Compte rendu du dîner-débat du 19 novembre2014

INDÉPENDANCE ÉNERGÉTIQUE,

ENJEUX STRATÉGIQUES POUR LA FRANCE

 

Intervention de Jean-Louis GUIGNARD

L'ÉNERGIE ET LA VIE

Une civilisation me parait se définir à la fois par les questions qu'elle pose et par celles qu'elle ne pose pas.

André Malraux

En cinq ans les Collectivités locales françaises ont diminué leur consommation énergétique de 9 % grâce à une politique d'investissement courageuse ; alors comment expliquer que dans la même période leur facture énergétique ait augmentée de 30 % environ ?

Aucun système vivant et aucun système organisé ne peut vivre ou fonctionner sans l'énergie; nous sommes tous un petit écosystème, toute notre société a pour carburant l'énergie. Mais c'est quoi l'énergie ?

Henri Bergson affirme qu'il « existe une énergie spirituelle qui ne peut se réduire à l'énergie physique ou biologique ». « Nous nous limiterons à ce qui est vérifiable, mesurable et reconnu par la méthode scientifique » (Bachelard).

L'énergie est un concept qui remonte à l'antiquité

Le mot français « énergie » vient du latin energia, lui-même issu du grec ancien ἐνέργεια / enérgeia. Ce terme grec originel signifie « force en action », par opposition à δύναμις / dýnamis signifiant « force en puissance » ;  Aristote a utilisé ce terme « au sens strict d'opération parfaite », pour désigner la réalité effective en opposition à la réalité possible.

Après avoir exploité sa propre force et celle des animaux, l'homme a appris à exploiter les énergies contenues dans la nature (d'abord les vents, énergie éolienne et les chutes d'eau, énergie hy-draulique) et capables de lui fournir une quantité croissante de travail mécanique par l'emploi de machines : machines-outils, chaudières (Denis Papin) et moteurs. L'énergie est alors fournie par un carburant (liquide ou gazeux, issu d'énergie fossile ou non).

Il faut noter que pour un physicien il n'y a pas de sources d'énergie, ni d'énergie renouvelable, ni de pertes d'énergie car l'énergie, selon le premier principe de la thermodynamique étudié par Anaxagore puis Lavoisier…. « Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme. »

La force du vent et de l'eau est historiquement utilisée préfigurant notre transition énergétique.

L'énergie est un concept physique créé pour quantifier les interactions entre des phénomènes très différents ; c'est un peu une monnaie d'échange commune entre les phénomènes physiques. Ces échanges sont contrôlés par les lois et principes de la thermodynamique et s'exprime en joule ou kilowatt. Aucune utilisation de l'énergie n'étant à 100% de rendement le solde se traduit par la production de chaleur. Ce point est particulièrement important puisque l'équilibre thermique de notre planète, ou son déséquilibre, peut avoir des conséquences redoutables pour notre écosystème. Le réchauf-fement climatique provoqué par l'effet de serre est une des conséquences mais pas la seule. On ne peut limiter l'approche à celle du CO² car de nombreux autres effluents ont un effet plus important; pour notre part nous privilégierons les technologies du recyclage du CO².

Concrètement nous privilégierons la notion d'énergie à la capacité d'un système à produire un travail entrainant un mouvement (moteurs) ou de la lumière, de la chaleur, de l'électricité. En 2000 nous n'avons produit et utilisé qu'un dix millième de l'énergie apportée par le soleil. L'histoire permet d'explorer les crises en les replaçant dans la durée. Depuis l'utilisation du feu de nos lointains ancêtres les moyens de convertir les sources d'énergie en énergie utile ont toujours rencontré des limites physiques (épuisement des ressources,…), sociales (bois pour les riches et charbon pour les pauvres,….), économiques et géopolitiques et bien évidemment la pollution et le réchauffement dû à l'activité humaine.

Le débat mondial sur les effets du réchauffement climatique et la maitrise des émissions de gaz à effet de serre ont conduit à envisager des transformations sur les modes de consommation, de gestion et de production de l'énergie.

