GEORGES POMPIDOU, Christine ALFARGE - Académie du gaullisme

Académie du Gaullisme
Président Jacques Myard
Secrétaire générale Christine ALFARGE
Président-fondateur Jacques DAUER
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GEORGES POMPIDOU,
 UNE VISION DE LA FRANCE  
« Toute politique implique   quelque idée de l’homme. »       
 (Paul Valéry)
   
par Christine Alfarge,
Il n’est, pour Georges Pompidou, « pas d’esprit plus critique, pas d’écrivain plus rigoureux que Paul Valéry. Il ne croit qu’à un art patiemment et intelligemment élaboré. Il ordonne et dose les mots comme d’autres les chiffres ou les corps chimiques. »
Le réalisme de Georges Pompidou, Premier ministre, le 14 avril 1962.
Avec Georges Pompidou, on a pu voir un regard lucide et passionné, constamment tourné vers l’avenir. Comme le général De Gaulle, Georges Pompidou, l’homme de lettres, est fasciné par le progrès et la modernité et accélérera la métamorphose de la France en faveur des technologies et de la recherche.
« Est-il besoin de souligner qu’il ne peut y avoir de politique d’aménagement du territoire, de politique agricole à long terme, de répartition des investissements en matière de routes ou de téléphone sans un plan indicatif des objectifs généraux de notre économie ? » écrivait Georges Pompidou.
À ce titre, l’ambition économique du général De Gaulle sera, à travers le Plan, de fixer les objectifs et les priorités pour les années suivantes. Selon lui, « Il ne suffit pas de faire bien ce que l’on fait, il faut le faire mieux que les autres. » Au moment où il reprend la charge du pouvoir, le général de Gaulle se trouvait devant le traité de Rome du 25 mars 1957 que l’Allemagne, l’Italie, les Pays-Bas, la Belgique, le Luxembourg et bien sûr la France avaient signé, dans lequel il était question d’un accord économique pour instituer un marché commun entre les six. Cet accord avait été ratifié, le 9 juillet 1957, par le Parlement français. « Mais plus encore que le texte même du Plan, importe l’esprit dans lequel il est conçu et appliqué. Et ceci touche à l’attitude fondamentale de l’État vis-à-vis de l’activité économique toute   entière. » écrivait Georges Pompidou.
 
Quelle direction donner à l’effort économique ? Selon la pensée du général de Gaulle, notre pays doit vivre avec son temps. « Pour produire beaucoup, pour le faire à des conditions qui facilitent les échanges, pour renouveler constamment par l’invention ce qu’il fabrique dans ses usines et récolte dans ses champs, il lui faut se transformer à mesure et profondément. » Charles de Gaulle a montré sa volonté de faire bouger tous les leviers, expansion, productivité, concurrence, concentration, vont s’imposer à l’économie française. Pour faire rayonner la France, « il ne suffit pas à l’industrie, à l’agriculture, au commerce, de fabriquer, récolter, échanger toujours autant, il faut qu’ils fabriquent, récoltent, échangent de plus en plus. » écrira-t-il dans ses Mémoires.
Face à la concurrence internationale, nos entreprises ne devaient pas être en reste, le général voulait leur donner une impulsion forte, pour les inciter à devenir plus compétitives et travailler ensemble. Il se résout au Marché Commun pour aller vers la suppression des douanes entre les Six, libérant le plus largement possible les échanges commerciaux dans l’intérêt de son pays. Depuis la fin de la guerre, le développement de l’hyperpuissance américaine dans le domaine économique, est une réalité dont le général De Gaulle tiendra compte en acceptant la mise en œuvre du Marché commun.
  
