« Majorité présidentielle » : P. KLOBOUKOFF - Académie du gaullisme

Académie du Gaullisme
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Président-fondateur Jacques DAUER
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« Majorité présidentielle » : l’imposture est démasquée






par Paul KLOBOUKOFF,
 
Attribuer au chef de l’exécutif une « majorité présidentielle », comme le font sans retenue des médias  « à la botte » et d’autres, habituellement plus lucides, revient à lui offrir, ainsi qu’à son parti, une légitimité qu’en réalité ils ont perdue il a dix huit mois aux élections législatives de juin 2022.
 
Légitimité et représentativité : d’indispensables piqûres de rappel
 
Présidentielles des 10 et 24 avril 2022
 
Au 1er tour, Emmanuel Macron est arrivé en tête avec 20,07% des voix des électeurs inscrits, contre 16,65% pour Marine Le Pen et 15,82% pour Jean-Luc Mélenchon.
 
Au second tour, après avoir dénigré et vilipendé son adversaire et répété qu’elle était une menace mortelle pour la République et la démocratie, E Macron a été élu avec 58,55% des votes, en concédant 41,45% à M Le Pen.
 
Législatives des 12 et 19 juin 2022
 
Echaudée ( ?) et/ou ne voyant pas l’intérêt de ces élections de juin 2022, la majorité des Français a refusé d’aller aux urnes.
 
Au 1er tour, l’abstention a atteint le niveau record de 52,49% des inscrits. Compte-tenu des votes blancs et nuls, le pourcentage des votes exprimés a été de seulement 46,46%. Ensemble, le parti du président (dès le début qualifié de « majorité présidentielle ») a recueilli 25,75% des suffrages exprimés, soit 11,97% des inscrits. La NUPES a obtenu les voix de 25,68% des votants, le RN, 18,68%, et les Républicains, 10,42%.  
 
Miracle de nos scrutins majoritaires à deux tours, au second, Ensemble a obtenu 245 sièges, soit 42,46% des 577 sièges de l’Assemblée nationale (AN). Ce n’est pas une majorité, même relative, comme elle a été aussitôt qualifiée… avant qu’on oublie très vite (sciemment) le terme « relative ». De toute façon, à l’AN, pour faire adopter ou rejeter un texte, la majorité doit être absolue. Le piètre résultat obtenu par Ensemble restreint sérieusement les capacités d’initiative et les marges de manœuvre de l’Exécutif. Pour « constituer » des majorités absolues « de circonstances », au coup par coup, il est contraint de s’adonner à la quête de « soutiens » à ses projets et d’adapter ceux-ci en fonction des desiderata de ses partenaires potentiels. Ces obligations ont insufflé un regain d’influence du Sénat. Celui-ci est dominé par la droite. Avant les élections sénatoriales du 3 octobre 2023, la droite, regroupant Les Républicains, l’Union centriste et les Indépendants, disposait d’une solide majorité avec 216 sièges sur les 348 de la Chambre haute. Après ces élections, elle dispose encore de 207 sièges. Renaissance, le parti de Macron a perdu 2 sièges et en conserve 22.
 
 
Le projet de loi immigration désarçonne la Macronie
 
Décembre 2023 aura vu se concrétiser le projet de loi immigration (PLI), maintenu en couveuse jusque là pendant près d’un an. Une lumière crue aura également montré l’inexistence d’une « majorité présidentielle ».
 
Il y a d’abord eu le 11 décembre, « le jour où les députés ont infligé un camouflet au gouvernement », comme l’a relaté lefigaro.fr le soir même (1). Ce jour là, à l’AN, une courte majorité (270 voix contre 265) a fait adopter une motion de rejet défendue par les Ecologistes pour « retoquer » le projet de loi immigration présenté par le ministre de l’Intérieur et des Outre-mer, Gérald Darmanin.
 
« C’est un coup de semonce au gouvernement, qui a supprimé une immense partie du texte du Sénat », qui était nettement plus « dur » ou « exigeant », a-t-on pu lire.
 
C’est une « victoire politique » pour Marine Le Pen et le Rassemblement national (RN), qui ont voté la motion de rejet, ainsi que pour Les Républicains, majoritaires au Sénat.
 
Ensuite, le 19 décembre, après « une journée marathon », par 349 voix pour et 186 contre, les députés ont adopté le texte de la loi immigration qui avait été remodelé par le Sénat. Une aussi large majorité n’a pu être atteinte qu’avec les voix des 88 députés du RN. Si les députés RN s’étaient abstenus, sans leurs voix (pour ou contre), le texte serait passé tout de même. Aussi, à l’issue du scrutin, Darmanin s’est autorisé à déclarer : « Le texte immigration  est voté définitivement. Un long combat pour mieux intégrer les étrangers et expulser ceux qui commettent des actes de délinquance. Un texte fort et ferme. Sans les voix des députés RN ». Cette fanfaronnade n’a trompé personne. Si les députés RN avaient voté contre, le texte aurait été rejeté par une majorité de 274 voix contre 261. Mais le RN n’avait pas de raisons de voter contre. L’accord trouvé en Commission mixte paritaire (CMP) sur le projet de loi finalement voté « a presque complètement effacé toutes les mesures favorables à l’immigration… un texte incontestablement inspiré par Marine Le Pen » (2).
 
