par Georges AIMÉ
5 heures d’attention pour ne rien entendre ! Tel est le triste bilan des deux premières
émissions censées « éclairées » l’électeur sur le programme de quelques-uns de
ces prétendants à la plus haute fonction ! Même s’il est vrai que le « format »
de ces émissions ne se prête guère à des débats de fond, on s’aperçoit qu’il en
est de même lorsque l’un des candidats est seul devant de pseudo « experts » de
la vie politique (Alain Juppé lors de L’Émission politique du 6 octobre
interrogé par Mme Salamé et M. Pujadas).
« Experts » plus soucieux de se mettre en valeur en monopolisant ou en coupant
la parole de façon intempestive que de laisser le temps d’une réponse
intelligente à la question souvent stupide qu’ils viennent de poser.
Faire un parallèle entre la prestation de celui ou de celle
qui vient parler de son projet pour la France et une joute de balle au pied
relève soit de la bêtise soit d’une réelle volonté de désinformation. De plus,
ces organisateurs, en mal d’imagination, vont chercher outre-Atlantique une
présentation digne d’un tribunal : accusés, restez debout, vous avez 30
secondes pour nous parler des migrants !
Autre fait remarquable : jamais de questions de fond sur le
fonctionnement de l’Europe et nos relations avec les États la constituant.
Tous veulent combattre le chômage mais aucun ne parle des
travailleurs détachés. Tous font les yeux doux aux PMI-PME mais aucun ne parle
de la concurrence déloyale exercée par les entreprises employant les
travailleurs précités ou par les distorsions de fiscalité au sein de cette
Europe.
Il en est de même sur nos rapports avec la Chine, les
États-Unis d’Amérique, l’Inde, la Russie et le monde en général. Aurait-on
oublié que, sous la Ve République, la première fonction du chef de l’État est
de s’occuper des affaires extérieures et de s’assurer que les décisions prises
ça-et-là sont conformes aux intérêts de notre pays.
Avez-vous entendu une question sur le TAFTA et sur la volonté
des USA d’imposer leur vision de l’économie et de leur mode de vie à l’Europe
? Avez-vous entendu une question sur ces
empêcheurs de s’entendre en rond que sont les Wallons et sur leur volonté de ne
pas voir le droit privé primer sur le droit national ? (Grâce à eux les
Français ont entendu parler du CETA !) Avez-vous entendu une question sur la
dichotomie observée entre une volonté de régler les problèmes migratoires sans
vouloir contrôler nous-mêmes nos frontières ? (Il est vrai que l’un des
candidats interrogés est celui qui les a fait disparaître.) Avez-vous entendu une question sur l’aide au
développement de l’Afrique autre que des « y’a qu’à-faut qu’on » de comptoir ?
Avez-vous entendu une question de fond sur
nos relations avec
la Russie autre que « il faut parler avec Poutine » ?
Avez-vous entendu une question sur les atteintes aux libertés les plus
élémentaires perpétrées par le président de la Turquie ? Avez-vous entendu une
question sur la colonisation de l’Afrique par la Chine ? Avez-vous entendu une
question sur les préoccupations des autorités allemandes de voir une partie de
leurs entreprises, et donc de leur savoir-faire, passer sous contrôle chinois ?
Les seules questions posées sur la politique extérieure de la
France ont été celles concernant le Moyen-Orient et la guerre contre l’État
islamique et là je dois constater qu’un vent de sable si dense s’est levé que
nul n’a osé l’affronter.
Dormez en paix Saoudiens et Qatariens, continuez à corrompre quelques-un(e) de nos représentants politiques. Vous pouvez
fermer les yeux sur les massacres, pourtant à vos portes, de populations qui
n’ont pas la même religion que vous ; vous pouvez continuer à considérer les
femmes comme des « reproductrices », esclaves de tous vos désirs ; vous pouvez
continuer à avoir une conception particulière de la liberté ; vous pouvez
continuer à employer des esclaves venus d’ailleurs pour vous servir ou... pour
construire des stades qui permettront à l’ultra-libéralisme d’être
flamboyant... tout cela est bien trop compliqué à comprendre (dixit un passé
président) par les manants que nous sommes.
Les candidats, par ailleurs, se sont bien gardés (vous avez
dit connivence ?) d’aborder les sujets que je viens d’évoquer. Obéissants
serviles aux diktats étatsuniens, inféodés à la technostructure européenne et
béats d’admiration devant la politique menée outre-Rhin (peu importe que la
baisse du chômage en Allemagne s’accompagne d’une paupérisation de ceux qui n’ont pas d’emploi), ils ne se posent même
pas la question de l’incongruité de leur attitude.
Comme nous en avons pris l’habitude depuis une vingtaine
d’années nous constatons les maux et ne traitons pas les causes. Comment
pourrait-il en être autrement ? Ceux qui se présentent comme des hommes neufs,
capables de résoudre les problèmes de la France ont tous (à l’exception d’un
seul) été ministre(s) (pour le plus ancien en 1986), Premier ministre et...
Président de la République. Pourquoi feraient-ils aujourd’hui ce qu’ils ont été
incapables de faire depuis trente ans ? La prestation et les propos de chacun
d’eux ne permettent pas de démontrer le contraire.
Cette classe politique, dont une des nombreuses ambitions est
un entre soi dont sont exclus tous ceux qui peuvent être différents (Nicolas
Dupont Aignan, Henri Guaino ou Jacques Myard) est-elle digne d’un quelconque intérêt ? Peut-elle
apporter ce renouveau dont nous avons tant besoin ? Tous se réclament du
gaullisme et tous font le contraire de ce qu’a fait le Général.
Aucun d’eux n’aurait reconnu la Chine ; aucun d’eux ne serait
sorti de l’OTAN ; aucun d’eux n’a été capable d’impulser une politique
industrielle garantissant à notre pays un avenir autre qu’à court terme ; aucun
d’eux n’ait capable de taper du poing à Bruxelles et de faire la politique de la chaise vide s’il
n’est pas entendu ; aucun d’eux n’ait capable de faire rayonner la culture et
la pensée française sur la planète (quand on nous parle en Asie ou en Afrique
d’un homme politique français on nous parle de... Charles de Gaulle...
quarante-six ans après sa mort !).
Tous prétendent être les héritiers d’un père qu’ils ne
respectent même pas.