Par Jacques MYARD
La chute du mur de Berlin a été un fait
majeur dont les conséquences ne sont pas encore totalement épuisées et
véritablement connues.
J'ai eu la chance professionnelle en
qualité de diplomate de servir à Berlin comme officier de liaison - parlent de
" political officer "-
entre le gouvernement militaire français de Berlin et les autorités allemandes
du Senat de Berlin et les deux arrondissements du secteur français, Wedding et Rheinickdorf.
Par " officier de liaison " il
faut comprendre celui qui remplit des fonctions politiques, les Anglo-saxons
parlent de " political officer ", mes interlocuteurs allemands étaient
déçus lorsque je leur disais que je n’étais pas colonel, diplomate...
Berlin était alors au coeur des relations
entre les deux blocs, chaque " incident " était analysé comme étant
le thermomètre des tensions EST-OUEST.
En tant que Français, Berlin ne m'est
jamais apparue comme une ville étrangère, à chaque coin de rue j'ai retrouvé
l'histoire de France, dans ses heures tragiques et ses heures glorieuses.
La langue berlinoise est truffée
d'expressions françaises comme le " Bel Etage" ou le rendu de monnaie
" 20 Pfennig Retour " héritage des Huguenots, il fut un temps où plus
de 20 % de la population de la ville était d'origine française.
La chute du mur avait été marquée de forts
signes avant-coureurs qui prouvaient l'unité du peuple allemand, même
si le régime de la RDA avait forgé des attitudes et des réflexes sociaux très
différents des habitants de la RFA.
Le Chancelier Kohl qui fut l'un des
artisans majeurs de la réunification allemande le reconnut lui-même quelques
années plus tard.
En 1980 j'ai accompagné les généraux
alliés à l'installation du nouvel Evêque catholique de Berlin Joachim Meisner à
la Cathédrale de Sainte Hedwige à Berlin-Mitte à l'Est; lorsque les voitures groupées des généraux sont
arrivées, la foule, plusieurs milliers de berlinois, a acclamé très fortement
les Alliés et les Vopos ont été totalement
débordés.
Le Vatican ayant toujours une vision à
long terme ne divisa pas le diocèse de Berlin et maintint son unité.
Le lendemain à la chancellerie du Senat
à l’Ouest, un haut fonctionnaire me dit avec fierté : " Alors
Monsieur Myard vous avez vécu un grand
moment de la nation allemande ! ".
Preuve que les nations sont toujours plus
fortes que les idéologies, au-delà des réminiscences " c'était
mieux avant ", l'Allemagne a bu le communisme comme le buvard l'encre,
comme le dit de Gaulle de la Russie...
Helmut Kohl ne fit qu'une erreur
économique il échangea à parité le Mark de l'est avec celui de l'ouest, ce qui
étrangla l'économie est-allemande qui était le membre caché du marché commun
avec une monnaie dévaluée !
Mais sur le plan politique Helmut Kohl
pouvait-il faire autrement ?
Après la réunification le Traité de Paix
signé à Moscou le 12 Septembre 1990 entre les 4 vainqueurs de 1945, Etats-Unis,
Russie, Grande-Bretagne, la France, et la RFA et la RDA (4+2) confirmait
la réunification.
L'Allemagne renonce à l'arme nucléaire,
elle reconnait les frontières des 2 Etats allemands et notamment la frontière
Oder-Neisse avec la Pologne, elle devient membre de l'OTAN.
L'OTAN, dont le Président Macron prétend
qu'elle est en situation de " mort cérébrale ".
Mais ce jugement n'est pas partagé par les
pays de l'ex bloc soviétique qui placent toujours leur sécurité dans l'Alliance
atlantique et ne croient pas dans une utopique défense européenne.
La chancelière Angela Merkel le lui
rappelé assez fermement en qualifiant ses propos de " radical », ce
qui illustre une fois de plus la dégradation forte des relations entre Paris et
Berlin et surtout l'agacement permanent que suscite le président français
toujours prompt à donner des leçons ...