ASSEMBLÉE GÉNÉRALE

DU 29 AVRIL 2008

DISCOURS

DE JACQUES

DAUER

 

Chers Compagnons,

Il est de convenance que le président parle, lors de l’assemblée générale, du passé et surtout de l’avenir de notre Académie. C’est aujourd’hui extrêmement difficile. Le passé, c’est-à-dire le combat que nous avons mené, est connu de tous. Aussi vais-je essayer avec vous d’envisager l’avenir. Il m’a été reproché de ne pas prendre position sur les actes du Président de la République. Pourtant tous les mois, j’ai donné ma façon de penser sur les actes des uns ou des autres, mais j’ai fait savoir, l’année dernière, que le jugement que l’on pouvait porter sur l’action au plus haut de l’État ne serait valable qu’au bout d’un certain temps. Au mieux à la fin du mois de juin de cette année mais plus honnêtement à la fin du mois de décembre.

 

Cette attente que je m’efforce de respecter a plusieurs raisons, la principale étant que les diverses propositions, et même les tout derniers propos dit souvent avec maîtrise, ne deviendront décisions qu’à la fin de l’année 2008 après le vote du budget pour 2009. Cela ne veut pas dire que nous n’avons pas déjà sur l’une ou l’autre de ces propositions des avis parfois convergents. Je ne pourrai assister à toutes les réunions du conseil ou du bureau, mais je souhaiterais que chaque année, au moins une ou deux fois l’an, nous réunissions le Conseil pour une séance de travail sur l’avenir de notre pays.

 

Si vous décidiez de me suivre sur ce chemin, j’aimerais qu’en octobre ou en novembre, nous débattions ensemble de l’action du Président de la République. Si cette proposition vous agrée, je vous demanderai de faire connaître à partir du mois de septembre votre avis. Il me plairait qu’Olivier Delatour et Marc Ponsard fassent une synthèse de vos missives et que nous présentions au conseil nos propositions afin de décider ensemble de notre prise de position. Car nous sommes favorables aux réformes. Mais il faut qu’elles soient structurelles et dans la durée.

 

Le malheur veut qu’en France la majorité des élus viennent du cadre administratif, notamment en ce qui concerne les parlementaires. Il faudrait d’ailleurs qu’ils quittent leurs postes de fonctionnaires après leur élection et qu’ils ne puissent retrouver ceux-ci que cinq ou six ans après la fin de leur mandat. De plus, ceux qui demeurent à leur poste ont un état d’esprit qui les porte à des décisions bureaucratiques pour ne pas dire totalitaires, lesquelles sont souvent des contraintes inacceptables non seulement pour les chefs d’entreprises PME -PM I mais aussi pour l’ensemble de la population. Ce qui fait que nous avons un état d’esprit fonctionnaire qui régit l’ensemble des citoyens.

 

C’est pourquoi, nous ne pouvons qu’approuver Mme Nathalie Kosiusko- Moriset qui a traité Jean-François Copé comme il se devait. Pour ce qui est des chefs d’entreprise, nous sommes devant une organisation, le ME DEF, dont de nombreux membres sont issus de la haute fonction publique et même pour beaucoup de l’ÉNA , ce qui fait que la grande industrie est gouvernée plus par des managers que par de véritables chefs d’entreprise. À cet égard, il est curieux que la présidente du ME DEF avoue ne pas être au courant des « malversations » de ses mandants. Pourtant cela fait des années que l’UIMM sévit. Dans les années 1960, j’ai écrit quelques articles sur ce syndicat, mais cela n’a pas servi à grand-chose. Que la présidente ne soit courant de rien, cela veut dire soit qu’elle est incapable, soit qu’elle se moque de nous. Les deux ne sont pas incompatibles.

 

D’autre part, il serait bon que la CGPME prenne ses distances. Sommes-nous un pays réformable ? Peut-être si les pouvoirs y sont vraiment décidés. Les réformes seront difficiles à mettre en place et plus encore à mettre en oeuvre, mais on peut s’appuyer sur les éléments les plus ouverts des citoyens. C’est pourquoi il faut consacrer du temps à informer la population. Mais une chose est indispensable, c’est de faire en sorte que les plus aisés soient plus « frappés » que les plus pauvres. À cet égard, il est curieux que Balladur, un de ceux qui veulent la fin de Ve République, s’attache à « réformer » les Institutions. Il y a quelque temps, une annonce avait été faite que la Participation allait être relancée. Nous avons pris cette annonce comme une avancée pour l’avenir. Malheureusement rien n’a été fait depuis, quoiqu’on annonce, dans les jours qui viennent, la Participation et l’Intéressement. Le chef d’entreprise que j’ai été sait tout le bien que la Nation pourrait en tirer.

