par
Pierre MAUREL,
inspecteur
général de l’Administration de l’Éducation nationale et de la Recherche
(h)
« La question n’est pas de savoir
quel monde nous allons laisser à nos enfants
mais quels enfants nous allons
laisser au monde ? »
Jorge
SEMPRUN
Y a-t-il sujet
plus diviseur que l’École ? L’aborder par quelque thème que ce soit est toujours
périlleux. Vous serez accusé de discours culpabilisant et élitiste, de jeter le
discrédit sur les enseignants, de stigmatiser le service public, de jeter
l’opprobre sur les enfants, de faire le lit de ceux qui voudraient privatiser
l’éducation. Et si vous choisissez d'écrire sur la violence à l’école (en dehors
des séminaires ou des sites réservés aux professionnels), vous ajouterez à
toutes ces accusations celle d’inciter à la mise en oeuvre de mesures autoritaires. Cette atmosphère si
particulière autour de l’instruction et de l’éducation de nos enfants conduit à
l'aveuglement sur les problèmes majeurs de l’école publique et au
déni.
Pourtant
l’échec scolaire qui frappe des centaines de milliers d’enfants chaque année est
toujours très présent. Comme la violence à l’école qui mine l’institution. Les
médias qui, pour faire de l’audience, n’abordent le sujet que sur le registre de
l’émotion et de la dramatisation relayent, avec complaisance, les incidents les
plus violents (racket, attaque au couteau, viols, trafics de drogue, guerre des
gangs, agressions gratuites filmées sur les téléphones portables...) qui nous
persuaderaient facilement que nos enfants vivent dans un univers ultra-violent.
Ils déforment la réalité d’une école qui n’est tout de même pas un lieu de
perdition. Mais c’est pourtant bien dans l’enceinte scolaire qu’on relève en
2013 de multiples incidents tragiques. À Bourg-Saint-Maurice en Savoie un enfant
se suicide. Il était roux, on se moquait de lui. Il s’est pendu. Dans les
Hauts-de-Seine, un élève mord un professeur qui veut lui confisquer son
téléphone portable. À Marseille des jeunes armés font irruption dans un
lycée.
À Argenteuil dans le Val-d’Oise, un
proviseur adjoint est frappé au visage par le frère d’un élève. À Lyon, c’est un
professeur de sport qui est passé à tabac par un père à coups de matraque
télescopique. Dans un lycée professionnel de Bordeaux, un élève en désaccord
avec un cours sur la religion roue de coups son professeur. À Poitiers, une
élève de 4e gifle un professeur d’histoire-géographie à cause d’une mauvaise
appréciation sur le cahier de correspondance...
Depuis 1996,
le nombre de mineurs mis en cause est passé de 143.824 à 214.612 soit + 42,9 %
(pour les majeurs + 45 %). Le nombre des mineurs auteurs d’atteintes à
l’intégrité physique est passé de 16.163 à 46.713 soit + 185,7 % dans le même
temps, et parmi ceux-ci, les auteurs de violence à dépositaires de l’autorité de
963 à 3568 soit + 270,5 %. Certes sur la même période le signalement des faits
et leur qualification ont évolué, mais cette évolution est aussi le reflet de la
fréquence et de la nature des actes enregistrés1.
La violence
est une composante intrinsèque de la vie collective que le processus de
civilisation s’épuise à tenter d’endiguer. Mais, malgré le travail incessant de
l’humanité pour qu’elle se défasse de ses instincts animaux, rien ne peut
l'éradiquer du cœur des hommes. « Tout est fragile et la violence affleure sans
cesse... la tâche de la maîtrise de la violence est infinie. »2. On ne devrait
donc pas s’étonner de la rencontrer dans des lieux destinés à l’éducation. Nous
y accueillons les petits de l’homme dont on sait, au moins depuis l’Antiquité,
qu’il est violent par nature, profondément agressif et doté de tendances
destructrices.
Pour Platon3,
« ...de tous les animaux, c’est l’enfant le plus difficile à manier ; par
l’excellence même de cette source de raison qui est en lui, non encore
disciplinée, c’est une bête rusée, astucieuse, la plus insolente de toutes
».
La violence à
l’école est une donnée permanente de l’histoire de la jeunesse à travers les
âges... Au XIXe siècle, le lycée Louis-le-Grand a connu huit révoltes d'élèves
(on disait alors « mutineries ») entre 1815 et 1883, dont plusieurs
nécessitèrent l'intervention de la police parisienne. Dans les cours de
récréation c’est la loi du plus fort qui s'est toujours
exercée.
L’école est
donc bien interpellée par la violence, tant celle des élèves qu’elle accueille
que celle qu'elle exerce dans son fonctionnement.
L’ÉDUCATION
NATIONALE RECONNAIT MAINTENANT LA VIOLENCE À L‘ÉCOLE C’est dans les années 1990
que la violence à l’école fait irruption sur la scène médiatique et que le
Ministère conçoit les éléments d’un premier plan d’envergure contre la violence
à l’école pour la rentrée 1992. La violence devient un phénomène de
société4.
Avant ces
dates, dans les années 1970-1980, des actes particulièrement dramatiques
survenus en établissement scolaire avaient été régulièrement rapportés par la
presse mais sans réaction notable de la société dans son ensemble ni du
ministère de l’Éducation nationale qui ne s’est pas rendu facilement à
l’évidence que la violence commençait à déferler sur
l’école.