La notion de transition énergétique désigne le passage du système énergétique actuel utilisant des ressources non renouvelables vers un bouquet énergétique basé principalement sur des ressources renouvelables c'est-à-dire toujours disponibles comme par exemple l'énergie solaire; ceci ne sera possible que par le développement de solutions de remplacement compatibles pour l'environnement, la disponibilité, la compétitivité... Pour beaucoup de mouvements écologistes c'est la transition vers la fin du nucléaire…nous verrons ce qu'il en est.

L'expérience allemande dans ce domaine s'avère mitigée pour l'environnement, pour l'économie et l'emploi mais très positive concernant la gestion de l'énergie en particulier dans le domaine des écono-mies (isolation des bâtiments entre autres…). En France notre parc nucléaire nous a permis d'être parmi les bons élèves écologiques en évitant la mise en action de centrales à charbon quand éoliennes et fermes photovoltaïque ne produisent pas sans compter la facture carbone pour leur construction, les risques considérables et in financement de Ponzi! On observe aussi que le nombre de mise en chantier de centrales nucléaires n'a jamais été aussi important qu'aujourd'hui en Chine avec les centrales à boulets et en Inde avec le Thorium (entre autres ), deux solutions qui ne présentent pas les dangers de l'uranium.

L'énergie a toujours été source conflits; en 1917 l'arrêt des combats a été bloqué par le charbon en Lorraine revendiqué par les allemands. Aujourd'hui le fait que l'Ukraine soit une éponge en gaz de schiste n'est pas étranger à la crise et l'étroite coopération entre les sociétés pétrolières et le renseignement ne doit pas étonner. Le Président de Total voulait négocier en euros. Nous sommes aussi dépendants de pays pétroliers qui ne nous aiment pas. En Europe chacun tire à hue et à dia malgré les efforts de la Commission. Dans ce contexte il n'est pas étonnant qu'il faille rechercher notre indépen-dance énergétique nationale et que l'on observe nombre d'initiatives pour l'autonomie de la collectivité locale, aux exploitations industrielles et agricole et même aux particuliers; plusieurs facteurs jouent dans ce sens :

 

-  coût du transport (presque 50 % pour l'électricité) ;

-  le stockage qui fait d'énormes progrès ;

-  rapprochement (distance, temporelle…) production/utilisation ;

-  progrès dans les coûts de production, utilisation des déchets et de la biomasse ;

-  compatibilité environnementale… par exemple par recyclage du CO²… ;

-  sécurité et sûreté.

Les moyens

On a affaire à un ensemble complexe ou chaque élément interagit avec les autres; le rôle de l'état est d'assurer cette coordination système en toute indépendance des lobbies et les garanties de fourniture; en cas de panne locale il doit assurer cette continuité.

A - Les utilisateurs sont de toutes sortes du particulier aux collectivités territoriales en passant par le transport, la production industrielle…Chacun a ses particularités temps d'utilisation, type d'énergie, contraintes (environnement, économique…), forme d'énergie utilisable (électricité, carburants, charbon, gaz, …), sécurité….

B - Sans entrer dans les détails un utilisateur va utiliser l'énergie sous la meilleure forme appropriée pour :

Eclairage très gros consommateur; l'arrivée des LED et une production locale va réduire fortement cette consommation.

Climatisation ; l'Allemagne a considérablement diminué la facture par la conception des bâtiments et une meilleure gestion; les compteurs individuels…

 

Le transport; les voitures ont vu leur consommation fortement diminuée en polluant moins; nous verrons prochainement l'arrivée des piles à combustible (hydrogène). Le ferroroutage serait plus efficace si on transportait la charge seule plutôt que le camion; ce serait un changement de paradigme pour le transport routier au niveau européen que j'avais proposé à la SNCF mais qui a eu l'opposition farouche des syndicats rejoignant ainsi le premier parti de France, celui de l'immobilisme.

Les utilisations diverses (industries, services…).

Avec des règles et contraintes économiques, environnementales, normatives, de sécurité…

C - Les sources d'énergie :

-          éolien (axe vertical, horizontal), hydroliennes ;

-          houille blanche ;

-          photovoltaïque ;

-          pétrole, charbon, schiste, grisou, gaz… ;

-          biomasse ;

-          hydrogène ;

-          nucléaire.

