ENTRE DE GAULLE ET MALRAUX, UNE PROFONDE AMITIÉ Christine Alfarge - Académie du gaullisme

Académie du Gaullisme
Président Jacques Myard
Secrétaire générale Christine ALFARGE
Président-fondateur Jacques DAUER
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   ENTRE DE GAULLE ET MALRAUX, UNE PROFONDE AMITIÉ
    « La grandeur est un chemin vers quelque chose qu’on ne connaît pas »
(Charles De Gaulle)


  
par Christine Alfarge,
« À mes yeux, il existe deux types d’hommes de l’Histoire, qui ne se rejoignent que par leur survie. D’une part les conquérants, de l’autre, les libérateurs… » disait André Malraux.
André Malraux fut toujours présent, il reste le seul des écrivains de grand renom à s’associer de près au gaullisme et le plus fidèle des Compagnons du général de Gaulle durant sa « traversée du désert ». Un lien s’établit sans jamais se rompre entre les deux hommes. Qui mieux qu’André Malraux a pu pénétrer au cœur de tant de combats dont le général De Gaulle en fut la force agissante. Ils parlaient ensemble d’égal à égal, signe d’un respect mutuel intériorisant les événements passés les ayant conduits l’un et l’autre sur le chemin de la liberté. Il est difficile de dire lequel des deux apportait le plus à l’autre tant ils étaient fusionnels dans leurs pensées sur la condition de l’homme et l’avenir de la France. Ô combien, il faut avoir souffert pour comprendre, pour se comprendre. Malraux s’adressant à De Gaulle « Vous avez fait aux Français un don qu’on ne leur fait guerre, élire en eux leur meilleure part. Légitimer leur sacrifice est peut-être la plus grande chose que puisse faire un homme. » « Si un nouveau sursaut doit se produire, il continuera ce que j’ai fait et non ce qu’on aura fait après moi » disait le général.
Qu’est-ce qui fait du général De Gaulle un personnage légendaire ?
Lorsque la mémoire combattante cesse d’être comprise, elle ne vit plus dans les esprits, le général De Gaulle voulait absolument écrire lui-même l’histoire vécue dans ses Mémoires. Il souhaitait partager la réalité de la guerre avec son cortège de souffrances pour que les Français n’oublient pas les heures les plus sombres de notre histoire où résistèrent tant d’hommes et de femmes au péril de leur vie en délivrant le pays du joug nazi. Nous savons avec émotion et reconnaissance combien le courage, le sacrifice de tous ces hommes et toutes ces femmes nous ont permis d’être libres aujourd’hui.
Le général De Gaulle a toujours montré une volonté de rassemblement pendant la guerre, dès la libération en 1944, il évite la guerre civile, pour réconcilier la politique, il ramène le consensus, dans son mouvement politique en 1947, lors de son retour au pouvoir en 1958 où André Malraux est successivement nommé Secrétaire d’Etat, ministre délégué à la présidence du Conseil notamment chargé de l’information, ministre chargé de l’expansion, du rayonnement de la culture française avant de prendre la direction du ministère des Affaires Culturelles. « C’est vous qui avez imposé le mot gaullisme, non ? Qu’entendiez-vous par là au début ? demande De Gaulle à Malraux. « Pendant la Résistance, quelque chose comme les passions politiques au service de la France, en opposition à la France au service des passions de droite ou de gauche. » dit Malraux. « Mais pour moi, répond le général De Gaulle, quand j’ai accepté le mot, assez tard, c’était l’élan de notre pays, l’élan retrouvé. Selon sa volonté, tout sera écrit dans ses Mémoires d’espoir.
Malraux espérait De Gaulle.
« Malraux ne concevait la vie que comme une rencontre de héros aux prises avec toutes les forces contraignantes. Il est évident que De Gaulle répondait à cette vision de l’individu luttant quasi seul contre une adversité écrasante. De surcroît, Malraux ne connaissait pas ce combattant auquel il conférait de loin, par l’imagination, une dimension épique. » s’exprimera Pierre Lefranc lors d’un entretien.
André Malraux devint le meilleur défenseur de De Gaulle contre ses détracteurs, « L’homme qui dans le terrible sommeil de notre pays, en maintint l’honneur comme un invincible songe. » écrivait-il.