C’est en 1979
seulement que le ministre demande un tout premier rapport à l’Inspection
générale de l’Éducation nationale. Rapport confié à l’inspecteur général George
Tallon qui va examiner la situation de quarante et un collèges « en situation a
priori difficile », et un échantillon représentatif de lycées professionnels.
Dix ans plus tard, à la rentrée scolaire 2001, le ministère de l'Éducation
nationale met en place le premier logiciel de recensement des actes de violence
à l’école, le logiciel SIGNA (pour « Signalements »). La France est un des rares
pays à tenter de relever les faits de violence à l’école en utilisant un
signalement par les chefs d’établissement des faits graves. Le risque de ce type
de statistiques est qu’il minore le nombre d’incidents et a fortiori le nombre
de victimes. À la fois parce que certains actes graves de violence retenus dans
la nomenclature5 - ceux « qui ont un retentissement important dans la communauté
scolaire » - ouvrent à une forte part de subjectivité (qui a pu conduire à des
phénomènes de sur-déclaration ou de sous-déclaration) et parce que la
concurrence entre les établissements a pu contribuer à
ne pas signaler certains actes graves6.
Par ailleurs,
toujours pour ne pas ternir la réputation de l’établissement, on prend
l’habitude de couvrir les petits événements, les insultes et les incivilités.
Les insuffisances de ce logiciel et la publication dans le magazine Le Point
d’un « palmarès » des établissements les plus violents ont conduit à la
suppression de SIGNA et à son remplacement en 2007 par un nouveau logiciel SIVIS
(Système d’information et de vigilance sur la sécurité scolaire) qui se veut
plus objectif. Ainsi les données, totalement anonymes, ne peuvent donner lieu à
aucune comparaison entre les établissements. Il s’agit d’une enquête sur un
millier d’établissements (l’Éducation nationale gère 55.000 écoles primaires et
11.300 établissements du second degré). Pour être déclaré l’incident doit
répondre au moins à l’une des conditions suivantes : motivation à caractère
discriminatoire, usage d’une arme, utilisation de la contrainte ou de menaces,
actes ayant entraîné des soins ou causé un préjudice financier important, porté
à la connaissance de la police, de la gendarmerie ou de la justice, susceptible
de donner lieu à un dépôt de plainte ou à un conseil de
discipline.
SIVIS écarte
ainsi les incidents mineurs (bousculades, petites empoignades, menaces et
injures « classiques », petits chapardages), pour des raisons en apparence
objectives : d’une part, ces incidents existent depuis toujours et ne sont donc
pas spécifiques au contexte contemporain, d’autre part, leur appréciation est
extrêmement subjective. Pourtant, tous les chercheurs accordent à l’inverse
beaucoup d’importance à ces petits incidents, qu’ils intitulent « incivilités ou
micro-violences ». Ils soulignent que leur répétition entretient une tension
permanente qui favorise à terme l’émergence d’une violence plus brutale, et qui
peut aussi être le signe d’un harcèlement dont sont victimes les élèves les plus
fragiles. SIVIS ne retient donc pas ces incidents mineurs, mais pour les élèves
seulement car il les retient pour les personnels de l’Éducation nationale, au
motif que, dans ce cas, tout incident constitue une « atteinte grave envers
l’institution scolaire ». Or, si un même incident peut être jugé plus grave
lorsqu’il concerne un personnel de l’établissement que lorsqu’il concerne un
élève, c’est que ce dernier est renvoyé à un statut d’infériorité civique. Ce
choix méthodologique qui considère qu’une agression contre un adulte est plus
grave qu’une agression contre un autre élève est très
contestable.
Les
incivilités sont devenues de plus en plus nombreuses et bien qu’elles ne
franchissent pas la ligne qui les ferait basculer dans les incidents graves
elles viennent profondément perturber le fonctionnement de la classe ou de
l’établissement. Elles font naître un sentiment d’insécurité et élèvent le degré
d’intolérance. Le regard que porte Éric Debarbieux7 sur l'évolution générale de
la violence scolaire pourrait se résumer en une formule : moins fréquente mais
plus grave. Par exemple, les victimes se plaignent d'une plus grande violence du
racket, désormais pratiqué plus souvent en bande. Il constate que ce processus
paradoxal de diminution quantitative et d'aggravation qualitative est corrélé
avec la ghettoïsation de certains établissements concentrant les difficultés,
notamment les problèmes de racisme.
Les
statistiques les plus récentes de la Direction de l’évaluation, de la prévision
et de la prospective (DEPP)8 montrent que les
établissements publics du second degré ont recensé 54.000 incidents graves en
2012-2013 (51.000 en 2011-2012). Rapporté au nombre d’élèves, le nombre
d’incidents graves s’établit à 14,4 pour 1000 élèves, chiffre en hausse par
rapport à 2007-2008 (11,6 pour 1000 – 2010-2011 : 12,6 – 2011-2012 : 13,6). La
plus grande partie se retrouve dans le premier cycle du secondaire et dans les
lycées professionnels : 70 % en collèges, 16 % en lycées professionnels et 14 %
en lycées d’enseignement général et technologique et en lycées
polyvalents.
