par Paul KLOBOUKOFF
Les versements de dividendes sont une des manifestations de
la vigueur et de la prospérité de notre économie. Symboles du capitalisme, ils
sont décriés, jugés exagérés, immérités et insuffisamment taxés, par des
organisations et des personnes qui ignorent le plus souvent le poids écrasant
de la fiscalité sur les bénéfices et les dividendes, qui ne laisse qu'entre un
et deux tiers des bénéfices distribués aux actionnaires. L'État empoche le plus
gros de ce « magot » constitué par les sociétés, sans trop se soucier de
l'impact de cette politique confiscatoire, dictée par une idéologie attardée,
sur l’investissement productif, la compétitivité et l'attractivité de
l'économie. Pour ne pas faire de jaloux, il se fourvoie comme il l'a fait en
surtaxant les salaires et les autres revenus du travail, majorant ainsi de
façon exagérée le coût du travail, handicapant nos entreprises et nuisant à
l'emploi.
Il va sans dire que les salaires exorbitants, les stocks
options géants et les parachutes dorés pharamineux accordés à des dirigeants «
de haut vol », hors de proportion avec les prouesses de leurs entreprises ou de
leur apport personnel dans celles-ci, viennent fausser la perception des « dividendes
» par la population et en donnent une image très contrariante, rebutante.
D'inadmissibles « licenciements boursiers » font des ravages parmi les
personnes employées et font dénoncer le profit « à tout prix ». Et nos médias
véhiculent trop d'informations partielles ou tronquées et parfois
d'inexactitudes sur les « dividendes fabuleux », les plus forts distribués en
Europe, sans cesse croissants... Ils abusent de l'usage des « performances » du
CAC 40 et des sociétés qui le composent pour peindre avec des couleurs vives,
sinon éclatantes, une réalité qui est plutôt terne depuis presque dix ans. À
l'égard du CAC 40, qui a le mérite d'exister depuis 1987 et qu'il est
impossible d'ignorer, le présent article est moins une critique qu'une mise en
garde à l'attention de ses adorateurs. On lui attribue, ainsi qu'aux dividendes
distribués par ses sociétés, une représentativité excessive de la santé des
entreprises et de l'investissement en France, et son interprétation pour usage
boursicotier est plus complexe qu'il n'y parait. D'autres indicateurs seraient
bienvenus. D'utiles données « de cadrage » ou « de recadrage » peuvent être
puisées dans les Comptes nationaux... pour reposer les pieds sur terre.
Il est aussi regrettable que la participation des salariés au
capital des entreprises, que le général de Gaulle a fait inscrire dans la loi
en 1966, ne donne pas lieu à des incitations et à des encouragements plus
continus et résolus de la part des Autorités, et que des sociétés, parmi
lesquelles de très grandes, n'en aient pas encore compris tout l'intérêt. Les
dispositifs institués pour développer la participation aux résultats des
entreprises, l'intéressement des salariés et les plans d'épargne-entreprises «
piétinent » et méritent aussi qu'on leur porte plus d'attention. Surtout, il
faut cesser de regarder l'épargne comme une maladie honteuse, de la critiquer,
de la décourager, de pousser à la dépense, aussi bien privée que publique, et à
l'endettement. L'épargne est un gage de sécurité pour l'avenir, bien utile
aujourd'hui, et devrait être mieux orientée pour mieux financer les
entreprises, la croissance et l'emploi.
J'avais déjà abordé, sous d'autres angles, une partie de ces
questions dans un article de La Lettre du 18 Juin de septembre 2012 intitulé Marchés, investisseurs, les
changements c'est maintenant, en y traitant, notamment, des «errements et dérèglements sur les marchés financiers aux
abois». Il a peu perdu de son actualité.
Une épargne en souffrance à la recherche de rendements
honnêtes
Les taux d'intérêt sont au plus bas. Comme le moral de trop
de citoyens et la popularité du président Normal. Le « placement préféré des
Français », le livret A, dépérit. Son encours total a baissé de 266 milliards
d'euros (Mds €) en fin 2013 à 229 Mds € en mai 2016. Pourquoi se priver,
économiser, pour une rémunération de 0,75 % (depuis août 2015), d'ailleurs
jugée trop élevée par des gourous écoutés des Autorités, vu que les prix n'augmentent
pas, comme chacun peut le voir ? Non, l'heure n'est toujours pas à l'épargne,
mais à l'endettement. Tout est fait pour. L'assurance vie continue cependant de
fleurir... en rémunérant moins ses « assurés ». Son encours est monté de 1.387
Mds en fin 2013 à 1.600 Mds € en mai 2016 (soit 7 fois celui du livret A,
contre un peu plus de 5 fois 27 mois auparavant !). Ce « succès » traduit aussi
la perte de confiance dans l'avenir et le destin des retraites. La «
privatisation » de celles-ci est ainsi en plein mouvement... pour une partie de
la population.
