Au-delà des Régionales de 2021. Paul KLOBOUKOFF - Académie du gaullisme

Académie du Gaullisme
Président Jacques Myard
Secrétaire générale Christine ALFARGE
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Au-delà des Régionales de 2021
En résumé
Lors des élections régionales de juin 2021, la seule   « grande gagnante » a été l’abstention « surprise », qui   a atteint 66,72% au premier tour et 65,31% au second. La très faible   participation a réservé une consistante « prime aux sortants » qui   a permis à la droite de conserver « ses » six régions, au   centre-droit de rester à la tête de la Normandie et à la gauche de garder ses   cinq régions. Le rassemblement national a enregistré un échec d’autant plus   cuisant que les sondeurs, faisant manifestement preuve d’incohérence, avaient   largement surestimé ses chances de succès. Très engagé, le président Macron   avait fait un tour de France promotionnel et avait envoyé au front un corps   expéditionnaire de ministres à l’assaut des Hauts de France. Sans crier   Montjoie Saint-Denis, cette fois, les électeurs lui ont administré un   retentissant soufflet et en ont fait un grand perdant de ces élections. Non   sans éventuelles conséquences pour 2022.
  
Aux législatives de juin   2017, marquées aussi par une forte abstention, les Macronistes avaient   conquis de nombreuses villes avec des scores dépassant souvent les 30% au 1er   tour, et même parfois 40%. Au 1er tour des régionales de juin 2021   cet électorat « de base » a été réduit des deux tiers environ dans   35 de ces villes. En France, ensemble, LREM et Modem n’ont recueilli que   10,5% des suffrages exprimés.
  
Dans le cas d’une réélection   de Macron en mai 2022, il pourrait donc lui être difficile de retrouver   une majorité présidentielle aux législatives de juin. Une cohabitation   serait-elle envisageable avec Jupiter ?    
  
La forte abstention de juin   2021 n’aurait pas dû surprendre autant. Avant le 1er tour, la   Covid 19 et l’organisation des scrutins aidant, des sondages l’avaient   estimée aux alentours de 60%. En outre, la baisse de la participation est une   tendance lourde en France : - depuis 2014 et 2015 pour les   élections municipales et régionales ; - depuis 2007 pour les élections   législatives et même pour les présidentielles.
  
Au premier rang des raisons   de cette désaffection, sanction de la gouvernance de la France, figurent les   excès que notre régime « présidentiel » permet depuis les réformes   des années 2000 à 2002, qui ont instauré le quinquennat et figé un calendrier   électoral plaçant les élections législatives au lendemain des présidentielles.   Macron a poussé beaucoup plus loin que Sarkozy et Hollande la   « monarchie absolue républicaine » et la centralisation des   pouvoirs au détriment des collectivités locales qu’il a dépouillées d’une   partie de leurs ressources financières propres.
  
Pourquoi n’avoir pas rappelé   aux citoyens que les municipales, les départementales et les régionales   étaient les clés des sénatoriales ? Le Sénat, dominé par la droite, est   le seul contrepouvoir législatif. S’appuyant sur des compétences avérées, il   joue un rôle (trop limité) indispensable de modérateur. Fort heureusement, en   l’absence de changements institutionnels, le Sénat parait assuré d’une   certaine stabilité au moins jusqu’aux municipales de 2026.
  
L’offre politique, plus   complexe et protéiforme, ne facilite pas les choix des électeurs. Autre   raison majeure de l’abstention, la défiance s’est enracinée et a prospéré   envers des politiciens et des « élites » dont l’exemplarité n’est   pas le souci premier et dont le mépris, la suffisance à l’égard du « bas   peuple » confine parfois à la morgue. Point d’orgue, la ratification du   traité de Lisbonne en février 2008, alors qu’au référendum du 19 juin 2005,   54,68% des votants avaient rejeté le projet de traité de l’Union européenne   (UE) « établissant une constitution   pour l’Europe », a été vécue par nombre de citoyens comme une   trahison, un déni de démocratie, une forfaiture. Elle a d’autant plus marqué   les esprits que trois présidents, Giscard d’Estaing, Sarkozy et Hollande,   avaient été impliqués dans cette « affaire ». Les réactions avaient   été vives lors de l’entrée en vigueur, le 1er décembre 2009, de ce   traité qui régit l’UE
  
La campagne de ce référendum   historique a eu la vertu d’attirer l’attention des Français (et des autres   Européens) sur l’importance prise par l’UE dans la gouvernance de leur pays,   ainsi que sur la marche forcée en cours vers une UE fédérale dont les Etats   membres, dépossédés de leur souveraineté, seraient des vassaux. En même   temps, c’est une marche pour plus de mondialisme, de multilatéralisme et   d’ouverture déprotégée.
  
Conséquences (?) en   France : - contrairement aux autres élections, la participation a   augmenté de 40,83% aux élections européennes de 2009 à 42,43% à celles de   2014, puis à 50,12% à celles de 2019 ; - aux européennes de juin 2009,   le FN n’avait recueilli que 6,3% des votes. A celles de 2014 et de 2019, il   est arrivé en tête des partis. En mai 2019, le RN a recueilli 23,3% des suffrages et obtenu 22 des 74 sièges alloués à la France au Parlement européen (PE). Depuis les élections présidentielles de2017, il est aussi le premier parti d’opposition au pouvoir en place.
 
Au niveau de l’ensemble de l’Union, la participation aux européennes a cru à peu près autant qu’en France.
 
Des bouleversements ont eu lieu au PE. Concrétisant le vote du Brexit, le Royaume-Uni (RU) a quitté l’UE le 31 janvier 2020, libérant 73 sièges au PE et modifiant les rapports de forces entre les groupes. Auparavant, les élections de 2014 et de 2019 avaient vu le recul des deux groupes majeurs, le Parti populaire européen (PPE), de droite, et les Socialistes et démocrates (S&D), qui au début mars 2021 ne comptaient plus, respectivement, que 175 et 145 des 705 sièges du PE. Sans surprise, les écologistes avaient nettement progressé, et les Verts/ALE disposaient alors de 73 sièges. Autre fait marquant, le groupe libéral européiste ALDE, rebaptisé Renew Europe (RE), auquel LREM s’était associé, détenait 98 sièges. Deux groupes nationalistes, populistes… s’étaient étoffés. Identité et démocratie (ID), que le RN avait rejoint, détenait 74 sièges. Le groupe des Conservateurs et des réformistes européens (CRE), également anti-fédéral, avait 63 sièges, dont 27 polonais. A gauche de la gauche, le groupe GUE/NGL détenait 39 sièges. 38 députés étaient Non-inscrits (NI).
 