 

La Nation mais aussi l’État. C’est donner à ceux qui travaillent non seulement des biens supplémentaires mais surtout des possibilités d’agir solidairement avec leur entreprise pour faire face à bien des aléas. Ne seraitce que les délocalisations ou les fermetures d’usine par la volonté des fonds de placement, par exemple. Pour ma part, je suis assez favorable à l’idée de l’Union de la Méditerranée, mais il serait lucide de ne réunir les pays du pourtour méditerranéen à l’Europe non en tant que telle mais en partenariat. Il y a d’autres sujets qui fâchent davantage. Je ne parlerai pas du CIO qui est la lâcheté même. Ni de Reporters sans frontière financé par le National Endowment for Democraty affidé à la CIA. Il y a vraiment là des coups de pied au cul qui se perdent.

 

Quant aux propositions actuelles des membres du Gouvernement dans différents domaines, il ne fait aucun doute que certaines peuvent avoir notre accord, mais que d’autres sont en opposition avec notre idéal. Nous ne pouvons accepter, par exemple, l’idée de la police de ficher la population (je ne vois pas d’autre mot), au travers du fichier nommé Ardoise, qui rappelle certaines dispositions d’un autre temps. Fichier remanié depuis, mais pour combien de temps ! Nous estimons aussi que l’idée de refonte de la Justice ne nous convient guère. Et Vigie pirate, qui ne s’appuie nullement sur notre Droit. La police semble passer au totalitarisme. Etc.

 

Je ne parle que pour mémoire du refus avéré d’emploi de la langue française, d’abord par les instances politicomédiatiques et ensuite par celles de la fonction publique. Non seulement, elles ne font aucun effort pour défendre notre langue, mais de plus elles acceptent sans discuter que les instructions de Bruxelles soient écrites seulement en américain et que les réunions ne se tiennent qu’en cette langue. Je ne parle pas de la stupidité des responsables de France 3 qui, pour l’Eurovision, ont accepté qu’un chanteur français soit obligé de chanter en américain. Cela prouve bien la déliquescence et la lâcheté des femmes et des hommes énarcho-politiques.

 

La France est la seule nation avec le Portugal qui aient adopté l’État laïque. La laïcité défend l’idéal de toutes les spiritualités, même l’athéisme, sans elle nous serions un pays de communautés, et ce que veulent la plupart des élus qu’ils soient de droite et de gauche. Il est dommageable pour la nation que les syndicats d’enseignants, dont beaucoup de « fonctionnaires » sont des enseignants haut-le-pied, c’està- dire dispensés de cours, s’en moquent, sauf sur un plan politicien. Il faut rappeler que les élèves sont là pour apprendre et recevoir et non pour se faire embrigader. Il est anormal que les syndicats d’enseignants se servent d’eux pour servir leurs propres intérêts. Les bons enseignants sont malheureusement et par la force des choses aux ordres de ces syndicats totalitaires ; ce qu’ils regrettent mais n’en peuvent mais.

 

Il ne fait aucun doute que la politique européenne du gouvernement n’a pas notre assentiment. Nous aurons l’occasion de revenir plus tard sur la Commission de Bruxelles, laquelle, en l’état, représente l’Amérique et très rarement l’Europe. Pour nous, il eût été convenable que le peuple français ait été consulté par référendum sur ce minitraité qui reprend presque mot pour mot le projet de constitution élaborée par Giscard et rejetée précisément par référendum. Nous refusons toute forme d’Europe fédérale, projet qui semble d’ailleurs être remis en question par l’ensemble des pays européens, et nous devrons veiller à ce que l’Europe ne puisse se former qu’avec des États se réunissant certes, mais gardant chacun une réelle autonomie qui préserve leur identité. Il y a plus de différence entre un Portugais et un Lituanien qu’entre un Californien et un Pennsylvanien. Il est bon de rappeler que le Kosovo a été le moyen utilisé par les Américains pour soutenir, avec la complicité de Kouchner, la revanche de l’Allemagne contre la Serbie.

 

Ce gauleiter français a permis aux Albanais de coloniser le Kosovo, qui est à la Serbie ce qu’est l’Auvergne pour la France. L’UFK, des tueurs, comme le reconnaît enfin le TPI, a fait en sorte d’éliminer les véritables Kosovars, c’est-àdire les Serbes. Non seulement, les Albanais ont agi ainsi, mais ils se seraient livrés, de plus, à des trafics d’organes dont le chef militaire de l’UFK, qui est aussi le nouveau (faux) président du Kosovo, serait à l’origine. En France, on reconnaît et l’on se tait. Pourquoi, Monsieur Kouchner ?