DES IMAGES DÉFORMÉES DE
LA RENTABILITÉ POUR LES ACTIONNAIRES
D'un autre côté, les professionnels de la bourse tentent
toujours avec obstination, et sans succès, d'attirer plus d'épargnants sur le
marché « juteux » des actions. Pour « aguicher », les leurres appétissants
ne manquent pas. À vous faire oublier qu'il s'agit de placements à risques. Le
plus fréquent est le taux de rendement de l'action, mesuré par le montant du
dividende distribué à l'actionnaire rapporté au prix d'achat de l'action. Or,
seul le détenteur connait la date et le prix de l'achat qu'il a fait, et peut
donc calculer le rendement, pour lui, de « son » action. Aussi, à l'usage des
gens du métier, des « investisseurs », comme du public, des taux de rendement
annuel des actions sont largement diffusés. Concernant le prix d'achat retenu
pour le calcul de ce taux, « chaque support d'information peut choisir la
référence qu'il trouve la plus pertinente : cours moyen de la veille, cours
moyen de l'année calendaire concernée, cours moyen correspondant au versement
du dividende, etc. » m'a répondu la société Total à qui j'ai demandé des
précisions. Elle même retient le cours moyen de l'année. Cette liberté de choix
ne facilite pas la stricte comparaison des rendements entre sociétés.
Le taux de rendement est très variable d'une année à l'autre,
notamment parce que le montant du dividende dépend des performances et du
résultat de la société (mais pas que, voir ci-après), au numérateur, et de la
cote de l'action, qui est en perpétuelle fluctuation, au dénominateur.
Le CAC 40 et ses dividendes « fabuleux »
Un taux de rendement annuel est ainsi calculé également pour
des « paniers d'actions », parmi lesquels notre « indice phare », le CAC 40,
retient l'attention.
Les 40 sociétés figurant dans cet indice sont sélectionnées
parmi les cent dont les valeurs des échanges sur le marché sont les plus
importantes. Cette composition est révisée 4 fois par an. La sortie d'une
société du CAC 40 est possible en cas de chute de son capital boursier, d'achat
par une autre société ou de son manque de liquidité. Les sortantes sont
remplacées par des sociétés plus dynamiques. L'entrée de celles-ci dans
l'indice phare a le plus souvent pour effet de « stimuler » les cotes de leurs
actions.
Depuis 2000, le CAC 40 a connu 36 entrées et autant de
sorties temporaires ou définitives de sociétés. Un profond renouvellement,
donc, qui conduit à s'interroger sur la représentativité de cet indice (dont on
retire des pâlichons pour les remplacer par des gaillards) qui est sensé
mesurer la vigueur de la bourse et des grandes sociétés du pays.
Cocorico ! « La France championne d'Europe » de la
distribution de dividendes, claironnait France TV Info en fin août (1). C'est
possible, nous le verrons, même si elle n'est pas championne en matière de
croissance et de bénéfice des sociétés.
« Marché : 2016, encore un bon cru pour les dividendes »
affichait déjà Trading Sat au début mai, en ajoutant
« Plus gros payeur de dividendes de la zone euro en 2015, la France semble bien
partie pour conserver son titre. Tour d'horizon des meilleurs rendements de
l'année 2016 ». En effet, Il n'est pas « politiquement correct » de mettre en
exergue les plus faibles.
Pour les sociétés du CAC 40, la masse des dividendes
distribués devrait croître d'un peu plus de + 17 % à 46,1 milliards d'euros...
ou de + 9,9 % si on n'y inclut pas les dividendes exceptionnels versés par
Vivendi (4,027 Mds €) et Sanofi (3,811 Mds €).
Les grands champions de l'augmentation des dividendes
distribués en 20016 sont les banques, avec +71,4 % pour le Crédit Agricole, +
66,7 % pour la Société Générale + 54 % pour la BNP Paribas. Plus « modestes »
sont les hausses pour Publicis, + 33,3 %, Renault, + 26,3 %, et Sodexo, + 22,2
%.
En ce qui concerne les taux de rendements annuels, mis à part
Vivendi et Sanofi, les Oscars 2016 du CAC 40 sont décernés à Engie, 6,1 %, Total, 5,9 %, Crédit Agricole, 5,5 %, Société Générale, 4,7 %, et BNP
Paribas.
Et, hors du CAC 40, des performances encore supérieures sont
signalées, avec Rallye, 12,8 %, Casino, 7,4 %, et Mercialys,
7,1 % (2).
Comment ne pas rêver et nourrir de fols
espoirs devant de tels chiffres !