La place prise par les opposants déclarés au fédéralisme européen, des groupes ID et CRE, ainsi que des Non-inscrits, est une nouveauté au PE. Face aux européistes, elle témoigne d’une amplification et d’une radicalisation du conflit au sein de l’Union sur la poursuite de l’intégration européenne. Un fossé est également en train de se creuser entre l’UE et des pays de l’est souverainistes qui ne partagent pas toutes « nos » valeurs sociétales progressistes.
 
Conscients de ce que la gouvernance et le destin de la France dépendent étroitement de l’UE, les citoyens sont davantage attentifs au choix de leurs représentants au PE. Cependant, le rôle des chefs d’Etat et de gouvernement est nettement plus déterminant dans les orientations et les décisions de l’UE. C’est pourquoi, l’élection présidentielle est aussi une « élection européenne ». Ceci apparaîtra d’autant plus évident d’ici avril-mai 2022 qu’au 1er janvier prochain la France prendra pour 6 mois la présidence tournante de l’UE. Du pain béni pour Macron ?
 
Les résultats d’ensemble des élections régionales en un coup d’œil


Le Rassemblement national, en net repli, n’a conquis aucune région et a dû se contenter de la 2ème ou la 3ème place dans la majorité d’entre elles. Une forte « prime aux sortants » a été donnée par les votants. La droite a conservé les Hauts-de-France, le Grand est, l’Ile-de-France, les Pays-de-Loire, l’Auvergne-Rhône-Alpes et la Provence-Alpes-Côte d’Azur. Le Centre-droit d’Hervé Morin a gardé la Normandie et la gauche s’est maintenue en Bretagne, en Centre-Val-de-Loire, en Bourgogne-Franche-Comté, en Nouvelle Aquitaine et en Occitanie
 
En termes de suffrages recueillis comme de sièges de conseillers régionaux obtenus, la droite et la gauche ont « raflé la mise », suivis par le RN. Les autres partis se sont partagés environ 10% des voix au second tour et 228 sièges sur les 1 926 en jeu. Ni le Verts, ni les Centristes n’arrivent véritablement à s’implanter localement (1). Avec assez peu de votes en leur faveur, les listes régionalistes obtiennent tout de même 85 sièges.
  
Un petit mot des   élections départementales, tout de même
  
Peu d’intérêt a été montré pour les élections   départementales et leurs résultats. Peut-être est-ce parce que des collectivités   à statut particulier n’étaient pas concernées par ces scrutins, comme :   la Ville de Paris, la Métropole de Lyon, la Collectivité de Corse, la Guyane   et la Martinique, les cinq Collectivités d’Outremer, la Nouvelle Calédonie…
  
94 conseils départementaux et l’Assemblée   d’Alsace étaient à renouveler, comptant 4 108 conseillers (2).
  
La participation a été particulièrement   faible : 33,32% au premier tour et 34,36% au second.
  
La prime aux sortants a largement profité à la   droite. Sur les 95 présidences de conseils en jeu, la droite en a obtenu 65   (pour 63 sortantes). La gauche en a obtenu 26 (contre 28 sortantes). Le   centre en a obtenu 4 (autant que de sortantes), dont 2 pour LREM et 1 pour le   Modem.
  
Effondrement de LREM dans les   villes : mauvais présage pour Macron ?
  
Aux élections présidentielles de 2017, Emmanuel Macron avait été   qualifié pour le 2ème tour avec 24,01% des suffrages exprimés,   devant Marine Le Pen, qui en avait recueilli 21,30%, François Fillon, 20,1% et Jean-Luc Mélenchon, 19,58%. Puis, il avait « triomphé » au 2ème tour, avec 66,10% des voix, contre 33,90% à Marine Le Pen.
 
 
Dans la foulée, des Français avaient voulu lui donner une « majorité présidentielle ». Au 1er tour des législatives de juin 2017, auquel 47,62% des inscrits s’étaient exprimés, LREM et le Modem avaient engrangé respectivement 28,21% et 4,12% des votes, prenant de sérieuses options sur la plupart des villes (pas seulement les grandes) avec des scores dépassant très souvent les 30% et allant parfois au-delà de 40%.
 
 
Au second tour, la participation avait faibli et, compte tenu des votes blancs et nuls, le pourcentage des votes exprimés avait été limité à 38,43% des inscrits. LREM avait alors obtenu 308 des 577 sièges de l’AN, et le Modem, 42.  
 
Il m’a paru instructif de rapprocher les performances urbaines du 1er tour des législatives de 2017 des résultats du 1er tour des régionales du 20 juin 2021, En quatre ans, les Français ont pu goûter au macronisme, apprécier sa gouvernance participative, ses bienfaits également partagés et, jusqu’à plus soif, sa pédagogique communication.

Notes et sources : (a) LREM + Modem aux législatives 2017 ;   (b) score des Républicains aux législatives 2017 ; (c) scores du Modem   aux régionales 2021 ; (d) pas de liste propre à LREM ; (e)   source : Wikipédia
       
Le tableau comparatif des résultats dans 35 villes montre un recul des deux tiers des votes en faveur de la « majorité présidentielle ». Elle semble avoir été lâchée par une grande partie de son électorat urbain.
 
En cas de réélection de Macron en 2022, les législatives pourraient-elles lui apporter à nouveau une « majorité » à l’AN, avec de nouvelles alliances ? Vu avec les yeux d’aujourd’hui, cela parait loin d’être assuré. Irait-on alors vers une cohabitation ? Avec Jupiter !!! Il est possible qu’on y pense en haut lieu et qu’un débauchage intensif dans les rangs de la droite et du centre-droit dès la rentrée apparaisse comme une bonne voie pour conjurer le mauvais sort.
 
