210 klobo - Académie du Gaullisme

La Lettre du 18 JUIN Vingt- sixième année – n° 210 – octobre 2018
Aller au contenu

210 klobo

par Paul KLOBOUKOFF
EUROPÉENNES 2019 : LES HOSTILITÉS SONT OUVERTES
Préambule
Les « européennes » se jouent à deux niveaux, celui de chaque État de l’Union européenne (UE), qui nous est familier, et celui de l’UE, qui l’est beaucoup moins. Nombre de Français, comme d’autres Européens, ignorent à quels « groupes européens » présents au Parlement européen (PE) adhèrent les partis nationaux pour lesquels ils votent et ce que représentent ces groupes. Nos médias n’aiment pas nous en parler. C’est pourquoi la première partie du présent article commence par une brève présentation des équipes, les groupes, qui s’affrontent sur le terrain européen, ainsi qu’à leurs apparentements avec nos propres partis. Dans l’UE, en vue des européennes de 2019, la campagne a débuté peu après l’élection d’Emmanuel Macron, qui n’a pas tardé à porter sa bonne parole en Europe. L’immigration est revenue en force au cœur des débats et des problèmes majeurs après la grande vague migratoire de 2015 et 2016. Et l’Europe, qui connaissait déjà la montée des nationalistes et des populistes, a vu celle-ci s’accélérer et s’étendre. Après moult péripéties, dont celles de l’Aquarius, les dirigeants européens ont été mobilisés pour participer à la « guerre » déclarée par Macron à Viktor Orban, Premier ministre hongrois. Contrairement à Macron, fédéraliste et mondialiste proclamé, Orban est un nationaliste, allié à des acolytes d’Europe de l’Est qui sont aussi très réticents à l’accueil des migrants. De surcroît, Orban et son ami, le Polonais Kaczinski, sont menacés de graves sanctions par l’UE pour atteintes à la justice et à la liberté dans leurs pays. C’est plus qu’il n’en faut pour que Macron s’efforce « d’orbaniser » les européennes. Il n’y aurait pas d’autre choix que lui et sa vision, pour sauver l’UE, ou celle d’Orban, pour la détruire. Absurde ! Ces développements ont déteint sur la campagne en France. En portant presque au premier plan les questions de l’immigration et, en même temps, les divisions entre « nos » présumés progressistes réformistes macronistes ou compatibles, les « populistes », ainsi que les partisans de gauche, du centre et de droite qui ne sont pas classés dans les deux catégories précédentes. Officiellement, la campagne n’est pas lancée. Mais, les hostilités sont ouvertes… pendant que les protagonistes essaient de préciser leur « ligne », de constituer leur liste de candidats. Sans attendre, et depuis des mois, des sondeurs impatients interrogent les électeurs sur leurs intentions de vote en mai 2019. Des observations intéressantes peuvent être faites. L’évolution des intentions exprimées, très corrélée à celles de la popularité de l’exécutif et des appréciations de la qualité de sa gouvernance, peut vraiment inquiéter Macron et son parti La REM. L’exécutif est au plus bas dans les sondages. L’impatience gagne. La domination des préoccupations franco-françaises dans les attentes des citoyens pèsera lourd dans les choix électoraux en mai 2019. À commencer par l’amélioration du pouvoir d’achat, la baisse du chômage, celle des impôts et des charges, la maîtrise de l’immigration, la réduction des inégalités sociales et de l’exclusion, la protection de l’environnement et le redressement de l’économie française. Pour y répondre, l’exécutif risque de manquer de munitions. Il a trop donné aux plus riches avec la suppression de l’ISF et l’instauration de la « fat tax », qui grèvent les recettes fiscales chaque année qui passe. Il donne encore 20 milliards € aux entreprises qui bénéficiaient du CICE. Ceci au détriment des fonctionnaires, des retraités, des propriétaires et des classes moyennes, des chômeurs, des pauvres, des malades…. En outre, la course désordonnée aux réformes et la mise en service du prélèvement à la source vont sans nul doute « interférer » avec la campagne des européennes, la perturber, la « polluer ». On peut craindre des assauts de com insistants et agressifs, surtout si les difficultés augmentent et si les cotes de Macron et de Philippe en souffrent. Heureusement, nous serons à l’abri des « fake news » ! Le roi et LaREM aussi.

I. – Dans l’Union européenne, l’immigration sème le trouble et divise
Les partis français dans les groupes européens au Parlement de l’UE
Le Parlement européen (PE) élu en mai 2014 pour 5 ans compte 751 députés. Le « Brexit » » va laisser vacants les 73 sièges du Royaume-Uni. En vue des élections de mai 2019, les députés européens ont rejeté le 7 février 2018 la proposition, soutenue par Emmanuel Macron, de créer des listes transnationales. Ils ont décidé de redistribuer 27 sièges entre 14 pays membres et de réduire le nombre total des sièges à 705. Démographie aidant, la France sera une des principales bénéficiaires, avec 79 sièges, soit + 5 sièges et un pourcentage des voix au Parlement qui montera de 9,85 % à 11,2 %. Les députés européens ont aussi confirmé leur attachement à ce que les candidats des partis européens désignent avant les élections, comme en 2014, un « Spitzkandidaten » (candidat tête de liste), qui sera leur candidat au poste de président de la Commission européenne (1) en remplacement du bien connu Luxembourgeois JeanClaude Juncker. Ce poste clé est très convoité, notamment par Allemagne, qui pousse en avant la candidature du Président du Parti populaire européen (PPE), Manfred Weber, soutenu par Angela Merkel.
Les députés européens peuvent s’organiser en « groupes » par affinités politiques. Pour former un groupe, il faut réunir au moins 25 députés d’au moins 7 États membres. Les députés « non groupés » sont classés dans les non-inscrits. Dans le Parlement actuel, 8 groupes se sont formés par des alliances entre des partis nationaux. Aussi, quand un électeur vote pour un parti dans son pays, la plupart du temps, il donne sa voix à un des 8 groupes du PE.  
