Compte-rendu du dîner-débat du 12 JUIN 2007 en présence de 

Monsieur Xavier HAREL 

Auteur du livre “Afrique, pillage à huis clos”

Comment une poignée d'initiés siphonne le pétrole africain 

Par Christine ALFARGE 

Avec courage et clarté, Xavier HAREL journaliste au quotidien économique la Tribune, spécialiste de l'Afrique sub-saharienne, mène à travers son livre “Afrique, pillage à huis clos” une enquête sans concession sur les pratiques scandaleuses du régime congolais prêt à tout pour s'enrichir au détriment de son peuple qui continue de sombrer dans la pauvreté et la famine.

Comme le rappelle Gilles BACHELIER dans son introduction, l'Afrique est un vaste continent, le deuxième du monde après l'Asie avec trente millions trois cent dix mille km2 représentant près du quart des terres émergées. L'Afrique compte neuf cent millions d'habitants dont la moitié à moins de quinze ans. Elle produit notamment 66% de la production mondiale de diamants, 60% de l'or, 12% du pétrole mondial. Parmi ses autres productions, il faut citer l'uranium, le manganèse, le cuivre, le cobalt, des métaux rares, le caoutchouc, le café, le cacao, le coton. L'Afrique est un continent très riche paradoxalement à sa population très pauvre”.

Comment l'Afrique peut-elle s'en sortir ?

L'Afriqueconcentre la plus grande partie des pays les plus pauvres du monde et sa situation ne cesse de se détériorer. Entre coups d'Etat militaires et guerres civiles incessantes, il est difficile de rester optimiste face à son développement. L'Afrique serait-elle victime d'une certaine fatalité qui la condamnerait irrémédiablement, certains le pensent en comparaison avec le développement croissant des pays du sud en Asie.

Les véritables plaies de l'Afrique.

Les difficultés du continent africain ont de nombreuses causes provenant à la fois d'une instabilité politique permanente et d'un manque de volonté de la part des dirigeants africains qui ne se soucient guère du développement à long terme de leur pays à l'image du régime congolais du président Denis Sassou Nguesso dont le seul objectif est de tirer profit de la manne pétrolière tout cela sous fond de corruption comme le décrit l'ouvrage de Xavier Harel.

Le pillage de l'Afrique n'est pas nouveau.

La dépendance extérieure est particulièrement importante sur presque tout le continent africain et notamment dans les anciennes colonies françaises qui maintiennent toujours des relations proches avec Paris afin d'obtenir un soutien constant tant sur un plan politique que financier. Si on prend l'exemple du Congo-Brazzaville qui ressemble à un petit koweit, on peut se demander où va l'argent du pétrole car chaque année trois à quatre cent millions de dollars disparaissent avant d'arriver à l'état. La preuve en est que revenu au pouvoir, Denis Sassou Nguesso se réapproprie la connaissance du terrain et en profite pour mettre en place des sociétés écrans afin de détourner l'argent du pétrole. Au clientèlisme interne vient s'ajouter un clientèlisme externe, certaines entreprises françaises de renom vont ainsi réaliser des profits juteux ainsi que des groupes bancaires dont le rôle apparaît imminent dans l'évaporation de l'argent.

Faut-il aider l'Afrique ou continuer à soutenir des régimes sans légitimité ?

L'Afrique est écrasée sous le poids de sa dette qui représente plus du double de ses exportations annuelles ce qui inquiète le Fonds monétaire international (FMI). Le continent africain est le moins exploré, on y trouve cependant du pétrole dans un grand nombre de pays comme le Nigeria, l'Angola, le Soudan, le Gabon, le Cameroun etc... Au lieu d'augmenter la richesse de leur pays pour faire rentrer des recettes fiscales, les gouvernements se sont contentés de détourner à leur profit une partie des ressources d'exportations des matières premières afin de disposer de devises leur permettant d'importer des biens de consommation occidentaux pour leur propre compte.

L'aveuglement des pays riches.

Les engagements pris lors du G8 qui s'est tenu dernièrement concernant notamment l'augmentation de l'aide publique en faveur de l'Afrique soit 25 milliards de dollars ne règleront pas le problème. Jusqu'à présent, le détournement des richesses internes ou extérieures au profit des dirigeants et de leurs clients a montré l'incapacité de l'Afrique à se constituer un capital indispensable à son développement. Bridée par la faiblesse de son investissement qui est une véritable carence aussi bien dans le domaine agricole que dans le secteur industriel, l'Afrique ne peut pas valoriser ses richesses pour assurer son développement futur. Une des solutions serait de rendre publics les versements des compagnies pétrolières faits en direction des états africains si l'on veut vraiment s'attaquer aux racines du mal, la corruption.

La croissance démographique de l'Afrique.

La rapide croissance de la population notamment dans la région de l'Afrique sub-saharienne ne facilite pas le développement des services de l'éducation et de la santé dont ce continent a tant besoin. Le taux de scolarisation en régression permanente touche particulièrement les filles. La mortalité infantile est de loin le pire fléau auquel s'ajoute le poids du sida dont les répercussions sociales et économiques sont catastrophiques.

L'appauvrissement des campagnes.

Les populations rurales globalement majoritaires dans la plupart des pays ont été laissées pour compte, subissant de plein fouet le manque de développement du à des politiques suivies privilégiant l'importation des céréales pour alimenter les villes au détriment des productions locales. La pauvreté des campagnes a provoqué un exode massif vers les villes où le taux de chômage est élevé. Selon les prévisions de l'organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), la population urbaine atteindra 63% de la population totale en 2020.

L'équilibre écologique de l'Afrique menacé.

Le manque de développement rural et l'attitude irresponsable des dirigeants est une véritable menace qui pèse sur les équilibres écologiques du continent africain. La croissance démographique exerce une pression forte sur l'environnement dans les zones fragiles comme le Sahel, la déforestation liée à l'utilisation du bois comme énergie domestique favorise la progression du désert. En zone subtropicale et équatoriale, l'exploitation du bois de qualité destiné à l'exportation détruit progressivement les forêts. Quant à l'absence de gestion des ressources en eau, il est à craindre de graves pénuries dans les prochaines années.

Quelle politique peut avoir l'Europe et en particulier la France face au manque de volonté des dirigeants africains.

La France comme ses partenaires européens prônent une politique de co-développement en faveur de l'Afrique, cependant la difficulté réside dans le fonctionnement même de l'économie africaine qui faute d'être institutionnalisé fragilise les relations économiques et juridiques et n'encourage pas l'investissement. Les sociétés africaines sont des sociétés de négociations où tout est basé sur le compromis, la tromperie et ceci est valable aussi bien en politique qu'en économie. La guerre apparaît comme la seule façon de changer efficacement la politique en Afrique. La tentative de démocratisation au début des années 90 n'a pas résisté au pouvoirs autoritaires mis en place n'ayant pour but que de satisfaire leurs appétits financiers au détriment de leurs populations toujours plus pauvres et meurtries.

Le Général de GAULLE qui fut le premier homme d'état à consacrer une réflexion profonde à l'égard du développement africain détestait avant tout l'irresponsabilité. En revanche, sa politique était “ fondée sur l'amitié et la coopération”. Il souhaitait avant tout affirmer le rôle de la France en aidant les états africains à exercer leur indépendance et leur souveraineté dans le respect de chacun. Il a d'ailleurs consacré des pages très importantes sur l'Afrique dans ses Mémoires de guerre ainsi que dans ses Mémoires d'espoir.

 

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