D - Le stockage.

E - Le réseau de transport.

F - La gestion.

G - L'innovation.

H - Contraintes économie, environnement,

réglementation.

I - Perspectives.

Alors que faire ?

L'Union européenne dans le cadre du programme Horizon 2020 libère d'énormes budgets (2.4 G€ pour la France) pour la recherche et développement en insistant sur les projets à fort impact économique; cet effort est indispensable à condition que ces crédits et subventions ne soient pas mobilisés par les seuls grands groupes (ou leurs filiales) et que la règle imposant une coopération entre trois pays soit moins restrictive. Par ailleurs on observe une lutte du « chacun pour soi » du fait que chaque pays est un cas particulier dont les problématiques sont assez différentes. L'UE n'a pas réussi à imposer l'euro comme monnaie d'échange pour l'énergie et les matières premières.

La France avec son parc nucléaire, son réseau de transport électrique et gazier, la transition vers des voitures électriques ou hybrides, sa réserve importante en biomasse, les technologies émergentes et surtout, ce qui est moins connu, la baisse en demande d'énergie au cours des dix prochaines années a de très bonnes perspectives à condition de vaincre l'immense force du conservatisme.


La transition énergétique en France doit prendre en compte l'expérience allemande

 

Les plans allemands d'économie d'énergie en particulier dans le bâti sont un succès. Par contre le volet énergie nouvelles pose problème. Nous devons prendre cette expérience en compte car des solutions existent et la France a de nombreux atouts.

Les technologies évoluent plus performantes et propres; il convient dons de subventionner la R&D pour des projets innovants, intrinsèquement profitables et propres en prenant soin de ne pas voir ces subventions monopolisées par les grands groupes

Les miraculeux emplois verts s'effondrent en Allemagne

 

L'énergie renouvelable était censée créer des dizaines de milliers d'emplois verts. Pourtant, malgré des centaines de milliards d'euros de subventions, le nombre d'emplois diminue rapidement. Sept emplois sur dix ne resteront que si les subventions continuent d'affluer.

Les subventions des énergies renouvelables n'ont pas conduit à une augmentation significative et durable de l'emploi. Selon des chiffres récents du gouvernement allemand, le nombre brut d'emplois dans les énergies renouvelables est de 363.100 en 2013 et a diminué d'environ 7 %. En comptant les salariés des organismes publics et des institutions académiques, les énergies renouvelables ont créé du travail à environ 370.000 personnes.

Cela signifie que seulement 0,86 % environ des 42 millions de travailleurs en Allemagne sont employés dans le secteur fortement subventionné des énergies renouvelables. Une grande partie de ce travail est limité à la maintenance et à l'exploitation des installations existantes.

D'autres suppressions d'emplois attendues

Dans le cœur de l'industrie, pour la production des systèmes d'énergies renouvelables, seulement 230.800 personnes occupaient un emploi l'an dernier : une baisse de 13 % dans l'année, principalement due à l'effondrement de l'industrie solaire allemande.

Il n'y a pas d'amélioration en vue, selon le rapport récent du gouvernement fédéral qui dit : « Dans l'ensemble, une nouvelle baisse des emplois sera probablement observée dans le secteur des énergies renouvelables dès l'année prochaine. ».

La grande majorité des emplois de ce secteur est encore tributaire des subventions, quinze ans après le début des subventions à l'énergie verte par le biais de la loi sur les énergies renouvelables (Erneuerbare-Energien-Gesetz, l'EEG).

Presque aucun emploi des énergies vertes n'est financièrement indépendant.

Selon les chiffres officiels du gouvernement fédéral, 70 % de l'emploi brut était dû aux énergies renouvelables (EEG) l'année dernière. Bien que ce soit une légère baisse par rapport à 2012, sept emplois sur dix dans le secteur de l'énergie-écologique sont encore subventionnés par la loi sur les énergies renouvelables (EEG).

