par Paul KLOBOUKOFF
Pour éviter des méprises, il est utile d'apporter des précisions sur les définitions du chômage et
ses évolutions. Car les informations qui sont livrées au public le sont tantôt
en termes de nombres de « demandeurs d'emploi de catégorie A » inscrits à Pôle
emploi, tantôt en termes de « taux de chômage au sens du BIT », qui ne sont
forcément en concordance, et se sont plusieurs fois trouvés en contradiction.
Une courte rétrospective révèle des surprises.
Un regard sur les perspectives de croissance, d'emploi et de
chômage en 2016-2017, montre qu'elles sont incertaines et changent de mois en
mois dans les prévisions françaises et internationales. Pas dans le bon sens en
ce début d'année. Mais, l'évolution démographique sera encore favorable à la
limitation du chômage. Alors, suspense ?
L'examen de la politique de lutte contre le chômage conduite
depuis mai 2012 a pour but, ensuite, de mieux comprendre les raisons de
l'inefficacité observée jusqu'ici, et de regarder ce qu'elle porte pour 2016 et
2017.
On sait ou on soupçonne que La France ne peut avoir de
stratégie de développement (agricole, industrielle...) indépendante, sur
mesure, principalement en raison des contraintes qu'imposent l'Union européenne
(UE) et les autres traités internationaux, ainsi que de sa dépendance des
multinationales (cf. mon article précédent). Aussi, nos gouvernants ont
beaucoup compté sur la croissance de l'économie mondiale pour relancer les exportations,
la croissance et l'emploi. De son côté, l'UE a fait le nécessaire pour inonder
la zone euro de liquidités, « dévaluer »
l'euro et maintenir de maladivement bas taux d'intérêt.
Dans les plans et les mesures que nous allons passer en
revue, les aides à l'investissement pour la croissance et la compétitivité ont
été essentiellement celles du Crédit
impôt compétitivité emploi (CICE).
Préférée à une franche réduction des cotisations sociales patronales, complexe,
mal ficelée, s'adressant peu aux entreprises exportatrices, cette «usine à gaz»
a produit peu de résultats en termes d'investissement et d'emploi.
À côté du CICE, la politique a visé à abaisser le coût du
travail et à aider financièrement les embauches par les PME et les toutes
petites entreprises (réputées créatrices d'emplois). En même temps, elle a
ciblé les aides sur les bas salaires et les faibles qualifications. Les
entreprises ont été incitées à recruter ou à conserver leur personnel, que
leurs marchés croissent, stagnent ou rétrécissent. Avec des effets d'aubaine
créés, cela a conduit à soutenir surtout les entreprises tournées vers le
marché intérieur, dans les services et, en particulier, dans les services à la
personne.
Les contrats aidés ont continué d'apporter leur concours aux
embauches, souvent de durée limitée, surtout par les administrations et les
services.
Jusqu'au plan de la dernière chance de F. Hollande de janvier
2016, un usage trop modéré a été fait de la formation professionnelle et
surtout de l'apprentissage.
De nombreuses mesures ont été vouées à «flexibiliser»
l'emploi, à fluidifier le marché du travail, à « assouplir », à libéraliser
(tous azimuts), à lever des contraintes «pesant» sur les entreprises, en
matière de contrats de durée déterminée (CDD), d'horaires, de salaires,
d'indemnisation des salariés licenciés, d'obligations sociales et fiscales
relevant de la réglementation des seuils sociaux... Des mesures contestées par
les syndicats et les « frondeurs ».
Il a été vérifié que sans croissance et dynamisme des
marchés, des dispositions de ce type ne pouvaient pas entraîner une véritable
relance de l'emploi.
Le changement pour le changement, ou pour effacer les traces
du passage de Sarkozy ? Ces questions
ont été posées. On a pu se demander, par exemple, quel sera l'apport contre le
chômage du remplacement du RSA activité et de la prime pour l'emploi par une
prime d'activité, qui sera distribuée par la
Caisse d'Allocations familiales (CAF) dès 2016 et dont le montant
dépendra de la composition et des ressources du foyer. Curieux mélange des
genres !