Depuis 1953, deux groupes majeurs marquent une opposition gauche-droite, devenue traditionnelle dans les pays d’Europe de l’Ouest au fil des décennies, et ont dominé, tour à tour, l’assemblée : celui du Parti Populaire Européen (démocrateschrétiens), ou PPE, et celui du Parti des Socialistes et Démocrates Européens (S&D). Leurs ramifications s’étendent à tous les États membres. En juillet 2018 (2), ils se partageaient  54 % des sièges du Parlement. Le PPE comptait 218 élus, dont 16 du parti Les Républicains (LR), 3 Divers Droite et 1 d’Agir. Parmi les 189 députés du S&D se trouvaient 10 élus du PS français, 2 de Génération.s et 1 radical de gauche.
Le groupe des Conservateurs et Réformistes Européens (ECR) rassemble des partis de 18 pays, de droite, ainsi que de droite nationaliste et/ou chrétienne. Il dispose de  73 sièges. 26 de ceux-ci étant occupés par des députés du Royaume-Uni, il va souffrir du Brexit.
L’Alliance des Démocrates et Libéraux pour l’Europe (ADLE) unit des fédéralistes, libéraux ou sociaux-libéraux, centristes ou de centre droit, de 58 partis dans 21 États de l’UE. Elle dispose de 68 sièges. Dans ses rangs se trouvent 7 députés français de 5 de « nos » partis : le MoDem, le Mouvement radical, social et libéral, l’UDI, l’Alliance centriste et Génération citoyen. Ce
Groupe considère ses idées proches de celles de Macron. Son patron, le Belge Guy Verhofstadt a d’ailleurs tenté de faire adhérer les macronistes à l’ALDE. Sans succès jusque-là.   
« Nous ne voulons plus des accords des grands groupes politiques européens  avant même que les citoyens aient voté », aurait « martelé » Christophe Castaner  le 26 septembre (3), alors que la majorité (LaREM et ses amis) porte l’ambition de créer son propre groupe politique au Parlement européen.   
Les Verts/Alliance libre européenne (Vets/ALE) sont présents dans 18 pays et comptent 52 députés. Parmi eux, se trouvent 6 Français : 5 d’Europe Ecologie Les Verts (EELV) et 1 Ecologiste. Daniel Cohn Bendit (alias Dany le Rouge pour les médias en 1968) a coprésidé ce groupe de 2004 à 2014. Curieusement, en haut lieu, chez nous, il a été envisagé de choisir ce « jeune homme » de 73 ans, encore vert, comme tête de liste de LaREM.  
La Gauche unitaire européenne/Gauche verte nordique (GUE/NGL) est présente dans 14 États membres et compte 51 députés socialistes, antilibéraux, anticapitalistes et/ou communistes. Parmi eux se trouvent 4 Français du Front de gauche-L’Union pour les Outremer.
Deux groupes peuplés de « protestataires », « populistes », « antieuropéens », souverainistes, nationalistes, xénophobes, souvent « d’extrême droite »… sont plus récents et sont « représentés » au Parlement par des députés élus, respectivement, dans 8 et 9 pays de l’UE :
- Le groupe Europe de la liberté et de la Démocratie Directe (ELDD) compte 45 députés. Il est présidé par Nigel Farage, un des artisans du Brexit. Son mouvement pour l’Indépendance du Royaume-Uni (UKIP) a apporté 20 sièges au groupe en 2014. 3 Patriotes (parti de Florian Philippot) et 1 sans étiquette français font aussi partie du groupe.  
- Le Mouvement Europe des Nations et des Libertés (MENL) a été créé en juin 2015, à l’initiative de Marine Le Pen (RN), de Geert Wilders (PVV néerlandais) et Matteo Salvini (Ligue du Nord italienne). Coprésidé par Marcel de Graaf (PVV) et Nicolas Bay (RN), il compte 35 députés, dont 16 Français du Rassemblement National.  
En juillet 2018, il reste 22 non-inscrits (contre 52 en 2014), parmi lesquels se trouvent 3 Français.
Ces élections « indirectes » des députés des groupes européens ne sont pas très populaires. À celles de 2014, le taux de participation dans l’ensemble de l’UE n’a été que 42,61 %. Très proche de celui enregistré en France, de 42,43 % (4). Il faut dire que nos médias estiment indignes d’intérêt les débats et les votes des lois au PE (nombreuses et d’inégale importance). Mais, surtout, beaucoup d’Européens semblent convaincus [non sans raisons] de l’impuissance du PE. Il est vu comme une chambre d’enregistrement des décisions de « l’Exécutif » de l’UE, la trop dominatrice Commission, avalisées, quand c’est jugé indispensable, par les chefs d’État et de gouvernement. Cela ne pousse pas les citoyens à se ruer vers les urnes. À cet égard, un parallèle peut être fait avec l’Assemblée nationale française. Aux législatives de 2017, le pourcentage des votes exprimés n’a été que de 47,6 % de celui des inscrits.