LREM invisible en PACA, et un marché de dupes pour les Républicains
 
En Provence-Alpes-Côte d’Azur, LREM a « disparu » en se glissant dans la liste de Roland Muselier (RM). Cela a provoqué la zizanie chez Les Républicains, semé le trouble chez des sympathisants de droite et, tout compte fait, sans que cela apporte un surcroît significatif de voix à ses « partenaires ». Pour le vérifier, on peut regarder les résultats de listes qui se sont présentées sous l’étiquette LREM dans les six départements appartenant à la région. Les scores de LREM au 1er tour des élections départementales ont été de : 2,48% dans les Bouches-du-Rhône, 0,79% dans les Alpes Maritimes, 2,73% dans le Var, 3,62% dans le Vaucluse, 1% dans les Hautes-Alpes. On ne trouve pas trace de LREM dans les Alpes de Haute-Provence. Les Républicains peuvent dire un grand Merci à RM et à ses amis.
 
Des sondages aux résultats manifestement incohérents
 
Avant le 1er tour de scrutin, une très forte abstention était déjà en vue. Ainsi, le 17 juin un sondage Elabe pour BFMTV indiquait : « Elections régionales : 36% des électeurs se disent sûrs d’aller voter au premier tour » (3). 10% envisagent « sérieusement » d’aller voter. « Ce qui laisse entrevoir un niveau de participation entre 36% et 41% ».
 
D’après un sondage IFOP, l’abstention devait être de 60% au 1er tour, et chez les jeunes de 18 à 25 ans, elle devait atteindre 80% (4). Les premières préoccupations de ces derniers étaient l’emploi et l’éducation formation.
 
On nous avait expliqué en long et en large lors des élections municipales de mars et de juin 2020 qu’en cas de forte abstention, les candidats sortants, bien implantés sur le territoire, bénéficient d’une forte prime à la réélection. Cependant, malgré leurs propres pronostics d’une abstention élevée, les sondeurs ont placé le RN en tête au 1er tour dans 6 régions, avec la « menace » de le voir conquérir une, voire plusieurs régions, au second tour.  Cette incohérence semble n’avoir choqué personne. Pourtant, qu’on le veuille ou non, les sondages influent sur les votes.
 
Les sondeurs se sont également plantés sur presque l’ensemble des résultats annoncés du 1er tour. Leurs « échantillons » ne sont sans doute pas « représentatifs » de l’électorat pour toutes les élections. Les électeurs ne s’abstiennent pas et ne font pas leurs choix partisans suivant des critères constants. En outre, les sondeurs « redressent » des intentions de vote fournies par leurs enquêtes, et en particulier celles « en faveur » du RN. Ont-ils forcé la dose cette fois ci, trop « influencés » par les résultats (alors imprévus) du 1er tour des régionales de 2015, qui avaient vu le RN arriver en tête dans 6 régions… mais avec une participation de 49,9%.
 
Sur lefigaro.fr, on a pu lire le 8 juillet (enfin) « Après le raté des régionales, les sondages en question » (5).  A l’approche de la présidentielle, les « spécialistes de l’opinion s’interrogent sur leurs méthodes ». C’était le cas de Brice Teinturier (IPSOS), pour leurs pronostics sur les résultats du RN au 1er tour ainsi qu’au 2ème en PACA.
 
Des sondeurs déboussolés, des électeurs perplexes face à une offre politique protéiforme
 
L’offre politique « sur le marché » est devenue complexe, multidimensionnelle et protéiforme, instable dans le temps. Aux offres des partis traditionnels allant des « extrêmes » au « centre » en passant par la gauche et la droite, se juxtaposent, se mêlent, celles engendrées et/ou amplifiées par les positions affichées sur : - les bienfaits de l’universalisme, de la mondialisation et de l’emprise de l’UE (et de la BCE) sur la souveraineté de la France ; - la défense de l’environnement, du climat, apanage des écologistes, qui rencontrent le plus de compréhension dans les grandes agglomérations ; - la fracture sociale (et politique) entre les catégories populaires et les « élites », dont la « crise » des gilets jaunes a montré l’une des facettes. L’intrusion en 2017 d’un parti « ni de gauche, ni de droite » et, en même temps, « de gauche et de droite », n’a pas clarifié le paysage politique.
 
Or, les électeurs veulent de la clarté et une certaine constance. Les résultats des régionales, des départementales et des municipales récentes attestent que « dans le doute, ils s’abstiennent ou se montrent conservateurs ».
 
Déclin persistant de la participation aux différentes élections  
 
Trois raisons de la montée de l’abstention record aux régionales… et aux autres élections
 
1. Sans doute moins qu’aux élections municipales de 2020, mais de façon conséquente, tout de même, la persistance de la crainte liée à la pandémie du Covid 19, soigneusement entretenue par le gouvernement, a pesé sur la participation, décourageant des personnes « fragiles », hésitantes ou peu motivées d’aller voter.
 
2. Le monopole du pouvoir, des initiatives et des décisions au sommet de l’Etat, couplé à un centralisme prédateur, ont laminé les prérogatives des collectivités locales et ont confiné celles-ci dans un rôle de gestionnaires, incitant les électeurs à délaisser des élections dont les résultats « ne changeront rien » de décisif pour leur devenir.
 
Seules les présidentielles présentent encore de l’intérêt pour nombre d’électeurs. De moins en moins, toutefois. La participation aux présidentielles décline aussi. Les Français sont de plus en plus conscients de la perte de souveraineté nationale et de l’influence croissante, lorsqu‘elle n’est pas déjà dominante, des instances de l’UE, de la Cour de justice européenne (CJE) et de la Banque Centrale européenne (BCE) dans la gouvernance économique, commerciale, monétaire et financière, sociale ainsi que sociétale, et même régalienne de la France. Des citoyens en sont contents ou s’en accommodent « tant bien que mal ». D’autres critiquent et demandent des changements sans remettre en cause cette domination extérieure. D’autres, enfin, l’acceptent mal et/ou y sont résolument opposés. La poussée intégrationniste concrétisée par la signature du traité de Lisbonne en 2008 et, depuis 2017, portée à des sommets par Emmanuel Macron en France et en Europe a remis à vif les clivages sur ce sujet. Elle a aussi provoqué un regain d’intérêt en France et dans d’autres Etats membres pour les questions et les élections européennes.
 