L'instabilité, érigée en système de gouvernance, et la
dispersion font partie des raisons majeures de l'échec. Un «environnement»
législatif, réglementaire, économique,
social et fiscal en perpétuel changement
est, évidemment, très défavorable à l'initiative, à la prise de risque, à
l'embauche, à l'investissement, qu'il soit français ou étranger. Le manque de
confiance s'installe, s'incruste. La dispersion d'un grand nombre de mesures,
en partie de redistribution, de promotion de la concurrence et de la
privatisation, dont la relation avec la création d'emplois n'est pas évidente,
et l'apparente absence de vision d'ensemble ont suscité l'incompréhension et la
méfiance. L'avalanche de « réformes »
polémiques a aussi pu être accusée d'entourer de brouillard
l'impuissance du Gouvernement.
Au lecteur de se faire sa propre opinion.
I - Des désaccords
entre les différentes mesures du chômage
Le temps partiel, les formations et les
contrats aidés ont réduit le « chômage »
Les informations les plus rapides diffusées chaque mois sur
le chômage portent sur les demandeurs d'emploi inscrits en fin de mois à Pôle
emploi. Ces derniers sont classés en cinq catégories. Ceux des trois premières
sont tenus de rechercher activement un emploi. Ceux de la catégorie A, sont
sans emploi. En France métropolitaine (FM), il y en avait 3.638,5 milliers (mi)
en décembre 2015. En catégories B et C sont inscrites des personnes en activité
réduite, courte ou longue : 727,3 mi en cat. B (78 heures travaillées ou moins
dans le mois), et 1.185,5 mi en cat. C (plus de 78 heures travaillées dans le
mois). Dans les deux catégories suivantes, se trouvent des personnes non
disponibles immédiatement pour l'emploi : 287 mi en cat. D, en formation, en contrat
de sécurisation professionnelle ou en maladie ; 420,5 mi en cat. E, en cours de
création d'entreprise ou en contrat aidé (1).
Au total, les demandeurs des cinq catégories étaient 6.259,2
milliers en FM en décembre 2015. Pour la France entière, 335 mi personnes de
plus étaient enregistrées.
Le nombre de « demandeurs » de catégorie A est surveillé
comme le lait sur le feu. Les évolutions des effectifs par classes d'âge, avec,
en particulier, les jeunes et les seniors, sont observées avec attention.
Moins connu, le nombre total des demandeurs des cinq
catégories est cité surtout par des
politiciens ou des syndicalistes
pour rappeler que l'indicateur précédent est très partiel et peu «
significatif ». Non sans raisons.
En France métropolitaine, entre mai 2002, début du second
mandat de Jacques Chirac, et décembre 2015, le nombre de chômeurs de cat. A est
monté de 2.373 mi à 3.639 mi, soit de + 53,4 %. Mais, le nombre total
d'inscrits dans les cinq catégories a crû d'avantage, de 3.661 mi à 6.259 mi,
soit de + 71 %... car celui des quatre catégories B, C, D, E a doublé,
s'élevant de 1.288 mi à 2.621 mi en décembre 2015. Le nombre des employés à temps partiel
inscrits à Pôle emploi a atteint 1.913 mi en décembre 2015, soit 52,5 % du
nombre de ceux de la catégorie A (contre
42,1% en mai 2002). En cat. B (temps partiel court), l'effectif a crû de
409 mi à 728 mi (soit de + 77,8 %) ; en
cat. C (temps partiel long), il a doublé, passant de 591 mi à 1.185
milliers.
Parenthèse : le nombre total de personnes employées à temps
partiel, dont la majorité souhaitent travailler plus et sont disponibles pour
le faire, est beaucoup plus fort. En 2014, il était de 4,87 millions, soit 18,9
% des 25,8 Mi d'emplois occupés, ce taux étant nettement plus élevé chez les
femmes que chez les hommes (2).
L'évolution des
effectifs des catégories D et E, autres indicateurs (partiels) de l'engagement
de l'État dans la lutte contre le chômage, montrent un effort croissant, mais
limité, en faveur de la formation et une forte propension à recourir aux
emplois aidés et au soutien des chômeurs pour la création d'entreprises. En,
effet, de 169 mi en mai 2002 à 287 mi en
décembre 2015, l'effectif de la cat. D s'est accru de + 70 %, tandis que celui de la
cat. C a été multiplié par 3,5 passant de 119 mi à 421 mi.