L’immigration : une question majeure, cruciale
Depuis des décennies, la limitation de l’immigration est une revendication appuyée des « populistes d’extrême droite » (pour faire court) dans l’UE (comme aux « États-Unis de Trump »). Et, il est vrai que la proportion d’immigrés et d’enfants d’immigrés n’a cessé d’augmenter en Europe. Une immigration principalement « économique» et familiale. En France, les statistiques et les études de l’Insee le montrent sans ambigüité. Potentiellement, à moyen et long terme, et peut-être avant, des « tensions » plus fortes sont à redouter. Dans un article intitulé « Europe 2050 : suicide démographique » (5), l’Institut Robert Schuman nous alerte sur la puissance de la « tectonique démographique » à l’œuvre dans le monde. D’ici 2050, d’après l’ONU et Eurostat, « l’Europe pourrait stagner autour de 500 millions d’habitants et perdre 49 millions de personnes en âge de travailler dans la tranche des 20-64 ans ». L’Allemagne perdrait 11 millions (Mi) d’actifs potentiels, l’Italie et l’Espagne, 7 à 8 Mi. Plus prolifique, la France rattraperait l’Allemagne. Le Royaume-Uni la dépasserait. Pendant ce temps, la population de la Chine reculerait un peu, à 1,350 milliard (Md). Celles du Japon et de la Russie diminueraient aussi. Au contraire, celle d’Amérique du Nord monterait à 433 Mi et celle d’Amérique Latine à 704 Mi. Celle de l’Inde augmenterait de + 334 Mi pour atteindre 1,705 Md. L’Afrique, elle, connaîtrait une explosion démographique retentissante, plus que le doublement  entre 2015 et 2050 : + 1,292 Md de personnes, et une population totale de 2,478 Mds en 2050. La population de l’Afrique du Nord et du Moyen-Orient devrait augmenter de + 150 Mi, et atteindre 354 Mi.  
Il est difficile d’imaginer que ces explosions ne s’accompagneront pas de poussées migratoires de grande ampleur. Et elles ne se limiteront pas à des embarcations de demandeurs d’asile. Il faut cesser de regarder les questions d’immigration devant nous par le petit bout de la lorgnette à courte vue avec des œillères politiciennes. Il est temps d’examiner les problèmes migratoires sereinement, lucidement et d’en discuter entre « adultes » européens. Il est surprenant, pour ne pas dire incompréhensible, que les instances de l’UE n’organisent pas une telle concertation.
L’accueil et le « traitement » des migrants fracturent l’UE
Avec l’écrasement des Nations par les poussées fédéralistes et le « despotisme » des dirigeants de l’UE, l’immigration a été un motif important de la montée des « populismes » dans un nombre croissant de pays. Elle a été une des causes majeures du Brexit.  
L’arrivée massive en 2015 de migrants de Syrie, d’Irak, d’Afghanistan… demandeurs d’asile a provoqué des réactions différenciées de la part des États de l’UE, a placé (ou replacé) au premier plan les problèmes d’immigration et a donné un nouvel élan aux mouvements populistes de droite. Très accueillante, Angela Merkel a décidé de recevoir un grand nombre de migrants en Allemagne. Plus d’un million en 2015 et en 2016. D’abord plutôt bien acceptée, cette « politique d’ouverture » a bientôt rencontré de l’hostilité, d’abord surtout en Bavière et en Allemagne de l’est au début, ensuite, plus largement. Elle a fait le lit de l’AfD (Alternative pour l’Allemagne), parti « populiste » montant, au moment où la chancelière se débattait à l’approche des élections législatives de septembre 2017, qui se sont avérées problématiques, puis après celles-ci, pour constituer un gouvernement de coalition avec son grand adversaire traditionnel, le SPD. Avec 12,6 % des voix aux législatives, l’AfD est devenu le premier parti d’opposition. Merkel n’a pas réussi à faire accepter l’adoption de « quotas » de répartition des migrants entre les États membres. Les opposants les plus déterminés à l’accueil des migrants (« sur la route des Balkans ») ont été la Pologne et la Hongrie, gouvernés par des « conservateurs anti-européens », et leurs deux autres « acolytes » du Groupe de Visegrad, la République Tchèque et la Slovaquie. Un groupe, né en 1991, qui s’était mobilisé pour aider à protéger la barrière de barbelés érigée par la Hongrie, dirigée par son Premier ministre, « national conservateur et populiste », le charismatique Victor Orban, également leader du groupe. L’affaire de l’Aquarius a ensuite révélé la fracture entre les États sur l’accueil des réfugiés, même en situation de détresse. La France, notamment, a montré de la réticence à l’accueil et peu de solidarité avec l’Italie, « sommée »  d’ouvrir ses ports au navire. Après les tentatives de « fixation » des migrants en Turquie et dans des pays de départ et/ou de transit en Afrique, ainsi que des négociations infructueuses, la question des quotas est toujours pendante. Avec les indigestes problèmes posés par le Brexit, « la migration », les conditions pour la limiter et la refouler, ont encore constitué le plat de résistance au menu du « sommet » européen de  Salzbourg débuté le 19 septembre. Un titre sur le monde.fr, « Crise migratoire : ‘’les divergences persistent’’ entre Européens au sommet de Salzbourg » (6), en résume les piètres résultats.   
« La montée des populismes »  à la Une à l’approche des européennes
Cette montée, attisée par la « crise migratoire », inquiète les « défenseurs de l’Europe », perturbe les partis prétendant les représenter et mobilise les médias. Des centaines d’articles traitent du sujet, avec une densité qui croît à 8-9 mois des européennes. Grâce à cette mine d’infos, on peut découvrir (ou vérifier) que, désormais, de la Finlande et la Suède jusqu’à Malte et Chypre, des partis et des mouvements populistes sont présents et actifs dans tous les pays. Aux dernières élections législatives, les partis d’extrême-droite ont réalisé des scores de : 27 % en Autriche (2017), 22,3 % en Italie (2018), 21,1 % au Danemark (2015), 19,6 % en Hongrie (2018), 17,6 % en Suède (2018) et en Finlande (2015), 16,6 % en Slovaquie (2016), 13,6 % en Pologne (2015), 13,1 % aux Pays-Bas (2017), 12,6 % en Allemagne… et seulement 8,95 % en France.
Notre attention est attirée aussi sur la prise du pouvoir de mouvements populistes en Italie et sur leur participation aux gouvernements de la Finlande ainsi que de l’Autriche où leur sont confiés trois ministères régaliens. En outre, des partis « ultraconservateurs », « proches » de l’extrême droite, sont au pouvoir en Pologne où « l’homme fort, Jaroslaw Kaczinski (Droite et justice) a « recentré » son parti, et en Hongrie, avec Victor Orban et son parti le Fidesz. Ces deux derniers sont mis en accusation par les instances de l’UE, et déjà à moitié condamnés par une majorité des 28 pour violations de l’état de droit dans leurs pays. Leurs cas « sulfureux » ont été copieusement médiatisés.