« Que le vent souffle plus ou moins fort, que les vagues soient plus ou moins hautes, je vous dois comme un compagnon à la fois merveilleux et fidèle à bord du navire où le destin nous a embarqués tous les deux… » Extrait d’une lettre adressée par le général de Gaulle à André Malraux, le 8 janvier 1966.
Le sens de la grandeur.
L’Amiral Philippe de Gaulle expliquait au sujet de son père, « qu’il avait trouvé en Malraux, le seul homme avec qui il respirait à la même hauteur. Qui comme lui avait le don de vision, l’intuition de l’histoire, le vrai sens de la grandeur. André Malraux était plus qu’un témoin. Il était au niveau du génie où le dialogue s’instaurait entre l’homme de l’Histoire et le voyant. C’est à ce niveau seulement qu’il faut chercher leurs rapports. »
« Sans doute, l’histoire ne consiste pas qu’à délivrer, elle est l’affrontement avec l’ennemi, aussi avec le destin. Peut-être la grandeur ne se fonde-t-elle que sur le niveau de l’affrontement. » disait le général De Gaulle.  
Tous ceux qui avaient rejoint le général de Gaulle en 1940, s’étaient manifestés par sens du devoir et pour seule mission, faire face à l’ennemi. A travers le général de Gaulle, ils découvraient une force indomptable, tellement inespérée, « sauver l’honneur », c’est tout ce qui comptait. Jean Moulin fut de ceux-là, une vie au service de la France, prêt à tout auprès du général de Gaulle pour libérer le pays. Le héros nous fait réfléchir sur la condition humaine tel Jean Moulin qui a donné des ailes à ceux qui partageaient ses convictions et sa foi pour son pays. Pourtant, il fut tué. Qu’éprouver d’une telle trahison entraînant une mort atroce ? « Ami, si tu tombes, un ami sort de l’ombre à ta place » Comme toujours, il faut résister, nous sommes les gardiens d’une flamme sacrée destinée à ne jamais s’éteindre, continuant d’entretenir une braise ardente.
L’âme de Jean Moulin planait.
Entre De Gaulle et Malraux, Jean Moulin était le lien indéfectible pour lequel ils éprouvaient la même émotion, celle du manque d’un être exceptionnel et fidèle. « Pour le meilleur comme pour le pire, nous sommes liés à la patrie. » s’exprime André Malraux, le 5 mars 1948. La mémoire a cette lourde charge de faire connaître l’histoire pour ne jamais oublier, comme ce jour du 19 décembre 1964 au Panthéon marqué par le souvenir de la cruauté de l’homme, résonneront pendant longtemps, les mots empreints d’émotion d’André Malraux, l’amour du pays, la force de vaincre, le sacrifice. « Entre ici, Jean Moulin, avec ton terrible cortège » Malraux qui avait rencontré Jean Moulin avant sa capture par les Allemands, honore le grand résistant tout au long de son discours : « Monsieur le Président de la République, voilà donc plus de 20 ans que Jean Moulin partit, par un temps de décembre sans doute semblable à celui-ci, pour être parachuté sur la terre de Provence, et devenir le chef d’un peuple de la nuit. Sans cette cérémonie, combien d’enfants de France sauraient son nom ? Il ne le retrouva lui-même que pour être tué, et depuis, sont nés 16 millions d’enfants… ». Il termine sur ces mots : « Aujourd’hui, jeunesse, puisses-tu penser à cet homme comme tu aurais approché tes mains de sa pauvre face informe du dernier jour, de ses lèvres qui n’avaient pas parlé. Ce jour-là, elle était le visage de la France. »
Il est émouvant de penser que le général De Gaulle et Malraux se reverront pour la dernière fois à la Boisserie, le 11 décembre 1969.
A travers le chef de la France libre, André Malraux emportait le symbole de l’espoir. « Si ce que j’ai fait n’avait pas porté en soi un espoir, comment l’aurais-je fait ? L’action et l’espoir étaient inséparables. » dira le général De Gaulle dont les mots résonneront encore longtemps après lui pour continuer de nous éclairer.
                                                                                                                   *Christine ALFARGE Secrétaire générale de l'Académie du Gaullisme.
               

© 01.12.2022

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