Un chômeur bénéficiant d'une formation ou d'un contrat aidé
quitte le chômage en migrant de la
catégorie A vers la D ou la E. Des médisants ont donc pu imaginer que la décision de F Hollande de
porter le nombre de formations de chômeurs de 200.000 à 500.000 était un
subterfuge utilisé pour aider à inverser la courbe du chômage en 2016.
Moins de « chômage au sens du BIT », et un taux
de chômage moins déprimant
Pour effectuer des
comparaisons avec d'autres pays, il faut se conformer aux normes édictées par
le Bureau international du travail (BIT) pour lequel un chômeur est une
personne en âge de travailler (d'au moins 15 ans), sans emploi, disponible pour
prendre un emploi dans les 15 jours, qui a cherché activement un emploi dans le
mois précédent ou en a trouvé un qui commence dans moins de trois mois. Un tel
chômeur ne doit pas forcément être inscrit à Pôle emploi et peut avoir un
profil différent de celui de catégorie A.
Les données sur le chômage proviennent d'une enquête
trimestrielle Emploi réalisée en continu. En France métropolitaine, elle
s'adresse à environ 67.000 ménages ordinaires. Elle couvre aussi les
départements de Guadeloupe, de Guyane, de Martinique et de La Réunion. Les
résultats en termes de nombres de chômeurs et de taux de chômage (nombre de
chômeurs/population active) sont publiés trois mois après la fin de l'enquête
(3). En France métropolitaine, les
nombres de chômeurs au sens du BIT étaient de 1.998 mi au 2e trimestre (T2) de
2002, de 2.154 mi au T2 de 2007, de 2.584 mi au T2 de 2012 et de 2.941 mi au 3e
trimestre de 2015. À Pôle emploi, le
nombre moyen de chômeurs inscrits en catégorie A aux mêmes trimestres T2 était
de 2.384 milliers en 2002, de 2.016 mi en 2007, de 2.774 mi en 2012, et de
3.526 mi au 3e trimestre 2015.
L'écart entre les deux sources a donc été très variable. Du
2e trimestre 2002 jusqu'au 2e trimestre 2008, le chômage de Pôle emploi a été
inférieur à celui du BIT, l'écart décroissant de - 386 mi de personnes à - 50
mi. Avec la crise de 2008, l'écart s'est inversé et est monté.
Au 3e trimestre 2015, le nombre de chômeurs de catégorie A a dépassé celui du BIT de + 585 milliers de personnes. En
fin d'année 2015, l'écart sera encore plus grand.
S'agissant du taux de chômage, c'est celui qui correspond aux
normes du BIT qui est choisi, diffusé, analysé et commenté. Ainsi, au 3e
trimestre 2015, ce taux est de 10,2 % en France métropolitaine, et de 10,6 % en
comptant aussi les DOM. Des chiffres qui nous sont devenus familiers. Si on
utilisait un « taux de chômage de catégorie A », ce sont des taux compris entre
12 % et 13 % qu'il faudrait afficher. La situation apparaitrait encore plus
déprimante.
Chômage : pourquoi le « duel » Sarkozy/Hollande
n'a pas de sens
Jacques Chirac (JC), le « roi fainéant », a été notre dernier
président à avoir réussi à faire reculer le chômage au cours de son second
mandat de mai 2002 à mai 2007, de - 369 milliers de demandeurs à Pôle emploi... si l'on s'en tient à cet
indicateur. Mais on peut aussi dire qu'il a fait monter le chômage au sens du
BIT de + 156 milliers de chômeurs.
S'agissant du « match » Hollande-Sarkozy, d'après le BIT,
Sarkozy est temporairement perdant pour avoir «créé» + 493 mi chômeurs en 5
ans, alors qu'Hollande « en est » à + 293 mi en 3 ans
et 1 trimestre. Par contre, à Pôle emploi, Hollande est temporairement perdant
pour avoir «produit » + 858 mi demandeurs d'emploi de catégorie A à fin 2015,
soit après 44 mois de règne, alors que Sarkozy en avait fait + 758 mi en 5
ans.