Elections :  des pronostics sans grands bouleversements
Depuis 2017, Poll of polls (POP) rassemble, analyse et agrège les résultats des sondages en vue des élections européennes de 2019 dans les 28 États de l’UE (7). La plus récente de ses « mises à jour », datée du 20 septembre, prévoit une répartition des 705 sièges du Parlement entre les groupes apparemment sans grandes surprises. Les « populistes » ne submergeraient pas l’UE et la hiérarchie entre les groupes ne serait pas bouleversée par le jaillissement de « forces nouvelles ».
Les deux groupes principaux, « traditionnels », reculeraient. Avec 186 députés, le PPE aurait 26,4 % des sièges du PE (contre 29 %). Moins résistant, le groupe S&D ne conserverait que 147 sièges, soit 20,9 % de ceux du PE (contre 25,2 %). Ensemble, ces deux citadelles ennemies ne seraient plus majoritaires, mais ne tomberaient sous les assauts.
Une chute du nombre d’élus du groupe ECR (droite et droite nationaliste) est attendue. Son ancrage plus profond dans les pays de l’Est, en Pologne en particulier (29 sièges), ne compenserait que très partiellement la perte des 26 sièges britanniques. ECR n’aurait ainsi que 52 sièges (contre 73 actuellement).
À contrecourant des préoccupations majeures environnementales, semble-t-il, le groupe de rattachement des Verts ne conserverait que 32 sièges (contre 52), dont 21 en Allemagne, aux Pays-Bas et en Belgique. Pourquoi ?
Parmi les 4 gagnants, l’ADLE (Démocrates et libéraux) aurait 71 sièges, soit 10 % de ceux du PE (contre 9,1 %).  
GUE/NGL (Gauche unitaire et Gauche verte nordique) gagnerait 3 sièges et en aurait 52, soit 7,4 % de ceux du PE.
Europe Nations et Libertés (ENL) gagnerait 17 sièges pour atteindre un total de 52, dont 13 Français et 28 Italiens.
Le groupe Europe de la liberté et de la démocratie (ELDD) directe gagnerait 3 sièges pour en occuper 45 au PE, dont 16 Allemands et 25 Italiens.
Ensemble, ces deux groupes « contestataires » déclarés et « populistes » présumés disposeraient ainsi de près de 13 % des sièges du Parlement européen. Ce serait un « fait marquant » de ces élections… qui n’apparaîtrait pas en contradiction avec leurs performances aux dernières élections législatives (cf.ci-dessus).
Enfin, Poll of polls a regroupé des partis, dont LaREM, sous la dénomination « Nouveaux partis non affiliés » (NUP). Cette nouvelle inconnue, avec 59 députés (dont 29 en France), ne bouleverserait sans doute pas le paysage du PE. Si la majorité de ces députés (dont ceux de LaREM) décidaient de s’associer ou de s’intégrer au groupe démocrate libéral ADLE, celui-ci renforcerait sa place de 3e groupe du PE.
Les « mises à jour »  à venir de ces prévisions montreront peutêtre de plus amples changements dans les huit mois à venir. Notamment parce que la « campagne » ne fait que commencer.
La tentative « d’orbanisation »  de la campagne des européennes 2019
Pas tout à fait. En réalité, Emmanuel Macron, fédéraliste partisan de plus d’intégration et mondialiste, a commencé sa croisade dès le lendemain de son élection. Il a multiplié les déplacements et les démarches pour rallier les chefs de gouvernement et de partis. Il a discouru pour se faire connaître en Europe et diffuser ses messages.   
Dans son long discours très médiatisé de la Sorbonne en septembre 2017, il avait « levé le voile sur ses intentions » et présenté son catalogue de mesures, « véritable programme électoral européen », avait-on lu il y a un an.  
Lors de son « grand oral » au PE à Strasbourg, en avril 2018 (après les frappes en Syrie), il avait actualisé et renouvelé en partie sa panoplie de préconisations et de mesures.  
Le 10 mai 2018, la mairie d’Aix-la-Chapelle lui a décerné le prix Charlemagne pour les intentions louables qu’il avait manifestées. Dans son discours de réponse au laudatio prononcé par Angela Merkel, il a répété ses appels à de profondes réformes, à un « multilatéralisme international fort », ainsi que ses demandes en faveur d’un budget européen beaucoup plus ambitieux, d’une zone euro plus intégrée dotée d’un budget propre. Il a redit sa préférence pour « une Europe à plusieurs vitesses ». Il a aussi condamné assidument le nationalisme et son « repli sur soi », qui s’opposent à la souveraineté européenne.  
Ses demandes ont connu une fin de non recevoir polie mais ferme. Merkel l’a d’ailleurs annoncé dans son discours à Aix-laChapelle. Elle a aussi prôné la recherche du meilleur équilibre entre souveraineté nationale et intégration. Avec une certaine réserve à l’égard de plus d’intégration. Macron et Merkel (l’Allemagne) ne sont pas sur la même longueur d’ondes. Il ne faut pas l’ignorer.
Du 7 avril au 13 mai, LaREM a lancé une « grande marche pour l’Europe ». Les Marcheurs auraient « frappé à « plus de 80 000 portes » et fait remplir plus de 80 000 questionnaires (8). Au fil des mois, notre président a pris la place d’animateur, seul ou presque, d’une campagne européenne anticipée. Très actif, il n’a pas caché son ambition de « faire émerger un nouveau mouvement politique progressiste en Europe d’ici la fin de l’année »… en s’inspirant de la méthode qui l’a porté au pouvoir en France. Sa tactique : « dynamiter » le bastion du puissant PPE, provoquer une scission de ce groupe qui, aux côtés de partis respectables de droite conservateurs chrétiens démocrates, héberge une « brebis galleuse », Victor Orban et son parti nationaliste, le Fidesz. Macron a sommé le PPE de « clarifier » sa position. Selon lui, « on ne peut à la fois être du côté de Merkel et d’Orban » (9).
