CURIEUSE ÉPOQUE

par Georges AIMÉ

Curieuse époque que la nôtre !

Quand elles avaient une vingtaine d’années, quelques-unes de nos « zélites » dirigeantes ont beuglé haut et fort « qu’il était interdit d’interdire »...

Quarante-cinq ans plus tard, force est de constater que ce slogan est devenu « il est interdit d’interdire ce que nous avons décidé »...

Qu’ils fassent partie de ceux qui criaient « Charlot, dix ans ça suffit » ou qu’ils soient fils ou fille d’immigrés ayant fui leur pays pour atteinte aux libertés, tous veulent nous imposer leur pensée pour mieux nous asservir.

Pour cela, une méthode : la culpabilisation, suivie de l’interdiction !

Ainsi, ne faut-il plus dire un noir, mais un black, sinon vous êtes un affreux colonisateur ; ni un juif, mais un feuj, sinon vous êtes un antisémite ; ni un breton bretonnant, mais un défenseur de l’identité locale, sinon vous êtes un affreux jacobin ; ni un balayeur, mais un technicien de surface, sinon vous êtes un abominable réactionnaire ; ni une caissière, mais une hôtesse de caisse, sinon vous êtes un sale patron ; ni, si vous êtes enseignant, un ballon, mais un référentiel bondissant, sinon vous êtes un inculte, etc.

Curieuse époque où Lépold Sedar Senghor devrait changer le titre de ses poèmes au risque d’être accusé de trahir son camp ; où de Gaulle ne pourrait plus dire qu’il ne souhaite pas que «Colombey-les-Deux-Églises devienne Colombey- les-Deux-Mosquées » au risque d’être traité de catho intégriste ; où Tintin, ce raciste primaire, ne pourrait plus être donné à lire aux enfants au risque de les traumatiser (...je me demande d’ailleurs si certains albums d’Astérix, notre héros national, ne relèvent pas d’un... anti-régionalisme voire d’un anti-européisme dangereux) ; où Pierre-Jean Vaillard ne pourrait plus se produire au risque d’être traité de facho ; où s’intéresser à Bécassine ou à Banania relève d’un état d’esprit douteux ; où Joséphine Baker ne pourrait plus apparaître sur scène avec pour unique vêtement une ceinture de bananes dans un spectacle appelé Revue nègre, au risque d’être traitée de vendue ; etc.

Ainsi, interdire un spectacle pour cause de plancher défaillant ou de « graves troubles à l’ordre public » non avérés (éléments trop flous pour être prise en compte par un tribunal) relève-t-il d’une démagogique et facile mise en paix de sa conscience. Si nos politiques de tous poils n’avaient pas laissé les communautarismes, de quelle que nature qu’ils soient, se développer nous n’en serions pas là ! Ils ont tous eu, à un moment ou un autre, leurs« bonnes » raisons pour ne pas agir ou réagir contre les coups de butoir donnés à la seule chose qui devrait, dans notre diversité, nous unir, à savoir la laïcité ; condition sine qua non de « notre vivre ensemble ».

Que ce soit pour obtenir des voix ou pour défendre une vision universaliste du bien et du mal, le résultat est le même : nous payons aujourd’hui les conséquences de leurs actes, qu’ils soient réfléchis ou irréfléchis !

Au lieu de nous abreuver de feuilletons ou de programmes imbéciles aux heures de grande écoute, les directeurs de chaînes de télévision serait bien avisés de nous montrer que les États-Unis ne sont pas le centre du monde, qu’il existe d’autres cultures, d’autres moeurs et d’autres façons de vivre et qu’elles sont toutes respectables lorsqu’elles n’attentent pas à la dignité de l’homme et que leurs prosélytes ne veulent pas nous les imposer.

Il en est de même de tous ces pseudo-débats censés « éclairés » le téléspectateur où personne n’écoute personne, où cacophonie rime avec embrouillamini et qui, au bout du compte, ne servent pas à grand-chose.

Un pays où un crétin réussit à gagner beaucoup d’argent grâce à la publicité, relayée par des médias peu soucieux d’éthique, que lui font ses détracteurs est un pays décadent. Il devrait s’interroger sur la qualité de l’enseignement et sur le sens des valeurs qu’il a enseignées aux « admirateurs » dudit crétin.

Répondre à la provocation par l’interdiction ne fait qu’exacerber les tensions. De plus, où commence la provocation ? Les histoires, autrefois sur les « péquenots », hier sur les Belges ou les Juifs, aujourd’hui sur les Musulmans sont-elles anodines ? Les caricatures, marionnettes et autres imitations des représentants du peuple sont-elles sans conséquence ? Les « bons » mots de tel ou tel député sont-ils à répéter à l’envi ?

C’est l’apprentissage et la compréhension des règles qui régissent notre « vivre ensemble » qui permettront aux citoyens de faire la distinction entre humour et provocation. Et si provocation il y a – et à condition que cette dernière n’entraîne pas de véritables troubles à l’ordre public – la meilleure réponse est l’indifférence.

On ne combat pas la bêtise par des lois et autres interdictions. On la combat par l’éducation et par les idées.

Note : triste consolation, nous ne sommes pas les seuls à vivre une curieuse époque... il est un pays où l’on décrète trois jours de deuil national pour le décès d’un joueur de balle au pied et où on envisage de l’enterrer au Panthéon !

 




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08.01.2014
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