C’est en lycée
professionnel que l’on compte le plus grand nombre d’incidents pour 1.000 élèves
soit 24 pour 1.000. Le dixième des établissements les plus concernés par la
violence concentre 40% des incidents. La violence en milieu scolaire se compose
principalement d’atteintes aux personnes qui regroupent 80 % des incidents
déclarés, les incidents concernant des atteintes aux biens ou à la sécurité
concentrent chacun 10 % des faits.
Un tiers des
victimes d’incidents sont des enseignants. En moyenne, pour 1.000 enseignants on
dénombre 42 victimes d’incidents graves. Viennent ensuite des violences
physiques généralement entre élèves (33 % des incidents). Les autres atteintes
aux personnes moins fréquentes sont les violences à caractère sexuel, le racket,
les atteintes à la vie privée. Pour ce qui est des atteintes à la sécurité, on
retrouve les comportements illégaux ou à risque : la consommation de stupéfiants
qui est en hausse significative cette année, le port d’armes blanches ou
d’objets dangereux, la consommation d’alcool, les vols et les dommages aux
locaux ou au matériel.
La
violence n’épargne pas l’école primaire
C’est l’une
des conclusions de l’enquête publiée le 20 septembre 20129 à partir des
témoignages recueillis auprès de 12.000 professeurs des Écoles : Si 62 % se
disent peu ou pas victimes d’actes de violence, 46,5 % des personnels des écoles
situées en Éducation prioritaire perçoivent une violence très fréquente ou assez
fréquente contre 18,3 % hors éducation prioritaire. La « victimation » contre les personnels est essentiellement
constituée de violences verbales et symboliques, les faits de violence physique
sont plutôt rares (5,6 % des répondants bousculés violemment ; 3,6 % frappés).
La violence paroxystique est très rare (0,04 % de répondants blessés par
armes).
Plus
inquiétant encore, 37 % des professeurs de primaire disent avoir eu au cours de
l’année des problèmes fréquents avec des enfants « gravement perturbés ». Le
rapport qui évoque clairement les troubles de la conduite et du comportement,
parle de « comportements répétitifs et persistants, socialement inadéquats et
mettant en danger les droits ou la personne d’autrui ou de soi-même ». Plus
concrètement, des enfants se roulent par terre, refusent l’autorité et peuvent
perturber une classe entière.
Signe des
temps, les enseignants souscrivent des assurances contre les violences : 55 %
des professeurs et 50 % des chefs d’établissement ont souscrit à la rentrée,
auprès de la MAIF, une assurance qui leur garantit à la fois une couverture
juridique et une protection contre les dommages corporels.
LA
NATURE DES VIOLENCES A CHANGÉ PROFONDÉMENT DEPUIS UNE TRENTAINE
D’ANNÉES
Des
jeux belliqueux et dangereux
« Donner
joyeusement des baffes », tel est le sens littéral de l’expression « Happy slapping ». Apparemment venue d’Angleterre, cette pratique
est liée à la généralisation du téléphone portable, puisqu’il s’agit de filmer
avec un mobile une agression gratuite. Si ces agressions sont la plupart du
temps de simples gifles, elles sont parfois beaucoup plus violentes. Quelques
rares cas d’enregistrement d’agressions de professeurs ont été recensés. C’est
pourquoi, en 2007, le législateur a considéré que l’enregistrement de la vidéo
d’une agression devait être assimilé à un cas de complicité de violence sur une
personne, et donc passible de condamnation.
D’autres jeux
violents pratiqués en cours de récréation ont aussi fait parler d’eux ces
dernières années, notamment toutes les versions du « jeu du bouc émissaire »,
qui consiste à frapper violemment un individu choisi aléatoirement dans le
groupe. Mais le plus dangereux est incontestablement le « jeu du foulard ». Il
existe depuis très longtemps et a été signalé depuis plus de cinquante ans, mais
il semble avoir augmenté ces dernières années. Il consiste à couper l’arrivée du
sang au cerveau en comprimant les deux carotides avec un foulard, une corde, ou
avec le bras du partenaire. Le but est d’atteindre la phase d’hallucination qui
succède au malaise initial. Outre le risque de ne pas s’arrêter à temps, il est
très dangereux si le jeune tente de le pratiquer seul en essayant de s’étrangler
avec un lien accroché à un support.
L’anomie dans
certaines classes est une vraie violence pour les élèves qui voudraient
travailler
L’école
publique doit accueillir tout le monde mais certaines classes d’écoles, de
collèges ou de lycées sont paralysées par des « élèves » dont la principale
occupation est d’imposer une norme de conduite anti-scolaire aux élèves qui,
eux, voudraient pouvoir étudier. Les uns poussent les autres à abandonner tout
effort. C’est la tyrannie de la majorité qui est pleinement à l’oeuvre au sens de Hannah Arendt : « Affranchi de l’autorité
des adultes, l’enfant n’a donc pas été libéré mais soumis à une autorité bien
plus effrayante et vraiment tyrannique : la tyrannie de la majorité »10. Cette
tyrannie des « exclus de l’intérieur » s’exerce essentiellement sur des jeunes
issus de milieux populaires (parce que les enfants des classes favorisées ou
très favorisées ont depuis longtemps quitté ce genre d’établissements
scolaires). Dans ces établissements qui vivent des situations extrêmes les
problèmes de discipline, de calme, d’attention sont devenus tellement prégnants
qu’ils en viennent à occuper énergie, temps et moyens au détriment de
l’acquisition réelle des connaissances.