Et Macron a déclaré la guerre à Orban ainsi qu’à ses amis nationalistes… et réciproquement. Il cherche à mobiliser derrière lui dans un affrontement Macron-Orban et à en faire un enjeu majeur, sinon l’enjeu principal des européennes de 2019. Il tente, ostensiblement,  « d’orbaniser » la campagne et de se présenter comme le chevalier le plus apte à terrasser le dragon qu’Orban incarnerait. Cela n’a pas échappé à « nos » médias, qui se sont empressés d’évaluer les forces en compétition, de décompter « les alliés de Macron et d’Orban en Europe » (10).  
Dans le camp d’Orban : - des alliés ont été identifiés : le Polonais Jaroslaw Kaczinski, l’Italien Matteo Salvini, Marine Le Pen, le Suédois Jimmie Akesson, le Néerlandais Geert Wilders, l’Allemande Alice Weidel et l’Autrichien Heinz-Christian Strache ; - des personnes proches mais réservées face au clivage ont été listées : Horst Seehofer, ministre de l’Intérieur allemand, Sebastian Kurz, Chancelier autrichien, Luigi Di Maio, ministre du Développement économique Italien, Andrej Babis, président du gouvernement tchèque.
Bref, les alliés d’Orban seraient les dirigeants des principaux groupes nationalistes et populistes, que Macron présente en effet comme les ennemis de l’Europe. Les autres « proches », soutiens potentiels d’Orban, seraient des ministres d’Allemagne, d’Autriche, d’Italie et de Tchéquie. Sans vouloir remettre en cause ces sélections, il me semble que manquent au moins des dirigeants de Bavière et de Slovaquie (autre État du groupe de Visegrad).
Dans le camp de Macron : - en tête des alliés, figurent JeanClaude Junker, président de la Commission, et Donald Tusk, président du  Conseil européen. Suivent cinq premiers ministres, ceux de l’Espagne, de la Grèce (Alexis Tsipras, leader du parti de gauche radicale Syriza), du Luxembourg, de la Belgique, de la Suède et du Portugal ; - les personnalités proches présumées sont Mme Merkel et trois premiers ministres, ceux de la Finlande, des Pays-Bas et du Danemark. Impressionnant !
Sauf que : Merkel et Junker sont des patrons du PPE. Il est douteux qu’ils soutiennent Macron dans son entreprise de démolition de leur groupe. Même si on leur passe la main dans le dos. Le Polonais Tusk, lui, n’est pas un fan du fédéralisme. En 2016, avant les élections britanniques pour ou contre le Brexit, il avait critiqué les « rêves utopiques » des militants du
fédéralisme européen : « D’abord parce que cela n’est simplement pas possible. Ensuite parce que cela nourrit le doute et l’euroscepticisme, et pas seulement au Royaume-Uni ». Ce 19 septembre, au sommet des 28 à Salzbourg, Donald Tusk a invité à en finir avec le « chantage sur la migration », ainsi qu’avec « ceux qui veulent tirer un avantage politique de la situation » (6). Il ne visait pas uniquement Matteo Salvini.    
On pourra aussi noter qu’« En Scandinavie, le malentendu perdure quant au projet macronien », selon le monde.fr du 5 mai (11).  « Malentendu » parait un euphémisme. Sur la scène européenne, le volontarisme de Macron agace les Scandinaves. « Les sociaux-démocrates suédois, par exemple, veulent discuter de la dimension sociale de l’UE, mais ne veulent pas d’initiatives supranationales », indique un chercheur en Suède. Ce pays, qui n’est pas dans la zone euro, s’inquiète d’une « Europe à deux vitesses ». Quant au Danemark, le Premier ministre libéral (classé dans les « proches » de Macron) a tenu à modérer les ardeurs européennes du président français après ses discours enflammés à la Sorbonne, puis devant le PE à Strasbourg. Pour lui, l’heure n’était pas « au grand projet d’intégration européenne » mais « au travail du rugbroad [pain de seigle danois, pour désigner le labeur quotidien] ». Ironique, un journaliste aurait ajouté «  Le gouvernement danois est terrifié à l’idée que la population puisse croire qu’il soutient cette position favorable à plus d’Europe ».  Le 23 avril, le quotidien suédois Dagens Nyheter « souhaite bonne chance au président Macron dans son projet français, même si cela ne lui ferait pas de mal de temps en temps de montrer un peu d’humilité », et « l’UE ne peut certainement pas fonctionner comme un one-man show ». Pour un autre journaliste, « Au Danemark, nous avons une démocratie consensuelle. La démocratie conflictuelle à la française est difficile à comprendre pour les Danois. Macron en est devenu le symbole… ».  
Ces réflexions seraient à méditer par nos « journalistes » encenseurs de Jupiter, qui rechignent à nous faire part des avis et positions des autres Européens quand elles ne portent pas aux nues leur dieu. En réalité, Macron rame à contresens de l’histoire de l’Europe, et il a très peu de vrais alliés pour résister au courant.
Il serait stupide et périlleux (pour l’Europe) que les européennes se concentrent ou, pire, se résument à un combat entre des extrêmes présumés, « intégristes » fédéralistes et mondialistes, d’un côté,  « populistes » nationalistes, de l’autre. Déjà chancelante, l’Union européenne ne s’en remettrait pas. L’heure n’est pas pousser à sa division. L’immigration n’est pas le seul problème en Europe. La défense est une priorité, alors que les États-Unis se désengagent de l’OTAN et que la Chine et la Russie organisent des manœuvres militaires communes. La guerre commerciale ouverte par Trump, contre la Chine, mais aussi contre l’Europe, devrait aussi préoccuper nos dirigeants. Il faut vite ramener à leur juste dimension les démêlés entre Macron et Orban et profiter de la campagne pour rechercher d’autres voies et moyens afin de reconstruire une Europe des nations et des peuples viable, amicale, plus démocratique, coopérative, et dynamique, comme le souhaitent de très nombreux Européens.