3. « L’affaire » du référendum du 29 mai 2005 a porté un coup fatal à la confiance des électeurs dans leurs dirigeants politiques ainsi que dans les élus censés les représenter. La triste litanie des promesses non tenues qui hantent les lendemains des élections entretient et/ou amplifie cette méfiance… ainsi que la tendance durable à l’abstention.
 
L’abstention augmente même aux élections présidentielles
 
En 2002, le passage au quinquennat accompagné d’élections législatives tenues dans la foulée de l’élection présidentielle a fait plus encore de celle-ci l’élection reine servant à élire le roi omnipotent de notre « République ». Sa première expérimentation a réservé une surprise. Ce n’est pas le Socialiste Lionel Jospin, mais Jean-Marie Le Pen (JMLP) qui a accédé à la finale face à Jacques Chirac (JC), la participation au 1er tour, très disputé, n’ayant été que de 71,6%. La réélection de JC ne faisait aucun doute. Malgré cela, un imposant Front républicain s’est dressé, la participation est montée à 79,71% au 2ème tour, JMLP a recueilli 17,79% des voix, et la « menace » a été repoussée.
 
Depuis, le « Front républicain » est devenu un marqueur, jusqu’ici indélébile, de nos élections face au Front (devenu Rassemblement) national. Et les qualifications de ces « fronts » qui s’opposent ne sont pas anodines.
 
La participation est ensuite montée à près de 84% aux deux tours des élections de 2007, qui ont finalement décidé de la victoire de Nicolas Sarkozy sur Ségolène Royal. L’abstention a progressé aux présidentielles suivantes (cf. tableau ci-après). De 2007 à 2017, la participation a baissé de - 6% des inscrits au 1er tour et de - 9,3% au second tour… celui de l’élection de 2017 opposant Emmanuel Macron à Marine Le Pen.
Cette désaffection semble passer inaperçue, sans recherches d’explications. De combien la participation descendra-t-elle encore aux présidentielles d’avril et mai 2022, particulièrement si la Covid 19 sévit encore et si un 2ème tour « resucée » du « duel » Emmanuel Macron contre Marine Le Pen est promis ?
 
Chute de la participation aux législatives, dans la foulée des présidentielles
 L’évolution observée aux élections présidentielles s’est retrouvée, amplifiée, aux législatives qui ont suivi « dans la foulée ». Par rapport à celle de 2007, la participation aux législatives de 2017 a perdu - 11,7% des inscrits au 1er tour et - 17,3% au 2ème tour, avec un plongeon à 42,64%. En outre, aux abstentions se sont ajoutés + 4,20% de votes blancs et nuls. Aussi, le pourcentage des suffrages exprimés s’est effondré à 38,43% des inscrits. Un record ! C’est dans ces conditions qu’avec 49,12% des suffrages exprimés, soit 18,88% de ceux des électeurs inscrits, LREM et Modem ont obtenu ensemble 348 sièges de députés, soit 60,3% des 577 sièges de l’Assemblée nationale (AN).
 
Une telle représentativité de la « majorité présidentielle » aurait pu inciter à une gouvernance consensuelle. Cela n’a pas été le cas, même sur des sujets sociétaux clivants, telle la procréation maternelle assistée (PMA). Les décisions tombent du sommet de l’Olympe, les affrontements au Parlement et le passage en force à l’AN sont notre lot quotidien. Dès lors, il ne faut pas trop s’étonner que des procès en légitimité de cette majorité et des accusations de déni de démocratie soient de plus en plus fréquents.
 Pendant la campagne (et aussi après son élection), Macron avait promis des réformes institutionnelles introduisant « une dose de proportionnelle » en même temps que la réduction des nombres des parlementaires des deux chambres. Dangereuses pour la survie de son parti, LREM, et ses alliés, ces réformes ont été abandonnées.

Un article de l’IREF du 8 juillet intitulé « Le jeune Macron est devenu un vieux démagogue étatiste et le « macronisme » un leurre politique » (6), a aussi souligné que le président avait lui-même semé le doute sur les rôles et l’utilité du Parlement ainsi que des autres institutions où siègent des élus : - en organisant un « Grand débat national » pour recueillir « en direct » les « doléances » des Français... sans en tenir compte ensuite, d’ailleurs ; - en convoquant  un échantillon du peuple de 150 citoyens tirés au sort à une « Convention citoyenne sur le climat » à grand spectacle. Les 150 propositions de celle-ci ont servi à préparer un projet de loi, bouillie de sansonnet à l’eau tiède, à la grande déception des participants à la Convention ; - en constituant un « Collectif citoyen sur la vaccination » de 35 citoyens tirés au sort, sans autre apport visible que de donner l’illusion que les avis des Français comptaient pour le président au moins autant que ceux des scientifiques.
 
Que restera-t-il de la participation aux législatives de 2022, surtout si elles suivent une nouvelle finale présidentielle Macron /Le Pen… et si le Covid 19 sévit encore ?
 
Participation aux élections locales en chute libre
 
Bien sur, la pandémie du Covid 19 a lourdement entaché les déroulements des campagnes et des scrutins des élections municipales de 2020, dont les deux tours ont été séparés de trois mois, ainsi que de celles des régionales et des départementales de fin juin 2021. Des défaillances ont aussi été relevées dans l’organisation matérielle de ces dernières élections et la distribution des documents pré électoraux.
Mais ces raisons semblent insuffisantes pour expliquer les chutes de la participation, qui ont été : - de - 19% à - 20% des inscrits (aux deux tours) entre les élections municipales de 2014 et celles de 2020 ; - de près de - 17% entre les premiers tours des élections régionales de décembre 2015 et de celles de mai 2021, et de - 24% entre les participations aux seconds tours. En 2015, la participation au 2ème tour avait été nettement supérieure à celle du 1er tour (+ 8,5% des inscrits), « boostée » par un front républicain « vigoureux » face au « danger » du Front national, qui était arrivé en tête dans 6 régions au 1er tour. En mai 2021, le « sursaut républicain » au 2ème tour n’a majoré la participation que de + 1%.
 