Ces élèves qui
voudraient travailler et qui savent que l’étude pourrait les faire échapper aux
parcours sociaux auxquels ils semblent voués sont condamnés par les « exclus »
qui ne cessent de perturber les classes et les pousse à cultiver des conduites
de rupture avec le reste de la société. Les enseignants qui ne sont pas préparés
à affronter ces situations (et ce sont souvent de très jeunes professeurs sortis
de l’université et n’ayant reçu aucune formation professionnelle) ne peuvent
faire autrement pour des raisons de survie que de fuir ou d’adapter leur
enseignement. Ce sont des situations qui mènent à la constitution toujours plus
affirmée de « communautés » et à « l’ethnicisation »
croissante de l’école. Ce sont de véritables ghettos scolaires dans lesquels la
société paraît abandonner ces jeunes11.
Il ne faut
pas, pour ces établissements, multiplier les dispositifs de surveillance,
hausser les murs de l’école ou, pire, punir davantage les parents et les élè-ves. Il faut fermer les « collèges ghettos », construire
de nouveaux établissements ailleurs et, en attendant, répartir les élèves dans
les établissements voisins en prenant garde de préserver une réelle mixité
sociale. Ce n’est évidemment pas techniquement simple mais, surtout, il y faudra
beaucoup de courage et une volonté politique inébranlable.
Le
rapport filles et garçons à l’école
Les garçons en
difficulté scolaire face à des filles en réussite scolaire qui apparaissent plus
en connivence avec des personnels massivement féminins, ont tendance à vouloir
montrer à ces dernières qu’ils sont quand même les plus forts en les bousculant,
en les agressant physiquement, voire sexuellement.
Les garçons
dans cette situation, et notamment ceux dont les familles sont originaires de
certaines cultures, ont tendance à réagir en créant dans l’école ou dans le
quartier des groupes, des bandes exclusivement composés d’hommes. Mais ces
comportements ne se limitent pas aux banlieues et aux jeunes influencés par
l’islam radical. Certains clubs de supporters de football appartiennent à cette
catégorie de bandes masculines véhiculant une idéologie profondément misogyne et
rabaissant la femme alors qu’ils sont composés de jeunes « gaulois » issus
quelquefois de familles aisées...
Cette violence
masculine que toutes les enquêtes montrent en accroissement dans les
établissements scolaires, notamment les dernières années du collège, est aussi
alimentée par le rejet de la part des garçons du « modèle féminin ». (Comme le
dit Marie Choquet, directrice de recherche à l’INSERM : « Toutes les conduites
sont sexuées. Il y a bien un modèle masculin et féminin. ») Les idéologies
rabaissant la femme trouvent ici un terreau fertile conforté par l’image de la
femme véhiculée par certaines émissions de téléréalité.
Cette violence
se manifeste aussi aux dépens des jeunes garçons qui apparaîtraient se comporter
« comme des filles », qui sont violemment rejetés, assez souvent avec des
injures à caractère homophobe. Avec en toile de fond, le poids des
représentations et des mentalités qui enferme certains jeunes de tous les
milieux sociaux dans la caricature « machiste » : d’un côté l’homme à la
virilité exacerbée ; de l’autre la femme mère ou putain... Comme le disait un
haut responsable de l’Éducation nationale : « Il n’est pas rare que les filles
fassent l’objet d’insultes sexistes dans les couloirs des établissements. Il
faut que les enseignants réagissent davantage contre ces incivilités et ces
rapports de force. ».
Ne pas traiter
cette fracture « sexuée » qui s’accroît entre garçons et filles favorise donc un
accroissement des violences scolaires entre garçons et filles. Les garçons
essayant de reconquérir par la force la place qu’ils ont perdue dans le domaine
de la réussite scolaire.
POURQUOI CETTE
VIOLENCE ? L’école n’est plus un sanctuaire
Banaliser
l’école, la désacraliser, constitue le plus mauvais service qu’on puisse lui
rendre. L’établissement scolaire, espace d’expression et de formation aux
valeurs républicaines, n’est plus aujourd’hui un lieu de savoirs protégé mais un
lieu de rencontres, dans lequel une population à l’avenir incertain et surtout
non sécurisé à terme pénètre sans repères maîtrisés.
En réaction,
la référence à la « sanctuarisation » de l’établissement scolaire y trouve son
fondement. Il ne s’agit pas d’imperméabilité mais de mise à l’abri de toute
forme de violence, quel que soit le quartier, pour que l'école exerce mieux sa
mission. Parler d’une école «sanctuaire», ce n’est pas convoquer les blouses et
les bonnets d’âne, l’école des années 50, c’est comprendre que la société doit
se structurer en séparant les espaces publics des espaces
privés.
L’entrée à
l’école maternelle est parfois mal préparée
Elle peut être
vécue comme une séparation douloureuse. Si tous les dépistages cognitifs voire
physiologiques exigeant une prise en charge précoce n’ont pas été suivis
d’effets, le passage au Cours préparatoire peut être le début d’un engrenage
d’échecs. Traduits en souffrance, ils peuvent aboutir à des formes de violence
diverses. De nombreuses études montrent que le jeune ne sera pas en mesure
d’assurer un parcours scolaire réussi si le terrain des apprentissages n’est pas
préparé aux plans physique, physiologique comme
psychologique.