II. - En France, les enjeux nationaux sont toujours dominants
À l’ordre du jour : clarification de lignes politiques  et quête de têtes de listes
En France, c’est aussi Macron qui a ouvert les hostilités, très tôt, en modifiant les règles des élections européennes. Fini les listes régionales. L’élection se fera au niveau national, une liste « unique » de candidats étant présentée par chaque parti… comme avant les européennes de 2004. Pour qu’une liste puisse faire élire au moins un député, il faudra qu’elle ait recueilli au moins 5 % des votes exprimés.  
Ce retour avantage le parti du président, LaREM, qui n’a pas réussi à s’implanter dans les régions et qui aurait peiné pour trouver des têtes de listes connues et appréciées des populations dans ces régions.  
Avec une seule liste, Macron sera la seule effigie de LaREM, et sans doute un acteur actif de la campagne de son parti. LaREM aura tout de même intérêt à choisir une (des) tête(s) de liste qui ne soit pas un (des) repoussoir(s). L’idée de recourir à Daniel Cohn Bendit ne serait pas encore écartée, mais celles de mettre en avant une personnalité « populaire » de la société civile et/ou un « ticket paritaire » homme-femme (comme la France Insoumise (LFI)) sont aussi sur le tapis. L’appel aux candidatures pour former la liste a été lancé le 26 septembre.
D’autres partis piétinent également devant ces choix. C’est le cas chez les Républicains parmi lesquels l’orbanisation de la campagne a semé ou réchauffé des germes de divisions sur « la ligne » du parti et sur le sort à réserver à l’accusé Orban. Notamment entre Laurent Wauquiez, président de LR, présenté par « nos » médias grand public comme tenant d’une « droite dure », et Valérie Pécresse, qui a créé un mouvement « Libres » au sein de LR. De leur côté, les Juppéistes sont partagés. Les uns préfèreraient se rallier à LaREM, d’autres seraient enclins à soutenir LR, d’autres, encore, à former leur propre liste. Vu les chutes prononcées de Macron et de Philippe dans les sondages, Alain Juppé, lui, recommande d’attendre et voir.  
Au centre, François Bayrou voudrait montrer ses « différences », mais sans parler de détacher son Modem des troupes de Macron. Une acrobatie délicate ! De son côté, le chef de l’UDI Jean-Christophe Lagarde entend porter le projet fédéraliste européen, mais pour lui : « Une seule liste proeuropéenne pourrait transformer le scrutin en référendum » (12). Liste séparée « libre » à l’horizon, donc.
Au PS, la « ligne » serait objet de tergiversations. Trois poids lourds seraient candidats à l’investiture à la tête de la liste : le Commissaire européen Pierre Moscovici, Julien Dray, un proche de Hollande, et Christian Eckert. Un choix difficile, qui doit être cohérent avec celui de la ligne.
Pour son nouveau mouvement « Génération.s », Benoist Hamon a prévu de se prononcer en automne.  
Au RN (ex FN), il est assuré que Marine Le Pen ne sera pas tête de liste. Au début septembre, c’était l’intellectuel et homme
d’affaires Hervé Juvin qui était favori. Mais le choix de Louis Aliot ou de Nicolas Bay, coprésident du groupe ENL au PE, ne serait pas exclu.
Moins hésitants, ou plus avancés, plusieurs partis ont annoncé leurs têtes de listes : - les Verts d’EELV seront conduits par Yannick Jadot ; - le parti communiste le sera par Ian Brossat ; - à La France Insoumise (LFI) de Jean Luc Mélenchon,  un tandem formé par Michel Bompart et Charlotte Girard a été désigné, et chargé de faire de l’élection un référendum anti Macron ; - Nicolas Dupont-Aignan, patron de Debout la France (DLF), a déclaré le 23 septembre qu’il serait lui-même la tête d’une liste d’union, et a tendu la main vers les « déçus » de LR et de RN.  
Pour anticiper leur choix de fin mai 2019, une grande partie des électeurs n’ont donc pas encore la totalité des éléments susceptibles de les convaincre. Toutes les cartes n’ont pas encore été distribuées. Pour autant, depuis des mois, les Français ne manquent pas d’être sollicités par les sondeurs.
Sondages européennes :  érosion de LaREM et montée du RN… notamment
Poll of polls suit attentivement les sondages sur les intentions de vote aux européennes réalisés en France. Dans sa livraison du 9 septembre 2018 (13), son site nous révèle, ou nous rappelle, qu’entre mai et août, LaREM aurait perdu 12 % des intentions de vote exprimées par nos électeurs. En effet :
- le 11 mai 2018, d’après le sondage ViaVoice, LaREM était à son apogée avec 32 % d’intentions de vote exprimés, contre 14 % au RN, 12 % à LR et 9 % à LFI ;
- LaREM aurait ensuite décliné jusqu’à 23% au sondage IfopFiducial du 27 juin, serait remontée à 26 % au sondage Ipsos du 2 juillet (avant l’affaire Benalla), puis rechuté à 20 % au sondage Ifop- Fiducial du 19 août ;
- pendant ce temps, ses adversaires auraient progressé, jusqu’à 17 % pour  le RN, 15 % pour LR et 14 % pour LFI.  
Plus récent, le sondage Odoxa-DentsuConsulting, dont les résultats ont été publiés le 13 septembre (13) montre LaREM, avec 21,5 % des « intentions de vote exprimées », au coude à coude avec le RN, à 21 %. Derrière, Les Républicains seraient à 14%, La France Insoumise à 12,5 %. Nettement plus bas se trouveraient Debout la France, à 6 %, devant les Verts, à 5 %, puis le PS de Faure à 4,5 %, Génération.s de Hamon à 4 %, l’UDI à 3 %. En dessous, cinq des 14 partis « candidats présumés » recueilleraient 1 ou 1,5 % des votes.  