Il s’agissait également de s’adapter par des investissements publics et privés à la modernisation des outils de production, comme il l’écrira dans ses Mémoires « les dépenses de développement dépasseront toujours celles de fonctionnement, tels la recherche fondamentale, l’espace, l’atome, l’aviation, l’informatique, … » des activités de pointe à partir desquelles la notion de progrès prend tout son sens. Et bien sûr, la monnaie, reflet de la santé économique et du crédit, favorisant l’esprit d’entreprise et la paix sociale. Elle reste le critère indispensable de notre influence internationale et notre indépendance.
Une France au croisement de son destin.
« Toute éclipse du gaullisme depuis vingt-cinq ans a été une éclipse de la conscience nationale. Si l’on veut demain dépasser l’idée de nation et donner quelque réalité à la notion d’Europe, c’est encore une fois en faisant appel à ce qu’il y a d’actif, de créateur, je dirai de spirituel dans les hommes, et d’ailleurs dans les nations, que l’on y parviendra et non en s’abritant derrière la crainte, la démission ou même l’intérêt. » écrivait Georges   Pompidou qui voulait inventer une France nouvelle.
Pendant ses années passées à Matignon, Georges Pompidou fut convaincu que « l’État peut et doit orienter dans ses   grandes lignes l’économie nationale. Il ne doit pas la diriger, car il ne le   peut pas. »
Quelles sont les grandes réalisations de cette période ?
Selon Hervé Gaymard, « Georges Pompidou, certes normalien, agrégé de lettres classiques et auteur d’une Anthologie de la poésie française de référence, était un homme de progrès, passionné par l’avenir. Sa grande intelligence, son esprit de synthèse, sa capacité de discernement faisait merveille pour aborder les sujets scientifiques. »
« De 1962 à 1974, il sera un ardent modernisateur. Le plan électronucléaire de 1973, porté par Pierre Messmer, prolonge les choix stratégiques gaulliens de la fin des années soixante et   dote la France d’un réseau de centrales nucléaires assurant son   autosuffisance énergétique mais aussi d’une expertise et d’un contrôle de la totalité du processus industriel. Les récents déboires de la filière, illustrés par les avaries de l’EPR, font hélas mesurer le terrain   perdu. »  
Georges Pompidou, face à mai 1968.
« Dans la gestion de la crise, Georges Pompidou a choisi une stratégie dont il ne veut pas s’écarter. Elle est fondée sur deux idées. La première est de calmer l’excitation universitaire en évitant les affrontements brutaux et, par-dessus tout, de verser le sang. La seconde est d’empêcher la jonction des revendications syndicales, qui ont resurgi, avec l’anarchie étudiante (d’où la conclusion rapide, dimanche 6 mai, des accords de Grenelle). Malgré le défilé commun du 13 mai, l’alliance, dont rêvent certains, entre Billancourt et la Sorbonne ne se fera pas. Le Premier ministre tient tant bien que mal sur cette fragile position, jusqu’à la gigantesque manifestation populaire du 30 mai qui balaie tout et renvoie chacun chez soi, en conclusion de l’appel radiodiffusé du général De Gaulle. » écrivait Pierre Messmer.
« Les réunions quotidiennes de mai 1968 ont transformé mes rapports avec Georges Pompidou. Je connaissais son intelligence, sa culture, son enracinement dans le terroir d’Auvergne. Maintenant, dans la crise, je vois qu’il est aussi un homme d’État.
         
Il sait où il veut aller et avec quels moyens. Il contourne ou écarte les obstacles sans hésiter, affronte l’Assemblée nationale habilement et fermement, réussit à convaincre le général De Gaulle de lui faire confiance pour gérer cette crise, de renoncer au référendum pour lui préférer la dissolution de l’Assemblée nationale. » « Pourquoi m’a-t-il choisi, de préférence à tel ou tel autre possible ? Ministre des Armées, j’avais été le principal exécutant d’une politique de défense qui a donné une nouvelle orientation à l’histoire de notre pays et j’étais d’autant plus fier de mon action qu’elle contribuait à assurer notre indépendance. »
Entre Georges Pompidou et Pierre Messmer, un rapport de confiance.
Infatigable héros, Pierre Messmer, compagnon de la Libération, a toujours mis sa lucidité et son courage au service de la France, comme ministre des Armées du général De Gaulle puis comme Premier ministre de Georges Pompidou. « Pour l’indépendance de la France et   le bien des Français, il est urgent de définir et de mettre en œuvre une politique efficace de production et de consommation d’énergie. » écrivait-il.