De
trop nombreux parents se conduisent de manière
paradoxale
D’un côté ils
demandent aux professeurs de rétablir l’ordre à l’école, de l’autre ils se
comportent comme les délégués syndicaux de leur enfant. Quand celui-ci a une
mauvaise note, quand son comportement perturbateur est sanctionné, ils
protestent, ils se fâchent et ils contribuent à saper ce qui reste d’autorité
aux enseignants. L’enquête Debarbieux/Fotinos (2012) souligne que 20 % des professeurs des Écoles
ont été insultés par des parents et 12,7 % menacés. Ce sont les directeurs des
écoles, et particulièrement des grosses écoles qui sont le plus exposés aux
agressions parentales, qu’elles soient verbales ou physiques : sur les 4.000
directeurs d'école élémentaire et maternelle consultés pour l'année scolaire
2012-2013, 51% se sont déclarés victimes d'une agression de la part des parents
d'élèves (enquête Fotinos, avril
2014).
Il n’y
a plus d’autorité nulle part
« Après 1968,
rien n'est plus pareil », écrit Jacques Pain12. Le chercheur pointe la «
libéralisation des mœurs de la société civile » qui fait que l'école doit
affronter « une érosion en règle des racines normatives de la France
contemporaine ». Les modèles éducatifs dominants sont désormais libéraux, ou «
démocratiques », tandis que l'autorité ne va plus de soi, que ce soit celle des
adultes, des policiers, des juges, ou, de façon encore plus marquée, celle des
enseignants ou des politiciens.
À ce premier
constat, Jacques Pain corrèle deux autres évolutions. La première est celle de
l'émergence de la société de consommation, qui fait de l'accès aux biens
matériels une composante essentielle du sentiment de bien-être et d'égalité. La
seconde est celle de la crise économique et sociale qui marginalise une
proportion significative de la population en lui rendant difficile l'accès au
travail et, par conséquent, à la consommation.
Un grand
nombre de chercheurs souligne que la violence scolaire est aussi le produit
d'une rencontre entre les problèmes individuels de certains adolescents et des
contextes locaux particuliers. Comme l'écrit E. Debarbieux, la majorité des élèves qui « vivent l'exclusion
sociale » ne sont pas violents à l'école. La violence scolaire doit aussi être
analysée en termes de « cumul de facteurs de risques » : problèmes familiaux,
difficultés psychologiques, fréquentation de délinquants, effectifs des
établissements et des classes, organisation de la vie des établissements,
revendications ethniques ou religieuses.
Mais, en-deçà
de ces immenses défis sociaux, la vie quotidienne des établissements pourrait
être améliorée si quelques mesures simples étaient mises en place, comme celle
d’exiger que les élèves présentent un carnet de correspondance ou une carte à
l’entrée des établissements, mesure qu’on ne peut pas qualifier de despotique ni
contraire aux libertés ! Dans le même ordre d’idées, il paraît naturel que des
adultes (concierges, surveillants, et surtout personnels de direction) soient
présents à la porte des établissements pour le contrôle des entrées des élèves.
Et, si les téléphones portables sont insupportables à l’école - et ils le sont - il faut avoir le courage de les interdire dans
l’enceinte des établissements.
L’adulte
n’exerce plus son autorité
« Les troubles
du comportement sévères ne concernent qu’une minorité d’enfants » explique
Philippe Jammet13, pédopsychiatre, qui décrit au-delà un climat général
favorisant ces comportements. « L’adulte n’exerce plus son autorité »,
résume-t-il. Les parents et les enseignants ne se sentent pas toujours légitimes
à poser des limites, les premiers par peur de ne pas être aimés, les seconds
parce qu’ils manquent de soutien et peut-être aussi de formation. Pour le
pédopsychiatre, les technologies d’information et de communication ont également
changé la donne. « Les enfants sont devenus des acteurs directs. Ils sont donc
plus ouverts, plus intervenants, plus entreprenants, mais en contrepartie n’ont
pas de limites… Le désarroi des adultes est amplificateur ». Il est donc urgent
de parvenir à un consensus entre adultes sur les règles à poser. « Les disputes
entre adultes et le manque de solidarité angoissent les enfants, tout en leur
laissant le terrain libre. Le débat sur l’école entre adultes, c’est la cour de
récré ! » ajoute P. Jammet.
On
socialise les enfants à la violence
Il est évident
qu’une grande partie de la socialisation des enfants passe aujourd'hui par la
télévision et les jeux vidéo, souvent très violents.
L’effet «
taille » et l’effet « établissement » jouent un rôle
important dans les situations de violence exacerbée
Les grands
établissements, favorisant l’anonymat, sont moins contrôlables. Plus le taux
d’échec scolaire augmente et plus les comportements violents augmentent - les
violences découlant de la situation d’échec scolaire ont en retour des effets
sur la qualité de l’enseignement, chez des enseignants insécurisés, entraînant à
nouveau une augmentation de l’échec -, enfin, la qualité de l’encadrement est
essentielle : il est avéré que les phénomènes de violence se réduisent si les
élèves estiment qu’ils peuvent communiquer facilement avec les professeurs et
l’administration. « Le manque de personnalité du chef d’établissement et
l’absence de cohérence de l’équipe pédagogique favorisent indéniablement la
violence scolaire »14.