En fait, ces comparaisons n'ont pas de sens. Sarkozy, si on
veut l'en rendre responsable, « a laissé » plus de chômeurs en quittant
l'Elysée que n'en avait laissé J.C. Quels que soient précisément les chiffres,
il a fait moins bien, ou pire, que son prédécesseur. Même chose pour Hollande,
qui a « aggravé » le chômage après Sarkozy, et laissera en mai 2017 un nombre
de chômeurs très supérieur à celui de mai 2012. À cet égard, une éventuelle «
inversion de la courbe » ne peut plus être décisive. La courbe est montée trop
haut.
2 - Beaucoup
d'incertitudes pour les années 2016 et 2017
Des prévisions de croissance en baisse, plutôt
faibles pour relancer l'emploi
Parmi « les principaux éléments de cadrage économique » du PLF 2016 (projet de Loi de
finances pour 2016) élaboré en
fin 2015, figure une « hypothèse » de
croissance du PIB de + 1,5 % en 2016. Elle
s'écarte peu du « consensus » des économistes et des pronostics des
institutions d'alors :
+ 1,4 % pour l'OCDE en septembre 2015; + 1,5 % en juillet (et en octobre ) 2015
pour le FMI, + 1,7 % pour la Commission européenne en juin 2015.
À quels oracles se fier aujourd'hui pour « deviner » les taux
de croissance des prochaines années ?
Aux extrêmes, pour l'année 2016, le curseur le plus haut est
à + 1,8 % pour Mathieu Plane, économiste à l'OFCE (Office français des
conjonctures économiques), grâce à un apport de + 0,8 % dû aux baisses
conjuguées du prix du pétrole, de l'euro et des taux d'intérêt. Pour nombre
d'économistes, sans la conjugaison de ces trois facteurs, le taux de croissance
aurait été bien inférieur à + 1,1 % en 2015. Pour Marc
Touati, président du cabinet Acdefi, en raison d'une
pression fiscale trop forte, d'un coût du travail trop élevé et d'un marché de
l'emploi trop rigide, l'hexagone ne dispose pas des structures suffisamment
modernisées et réactives pour bénéficier de la planche à billets et des baisses
des taux de la BCE, de la baisse des cours des matières premières ou encore de
la dépréciation de l'euro. « La France restera l'une des lanternes rouges de la
zone euro en 2016, avec + 0,7 % de croissance moyenne » (4).
Suivant les « projections macroéconomiques », plus «
prudentes » ou plus « consensuelles »,
de la Banque de France de décembre 2015, la croissance du PIB réel
serait de + 1,4 % en 2016 et + 1,6 % en
2017 (5).
Pour sa part, le FMI a
présenté le 19 janvier une « mise à jour » de ses Perspectives de l'économie mondiale» (6) d'octobre 2015.
La reprise de l'économie mondiale serait plus progressive : + 3,4 % en 2016 et
+ 3,6 % en 2017. Pour le PIB de la France, il a abaissé ses prévisions de + 1,
46 % à + 1,3 % en 2016, et de + 1,65% à + 1,5 % en 2017. Le FMI insiste sur les
risques associés au ralentissement généralisé dans les pays émergents (Chine,
Brésil, Russie, pays du Moyen-Orient...), au rééquilibrage de l'économie
chinoise, au repli des cours des produits de base, ainsi qu'à la sortie
progressive de « conditions monétaires exceptionnellement accommodantes» aux
États-Unis. « La croissance mondiale pourrait dérailler si certains écueils
importants ne sont pas bien gérés », laisse craindre Mme Lagarde. En fin février, elle a laissé entrevoir une
probable nouvelle baisse des prévisions du FMI en avril prochain.
Et, « L'OCDE abaisse ses prévisions de croissance mondiale »,
a-t-on pu lire le 18 février (7). Elle ramène le taux de croissance de la
France à + 1,2 % en 2016. Elle souligne que la
politique monétaire ne suffit pas pour relancer l'activité et, qu'en Europe, de
profondes réformes capables d'apporter des gains de productivité sont
nécessaires.