Cette dissémination de nombreuses candidatures serait particulièrement nuisible aux Socialistes de Benoist Hamon et à ceux d’Olivier Faure, qui ne seraient pas assurés d’atteindre le seuil de 5 % des votes et de faire élire un seul des 79 futurs députés français. Quant aux suivants, leur participation leur permettrait de participer aux débats, mais les laisserait en dehors du PE.
À ce sondage, une question complémentaire a été posée : Parmi les grands domaines suivants, quels sont ceux qui compteront dans votre vote aux élections européennes. 9 « domaines » ont été proposés à leurs choix. Les sondés ont eu droit à deux réponses. Aucune question ne porte explicitement sur « l’Europe et la construction européenne ». 11/200 des sondés ont relevé cette absence. Même « L’identité française », listée, peut intéresser des Corses, des Basques, des Calédoniens… mais en quoi peut-elle concerner les Français dans l’UE ? Parlons plutôt de « souveraineté » pour poser réellement une question actuelle de l’UE. En quoi le pouvoir d’achat, le chômage, la santé, l’éducation et la fiscalité sont-ils des problèmes « européens » en France ? Ces critiques étant faites, il n’est pas surprenant de voir qu’en tête des préoccupations des sondés se trouvent le pouvoir d’achat (35/200 des réponses) et l’immigration (32), suivis par la sécurité et la lutte contre le terrorisme (27), et l’environnement (22). On pourrait s’étonner de ne trouver le chômage qu’à 14 et la fiscalité à 11. Étranges ce questionnaire et les réponses décomptées… qui laissent entendre, ou présager, que les résultats de « nos » européennes dépendront essentiellement de considérations francofrançaises.
En difficulté, la Macronie durcit ses attaques  et veut orbaniser la campagne
Présentant les résultats du sondage publiés le 13 septembre, lefigaro.fr a affiché «  Macron prépare un duel avec Le Pen » (14). Un titre accrocheur ! Pourtant, ni Macron, ni Le Pen ne seront têtes de listes. Il n’y aura pas de duel, car il n’y aura pas de second tour. Cependant, il est vrai que Macron tente de « réduire » ces européennes à un affrontement entre des « progressistes réformateurs », qui se grouperaient derrière lui, contre les populistes d’extrême droite xénophobes, nationalistes nuisibles à la France et anti-européens du RN. Les autres partis de gauche ou de droite seraient « écrasés », ou « siphonnés » entre ces deux opposants. Il rêve de rejouer le second tour des présidentielles de 2017. Dans son jeu, division et braquage des Français ainsi que des Européens les uns contre les autres sont des « atouts » maîtres. Pour nous en convaincre, « Castaner s’en prend à Salvini, Orban, Le Pen et Wauquiez, les ‘’pyromanes de l’Europe’’ a-t-on encore pu lire le 27 septembre  (3). Le 26, clamant « Contrairement à eux, je n’ai pas l’Europe honteuse », il les a attaqués violemment devant des militants LaREM en les qualifiant d’ « ennemis de l’Europe » et d’ « ennemis des peuples d’Europe ». Invectiver, diaboliser encore et encore ! Si les oppositions usent du même ton et d’arguments de la même qualité, la campagne risque de virer au pugilat et de dégouter la majorité des Français, qui se déplaisent déjà de plus en plus dans ce « nouveau monde ». Est-ce le but recherché ?  
Les résultats de la politique de Macron  et leur perception seront décisifs
Les résultats de la politique de Macron et la cote de popularité qui les accompagnent ont un impact presque immédiat sur les scores de LaREM dans les sondages sur les intentions de vote aux européennes.
En  ce qui concerne la popularité, Macron totalisait 64 % d’opinions favorables en juin 2017 (15). Au début de mai 2018, il en avait perdu 21 % et bénéficiait encore de 43 % d’opinions favorables. Son image de président des riches était ancrée. Cependant, 40 % des sondés se disaient prêts à attendre pour juger (16). Cette patience était présentée comme une victoire dans son camp et par certains médias. De courte durée !
En septembre 2018, « le chef de l’Etat chute à 29 % d’opinions positives… 70 % des Français se disent mécontents de son action ».  Edouard Philippe, lui est descendu à 34 % d’opinions favorables (15).
Un autre sondage de septembre (17) faIt État d’un « bilan négatif » d’Emmanuel Macron « pour 60 % des Français ». Seulement 19 %  trouvent le bilan positif. C’est l’impatience qui domine, devant l’absence de résultats. Le non-respect de ses engagements de campagne est aussi une cause de son recul, avec le renforcement de son image de président des riches. Seulement 21 % des Français l’estiment capable de rassembler les Français. J’ai indiqué dans le préambule les attentes principales en France… qui lui demanderaient de redresser la barre. Mais, il ne cesse d’affirmer qu’il n’est pas question de changer de cap. Quand on « réforme », on serait « forcément impopulaire ». Aucune importance, donc. Sauf que, dans la plupart des cas, c’est parce que les réformes en question ne sont pas bonnes qu’elles sont impopulaires… et qu’elles affaiblissent plus ou moins vite le Pouvoir.   
Encore un souci ? « Les patrons doutent de plus en plus de Macron », selon un sondage OpinionWay publié le 27 septembre (18). C’est la dégringolade depuis l’enquête de juillet. Pas plus de 36 % des patrons ont maintenant une opinion favorable sur l’action de Macron. Malgré les cadeaux. Leur enthousiasme aurait été « douché » par la réforme sur la formation et l’apprentissage, ainsi que par la « probable » instauration d’un bonus-malus sur les contrats courts. Il ne resterait que 46% des patrons à considérer que le gouvernement donne la priorité à la flexibilité qu’il a promise. Et, « plus inquiétant pour l’exécutif », 88 % des patrons affirment ne pas connaître le contenu de la loi Pacte, un monument de 244 pages, bourré de bienfaits pour les entreprises (parait-il), qui se discute actuellement à l’Assemblée nationale. Comme quoi un excès de réformes désordonnées et précipitées, visiblement mal expliquées, de surcroit, peut donner le tournis, même aux têtes bien faites des patrons. Pas surprenant, surtout avec une « com » vouée essentiellement à la propagande.