Les équipes
d’adultes ne sont pas assez stables
Le turnover
qui est de l’ordre de 70 % dans certains collèges est néfaste. Par ailleurs, le
taux d’encadrement en surveillants est trop bas : un pour 300 élèves, il y en
avait un pour 125 en 1962. Il faut en embaucher mais en ne privilégiant pas le
recrutement des étudiants surmenés et à temps partiel, ni des « grands frères »
dont l’activité principale consistera à imposer l’observance de tel ou tel
précepte aux petits.
La suppression
de la formation des professeurs en 2008 n’a rien arrangé. « Je n’ai plus de
métier puisqu’il ne s’apprend pas » dit un enseignant. Comment imaginer que,
malgré la bonne volonté des jeunes gens qui sont recrutés à la fin de leurs
études universitaires, nous puissions confier nos enfants à des professeurs
auxquels aucune formation pratique et pédagogique n'aura été donnée ? Rétablie
depuis peu, cette formation est naturellement
indispensable.
LA
VIOLENCE SCOLAIRE NOUS ENJOINT D’EXAMINER LA QUESTION DES RAPPORTS DE L’ÉCOLE
AVEC LA SOCIÉTÉ
L’école est le
premier représentant de la société et il n’est donc pas surprenant que viennent
s’y réfracter des violences du dehors, générées par les chaos économiques,
sociaux et familiaux. Nous vivons dans une société de plus en plus compétitive
où l’excellence et la performance sont exigées. Cette logique de l’excellence
produit inéluctablement l’exclusion et toutes ses
conséquences.
Le chômage est
un fort facteur de déstabilisation de l’école favorisant le développement de la
violence scolaire. La crise a délégitimé l’école en ôtant toute crédibilité à sa
mission de préparer l’insertion professionnelle des jeunes. La société engage
les élèves à aller à l’école pour réussir socialement, mais ne leur garantit pas
d’emploi en bout de course. L’importance du chômage des jeunes et de leur
précarité à l’entrée sur le marché du travail provoque parfois un sentiment de «
fatalité » chez les jeunes ; la précarité grandissante des jeunes finit par être
complètement intégrée par certains d’entre eux. Pourquoi étudier si l’on croit
que c’est sans effet sur la construction de l’avenir ?
L’école
publique ne sait plus remplir sa mission
Ils sont des
dizaines de milliers d'élèves qui, après 5 ou 6 ans de pré-primaire et de
primaire ou après 10 ou 11 ans de scolarité obligatoire, sortent sans posséder
les fondamentaux, sans diplôme et sans qualification ; obligés en tout état de
cause de suivre une scolarité dans les pires conditions, celles où on ne
comprend pas ce qui se passe dans l’enceinte scolaire, celles où on a, très
jeune, conscience qu’on fera partie des « laissés pour compte » de la
société.
Chaque année,
environ 40 % des élèves (environ 300.000 élèves) quittent le CM2 avec de graves
lacunes. Près de 200.000 d’entre eux ont des acquis fragiles et insuffisants en
lecture, écriture et calcul, et plus de 100.000 n’ont pas la maîtrise des
compétences de base dans ces domaines15. (Ces 15 % d’échecs les plus sévères
correspondent à des enfants de familles très pauvres culturellement et
matériellement, résidant dans des logements surpeuplés, dont beaucoup sont
concentrés dans les mêmes enclaves de pauvreté). Ces lacunes les empêcheront de
poursuivre une scolarité normale au collège. Comment espérer ensuite qu’ils
adoptent la posture de l’enfant studieux. Souffrir de graves déficiences en
lecture, c’est être condamné à l’échec : la maîtrise de la langue française
devrait être un objectif fondamental prioritaire, car savoir lire, écrire et
s’exprimer oralement conditionne la maîtrise de toutes les autres compétences. «
Il y a des savoirs qui, faute d’être acquis à temps sont perdus pour toujours et
qui sont ceux qui ont une valeur universelle, d’usage quotidien, de besoin
constant, qui permettent de s’insérer dans un groupe, dans une formation
professionnelle, dans un emploi, d’aider utilement son semblable, de surmonter
la frustration sans recourir à la violence. Ces savoirs primordiaux de l’école
obligatoire devraient imposer au système éducatif une obligation de performance
et garantir au citoyen l’acquisition d’un savoir validé.
»16.
La violence
scolaire dérive de cette situation intolérable qui conduit tant d’élèves à ne
plus comprendre la légitimité des savoirs. Un grand nombre d’entre eux
développent une forme de violence qui témoigne de leur désarroi. Ils ont –
comment s’en étonner – une estime très faible d’eux-mêmes et de leurs
professeurs. On est face à un immense gâchis humain – fait de désespérance et
d’humiliation – social et économique.