Des prévisions de la Loi de finances (LDF) et de celles de la
Banque de France (BDF), il ressort que
le principal moteur de l'activité en France devrait être la demande
intérieure. Dans celles de la LDF, les dépenses de consommation des ménages
progressent de + 1,7 % en 2016, alors que le pouvoir d'achat de leur revenu
disponible ne croît que de + 1,3 %, tandis que les investissements des entreprises
(hors construction) augmentent de + 4,9 %, stimulées par les mesures
incitatives de l'État. Dans celles de la BDF, la consommation des ménages
augmente de + 1,5 % en 2016 et d'autant en 2017... moyennant la
réduction de leur taux d'épargne de 15,2 % en 2015 à 15 % en 2016 et à 14,9 %
en 2017. Les investissements des entreprises croissent de + 3,4 % en 2016 et de
+ 3, 3 % en 2017.
Rien de globalement positif n'est attendu des échanges
extérieurs. Dans les prévisions de la LDF, un déficit de la balance commerciale
(marchandises) de - 40 milliards € est anticipé en 2016. Pour l'ensemble des
biens et services ainsi que des revenus et des transferts, le FMI avait prévu
des déficits des échanges de - 0,4 % du PIB
en 2016 et en 2017... avant sa mise à jour, plus
pessimiste, de janvier 2016. À l'exception de la poursuite attendue, non sans
angoisse, de la baisse des cours du pétrole et du gaz, les facteurs externes,
ne sont pas spécialement porteurs.
Une lueur d'espoir, tout de même, sur une
petite baisse du chômage ?
Pour la BDF, en décembre 2015, le taux de chômage au sens du
BIT en France était susceptible de baisser de
10,2 % en 2015 à 10 % en 2016, puis à 9,7 % en 2017. Sachant que ce taux
était de 10,6 % au 3e trimestre 2015, ces chiffres peuvent paraître
«optimistes», ou « volontaristes », aujourd'hui. Même observation concernant
les prévisions du FMI d'octobre 2015, qui voyait ce taux décroître de 10,2 % en
2015 à 9,9 % en 2016 et à 9,7 % en 2017.
Sous le titre « Emploi et questions sociales - Tendances pour
l'année 2016 », l'Organisation internationale du travail (OIT) a publié en
janvier 2016 les résultats de ses recherches et de ses calculs sur les
tendances, en novembre 2015, en matière de chômage (8). On y voit le taux de
chômage en France diminuer de 10,6 % en 2015 à 10,4 % en 2016 et à 10 % en
2017, et les effectifs des chômeurs baisser de 3,1 millions en 2015 à 3 Mi en
2016 et à 2,9 Mi en 2017.
Le 23 février, l'Unedic, qui gère l'assurance chômage, a fait
part d'une prévision de diminution du nombre de chômeurs de catégorie A de - 25
000 en 2016, puis de - 26 000 en 2017.
Et, les prévisions de l'Unedic sont réputées fiables. La légère baisse en 2016
est liée essentiellement au plan massif de 500.000 formations supplémentaires
pour les chômeurs annoncé par François Hollande. En 2017, « la baisse serait en
partie atténuée par le retour en catégorie A des demandeurs d'emploi entrés en
formation en 2016 ». En revanche, le
nombre de demandeurs d'emploi des catégories A + B + C, incluant ceux en
activité réduite, continuerait de croître, de + 26 000 en 2016 et de + 10.000 en 2017 (9). Plus d'emplois à temps
partiel, donc.
Retraites et population active : encore au
secours du chômage en 2016 ?
En raison des réformes du système de retraites décidées
jusqu'en 2012, surtout, et des problèmes de pouvoir d'achat des personnes
âgées, notamment, l'âge moyen des départs à la retraite va continuer
d'augmenter. Selon les prévisions du Conseil d'orientation des retraites (COR),
il va
croître de 61,6 ans en 2015 à 61,8 ans en 2016 et à 62 ans en 2017, pour
atteindre 62,3 ans en 2020 (10).
Cependant, suivant des projections de l'INSEE (11), le nombre de départs
de fin de carrière restera massif entre 2015 et 2020 : 705.000 par an en
moyenne. Les départs à la retraite ouvriront donc encore de larges possibilités
de recrutements de remplacement, ou de limitation des licenciements. L'INSEE a également prévu une légère
diminution de la part des jeunes de 15 à 24 ans dans la population active, de
10 % en 2015 à 9,9 %. Aussi, dans la continuité de ce qui est observé depuis
2007, la population active totale ne devrait augmenter que de + 125.000
personnes par an en moyenne de 2015 à 2020. Le COR prévoit la même chose, soit
+ 0,4 % d'augmentation annuelle de la population active, qui avoisine 28,8
millions de personnes en 2015.