Diverses explications de la très forte abstention aux deux tours des dernières régionales ont été avancées. « Les offres politiques locales » ont été critiquées pour leur qualité et pour leur inadéquation avec les préoccupations majeures de la population. Il est vrai que l’insécurité, le terrorisme, le chômage, les minima sociaux, la lutte contre la Covid, la relance de l’économie… ne sont que marginalement du ressort des régions et des départements. Dans ces domaines, comme dans bien d’autres, le pouvoir est entre les mains du chef de l’Etat. Et Macron a durci la centralisation.
 
 
Il a supprimé la taxe d’habitation. Il a dépouillé les collectivités d’une partie des ressources d’origine locale et de leur autonomie en matière financière. Les contrats Etat-région pour le cofinancement de « projets » ont aussi accru la dépendance des régions. Les préfets, placés sous l’autorité de l’Etat, sont davantage sollicités que les responsables locaux, notamment pour l’exécution de la « politique » sanitaire.
Un article de l’IREF du 8 juillet intitulé « Le jeune Macron   est devenu un vieux démagogue étatiste et le « macronisme » un   leurre politique »   (6), a aussi souligné que le président avait lui-même semé le doute   sur les rôles et l’utilité du Parlement ainsi que des autres institutions où   siègent des élus : - en organisant un « Grand débat   national » pour recueillir « en   direct » les « doléances »   des Français... sans en tenir compte ensuite, d’ailleurs ; - en   convoquant  un échantillon du peuple de   150 citoyens tirés au sort à une « Convention   citoyenne sur le climat » à grand spectacle. Les 150 propositions de   celle-ci ont servi à préparer un projet de loi, bouillie de sansonnet à l’eau   tiède, à la grande déception des participants à la Convention ; - en   constituant un « Collectif citoyen   sur la vaccination » de 35 citoyens tirés au sort, sans autre apport   visible que de donner l’illusion que les avis des Français comptaient pour le   président au moins autant que ceux des scientifiques.
  
Que   restera-t-il de la participation aux législatives de 2022, surtout si elles   suivent une nouvelle finale présidentielle Macron /Le Pen… et si le Covid 19   sévit encore ?
  
Participation aux élections locales en chute libre
  
Bien sur, la   pandémie du Covid 19 a lourdement entaché les déroulements des campagnes et   des scrutins des élections municipales de 2020, dont les deux tours ont été   séparés de trois mois, ainsi que de celles des régionales et des   départementales de fin juin 2021. Des défaillances ont aussi été relevées   dans l’organisation matérielle de ces dernières élections et la distribution   des documents pré électoraux.
  
Les municipales, les départementales et les   régionales, clés des sénatoriales
  
On a aussi   omis de rappeler aux citoyens un enjeu national majeur qui aurait pu   les inciter à ne pas s’abstenir. Ces élections déterminent la composition du   corps des « grands électeurs » qui élisent les sénateurs,   représentants des élus du Territoire. Au nombre de 348, ils sont élus pour 6   ans et la moitié d’entre eux est renouvelée tous les 3 ans.
  
Les   élections sénatoriales du 24 septembre 2017,   qui portaient sur 171 sièges, avaient consacré la victoire de la droite et du   centre. Les Républicains avaient gagné + 4 sièges et l’Union centriste, + 7.   Les Socialistes avaient perdu - 8 sièges, et le parti présidentiel LREM en   avait cédé - 8 (7). Discrétion de rigueur sur cette   défaite, donc.
  
Aux   élections sénatoriales du 27 septembre 2020   mettant en jeu 172 sièges, les Républicains et l’Union centriste ont encore   conforté leurs positions. Les premiers ont gagné + 4 sièges pour en détenir 148, les seconds en ont gagné + 3   pour en détenir 54 (8). Ensemble, ces deux Groupes disposent d’une assez   confortable majorité. Encore en recul de - 6 sièges, le Groupe socialiste,   écologiste et républicain (SER) a préservé 65 sièges. Quant au Groupe macroniste, rebaptisé Rassemblement   des démocrates progressistes et indépendants (RDPI), il a conservé 23 sièges.
  
Sous la   présidence de Gérard Larcher, avec une majorité de droite, le Sénat est la   seule force parlementaire qui, s’appuyant sur des compétences éprouvées, joue   un rôle d’opposition constructive et modératrice face la majorité   présidentielle à l’AN… qui, dans notre procédure parlementaire a toujours le   dernier mot.
  
Compte tenu   des résultats des dernières élections locales, la composition du Sénat   devrait probablement rester assez   stable jusqu’après les élections municipales de 2026… puisque le   président Macron n’a pas l’intention de tenir ses promesses et de réduire les   effectifs parlementaires des deux chambres d’ici mai 2022. C’est plutôt   rassurant.
  
L’exception   des élections européennes
  
Souviens-toi du référendum du 29 mai 2005 !
  
Ce jour-là,   avec une forte participation (69,33% de votants), une large majorité des   Français, 54,68% des   suffrages exprimés, avait répondu NON   (contre 45,32% en faveur du OUI) à la question « Approuvez-vous   le projet de loi qui autorise la ratification du traité établissant une   constitution pour l’Europe ». Le 1er juin, le peuple   des Pays-Bas avait aussi rejeté ce traité constitutionnel élaboré en   2004. L’Union européenne (UE) avait dû renoncer à son projet.
  