Juste un mot sur le prélèvement à la source (PALS), que les patrons accepteraient sans trop rechigner. D’après une étude de YouGov (19), 49 % des Français estiment qu’ils sont mal informés sur les modalités pratiques et les enjeux du passage au PALS, et six sur dix pensent que les entreprises sont insuffisamment préparées. 45 % des Français craignent des bugs lors de sa mise en application le 1er janvier 2019. Ces craintes sont tout à fait justifiées.
À noter que les « réformes » et autres mesures ont porté atteinte aux pouvoirs d’achat. « Et pendant ce temps, le chômage montait, montait », a titré un article sur contrepoints.org le 29 septembre (20). Le nombre de chômeurs de catégories A, B et C vient de battre un record historique avec 5,66 millions de demandeurs d’emplois inscrits. Soit 100 000 de plus qu’au lendemain de l’élection présidentielle de 2017… dont 60 000 personnes de plus de 50 ans. Leur nombre atteint 1,4 million. L’accélération de la révolution numérique n’y serait pas pour rien. On peut donc être presque assurés que la campagne des européennes 2019 ne sera ni exclusivement « européenne », ni très sereine et apaisée. Constructive, malgré tout ?
PS : dernière minute
Paniqué, Macron essaie de retourner sa veste. Cela ressort de l’article du 30 septembre sur lefigao.fr intitulé « Européennes : Macron va s’impliquer » (21). « C’est un combat de civilisation, un combat historique, et je ne cèderai rien aux extrêmes », dit-il.
« Je crois au retour des peuples. Je ne suis pas un européiste, ni un mondialiste. Je crois à l’identité forte de chaque peuple, je crois à l’histoire et à l’ambition de notre peuple. Je veux le convaincre que l’Europe, c’est ce qui l’accompagne, le protège. Je suis là pour tourner la page d’une Europe ultralibérale, mais aussi pour éviter la page d’une Europe des nationalismes. L’Europe, c’est notre protection. Encore faut-il la repenser et la rebâtir ». Avec ce revirement opportuniste, ce changement de cap motivé par son isolement, Il porte un coup sévère, sinon fatal, à sa sincérité présumée et à sa crédibilité. Que peuvent croire les Européens après ses discours enflammés pour plus d’Europe ? Caricaturé en Pinocchio avec le nez qui s’allonge ? Il va provoquer l’incompréhension, la colère et/ou les lazzis de ceux qui n’oublient pas ses prêches pour un « multilatéralisme international fort », un budget européen beaucoup plus ambitieux, une zone euro plus intégrée dotée d’un budget propre, « une Europe à plusieurs vitesses », ainsi que contre ceux qui « s’opposent à la souveraineté européenne. Ils observeront son ambition, sans doute plus que celle de « notre peuple ».

Sources et références

(1) « Vers une nouvelle composition du Parlement européen en 2019 », occitanie-europe-eu/vers…, le 15/02/2018.
(2) europarl.eu/meps/fr/crosstable.html, juillet 2018.   + europarl.europa.eu/elections2014-results/fr/election-re…, le 01/07 2014.   + fr.wikipedia.org/wiki/Groupe-politique-du-parlement..., 2018.   + fr.wikipedia.org/wiki/Liste_des_deputes_europeens_de_France_de_la_8e_legislature, 2018.
(3) « Castaner s’en prend à Salvini, Orban, Le Pen et Wauquiez, les ‘’pyromanes de l’Europe’’»,  lefigaro.fr/politique/2018/09/26/01002…
(4) intérieur.gouv.fr/Elections/Les-resultats-des-elections-européennes-2014.
(5) robert-schuman.eu/fr/questions-d-europe/04612-europe-2050-suicide-demographique    le 12/02/2018.
(6) lemonde.fr/europe/article/2018/09/21/union-europeenne…
(7) Poll of polls-European, Union-EU Parliament,30 09 2018-html.
(8) liberation.fr/direct/element/grande-marche…  le 04/06/2018.
(9) actu.orange.fr/France/en-pre-campagne-pour-les-europeennes-macron-recoit-merkel, le 07/09/2018.
(10) lemonde.fr/europe/article/2018/09/06/infographie-les allies-de-macron-et-d-orban-en-europe.
(11) lemonde.fr/europe/article/2018/05/07/en-scandinavie-le malentendu…
(12) lopinion.fr/edition/politique/jean-christophe-lagarde…, le  07/06/2018.
(13) lefigaro.fr/politique/2018/09/13/01002-20180913…
(14) pollofpolls.eu/FR/53/european-parliament-election-2019-in-france    le 09/09/2018  (3) lefigaro.fr/politique/2018/09/26/01002-20180926A…
(15) « Popularité : Macron poursuit sa chute dans les sondages », actu.orange.fr/politique/popularite-emmanuel…, le 23/09/2018.
(16) « Emmanuel Macron a perdu 20 points de popularité en un an… », rtl.fr/actu/politique/emmanuel…, le 04/05/2018.
(17) « Emmanuel Macron : un bilan négatif pour 60 % des Français », lefigaro.fr/politique/le-scan/2018/09/16/25001…
(18) « Les patrons doutent… », lefigaro.fr/conjoncture/2018/09/27/2002…
(19) « Prélèvement à la source : près de la moitié des Français craignent des bugs en janvier », le figaro.fr/conjoncture/2018/09/27/2002…
(20) contrepoints.org/2018/09/29/326293-et-pendant…
(21) lefigaro.fr/flash-actu/2018/09/30/97001…

© 05.10.2018
Retourner au contenu