De l’alternance paisible gauche-droite ...P. KLOBOUKOFF - Académie du gaullisme

Académie du Gaullisme
Président Jacques Myard
Secrétaire générale Christine ALFARGE
Président-fondateur Jacques DAUER
Aller au contenu
De l’alternance paisible gauche-droite
 
à l’instabilité entre trois extrêmes





par Paul KLOBOUKOFF,
Qui se souvient qu’en mai 2012 la France vivait paisiblement et qu’aux élections présidentielles s’opposaient deux favoris, Nicolas Sarkozy, qui terminait son mandat de président, et son rival François Hollande. Au 1er tour, recueillant 28,63% des suffrages, Hollande devançait Sarkozy, qui en obtenait 27,18%. Déjà sur les rangs, Marine Le Pen, avec 17,90% des voix, et Jean-Luc Mélenchon, avec 11,10% des voix, suivaient, à des distances respectables, tout comme François Bayrou, qui en obtenait 9,13%.
Au second tour, Hollande décrochait la timbale avec 51,64% des voix.  
Emmanuel Macron, au parti socialiste (PS) de 2006 à 2009, a participé activement à la campagne de Hollande en 2012. Aussitôt celui-ci élu, Macron a été nommé Secrétaire général adjoint au cabinet du président. En 2014, il est devenu ministre de l’Economie, de l’Industrie et du Numérique. En 2015, il s’est éloigné de Hollande et, l’année suivante, il a créé son mouvement En marche. Au printemps 2017, il s’est présenté à l’élection présidentielle en tant que candidat rassembleur ni de droite ni de gauche. François Fillon était le favori des sondages… avant le « Penelope gate ».
En janvier 2017, le Canard enchaîné avait révélé que son épouse, Penelope Fillon avait été rémunérée 500 000 € bruts entre 1998 et 2007, puis en 2012, comme attachée parlementaire de son mari puis de son suppléant, Marc Joulaud. L’hebdomadaire mettait en doute la réalité de son travail. Soupçonné d’emplois fictifs par le Pôle national financier (PNF), François Fillon était mis en examen derechef le 14 mars 2017. Il décidait de maintenir sa candidature. Le destin lui a été fatal.
Au 1er tour des présidentielles de 2017, Macron (En marche) est arrivé en tête, avec 24,1% des suffrages exprimés, suivi de Marine Le Pen (Front national), avec 21,30% des votes, de F Fillon, avec 20,01% des voix, de Jean-Luc Mélenchon (Les Insoumis), avec un score de 19,98%, de Benoît Hamon (PS), avec 6,36% et de Nicolas Dupont-Aignan (Debout la France), avec 4,70%.
Au second tour, après un appel retentissant au « front républicain » contre la candidate du Front national, généreusement diffusé par les médias et couronné de succès, Macron a obtenu 66,10% des voix, avec le pourcentage de suffrages exprimés très faible de 65,95%, et est devenu président de la République.
Dans la foulée, les élections législatives se sont déroulées dans un contexte particulier. Adoptée le 22 janvier 2014, la loi sur le non cumul des mandats a interdit à tout parlementaire d’exercer une fonction exécutive en parallèle à partir de 2017. Aussi, 220 députés sortants ne se sont pas représentés. En outre, beaucoup d’électeurs ont déserté les urnes. Au 1er tour, seulement 48,7% des inscrits ont voté. Au second, l’abstention a atteint 57,4%. De sombres records ! Dans ces conditions, En marche a obtenu 308 sièges à l’Assemblée nationale, et le Modem de François Bayrou, 42. Le camp présidentiel a disposé d’une majorité absolue de 350 sièges. Les Républicains ont obtenu 112 sièges, le PS, 30, la France insoumise, 17, le Parti communiste, 11 et le Front national, 8.
Du haut de l’Olympe, Jupiter a ainsi pu exercer un pouvoir absolu pendant 5 ans, avec la sagesse et la modestie que les Français seraient ingrats de lui contester.
Fervent Européiste, il s’est employé à déposer entre les mains de l’Union européenne (UE) les attributs de la souveraineté de la France.
Ursula Van der Leyen, présidente de la Commission de Bruxelles et impératrice de l’Europe sans frontières (intérieures et extérieures), s’en est saisie avec avidité et ne manque pas de rappeler à notre souverain sa subordination à son Autorité.
Estimant sans doute qu’il n’en avait pas assez fait pour notre pays, ses citoyens et l’Union européenne (UE), Emmanuel Macron a présenté sa candidature aux élections présidentielles de 2022. En tête au 1er tour, il a recueilli 27,85% des votes. Mais les écarts avec ses poursuivants se sont réduits. Les scores ont été de 23,15% pour Marine Le Pen, de 21,95%  pour Jean-Luc Mélenchon, et de 7,07% pour Eric Zemmour, président de Reconquête. Au second tour, la diabolisation du Rassemblement national (RN) et l’appel au front républicain ont encore servi Macron. Nettement moins qu’en 2017, cependant. Au second tour, le président sortant a été réélu avec 58,55% des voix. Mais cela a été moins un vote d’adhésion que de rejet de sa concurrente… qui a tout de même mobilisé 41,45% des voix (contre 33,90% en 2017). Elle s’est installée durablement comme première opposante de la Macronie.  
Aux législatives des 12 et 19 juin 2022, l’abstention a encore été géante, atteignant 53,77% au premier tour. Au second tour, les suffrages exprimés n’ont pas dépassé 42,70% du nombre des inscrits. Ces consultations ont suscité de moins en moins d’espoirs.  Celles de 2022 ont donné : - 244 sièges à la « Majorité présidentielle », soit 42,3% des sièges de l’AN ; - 127 sièges à la NUPES (gauche et écologistes, sous la férule de JL Mélenchon) ; - 89 sièges au RN ; - 61 aux Républicains ; - 51 sièges aux autres partis.