Attention, cependant. La plupart des projections retiennent des
hypothèses «tendancielles» pour le solde migratoire de + 50.000 personnes par an. Avec l'afflux des
migrants de Syrie, d'Irak, de Lybie... et la chute des cours des hydrocarbures,
qui frappe des pays comme l'Algérie et la Lybie, les flux migratoires
pourraient être plus importants.
3 - Un chapelet de
plans et de «réformes» contre le chômage
« Resterait » à «créer» plus de 125.000 emplois
supplémentaires nets. Depuis trois ans le Gouvernement déploie plans et «
réformes » afin « d'inciter » les entreprises à embaucher et les chômeurs à
créer leurs propres emplois, non sans chercher aussi à réduire, pendant le
temps politique nécessaire, le nombre de demandeurs d'emploi de catégorie A en
recourant à la formation et de l'apprentissage. Pour le Nouvel Obs, « Croissance,
emplois... L'économie française accélère en 2016, grâce aux mesures de Hollande
»... grâce au CICE, 127.000 emplois
auraient été créés en 2015 et 73.000 seraient attendus au premier semestre 2016
(12). Après l'annonce du projet de loi
Travail, Geoffroy Clavel, journaliste politique au Huffingtonpost
interroge : «
Emploi : Où mène la fuite en avant réformiste du Gouvernement ? », évoquant un
« tournis réformateur » (13). Les principales « réformes » sont longuement
résumées ci-après.
Le CICE, au cœur des pactes et des plans
successifs pour l'emploi
Le CICE est né dans le Pacte national pour la croissance, la
compétitivité et l'emploi de J.-M. Ayrault en novembre
2012. L'idée était de donner un peu d'air aux entreprises en
leur accordant une baisse de leur impôt de l'année suivante sur les bénéfices
de l'année (ou une créance sur l'État). Cela permettait de décaler le coût
budgétaire de cette aide. Complexe, il a été regardé comme une usine à gaz dès
sa création. Il a été critiqué pour ne pas comporter d'obligation de
contreparties, surtout à gauche, et pour
ne pas cibler suffisamment les entreprises exportatrices. Mis en œuvre au 1er janvier 2013, ce crédit
d'impôt était alors pour une entreprise de 4 % de la masse des salaires ne
dépassant pas 2,5 SMIC. L'entreprise devait utiliser cette somme pour investir,
embaucher ou conquérir de nouveaux marchés, sans que cette utilisation fasse
l'objet de contrôle par l'administration fiscale (14).
En janvier 2014, le Pacte de responsabilité est entré en
vigueur, a repris le CICE et en a porté le taux à 6 %, le coût du CICE étant
estimé à 13 milliards € pour 2013 et à 20 Mds € pour 2014.
À fin 2014, ses résultats en termes de créations d'emplois,
de gains de compétitivité et de soutien à la balance commerciale ont été jugés
décevants, mais un bilan chiffré n'a
pas pu
en être dressé. Ensuite, il s'est
avéré qu'en 2014, 10 Mds € ont
été versés aux entreprises ou non prélevés. En 2015, le coût du CICE est monté
à 24 Mds €.
En janvier 2016, F. Hollande a annoncé un « Plan d'urgence
pour l'emploi », complétant et actualisant le Pacte de responsabilité, dans
lequel figure encore le CICE et se retrouvent aussi, avec quelques mesures
nouvelles, des dispositions du « Small business act »
de Manuel Valls décidé en juin 2015.
Pour 2016, un supplément aux 24 Mds € d'un montant de + 9 Mds est prévu, réparti entre le CICE, des
allègements de cotisations sociales, la suppression de la contribution sociale
de solidarité des sociétés (C3S) pour une deuxième tranche d'entreprises, la
suppression de la contribution exceptionnelle d'impôt sur les sociétés, ainsi
qu'avec les plans pour l'investissement et les TPE - PME (15). Une dépense
globale de 33 Mds € en 2016, donc. En régime de croisière, le coût annuel pour
l'État annoncé de ces aides sera de 41 Mds € à partir de 2017.