 

La France avait refusé tout engagement en Irak, tant il est certain qu’aux Proche et Moyen-Orient la politique des États- Unis ne peut conduire qu’à des guerres. Nous n’avons rien à faire en Afghanistan, surtout dans le cadre de l’OTAN où nous sommes présents sans pouvoir de décision. Rappelons que si nous sommes dans le traité de l’Atlantique-Nord, nous ne participons pas aux instances de commandement intégré depuis la décision du Général de Gaulle, qui ne voulait pas subir des décisions américaines contraires à nos intérêts. On a bien essayé d’y revenir, mais les États-Unis s’y sont opposés, bien qu’acceptant volontiers notre aide comme supplétifs. Supplétifs ou non, nous n’avons rien à faire depuis la fin de la Guerre froide au sein de cette organisation colonialiste.

 

En Afghanistan, il faut se rappeler que, comme en Irak, les Américains voulaient apporter ce qu’ils appellent la démocratie, alibi ô combien fallacieux pour des gens qui ne savent que tuer, encore tuer, mais jamais aider les pays à sortir de l’ornière dans laquelle ils les ont jetés, encore moins de la misère. La position française semble vouloir aider l’armée afghane et non faire la guerre. Alors l’OTAN n’est pas nécessaire. Les Américains veulent une Europe à leur botte, en esclavage pour certains. Ils empiètent sans cesse, via l’OTAN , sur la souveraineté des États comme le montre l’implantation de leurs nouvelles bases dans les PECO. L’OTAN doit être abandonné car cette organisation ne peut être un objectif. Dans ce dessein, ils ont une arme redoutable, ce sont les sectes : témoins de Jéhovah, scientologie et même les évangélistes, majoritaires aux États-Unis, qui estiment que la Bible doit être prise au pied de la lettre.

 

 De plus en plus, les écoliers européens, lycéens, étudiants apprennent ces billevesées et bien d’autres. En France, les sectes sont interdites, mais les fonctionnaires, pour certains des adeptes sectaires, n’appliquent pas la loi. Ainsi actuellement l’une d’entre elles doit plus de cinquante-sept millions d’euros depuis six ans, et l’administration s’arrange pour en fait ne rien lui réclamer. Mais il y a plus grave, beaucoup plus grave. C’est le risque que le manichéisme ambiant nous entraîne dans la guerre qui se profile entre l’Amérique et la Chine. Je sais que l’on pense plutôt à Al Qaïda, non point que je veuille éliminer ce risque qui atteindra aussi bien la Chine que l’Amérique, mais il nous faut réfléchir pour faire face au risque premier qui résulte de l’affrontement entre les deux super grands. Par exemple, ce qui se passe au Darfour dépasse, et de loin, la simple lutte entre les musulmans du Nord et les chrétiens et animistes du Sud (trois cent mille morts d’après l’ON U).

 

Depuis treize siècles, l’Afrique a subi l’esclavagisme des blancs musulmans ; aujourd’hui il y a des restes au Darfour, mais la majorité des populations du Sud ne veulent plus s’en laisser conter. Il se trouve que la Chine a des intérêts économiques extrêmement poussés dans cette région et que les États-Unis ont créé des liens, souvent par États interposés, avec ces peuples du Sud. Cet abcès de fixation est un leurre dans la mesure où tant la Chine que les Etats-Unis ont pris pied pour longtemps en Afrique, comme au Zimbabwe. La Grande- Bretagne a plus ou moins été éliminée par les Américains et la France par l’Allemagne (pour le compte des États-Unis).

 

Tôt ou tard les intérêts de la Chine et des États-Unis entreront en conflit, s’ils ne le sont déjà ! L’Asie et l’Amérique du Sud seront entraînées. D’où l’intérêt pour l’Europe de ne pas se retrouver au milieu de ce capharnaüm et l’intérêt pour la France de garder ses possibilités d’action. Il ne faudrait pas avoir à choisir entre le colonialisme des Chinois ou celui des Américains et la liberté. Cela peut advenir dans les dix ans qui viennent. Sans doute me direz-vous que le plus grave pour le moment est l’augmentation du coût de la vie qui touche les classes les plus défavorisées. La conjoncture, qu’elle subisse la loi du marché ou que plutôt elle résulte de spéculations politicofinancières, frappe actuellement les pays les plus pauvres, mais nous n’en serons pas exempts.

 

De plus cela ouvre la voie aux révoltes dont un jour ou l’autre nous serons nous-mêmes frappés, car le monde qui s’appauvrit ne supportera pas toujours l’oppression de la spéculation. Pour certains, les plus nombreux, nous ne comptons guère. Les politiques et les fonctionnaires ont les moyens de faire en sorte que notre voix ne puisse se faire entendre. Peut-être, mais elle chemine et, qu’ils le veuillent ou non, un jour, que l’on peut croire prochain, elle retentira. Pour conclure, vous me permettrez de citer l’homme qui a toujours été LA référence, le Général de Gaulle : « Si la tâche est ardue, la mission est noble. »

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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