Le fonctionnement « harmonieux » de notre régime présidentiel est tributaire de l’obtention par les gouvernants en exercice d’une majorité pleine à l’AN. Sinon, il cafouille. C’est ce qui est arrivé à Macron, qui avait perdu les pleins pouvoirs en 2022, et l’a poussé à dissoudre l’AN par décret du 9 juin 2024. Espérait-il vraiment voir émerger une « meilleure » Assemblée des législatives qui ont eu lieu, presque sans préavis, les 30 juin et 7 juillet ? Cela n’a pas été le cas. Trois blocs antagonistes ont accaparé près de 82% des sièges : - l’Union de la gauche (NFP), 178 sièges ; - Ensemble (ex majorité présidentielle), 150 sièges ; - RN et alliés, 143 sièges. Le paysage politique a été profondément bouleversé.
Depuis, c’est l’instabilité et la valse des Premiers ministres. En 2024, il y en aura eu quatre : Elisabeth Borne, Gabriel Attal, Michel Barnier et, depuis quelques jours, le revenant (ou l’insubmersible) François Bayrou, qui a forcé la main à Emmanuel Macron pour être désigné. Malgré les espoirs que nourrissent certains de le voir démissionner, ce dernier entend rester président jusqu’à l’ultime seconde en mai 2027.
Les citoyens qui ne l’apprécient pas boiront le calice jusqu’à la lie. Tant pis pour eux, pour nous. Tous les candidats potentiels à la présidence et leurs partis fourbissent leurs armes et adaptent leurs « stratégies » en fonction de cette échéance. On pourrait presque dire qu’à leurs yeux, seule l’élection présidentielle a une importance déterminante, vitale. Et, rares sont ceux qui ne se félicitent pas de la robustesse de la Constitution de la Vème République, ainsi que de toutes les contorsions qu’elle autorise. Vive Debré !? Vive De Gaulle !? Non, laissons-les ignorer les turpitudes et les comportements qui nuisent à la France.
Depuis 2017, la dette publique a été accrue de + 800 millions (Mi) d’euros et se monte à 3 290 milliards (Mds) d’euros ce 14 décembre, représentant 112,9% du PIB. Les intérêts de la dette tutoieront les 50 Mds € en 2024. Il n’est pas certain que le sommeil du président en soit troublé. Les déboires économiques et financiers de notre pays ne semblent pas l’empêcher de dormir sur ses deux oreilles et de goûter aux plaisirs des déplacements à l’étranger..
De la présente courte rétrospective, plusieurs évolutions se distinguent : - les reculs considérables de la gauche et de la droite « classiques »… qui ne sont plus que les ombres d’elles mêmes ; - le rétrécissement de la Macronie, qui, de 350 sièges à l’AN en 2017, n’en a plus que 150 aujourd’hui : - l’expansion de la Mélanchonie, de 17 sièges à l’AN en 2017 à 178 à ce jour ; - la montée en puissance du RN, qui, avec ses alliés, dispose de 143 sièges à l’AN, contre 8 en 2017, et est crédité d’un électorat de 10 à 11 millions de personnes. Tout cela s’est produit sous le règne de Macron en un peu plus de sept ans seulement.
Les sondages sur les élections présidentielles 2027 se succèdent, faisant de Marine Le Pen (MLP) la favorite. C’est le cas du sondage IFOP-Fiducial pour le Figaro Magazine et Sud Radio  publié le 12 de ce mois, selon lequel : - opposée à Edouard Philippe, elle gagnerait à 36% contre 25% ; - opposée à Gabriel Attal, ce serait 38% contre 20%. Si, suite au procès des assistants parlementaires, elle se trouvait inéligible en 2027, Jordan Bardella, actuel président du RN, devancerait les autres concurrents et, en particulier, Edouard Philippe, à 34% contre 26%. Laurent Wauquiez se situerait entre 6 et 8%. La gauche serait éclatée. Mélenchon ne dépasserait pas les 12%. Ce n’est un secret pour personne, depuis des mois, MLP est la grande favorite des prochaines présidentielles. A son encontre, le « front républicain » semble avoir vécu. Macron aura œuvré avec persistance, sinon acharnement, pour qu’il en soit ainsi.
Espérons que l’année 2025 et les suivantes permettront à la France de se redresser, de reprendre de l’élan, et aux Français de redevenir sereins et fiers de leur patrie. Il ne faut pas s’interdire de réfléchir collectivement à l’adéquation de notre régime présidentiel. Nos trois derniers chefs d’Etat, monarques aux pouvoirs très (trop ?) étendus, n’ont pas été à la hauteur des attentes des concepteurs et des promoteurs de la Constitution de la Vème République… ainsi que de celles de la majorité des citoyens  Si l’on ne peut pas (ou plus) compter sur un homme « providentiel » pour diriger la France, ne convient-il pas de regarder comment sont gouvernés les pays voisins et d’en tirer des leçons profitables ?
A tout le moins, si les Français restent attachés à la monarchie présidentielle, il serait préférable qu’elle soit limitée à un seul mandat d’une durée de 7 ans. Le passage au quinquennat, « renouvelable » en 2002 pour permettre au président Jacques Chirac d’effectuer un second mandat écourté, accompagné de l’adaptation du calendrier des législatives, a été une grave erreur à laquelle nous devons en partie les déboires actuels. Il a permis à Macron de se représenter en 2022 et l’autorise à rester sur le trône encore une trentaine de mois.
 
Bon courage…   et Meilleurs vœux !
 
*Paul KLOBOUKOFF Académie du Gaullisme le 17 décembre 2024

© 02.01.2025

Retourner au contenu