L'ITALIE À RECULONS !

par Luc BEYER de RYKE

Si la France se porte mal elle n'est pas la seule en Europe. Nous n'y verrons pas une consolation. Le pays auquel nous songeons est l'Italie.

J'en viens. Invité à tenir une conférence à l'Institut culturel français à Rome ce fut l'occasion d'un approche rapide mais riche d'enseignements.

Elle me conduisit dans les milieux politiques et diplomatiques sans omettre des amis italiens observateurs attentifs de leur pays. Le constat est inquiétant.

L'Italie se défait. Économiquement elle est en récession. Politiquement elle est en quête d'une autorité morale susceptible de juguler les mafias qui envahissent toute la vie de la cité. Les avis se recoupent. J'ai trouvé une analyse comparable auprès de tel ambassadeur comme celui de Marco Pannella le président du Parti Radical.

L'homme a vieilli. Avec ses cheveux blancs en queue de cheval il a pris un caractère faunesque sans oblitérer la connaissance approfondie qu'il a des intrigues et des « combinazione » dont est constituée la politique italienne.

« Ne crois pas, me disait-il, lorsqu'on parle de mafia qu'il n'en n'est qu'une, la sicilienne. Aujourd'hui, dans les grandes villes comme Rome, ce sont les partis politiques qui en jouent le rôle. »

Me disant cela Marco Pannella se référait à la collusion mafieuse dans laquelle est engluée l'ancienne mairie romaine, très à droite, et la nouvelle située au centre gauche. Si Marco Pannella semble aujourd'hui hors-circuit et se plaint d'être absent des médias, son bras droit, Emma Bonino, était il y a quelques mois encore ministre des Affai-res étrangères. Et au moment où le Président de la République Giorgio Napolitano - 90 ans en juin prochain - veut se retirer, le nom d'Emma Bonino est cité parmi d'autres, tels celui de Romano Prodi, pour lui succéder. Cela étant, les pouvoirs attachés à la présidence n'ont rien de comparables avec ceux de l'Élysée sous la Ve République.

La République des partis

Le personnage sous l'oeil des caméras est celui du président du conseil en l'occurrence Matteo Renzi. C'est un peu le Manuel Valls italien. Avec son énergie et ses coups de menton. Les deux hommes d'ailleurs se voient, se comprennent et s'entendent. Reste que la grande popularité de Renzi a été très écornée par la grève générale qui, en décembre, a paralysé l'Italie.

Le Premier ministre entreprend des réformes mais ne discute pas avec les syndicats. Ses partisans plaident l'urgence. « Le temps fait défaut pour le perdre en palabres. » Peut-être, mais sans consensus le pouvoir est barré et contré dans la rue.

Il est un parti qui grimpe dirigé par un autre Matteo. Matteo Salvani, l'actuel patron de la Ligue du Nord. Il y a peu, lors d'une élection partielle en Émilie- Romagne, la Ligue, à droite, a devancé largement Forze Italia. Berlusconi a trouvé un successeur. Ces succès ont donné des ailes à Salvani. Jusqu'ici la Ligue trouvait ses bastions dans le Nord, en particulier à Venise, et parlait volontiers de la Padanie. Voici que désormais ses ambitions s'élargissent à l'ensemble de la botte.

Et en France, Salvini trouve en Marine Le Pen, une alliée qui, espère-t-il, aura pour lui les yeux de Chimène. C'est une nouvelle donne qui se dessine.

L'État c'est l'ennemi …

Mais, sous les nervures de la vie politique et les orientations qui s'inscrivent, il existe une désaffection profonde de la population. À tel point qu'un politologue évoquant « l'incivisme » des Italiens me confiait qu'aux yeux de beaucoup « l'État est l'ennemi. Chacun retrousse ses manches pour le détruire ». Ce qui explique ce que je relevais en exergue, à savoir que l'Italie se défait.¾

 



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07.01.2015
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