Aussi, au   cours du second semestre 2007, un nouveau traité de Lisbonne avait été concocté par l’UE. Il avait   repris la majorité du traité rejeté en 2005 et avait modifié en profondeur le   traité de Rome de 1957 instituant la Communauté européenne, ainsi que le   traité sur l’UE de Maastricht (1992). Ce nouveau traité a été signé par les   27 pays membres, et, au nom de la France, par le président Sarkozy le 13   décembre 2007. En France, il avait été décidé en haut lieu que la   ratification du traité se ferait par voie référendaire… moyennant une   « adaptation » de la Constitution française. La révision de notre   Constitution a été approuvée par le Parlement à Versailles le 4 février 2008.   Une loi votée par l’AN et le Sénat les 7 et 9 février a autorisé la   ratification du traité de Lisbonne.   Celui-ci est entré en vigueur le 1er décembre 2009 et régit   toujours l’UE.
  
Cette   manœuvre a été très mal vécue par les opposants au traité et la majorité des   Français. « Ratifier Lisbonne, une forfaiture ! » a   résumé le journaliste d’investigation français Karl Laske sur liberation fr   le 8 février 2008 (9). « Ce que le peuple français a refusé, c’est au peuple français de le   concéder, pas à une poignée de parlementaires aux ordres ».  
  
Le refus de   2005 était durable. « Référendum européen : dix   ans après, les Français confirmeraient le « non » », affichait lepoint.fr le 28 mai 2015 (10). Un sondage de l’IFOP révélait que 29% des Français voteraient pour le OUI au référendum, alors que 47% voteraient pour le NON et que 24% ne se prononceraient   pas. L’article rappelait que le traité constitutionnel rejeté avait été   préparé « sous le patronage »   de l’ex-président Giscard d’Estaing, que Hollande et Sarkozy s’étaient   accordés pour que le NON se transforme en OUI et avaient fait voter le   changement de la Constitution de la France au Congrès de Versailles. Ainsi, trois   de nos présidents ainsi qu’une partie des parlementaires avaient été   « mouillés » dans cette   scabreuse affaire qui a
  
confédéral   de la Gauche unitaire européenne/Gauche verte nordique (GUE/NGL), auquel sont   affiliés des députés de la France insoumise (LFI) et des Communistes ; -   38 députés étaient Non-inscrits   (NI).
  
Longtemps   majoritaires ensemble au PE et habitués aux compromis, le PPE et S&D ne   le sont plus. La situation s’est compliquée. Avec les Verts, ces deux groupes   se trouvent maintenant cernés par des courants actifs qui ont grossi.
  
D’un côté,   des partisans de plus d’intégration réclament une constitution pour l’UE et   plus de souveraineté supranationale. Macron y est très en vue. Ces   « européistes » œuvrent dans le même sens que les dirigeants de   l’UE et la Technocratie bruxelloise qui s’efforcent depuis des décennies   d’imposer la domination de leur appareil sur les nations. Dans l’opposition   au fédéralisme, le flan gauche est occupé par le groupe confédéral GUE/NGL.   Sont aussi et surtout montés en puissance plusieurs mouvements résolus aux   motivations en partie communes et/ou différenciées. Ils sont   « dispersés », avec le groupe CRE, né en mai 2009, et le groupe ID,   enfant du groupe ENL, né en 2015. Le nombre total de leurs députés est de   137, sans compter ceux qui sont « contre l’Europe » parmi les 38 Non-inscrits.   Aussi, les récentes tentatives de rapprochement, voire d’union, ne sont pas   surprenantes.
  
Déclaration   commune, mais divisions chez les « eurosceptiques »
  
Une déclaration commune sur   l’avenir de l’Union européenne a   été signée par 16 de ces partis. Le 14 juillet, dans un article détaillé   intitulé « Les fractures politiques et économiques de la   « droite » eurosceptique » (14), l’IREF a examiné les positions de ces 16 partis,   ainsi que celles des 12 partis non signataires affiliés aux groupes ID et   ECR.
  
Dans leur   déclaration, les partis signataires critiquent « la voie fédéraliste [prise par l’UE] qui l’éloigne inexorablement des peuples,   qui sont le cœur battant de notre civilisation ». Ils plaident   « pour une Europe respectueuse des   peuples et des nations libres » et refusent « que les peuples soient soumis à   l’idéologie bureaucratique et technocratique de Bruxelles qui impose ses   normes dans tous les pans de la vie quotidienne ».
  
Au total, le   nombre de députés européens des partis signataires est de 114, la   Ligue italienne en apportant 28, le PiS polonais, 25, le RN français, 23, le   Fidesz hongrois, 12, et les Frères d’Italie, 5.
  
Les partis   qui n’ont pas signé comptent 33 députés. Avec 11 députés, le parti   Alternative pour l’Allemagne (AfD) est le plus étoffé. Les 16 signataires   l’auraient écarté, le jugeant « trop   d’extrême droite ». En nombre, les principaux partis absents sont Le   Parti Démocratique Civique tchèque, avec 4 députés, le Forum pour la   Démocratie batave et le parti flamand NVA, avec chacun 3 députés.
  
Après examen de leurs positions   respectives, l’IREF voit une fracture géopolitique entre les groupes   ECR et ID, le premier étant atlantiste et attaché à l’OTAN, tandis que dans   le second, des partis seraient russophiles et/ou sinophiles. A l’instar du   RN, ils aimeraient se détacher de l’OTAN et se rapprocher de la Russie.
  
Une fracture économique   séparerait les partis « libéraux », notamment ceux du groupe   ECR, de ceux du groupe ID qui ne le sont pas. « Seul le RN apparait en réalité comme un   parti économiquement (et socialement) socialiste. Les autres partis non   libéraux sont certes protectionnistes, mais laissent cependant pas mal de   souplesse à l’économie à l’intérieur de leurs frontières ».
porté un coup fatal à la confiance des électeurs dans leurs élus et à la représentativité de ces derniers. Pas seulement sur les questions européennes.
 