Dans les industries de pointe auxquelles le général De Gaulle s’était attaché, les progrès continuent et la coopération internationale s’organise. Georges Pompidou a suivi la pratique du général De Gaulle dirigeant lui-même la politique extérieure de la France avec le ministre des Affaires étrangères pour principal collaborateur. La politique française de défense nationale engagée dès les débuts de la Vème République, basée essentiellement sur la force de dissuasion nucléaire, demeurera inchangée avec tous les successeurs du général De Gaulle, Georges Pompidou en tête, malgré les évolutions du contexte international. « Les successeurs à l’Elysée du général De Gaulle, sans réaffirmer publiquement cette politique tous azimuts, n’y ont jamais renoncé. » écrivait Pierre Messmer. En ce qui concerne l’Europe, Georges Pompidou annonce le 16 mars 1972 à l’Élysée la tenue d’un référendum proposant l’adhésion de la Grande Bretagne à la communauté européenne : « Ayant pris moi-même des responsabilités personnelles à La Haye d’abord dans mes entretiens avec M. Heath ensuite, en autorisant enfin la signature du Traité, j’estime qu’il est de mon devoir et qu’il est fondamentalement démocratique, d’appeler les Français qui m’ont élu directement à se prononcer directement sur cette politique en faveur de l’Europe. »
Cela n’empêche pas Georges Pompidou de s’affirmer en défenseur de la francophonie : « Je dis que si   demain l’Angleterre étant entrée dans le Marché commun, ce qui est probable, il arrivait que le français ne reste pas ce qu’il est actuellement, la   première langue de travail de l’Europe, alors l’Europe ne serait jamais tout à fait européenne. Car l’anglais n’est plus la langue de la seule Angleterre, il est avant tout pour le monde entier, la langue de l’Amérique. Or l’Europe ne sera l’Europe que si elle se distingue, je ne dis pas se coupe, je dis se distingue de l’Amérique.»
L’érosion des libertés fondamentales.
Dans les années 1960, Georges Pompidou évoque souvent la crise de civilisation, réfléchissant à la dualité entre un univers techniciste et déshumanisé et un univers poétique agricole plus classique. « Je suis de ceux qui pensent que dans cinquante ans la fortune consistera à pouvoir s’offrir la vie du paysan aisé du début du vingtième siècle, à bien des égards, c’est-à-dire de l’espace autour de soi, de l’air pur, des œufs frais, des poules élevées avec du grain, etc. On y ajoute des piscines et des automobiles, mais ce n’est pas une modification fondamentale, il reste le besoin d’air, de pureté, de liberté (…) Quoi qu’il en soit, il faudra bien remettre en place des valeurs qui puissent servir de fondement à la société en même temps qu’assurer l’équilibre moral des individus. Il est inutile de chercher à ralentir le progrès scientifique, technique et matériel. On ne peut que s’en accommoder et chercher à préserver ou à recréer les valeurs élémentaires dont chacun a besoin pour se satisfaire de ses conditions de vie. »
Cinquante ans après sa disparition, le2 avril 1974, Georges Pompidou au-delà de son pragmatisme, nous parle aussi de poésie, « la passion de la poésie, avoue-t-il, dont on me prédisait lorsque j’étais enfant qu’elle passerait, a persisté au-delà du milieu du champ de la vie (…) À cet âge où chacun est tenté de faire le point, l’idée m’est venue tout naturellement de mettre ensemble mes poèmes préférés, la poésie de Hugo n’est pas celle qui me touche le plus, mais il accumule par milliers d’admirables vers, la perfection suprême de La Fontaine ou de Racine, de Baudelaire ou de Mallarmé, de Paul Eluard, le seul contemporain, poète parmi les poètes.
L’avenir de la France, une espérance.
Georges Pompidou n’avait de cesse de s’interroger sur l’avenir de la France. Il a a incarné la génération du gaullisme. Il est celui qui fait rentrer la France dans la modernité. « Ce que je veux que l’on retienne, plus que mon nom, c’est que la France a connu une période heureuse ». Son souhait le plus cher a triomphé, les Français gardent toujours la nostalgie d’une France heureuse, d’un président qui voulait le bonheur de tous !

« Il ne suffit pas d’être un grand homme, il faut l’être au bon moment » écrivait Georges Pompidou en pensant au général De Gaulle. Qu’on le veuille ou  non, il y avait un mimétisme entre les deux hommes, un esprit clairvoyant, un éclat de lumière, la même espérance s’agissant de la France, son avenir!  
       
       
       
               *Christine ALFARGE Secrétaire générale de l'Académie du Gaullisme.
               

© 01.04.2024

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