Environ 137.800 personnes travaillent dans le secteur de l'éolien, seul secteur de l'éco-énergie, hors géothermie, qui ait augmenté l'emploi. Environ 56.000 salariés dans le secteur photovoltaïque dépendent du paiement par l'EEG.

Les investissements chutent de 20%

Les subventions à la production d'électricité verte ont été payées pendant près de quinze ans et totalisent une somme en centaines de milliards, qui doit être encore payée pendant plus de vingt ans par les factures des consommateurs d'électricité. Cette année seulement, les consommateurs doivent subventionner la production d'électricité verte à hauteur d'environ 20 milliards d'euros. Un effet durable sur le marché du travail n'a rien d'évident.

Le rapport « L'emploi brut dans les énergies renouvelables en Allemagne en 2013 », commandé par le ministère fédéral de l'Économie et de l'Énergie, a été rédigé conjointement par les instituts du DLR, DIW, STW, GWS et Prognos. Selon les chercheurs, la cause de la baisse de l'emploi est due à la baisse des investissements en énergie verte.

Les investissements dans les énergies renouvelables en Allemagne ont chuté de 20 %, à 16,09 milliards d'euros l'année dernière. Par rapport à l'année précédente, environ la moitié seulement des panneaux solaires a été installée en Allemagne. Les investissements dans les usines de biomasse et dans le solaire thermique ont chuté également.

« Il ne reste rien du miracle de l'emploi »

Les chercheurs ne s'attendent pas à ce que la production de systèmes de haute qualité en énergie verte conduise encore à un boom de l'emploi en Allemagne. Pour cette année et la suivante, ils s'attendent plutôt à une nouvelle baisse de l'emploi. Par la suite, les secteurs de basse technologie tels que « l'entre- tien de fonctionnement » ainsi que la fourniture de combustibles de biomasse sont attendus pour « stabiliser l'emploi ».

« Il y a quelques années, le secteur des énergies renouvelables a été un miracle pour l'emploi en Allemagne, maintenant il ne reste rien de tout cela », a déclaré Oliver Krischer, le chef adjoint des Verts au Bundestag.

Ce politicien vert est sceptique sur les tentatives du gouvernement fédéral qui visent à réduire la dépendance de la subvention aux énergies vertes : « Les freins à l'expansion des énergies renouvelables par le gouvernement conservateur-libéral précédent frappent maintenant fortement le marché du travail », a déclaré Krischer, « À cause de la réforme des énergies renouvelables (EEG) en cours par les syndicats et le SPD, l'industrie jeune et innovante des énergies renouvelables va perdre davantage d'emplois. »

Au bout du compte, il ne reste aucun emploi

Le rapport du gouvernement fédéral estime explicitement que l'« emploi brut » est créé principalement par des subventions vertes. Les mêmes subventions, cependant, ont conduit à la hausse des coûts et des pertes d'emplois dans de nombreux autres domaines, comme l'industrie lourde et le commerce ainsi que chez les opérateurs de centrales conventionnelles. Pour une analyse nette, les emplois qui ont pu être empêchés ou détruits en conséquence devront être déduits du nombre brut des emplois verts.

Les chiffres officiels de l'effet net sur l'emploi des énergies renouvelables en Allemagne devaient être à l'origine présentés en juillet, selon le ministère de l'Économie fédérale. Toutefois, la présentation a été retardée jusqu'à l'automne.

Des chercheurs comme le président de l'institut IFO de Munich, Hans-Werner Sinn, croient que l'effet net des subventions pour les énergies renouvelables sur le marché du travail est égal à zéro : « Celui qui prétend que des emplois nets ont été créés doit prouver que le capital investi pour la production d'énergie dans les nouveaux secteurs est plus faible que dans les anciens. Il n'y a aucune indication dans ce sens. » « Il n'y a pas d'effet positif net sur l'emploi par les énergies renouvelables (EEG) », a également déclaré Sinn. « Grâce à des subventions pour des technologies inefficaces, pas un seul nouvel emploi n'a été créé, mais la richesse a été détruite. » ¾

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04.12.2014
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