Cet épisode a aussi profondément marqué la perception de l’UE par les Français. Il a cristallisé une opposition entre les tenants d’une UE fédéraliste, en même temps que du mondialisme et d’un universalisme sans frontières, dont Macron est la figure de proue dans notre pays, face aux défenseurs d’une France conservant sa souveraineté, son identité nationale. Parmi ces défenseurs, le FN a été aux avant-postes. C’est sans doute une des raisons pour lesquelles il a mobilisé davantage sur ce terrain et est monté en puissance dans les années 2010, tandis que la participation aux élections européennes, qui s’était complètement effondrée de 1994 à 2009, a repris des couleurs.
 
Aux européennes de 2014 et 2019, la participation a progressé… et le RN aussi
 
De 2009 à 2014, la participation aux élections européennes en France s’est relevée et est montée de 40,63% à 42,43%. Elle a ensuite atteint 50,12% en 2019.
 
Lors des européennes de juin 2009 en France, peu avant l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne, le FN n’avait recueilli que 6,3% des votes et obtenu 3 des 72 sièges alloués à la France au Parlement européen (PE). Aux européennes de 2014, le FN était arrivé en tête avec 24,9% des suffrages exprimés et avait obtenu 24 des 74 sièges français au PE, devant l’UMP qui avait obtenu 20,8% des votes et 20 sièges. Aux européennes de mai 2019, Marine Le Pen a battu Emmanuel Macron d’une courte tête. Premier, le RN a recueilli 23,3% des suffrages et obtenu 22 des 74 sièges français au PE. Avec 22,4% des suffrages, LREM a obtenu 21 sièges. A ces élections, les Verts ont obtenu 12 sièges et les grands perdants (comme en 2014), les Républicains et les Socialistes, respectivement 8 et 5 sièges.
 
Ainsi, le RN a recueilli 1,092 million (Mi) de voix aux européennes de 2009, 4,712 Mi à celles de 2014 et 5,287 Mi à celles de 2019. Cette montée n’a-t-elle vraiment pas de lien avec la suite donnée au NON du référendum de 2005 ?
 
La France dans la tourmente de l’Union européenne
 
Participation en hausse dans l’UE et bouleversements au Parlement européen
 
Au niveau de l’ensemble de l’UE, la participation aux européennes a bondi de 42,61% en 2014 à 50,66% en 2019. A ces élections de mai 2019, d’importants changements ont eu lieu dans la composition du Parlement européen (PE). 751 sièges étaient en jeu. De fortes progressions ont été enregistrées par les groupes : - Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe (ALDE), rebaptisé Renew Europe (+ 39 sièges) à la demande de La République en Marche, qui est venue grossir ses rangs et qui rechignait à voir le mot « libérale » dans le nom du groupe ; - Les Verts / Alliance libre européenne (+ 22 sièges), ALE militant notamment pour le droit des régions à l’autodétermination : - Identité et démocratie (ID) (+ 37 sièges), ex ENL de Matteo Salvini, qualifié d’extrême droite, auquel  le RN a adhéré. Du côté des diminutions, se trouvaient surtout le Parti populaire européen (PPE), qui a perdu - 24 sièges, et l’Alliance progressiste des Socialistes & Démocrates (S & D), qui en a cédé - 31 (11).
 
Depuis ces élections, à la suite du vote du Brexit, le Royaume-Uni (RU) est sorti de l’Union européenne le 31 janvier 2020 à minuit. Les 73 sièges du RU ont alors été libérés. 27 ont été redistribués entre les Etats membres. 46 sont restés vacants en prévision d’éventuels élargissements de l’UE.
 
Avec 73 « partants » britanniques, les équilibres entre les groupes au PE ont été modifiés. Les Non-inscrits (NI) ont vu leur nombre réduit des - 30 sièges du Parti du Brexit (de Nigel Faredge), Renew Europe a perdu - 17 sièges, les Socialistes et Démocrates ont perdu - 10 sièges travaillistes, le groupe des Verts/ALE en a perdu - 11… (12).
 
Autre changement, le PPE s’est délesté de - 12 sièges le 3 mars 2021 lors du départ remarqué du Fidesz, le parti du Premier ministre Hongrois Viktor Orban (13), « ennemi public n° 1 » de l’UE, et tête de turc préférée de Macron.
 