L'école est
violente
Pour expliquer
les mutineries à répétitions des lycéens de Louis-le-Grand au XIXe siècle,
l'historien Gustave Dupont-Ferrier écrivait en 1922 :
« La discipline de la maison ne triomphait que par la force et n'agissait pas
sur la conscience. ». Un demi-siècle plus tard, historiens et sociologues
dénonceront abondamment le caractère contraignant et coercitif du fonctionnement
des établissements scolaires. Silence dans les classes, élèves en rangs dans la
cour, dialogue inexistant avec les adultes de l'établissement, toute-puissance
des enseignants, travail réduit à la restitution passive des connaissances, les
événements de mai 1968 avaient résumé ce constat en un slogan efficace : le «
lycée caserne ». La pratique de la punition corporelle était également dénoncée,
même si elle demeurait essentiellement cantonnée à l'école primaire, et parfois
aux ateliers des lycées pro-fessionnels.
Plus de
quarante ans après, il serait difficile de soutenir que rien n'a changé. Les
élèves et leurs parents ont des délégués qui les représentent dans plusieurs
instances des établissements, la parole avec les adultes est plus libre, les
élèves circulent plus librement, et sont plus souvent incités à prendre la
parole en classe.
Toute violence
de l'institution a-t-elle pour autant disparu ? Pas sûr, si l'on en croît les
spécialistes. L’école peut encore être le lieu « d'abus symboliques d'autorité
»17. Remarques humiliantes, ironie blessante, jugements dévalorisants font,
selon Pierre Merle18, encore souvent partie de l'arsenal répressif de nombre
d'enseignants. Les victimes en sont le plus souvent les élèves en difficulté,
c'est-à-dire majoritairement ceux d'origine sociale modeste. Certaines violences
physiques peuvent aussi être une réponse à la violence symbolique de
l'institution.
La pratique
d’évaluation peut « victimiser » même si l’évaluation
fait partie intégrante du processus d'apprentissage. Ce qu'on peut interroger,
c'est bien plutôt le contenu des évaluations (évalue-t-on bien les objectifs
annoncés et ce qui a été enseigné?), leur fréquence, leur forme (quelles infor-mations les élèves reçoivent-ils en retour et comment
sont-elles communiquées?) et leurs finalités (réguler les apprentissages,
sélectionner, certifier, orienter...).
L’évaluation
peut être source de violence, disqualifiant les élèves jusqu'à parfois les
humilier, ou, pour le moins, contribuant à développer un sentiment d'injustice
chez les élèves obtenant de mauvaises notes et de mauvaises orientations, se
retrouvant finalement relégués dans de « mauvaises »
classes.
Le
processus d’orientation a sa part de responsabilité
L'administration
qui effectue l'orientation doit tenir compte des capacités d'accueil et ne peut
mettre les élèves que dans les classes qui existent. Elle cherche logiquement à
équilibrer les effectifs des différentes classes, et elle évite d'en surcharger
certaines en en laissant d'autres à moitié vides. Elle ne peut donc accorder à
tous les élèves les orientations qu'ils demandent et il faut bien faire pression
sur certains élèves pour qu'ils aillent dans des sections qu'ils n'ont pas
demandées, ou qu'ils ont demandées en deuxième ou troisième
position.
Ainsi, pour
beaucoup d’élèves, l'orientation est d’abord une orientation par l'échec
puisqu’orienter les élèves, c'est toujours leur refuser une section qu'ils
demandaient pour les affecter à une section qu'ils voulaient éviter. Ce
fonctionnement du système scolaire fait peser en permanence sur les élèves, à
partir de la 5e, la menace d'une relégation. Cela les oblige à vivre leur
scolarité d'abord sur le mode de l'anxiété, une anxiété entretenue par les
professeurs, prompts à évoquer les décisions futures du conseil de classe. Si la
menace d'une relégation dans une « mauvaise » section incite au travail les
élèves des « bonnes » sections, elle est impuissante auprès de ceux des
mauvaises. Il se forme ainsi des classes désespérantes, parce que leurs élèves
n'espèrent plus et l'on ne sait pas comment faire travailler ces élèves qui
estiment ne plus rien avoir à perdre.
Bien qu’on y
trouve des élèves motivés, notamment par des traditions familiales ou
régionales, l’image de l’enseignement professionnel est dégradée. Pour beaucoup
d’élèves qui y sont orientés à l’issue du collège, cela revient à ne pas être
jugé digne de la voie générale et cela équivaut à une sélection par l’échec. La
difficulté principale tient au fait que l’entrée des élèves en lycée
professionnel reste soumise aux capacités d’accueil, les places par spécialité
étant contingentées. En conséquence, l’élève orienté en lycée professionnel peut
se voir affecté dans une spécialité qui ne l’intéresse pas ou qui ne correspond
pas à ses aptitudes, ou bien il peut être contraint de quitter son secteur
géographique, ou les deux19.
Les
professeurs, dans certains établissements, n’ont plus de prise sur l’intolérance
religieuse qui menace l’école laïque
À lire le
Rapport 2010 du Haut Conseil de l'intégration20, on constate qu'il y a une autre
forme de violence à laquelle les classes, les élèves et les pro-fesseurs sont confrontés : les refus catégoriques
d'actions d'enseignement de la part de parents qui sous prétexte d’une
interdiction religieuse défendent à leurs enfants de chanter dans une chorale ou
de jouer de la flûte à bec. Ces mêmes parents les forcent à déserter les cours
de piscine parce que pendant le ramadan il est interdit d’avaler de l’eau ou
parce que leurs fillettes n’ont pas le droit de partager un bassin avec des
garçons.
