Un référendum pour faire quoi ? A. Belon - Académie du gaullisme

Académie du Gaullisme
Président Jacques Myard
Secrétaire générale Christine ALFARGE
Aller au contenu
Un référendum pour faire quoi ?
         
       
         
Référendum ? Sur quel sujet ? Plusieurs pistes avaient   auparavant été diffusées grâce à la presse, mais elles semblaient soulever   des débats internes et des contradictions difficiles. C’est alors que   l’éclair de génie est apparu : seule la question du climat pouvait   susciter un large soutien populaire. Elle reposait sur un problème assez   largement reconnu comme un défi majeur. Elle séduisait la   jeunesse. Elle inquiétait les plus âgés. Elle soulevait l’enthousiasme de la   presse conforme et même les sceptiques n’osaient pas trop monter le bout de   leur nez. La bonne idée quoi !
Alors que la tenue même du référendum est encore incertaine, que le   texte qui devrait être soumis à débat n’a pas été rédigé, il peut donc   paraitre absurde et présomptueux de prendre position pour le NON. Je vais   pourtant le faire. C’est qu’en effet, ce n’est pas le fond de la question,   c’est le principe même de la démarche qui pose un problème tout à fait   fondamental. Principe en contradiction avec le combat que nous menons depuis   plus de 13 ans pour la reconstruction du peuple souverain et d’institutions   fondées sur sa souveraineté. Et, justement, la question climatique ne saurait   être traitée hors de celle de la reconstruction démocratique.
Ce ne fut pas la   préoccupation majeure jusqu’ici. Le premier acte face au défi climatique fut   la « Convention citoyenne pour le climat » qui, par l’intermédiaire   d’individus prétendument représentatifs et d’experts   savamment choisis, permettait d’ignorer le suffrage universel. Mais comme il   faut quand même se soumettre à ce pilier de la démocratie -pour combien de   temps encore ? -, Emmanuel Macron envisagerait un référendum non sur des   mesures précises mais sur l’inscription de la question climatique en   l’article 1 de le Constitution, ce qui lui semble plus rassembleur.
Il s’agirait donc   d’une révision de la loi fondamentale sur un terrain choisi par le Président   de la République et qui, de façon corolaire, lui permettrait de réaffirmer   une légitimité qui semble lui échapper, à supposer qu’elle ait vraiment   existée.
Pourquoi dire   NON ?
La Constitution   est une chose globale et fragile. Globale parce qu’elle règle l’ensemble de   la vie publique. Fragile parce qu’elle définit un équilibre des pouvoirs dont   la base est la souveraineté du peuple (article3). Or, cet équilibre est   devenu une incantation plus qu’une réalité. Tout particulièrement,   l’offense faite au peuple Français par la signature du Traité de Lisbonne (en   violation du referendum du 29 mai 2005) a imposé la question du pouvoir   politique démocratique, de sa source et de son titulaire. Face à cette   interrogation, tous les gouvernements successifs ont effectué des   modifications constitutionnelles dans le vain espoir de retrouver la   confiance et une légitimité bien affaiblie.
  
L’enjeu   climatique, pas plus que les questions économiques et sociales,   ou sanitaires, ne doit pas faire les frais de manœuvres politiciennes. On   sait d’ailleurs que la Charte de l’environnement est d’ores et déjà intégrée   au « bloc de constitutionnalité » et qu’aucun vide juridique   n’existe à ce sujet. L’initiative présidentielle rappelle qu’aucun grand   enjeu, aussi essentiel soit-il, ne saurait être isolé de la question fondamentale,   à savoir la reconstruction d’une démocratie   désormais limitée autant sur l’espace national que sur l’espace européen. Et   le soutien nécessaire du peuple Français face aux défis ne peut être retrouvé   en isolant les questions et par des méthodes arbitraires.
Certains aiment la   Constitution de 1958, d’autres pas. Sa version actuelle, fruit de 24   modifications, la plupart d’ailleurs sans appel à la volonté des   citoyens, ressemble bien peu au texte initial ratifié par les Français. Il   est de plus en plus apparent que la Constitution actuelle est inadaptée.   Quant au fameux « Etat de droit », il consiste davantage à   renforcer les pouvoirs du Conseil constitutionnel et de la Cour de justice de   l’Union européenne qu’à la réaffirmation des règles démocratiques.
Dans de telles   conditions, réviser une nouvelle fois la loi fondamentale servirait surtout à   consolider le pouvoir, déjà hypertrophié, de l’exécutif et d’instances non   élues au lieu mobiliser les Français face aux défis.
Quelle proposition ?
Le système   politique est en crise, à bout de souffle. Les citoyens ne sont plus   représentés, reconnus, respectés. Il ne s’agit pas de modifier les règles   constitutionnelles par le fait du prince ni de tenter de faire avaliser un   bricolage institutionnel par un référendum au rabais qui aura évité les   questions fondamentales : Où est le pouvoir ? Où est passé la   démocratie ? Où est la légitimité ? A quoi servent les élections   dans le cadre institutionnel actuel ?
Un référendum ne   saurait servir à contourner ces questions. Si on veut respecter le peuple, il   faut redonner son sens à la souveraineté du peuple, par le peuple et pour le   peuple.
C’est pourquoi il   faut dire avec sérénité, mais fermeté :
NON AU REFERENDUM
OUI A L’ELECTION   D’UNE ASSEMBEE CONSTITUANTE !
*André BELLON Président de l'Association pour   une Constituante, ancien président de la Commission des   affaires étrangères de l'Assemblée nationale.
       

© 01.02.2021

Retourner au contenu