Au début mars 2021, la répartition des 705 sièges du PE était la suivante (13) : - 175 sièges pour le Parti populaire européen (PPE) ; - 145 pour les Socialistes et démocrates (S&D) ; - 98 pour Renew Europe (RE) ;  - 74 pour Identité et démocratie (ID) ; - 73 pour les Verts/ALE ; - 63 pour le groupe des Conservateurs et des réformistes européens (CRE), comprenant 27 élus polonais (en grande partie du parti Droit et justice (PiS) ; - 39 pour le groupe confédéral de la Gauche unitaire européenne/Gauche verte nordique (GUE/NGL), auquel sont affiliés des députés de la France insoumise (LFI) et des Communistes ; - 38 députés étaient Non-inscrits (NI).
Longtemps majoritaires ensemble au PE et habitués aux compromis, le PPE et S&D ne le sont plus. La situation s’est compliquée. Avec les Verts, ces deux groupes se trouvent maintenant cernés par des courants actifs qui ont grossi.
D’un côté, des partisans de plus d’intégration réclament une constitution pour l’UE et plus de souveraineté supranationale. Macron y est très en vue. Ces « européistes » œuvrent dans le même sens que les dirigeants de l’UE et la Technocratie bruxelloise qui s’efforcent depuis des décennies d’imposer la domination de leur appareil sur les nations. Dans l’opposition au fédéralisme, le flan gauche est occupé par le groupe confédéral GUE/NGL. Sont aussi et surtout montés en puissance plusieurs mouvements résolus aux motivations en partie communes et/ou différenciées. Ils sont « dispersés », avec le groupe CRE, né en mai 2009, et le groupe ID, enfant du groupe ENL, né en 2015. Le nombre total de leurs députés est de 137, sans compter ceux qui sont « contre l’Europe » parmi les 38 Non-inscrits. Aussi, les récentes tentatives de rapprochement, voire d’union, ne sont pas surprenantes.
Déclaration commune, mais divisions chez les « eurosceptiques »
Une déclaration commune sur l’avenir de l’Union européenne a été signée par 16 de ces partis. Le 14 juillet, dans un article détaillé intitulé « Les fractures politiques et économiques de la « droite » eurosceptique » (14), l’IREF a examiné les positions de ces 16 partis, ainsi que celles des 12 partis non signataires affiliés aux groupes ID et ECR.
Dans leur déclaration, les partis signataires critiquent « la voie fédéraliste [prise par l’UE] qui l’éloigne inexorablement des peuples, qui sont le cœur battant de notre civilisation ». Ils plaident « pour une Europe respectueuse des peuples et des nations libres » et refusent « que les peuples soient soumis à l’idéologie bureaucratique et technocratique de Bruxelles qui impose ses normes dans tous les pans de la vie quotidienne ».
Au total, le nombre de députés européens des partis signataires est de 114, la Ligue italienne en apportant 28, le PiS polonais, 25, le RN français, 23, le Fidesz hongrois, 12, et les Frères d’Italie, 5.
Les partis qui n’ont pas signé comptent 33 députés. Avec 11 députés, le parti Alternative pour l’Allemagne (AfD) est le plus étoffé. Les 16 signataires l’auraient écarté, le jugeant « trop d’extrême droite ». En nombre, les principaux partis absents sont Le Parti Démocratique Civique tchèque, avec 4 députés, le Forum pour la Démocratie batave et le parti flamand NVA, avec chacun 3 députés.
Après examen de leurs positions respectives, l’IREF voit une fracture géopolitique entre les groupes ECR et ID, le premier étant atlantiste et attaché à l’OTAN, tandis que dans le second, des partis seraient russophiles et/ou sinophiles. A l’instar du RN, ils aimeraient se détacher de l’OTAN et se rapprocher de la Russie.
Une fracture économique séparerait les partis « libéraux », notamment ceux du groupe ECR, de ceux du groupe ID qui ne le sont pas. « Seul le RN apparait en réalité comme un parti économiquement (et socialement) socialiste. Les autres partis non libéraux sont certes protectionnistes, mais laissent cependant pas mal de souplesse à l’économie à l’intérieur de leurs frontières ».
Vu que le qualificatif « libéraux » est galvaudé et utilisé avec des significations très diverses, cette fracture parait moins convaincante. D’autant que dans des groupes tels le PPE et le RE, notamment, une telle cohabitation entre des partis libéraux et d’autres qui ne le sont pas s’observe aussi.
 
La méfiance de pays de l’Est à l’égard de l’UE n’est pas nouvelle. Le groupe de Visegrad (V4), qui comprend la Pologne, la Hongrie, la République tchèque et la Slovaquie, a été créé il y a trente ans. Il défend les intérêts de la région. « Les quatre pays de Visegrad, un groupe avec lequel il faut compter désormais en Europe » avaient titré, à juste raison, lesechos.fr le 18 février (15). Selon l’article, c’est un « repère de refuzniks » qui s’opposent à l’intégration européenne, ainsi que de conservateurs qui désapprouvent le « progressisme » sociétal de l’UE.
 
Sous la pression intégrationniste et normalisatrice de l’UE, les oppositions s’étendent et se tendent à l’Est. Un fossé est en train de s’élargir entre deux parties de l’Europe… qui, visiblement, n’ont pas tout à fait les mêmes valeurs.
  
Similitudes   troublantes
  
La situation politique en   France présente des similitudes « troublantes » avec celle de l’UE.   En plus grave chez nous. Parce que les deux grands partis qui ont alterné ou   cohabité au pouvoir pendant des décennies ont été « écrasés » entre   LREM (avec ses alliés) et le RN, des ennemis irréductibles, parce que le   président de la République fait tout son possible pour perpétuer cette   situation… et que la France continue de perdre sa souveraineté, sa   personnalité, que les Français en soient conscients, le veuillent ou non.
  
Sources et références
 
(1) Elections régionales françaises de 2021 --- Wikipédia    wikipedia.org/wiki/Elections_régionales…      le 02/07/2021
 
(2)  Elections départementales françaises de 2021 --- Wikipédia     wikipedia.org/wiki/Elections_ départementales…
 
(3) Sondage BFMTV - Elections régionales : 36% des électeurs se disent sûrs d’aller voter au premier tour      bfmtv.com/politique/elections/régionales/sondage… le 17/06/2021
 
(4) Quatre jeunes sur 5 ne voteront pas aux régionales    lepoint.fr/elections-regionales/sondages/quatre-jeunes…     le 16/06/2021   
 
(5) Après le raté des régionales, les sondages en question    lefigaro.fr/elections/regionales/apres-le-rate…     le 09/07/2021
 
(6) Le jeune Emmanuel Macron est devenu un vieux démagogue étatiste et le « macronisme » un leurre politique    irefeurope.org/Publications/Article/article/Le-jeune…    le 08/07/2021
 
(7) Elections sénatoriales françaises de 2017 --- Wikipédia
 
(8) Elections sénatoriales françaises de 2020 --- Wikipédia
 
(9) Ratifier Lisbonne, une forfaiture     liberation.fr/contre-journal/2008-02-08/ratifier-lisbonne…
 
(10) Référendum européen : dix ans après, les Français confirmeraient le « non »     lepoint.fr/politique/referendum-européen…      le 28/05/2015
 
(11) Elections européennes de 2019    wikipedia.org/wiki/Elections_européennes…
 
(12) Elections européennes de 2019 au Royaume-Uni    wikipedia.org/ wiki/Elections_europeennes_de_2019_au_Royaume-Uni
 
(13) Les députés européens : répartition par pays et par groupe politique     touteleurope.eu/institutions/les-deputes…     le 12/03/2021
 
(14) Les fractures politiques et économiques de la « droite » eurosceptique    irefeurope.org/Publications/Articles/article/Les-fractures…     le 14/07/2021
 
(15) Les quatre pays de Visegrad, un groupe avec lequel il faut compter désormais en Europe.      Lesechos.fr/monde/europe/les-quatre…    le 18/02/2021

© 01.09.2021

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