Désormais, les
professeurs font aussi face à des collégiens qui posent leur crayon quand on
leur demande de représenter un visage humain ou à des lycéens qui rendent copie
blanche pour manifester leur désaccord sur un sujet de dissertation. À l’école,
aujourd’hui, il y a des matières qui fâchent, des pans entiers du programme que
le professeur ne peut plus enseigner. À commencer par les cours de biologie.
Autre sujet de crispation, la contraception et l’avortement. Il est devenu
difficile d’aborder la Shoah ou le conflit israélo-palestinien. Les réflexions
antisémites sont courantes. Plutôt que d’alerter leur hiérarchie, certains
professeurs préfèrent se murer dans le silence. Ils craignent qu’on ne pointe du
doigt leur incapacité à faire autorité. Pour éviter les conflits ou les
affrontements identitaires, certains choisissent de ne plus traiter les points
du programme jugés « sensibles ». Plus inquiétant, certains professeurs
sollicitent l’imam du quartier pour légitimer leur
enseignement.
∴
La violence
est très présente dans nos établissements scolaires. Nul ne peut plus le nier.
Une violence, extrême parfois, mais le plus souvent faite de comportements
incivils, insultants et de harcèlement à l’égard des enseignants et entre les
élèves. Du désarroi et de la souffrance pour les uns et les autres. Des
territoires de notre République où l’anomie règne et où la transmission des
connaissances et l’éducation à la citoyenneté ne sont plus que des vues de
l’esprit.
Le constat
fait, reste à analyser, pour la société, les causes de cette situation qui met
en danger l’école et la République elle-même. Et, surtout, à affronter nos
dérives et avoir le courage d’y mettre fin : les inégalités sociales et
scolaires de plus en plus insupportables, l’échec scolaire qui ne cesse de
croître, l’incapacité pour l’école primaire à qui on n’a pas donné, depuis des
décennies, les moyens suffisants pour transmettre à tous les connaissances
fondamentales du « lire, écrire compter », la situation de cités où se concentre
une population « d’origine étrangère », des jeunes qui sont nés en France mais
que la société française, souvent, n'a pas réussi à (ou n'a pas voulu ?)
intégrer, le rejet de l’autorité...
Il ne faut
plus penser la violence à l’école dans l’émotion des graves incidents médiatisés
et réagir, seulement, avec la construction de politiques sécuritaires. Il faut
la penser globalement en surmontant nos idéologies et nos égoïsmes.
1. Claude
BIsson-vaivre, IGEN, « Ecole
et sécurité : d’une politique sécuritaire à une culture de la sécurité » in
Cahiers de la sécurité ? n° 16 de l’institut national
des Hautes Etudes de la sécurité et de la justice (avril-mai juin
2011).
2. Yves
Michaud in La Violence, PUF, nouvelle édition. 1998.
3. Lois,
VII.
4. Cf. Revue
de l’inspection générale, n°5 « L’Inspection générale à l’heure des changements
» ; en particulier l’article de Jean-Paul Delahaye.
5. Actes dont
la qualification pénale est évidente ; actes qui ont fait l’objet d’un
signalement (à la police, à la justice ou aux services sociaux du Conseil
général) ; actes qui ont un retentissement important dans la communauté
scolaire.
6. Note 04.04
de la Direction de l’évaluation et de la prospective (DEP) (« SIGNA 2002-2003 »)
du ministère de l’Education nationale.
7. Éric Debarbieux, grand spécialiste des violences scolaires, a vu
son laboratoire de l’université de Bordeaux érigé en 2012, par le ministère de
l’Éducation nationale, en « Délégation ministérielle chargée de la prévention et
la lutte contre les violences en milieu scolaire ».
8. Note DEPP
13-32, décembre 2013.
9. Éric Debarbieux et George FOTINOS, « L’école entre bonheur et
ras-le-bol », septembre 2012 : il s’agit de la toute première enquête de « victimation » (qui se déclare victime de quoi) menée en
France auprès des personnels du premier degré de l’Éducation
nationale.
10. In « La
crise de la culture ».
11. Cf.
Christian Laval, « La nouvelle école capitaliste » (2011).
12. Professeur
des Université, université de Paris-Ouest-Nanterre-La Défense
, fondateur du secteur de recherches « Crise, école, terrains sensibles
».
13. Professeur
de psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent à l'université de Paris-VI, puis
chef de Service du département de psychiatrie de l'adolescent et du jeune adulte
à l'Institut mutualiste Montsouris. Président de l’École des parents et des
éducateurs Île-de-France.
14. E. Debarbieux.
15. Rapport du
Haut Conseil de l’Éducation au Président de la République – Bilan des résultats
de l’École – l’Ecole primaire – 2007.
16. Rapport
Fauroux (1996).
17. Jacques
Pain.
18. Pierre
Merle, sociologue et professeur d’université. « L’élève humilié. L’école : un
espace de non-droit ? ».
19. Rapport du
Haut Conseil de l’Education sur « L’orientation scolaire »
2008.
20. Haut
Conseil à l’intégration – Rapport 2010 « Les défis de l’intégration à l’école
».