Aussi, la loi immigration votée par les deux chambres ne l’a pas été avec le même enthousiasme par les députés de la Macronie. Sur les 170 députés de Renaissance, 131 ont voté pour, mais 20 ont voté contre, dont le président de la Commission des lois, Sacha Houlié. Sur les 51 députés du Modem, allié fidèle de Macron, auxquels leur président François Bayrou avait accordé la liberté de choix, 30 ont voté pour, 5 ont voté contre et 15 se sont abstenus. 2 députés du groupe Horizons d’Edouard Philippe ont voté contre. Sur les 21 députés du groupe Liot, 8 ont voté pour, 8 ont voté contre et 5 se sont abstenus. Bertrand Plancher, président de Liot a observé que le projet de loi immigration était aujourd’hui « source de grande fracturation politique ».
 
En dehors du camp présidentiel, personne n’a contesté que l’exécutif et sa minorité parlementaire sortent très fragilisés de cette séquence politique révélatrice.
 
 
Juste un mot des mesures présentes dans la loi immigration
            
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Les mesures phares de la loi immigration (3)
  
.          Régularisation   des travailleurs étrangers
  
« L’expérimentation », qui   durera jusqu’à fin 2026, donne aux préfets le pouvoir discrétionnaire   d’accorder les titres de séjour aux étrangers. Ces derniers seront délivrés   au cas par cas pour un an, à condition d’avoir résidé en France pendant au   moins 3 ans et d’avoir exercé une activité salariée durant au moins 12 des 24   derniers mois.
  
. L’expulsion sera facilitée à   l’encontre des migrants condamnés à 3 ans de prison ou plus. En même temps,   le délit de délit de séjour irrégulier est rétabli, avec uns peine encourue   de 3 750 € d’amende.
  
.          L’instauration   de « quotas » migratoires par le parlement pour plafonner   « pour les trois années à venir » a été inscrite dans la loi sous   la pression de LR… mais avec l’espoir non dissimulé par le président de la   voir retoquée par le Conseil constitutionnel
  
+ Déchéance de nationalité pour les   binationaux  condamnés pour homicide   volontaire contre toute personne dépositaire de l’autorité.
  
+ Droit du sol, maintenu, avec   obligation de demande de l’étranger entre ses 16 et 18 ans.
  
+ Naturalisation impossible en cas de   condamnation pour crime.
  
.           Allocations   familiales, droit opposable au logement et allocation personnalisée   d’autonomie (APA) : délai de séjour en France préalable de 5 ans   pour ceux qui ne travaillent pas et de 30 mois pour les autres.
  
+ Accès à l’aide personnalisée au   logement (APL) : délai préalable de 5 ans pour ceux qui ne travaillent   pas et de 3 mois pour les autres. Restrictions non applicables aux étudiants,   aux réfugiés et aux titulaires d’une carte de résident.
  
.              Regroupement familial : durée de séjour du demandeur de 24 mois   au moins (contre 18), âge minimal du conjoint de 21 ans,  nécessité de disposer de ressources   « stables, régulières et suffisantes », ainsi que d’une assurance   maladie.
  
.           Aide   médicale d’Etat : maintenue, avec promesse d’une réforme au début de   2024.
  
+ Accès au titre séjour   « étranger malade » restreint aux ressortissants de pays où il n’y   a pas de »traitement approprié »
  
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Les médias ont davantage parlé des péripéties qui ont entouré le projet de loi et son vote que du contenu de la loi, qui rassemble quelques mesures que l’on pourrait qualifier « de bon sens », mais dont les visées apparaissent bien modestes au regard de l’ampleur et de l’acuité des problèmes que pose l’immigration, localement, notamment, ainsi que des services qu’indéniablement elle apporte. Une « tempête dans un verre d’eau », aux yeux de certains observateurs. Le sujet est donc loin d’être épuisé. Il reviendra d’ici peu lorsque l’avis du Conseil constitutionnel, que le président Macron s’esr empressé de solliciter, sera délivré.
 
Nous pourrons donc en reparler l’année prochaine, dans quelques jours. Espérons  que cette année 2024 sera meilleure pour la France et ses citoyens que les années précédentes, avec le réveil du dynamisme économique, plus de prospérité et de justice sociale, ainsi qu’avec la volonté partagée d’œuvrer à la libération de la France de ses chaînes européennes et internationales et au rétablissement de la grandeur de notre pays.
 
Très bonne année à vous et à ceux qui vous sont chers.
 
*Paul KLOBOUKOFF  Académie du Gaullisme  Le 26 décembre 2023
 
Sources et références :
 
(1) Projet de loi immigration rejeté : le jour où les députés ont infligé un camouflet au gouvernement lefigaro.fr/politique/projet-de-loi-immigration-le-camouflet-des-deputes-au-gouvernement-2023-12-11
 
(2) Loi immigration : le texte définitivement adopté par le parlement publicsenat.fr/actualites/projet-de-loi-immigration/loi-immigration-le-texte-definitivement-adopte-par-le-parlement    le 20/12/2023
 
(3) Loi immigration : ce que contient le texte adopté par le parlementeurope1.fr/loi-immigration-ce-que-contient-le-texte-adopte-par-le-parlement-4221056  le 20/12/2023

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