Argent Boursier nous avait déjà mis l'eau à la bouche (ou
fait éprouver des regrets) en janvier 2016 avec ce titre éloquent « Actions :
3,4 % de taux de distribution sur le CAC 40 en 2015 ». Ce taux correspondait à
une masse de dividendes de 42,7 Mds € comportant 34,8 Mds € de distribution en
« cash », 2,7 Mds € en actions, ainsi que 5,2 Mds € de rachats de leurs actions
par des sociétés. À la tête du classement en terme de taux de rendement annuel,
se trouvaient Vinci et Vivendi, à 6,3 %, Total, à 6,2 %, et Sanofi à 4,7 %. En queue,
Alcatel, Alstom et Peugeot n'avaient rien distribué à leurs actionnaires
(3).
Information importante : l'article soulignait que le
rendement du CAC 40 était en baisse... tandis que (et aussi en partie parce
que) les valorisations des actions étaient en hausse. En effet, en 2014, le rendement du
CAC 40 avait été évalué à 4,9 %, correspondant à une masse de dividendes de
56,0 Mds € (4).
De l'observation des masses des dividendes distribués par
l'ensemble des sociétés du CAC de 2006 à 2015 (5), il ressort que : 1° leur montant total annuel a
été très inconstant, avec des sommets de 54,2 à 57 Mds €, et avec des creux de
35,4 Mds et de 38,8 Mds, sans que des
liens étroits apparaissent avec l'évolution de la marge totale enregistrée ;
2° cette « volatilité » provient de
celles des amples variations des dividendes distribués en actions, d'une part,
et des rachats d'actions, très irréguliers, d'autre part ; 3° au contraire, on
assiste depuis 2010 à une assez grande stabilité de la masse des dividendes
distribués « cash », très resserrés autour de leur moyenne de 34,6 Mds €.
Visiblement, beaucoup de sociétés du CAC 40 s'évertuent à garantir aux
actionnaires des dividendes annuels en liquide sans surprise, que les résultats
soient bons ou mauvais, sans doute pour « fidéliser » leurs clientèles.
Une évolution des valeurs boursières
défavorable pour nombre d'actionnaires
Consciencieux, des sites spécialisés expliquent (aux
débutants) que la rentabilité d'une action s'évalue en tenant compte de son
rendement, mais aussi de l'évolution du cours de cette action, qui aura
enregistré une plus-value ou une moins-value. Or, malencontreusement, depuis
presque dix ans l'évolution à moyen terme du cours du CAC 40 est défavorable
aux actionnaires qui conservent leurs titres relativement longtemps.
Sans remonter à la bulle financière qui a vu le CAC 40
atteindre son Himalaya à 6.945 points le 4 septembre 2000, il ne faut pas
oublier qu'après une chute abyssale ayant enfoncé l'indice jusqu' à 2.401
points le 12 mars 2003, celui-ci avait atteint un nouveau sommet à 6.168 points
le 1er juin 2007. Puis, il a rechuté jusqu'à 2.855 points le 12 septembre 2011,
avant de remonter à 5.000 points au printemps 2015, puis osciller et peiner à
se stabiliser entre 4.300 et 4.500 points (4.491 le 9 septembre 2016, 4.330
sept jours plus tard). À ce dernier jour, le CAC40 avait ainsi perdu 30 % de
son niveau de juin 2007. Une baisse que les dividendes versés ont du mal à
compenser. De nombreuses actions du CAC 40 (ou non) ont connu des parcours
aussi mouvementés et se sont trouvés prises dans cette tendance baissière
contagieuse. Les petits actionnaires aussi.
Contrairement à ce qu'on pourrait penser, l'évolution du CAC
40 (en nombre de points) n'est pas exactement celle de la « capitalisation
boursière » du CAC (somme des valeurs en bourse des 40 sociétés). Cette
dernière lui est un peu supérieure, en raison du renouvellement des sociétés
(cf. ci-dessus). Ainsi, signe de la santé « fragile » de l'économie, entre juin
2007 et le 16 septembre 2016, l'indice a baissé de - 29,6 %. La capitalisation
boursière a faibli aussi, mais seulement de - 7,8 %, de 1.300 Mds € à 1.198 Mds
€. Cela rend l'interprétation des évolutions de l'indice et de la valorisation
boursière du CAC 40 d'autant plus délicates.
Un CAC 40, comme une économie, avec des sociétés
pas tout à fait françaises
« Les non-résidents |étrangers] ne détiennent plus que 45 %
du CAC 40 », constatait un article dans LesEchos.fr en fin septembre 2015 (6).
Une chute de plus de 2 % après le « record historique » de 47,6 % en 2014. À la
fin de cette dernière année les étrangers possédaient la majorité du capital de
18 sociétés du CAC 40 et détenaient 41,3 % de la valorisation totale des
actions «françaises». Merci à la mondialisation et à
l'Union européenne !
