Nous sommes tous marqués par notre histoire, par nos origines, par nos engagements. « Mais une chose est restée gravée dans ma mémoire de ce pays qui peut témoigner de son importance voire sa richesse, je me souviens comme si c’était hier dans ma ville natale de Bagdad, le jour où mes parents me soupçonnaient de salir mes vêtements de sport avec du cambouis du garage voisin, la vérité est que le cambouis ne parvenait pas de ce garage mais c’est le pétrole qui jaillissait du terrain de foot en se mélangeant avec la terre. » Ceci montre l’importance des richesses minières de l’Irak au Moyen-Orient. L’accord Sykes-Picot de 1916 et l’occupation de ce pays par les États-Unis ont illustré les appétits de convoitise sur l’Irak et donc une pression permanente sur son destin. Voilà le paradoxe entre ces images de ce pays très ancien ou naquirent Abraham et Sarah. Restera-il comme dans le passé un lieu sacré de notre histoire ? N’oublions pas qu’Abraham est né à Ur (sud de l’Irak actuelle), et que la signification du mot Abraham veut dire en araméen père de l’humanité. À méditer