COMPTE-RENDU DU DÎNER-DEBAT DU 13 DECEMBRE 2016

En présence de Monsieur JACQUES NIKONOFF

Pourquoi une VIème république ?

 

Par Christine Alfarge

 

« Repenser l’Europe, sans doute un jour où l’autre mais les conditions ne sont pas réunies ».

 

La Constituante.

De nouveaux arguments militent pour la VIe république même s’il y a quelques qualités à la Vème, sa stabilité. La Vème république a-t-elle atteint le point limite de son dysfonctionnement ? La difficulté avec laquelle elle affronte le changement de société peut le laisser penser. Ainsi qu’en est-il face à une croissance économique insuffisante, au chômage exponentiel, au déséquilibre du commerce extérieur, un pouvoir d’achat faible et une violence urbaine grandissante ? Ce à quoi s’ajoute la place de la France dans l’Union européenne et sur la scène internationale à la suite du rejet du traité établissant une Constitution pour l’Europe.

Le fond du problème, c’est une erreur de diagnostic, on veut faire croire que le changement de société français viendrait de sa constitution, erreur d’analyse selon le point de vue de Jacques Nikonoff :« C’est un alignement des partis sur des politiques néolibérales ». Il ajoute : « Changer de république ne peut se faire qu’à partir d’un diagnostic sous trois conditions pour une constituante ».

Etre dans un pays souverain.

Sinon comment changer la constitution d’un pays qui ne serait pas souverain ? On passerait du droit interne au droit communautaire selon l’article 3 du Traité de Lisbonne contenant des compétences exclusives à la main de l’Union européenne avec une transposition des actes juridiques dont 70% à 80% en résulteraient. Différents traités internationaux supportent des institutions multilatérales dont le but est de maintenir l’ordre néo-libéral. « Peut-on changer de constitution si on ne redevient pas indépendant ? Personne n’alerte de cela », selon Jacques Nikonoff.

Un contexte politique grave.

Les constitutions précédentes sont issues de mouvements révolutionnaires. A chaque fois qu’il y a une situation particulière, il faut une dynamique historique.

Enfin « une dimension sociale », une vision partagée par le peuple. Comment mobiliser les foules sur du vide ? Selon Jacques Nikonoff : « Le moment n’est pas venu, nous aurions la même reproduction des partis ». Aussi est-il évident qu’une simple révision constitutionnelle du régime politique de la Vème république ne saurait suffire à permettre à la France de maîtriser le changement de société auquel elle est confrontée. Cependant, elle devra redéfinir les rapports de l’Etat avec les collectivités territoriales ainsi qu’avec l’Union européenne et qu’elle opère une véritable reconversion de ses relations avec la société civile. Ce qui implique un nouvel équilibre entre démocratie représentative et démocratie participative. Jacques Nikonoff indique « le vote blanc doit être reconnu et converti en élu tiré au sort ».

Révision du statut du président.

A l’approche de l’élection présidentielle, n’est-il pas surprenant que l’on s’interroge sur la capacité du régime à prendre des décisions. « Il faut changer le statut du président de la république mais pour que l’élection soit une véritable élection populaire, il faut préserver le suffrage universel direct » selon Jacques Nikonoff.

1er argument : Retirer au peuple ce droit, serait un séisme populaire. Imaginez la population qui se verrait confisquer cette désignation, la seule élection où les Français voient la réaction immédiatement.

2ème argument : Pour l’élection au suffrage universel direct du président, la France aura besoin d’une légitimité parce qu’il y aura un besoin de stature et de légitimité par rapport à la mondialisation néo-libérale (OTAN, FMI…). Il faut un président qui soit un président qui fixe et remette au cœur des institutions la reconstruction de la nation française.

Un système obsolète.

Il faut réviser la constitution pour permettre de redonner du pouvoir au peuple. Eliminer le titre 15 de l’Union européenne dans la Constitution. Des obligations doivent passer à des droits papiers à vocation universelle.

Les modalités électorales.

Tenir toutes les élections le même jour pour une durée de quatre années sans cumul. Deuxièmement, modifier les élections législatives à un tour avec un bonus pour celui qui arriverait en tête. Si aucun n’atteint 40%, il faut au moins 251 sièges. Quant au président, il doit se polariser sur les affaires internationales.

Sur l’idée de modifier la Constitution, comment répartir les pouvoirs ? Etablie en 1958 par un Etat souverain et centralisé, la Constitution de la Vème république a de plus en plus de difficultés structurelles dues à la superposition et l’enchevêtrement des niveaux de prise de décision. L’adjonction aux collectivités communales et départementales des communautés d’agglomérations et des régions, certes justifiée mais, non accompagnée d’une refonte générale de la décentralisation, a rendu très difficile la répartition des tâches entre ses différentes entités.

Aujourd’hui la réalisation de la plupart des investissements collectifs provient de financements croisés auxquels s’ajoutent ceux de l’Etat et de la Communauté européenne. Est-ce un retour au parlementarisme ? En réponse, Jacques Nikonoff dit : « La Constituante sera une constitution comme les autres, élue en partie par le tirage au sort ». Il précise : « qu’il faut se débarrasser des institutions mais rechercher la coopération des nations ».

Au-delà du niveau étatique, a surgi depuis plus d’un demi-siècle le niveau européen et l’articulation entre les deux n’a pas vraiment trouvé son équilibre. Selon lui, « La démondialisation est en cours ». Jacques Nikonoff qui n’est pas gaulliste s’exprime « On ne peut pas faire parler les morts. Je ne sais pas si Charles de Gaulle aurait été un démondialisateur, je suis persuadé qu’il aurait été fidèle à la souveraineté de la nation et à l’indépendance de la France. De Gaulle a toujours été convaincu que les relations internationales reposaient avant tout sur les réalités nationales et les rapports entre les Etats ». Il souhaitait ardemment une « Europe des nations » allant « de l’Atlantique à l’Oural », celles-ci devant conserver leur pleine souveraineté et leur personnalité historique et culturelle ».

Citant le Général de Gaulle : « Si vous voulez que des nations s’unissent, ne cherchez pas à les intégrer comme on intègre des marrons dans une purée de marrons. Il faut amener leurs gouvernants légitimes à se concerter, et un jour, à se confédérer, c’est-à-dire à mettre en commun certaines compétences, tout en restant indépendants pour tout le reste ».

 

 

© 07.01.2017