Une partie au moins de l'explication de ce « petit » recul
étranger tient dans cet autre titre du même média au début de juin 2016 : « Quand
les fleurons du CAC 40 plient bagage pour l'étranger ». En moins de deux
ans, quatre sociétés sont passées sous pavillon étranger. Il s'agit du groupe
Alcatel-Lucent, absorbé par le « fleuron » finlandais Nokia, des activités
énergie d'Alstom, reprises par General Electric, du cimentier Lafarge, passé
aux mains du Suisse Holcim, et, dernier en date, de Technip qui s'est associé avec la société américaine FMC et
dont le nouveau siège a été installé à Londres. « Est-ce le reflet du déclin
industriel français ? Ou bien le résultat de stratégies individuelles
désastreuses ? » s'inquiète l'auteur de l'article (7). Aucune hypothèse ne peut être exclue ! Et,
hors du CAC 40, un grand groupe Français « champion du nucléaire », Areva, en
pleine restructuration, vient de céder ses activités dans l'éolien en mer « au
tandem germano-espagnol Siemens-Gamesa pour quelque
60 millions d'euros » (8).
Si le poids de l'étranger parmi les grandes entreprises est
élevé, c'est aussi parce que « nos entreprises » ont des difficultés à résister
à la concurrence sur le marché français et/ou préfèrent investir à l'étranger,
sur de grands marchés porteurs et dans des pays où les coûts de la main d'œuvre
et la fiscalité sont plus attractifs. Nous en verrons les impacts ci-après sur
l'origine et la destination des dividendes distribués.
À cet égard, le cas d'actualité très médiatisé de la société
Alstom, qui était sur le point de fermer son unité de fabrication de matériel
ferroviaire de Belfort il y a quelque jour, est très parlant. Son carnet de
commande français est dégarni du fait d'une demande nationale limitée et
d'appels d'offres internationaux (imposés par l'appartenance à l'UE) qu'Alstom
ne parvient pas à gagner. En revanche, la société est en plein boum à l'étranger.
Globalement florissante depuis deux ans, après la cession de son activité
énergie, elle a réalisé des bénéfices enviables en 2015 et son action est
montée en flèche à la bourse de Paris.
Des informations édifiantes et des démentis
apportés par les Comptes nationaux
Les dividendes « géants » distribués par les sociétés du CAC
40 en 2015 ne représentent que 20 % des 213,8 Mds € de dividendes versés par
les sociétés financières et non financières résidentes en France.
Aux dividendes versés par les sociétés résidentes en France
s'ajoutent ceux venant de l'étranger. Ce retour sur investissements français à
l'étranger très « dynamique » s'est monté à 65,9 Mds € en 2015, après avoir
fortement progressé, surtout entre 2009, où il n'était que de 37,3 Mds €, et
2012. Sur les sept années, il s'est accru de plus de + 76 %. Cette évolution
illustre l'engagement de plus en plus important de « nos » sociétés hors de
France.
En sens opposé, les flux des dividendes versés à l'étranger
sont nettement plus faibles. De 29,5 Mds en 2009, ils sont montés jusqu'à 37,2
Mds en 2012 avant de plafonner et de s'établir à 38 Mds € en 2015. C'est un
témoignage de la baisse de l'engouement des investisseurs étrangers pour les
entreprises de France évoqué plus haut.
Ainsi, phénomène marquant des sept dernières années, la
balance des dividendes entre la France et l'étranger a « explosé ». D'un
excédent de + 7,8Mds en 2009, elle a bondi à + 24 Mds en 2012 et a atteint +
27,9 Mds € en 2015.
La plus grande partie des dividendes des sociétés résidentes,
ainsi que les dividendes venant de l'étranger, sont versés à des sociétés
résidentes, leurs principales actionnaires. Cette « inter-détention », mère
d'interdépendance, explique pour beaucoup les montées à l'unisson des valeurs
boursières ainsi que les effondrements « en châteaux de cartes » de la bourse
et de ses indices auxquels nous assistons périodiquement. Le montant de ces
dividendes reçus par les sociétés en France a atteint 206,2 Mds € en 2015 (un
peu moins que les 210 Mds de 2009).
Aussi, à la rémunération des actionnaires faisant partie des
administrations et des ménages n'ont été consacrés que 35,5 Mds € en 2015,
somme relativement peu éloignée de celles des années précédentes.
Les administrations et les ménages sont de « petits
actionnaires » (au moins globalement) C'est une faiblesse de nos marchés et du
mode de financement des sociétés. Ils ne reçoivent qu'une maigre partie des
dividendes : 8,1 Mds pour les administrations (qui ont vendu depuis des années une
grande partie des bijoux de famille) et 27,4 Mds pour les ménages... qui n'ont
pas le goût du risque boursier. On peut les comprendre.
Le tableau ci-dessous rapportant les masses de dividendes
versées et reçues par les agents économiques en 2009, 2012 et 2015 résume les
principales observations faites (9).