par Paul
KLOOBOUKOFF
Baisse du taux du livret A et du LDD
: merci à saint François et saint Jean-Marc
Une fois de plus les petits
épargnants et ceux des classes moyennes sont méprisés et rançonnés. Ce sont eux
que l'on frappe au-dessous de la ceinture en baissant de 1,75 % à 1,25 % le taux
du livret A, placement « préféré » des Français : 63,3 millions de comptes à fin
2012. Parenthèse : la population de la France étant alors de 64,6 millions de
personnes, on comprend que des millions d'entre elles ont plusieurs comptes, ce
qui est interdit. Pas grave, sans doute, puisque la situation perdure. Toujours
d'après la Banque de France (BDF), l'encours total de ces comptes est de 262,3
milliards (Mds) à fin juin 2013. La moitié de ce montant est déposée sur 90 % de
l'ensemble des comptes (de l'ordre de 2.300 € par compte, en moyenne), et 64 %
des comptes sont inférieurs à 1.500 €. De gros épargnants, en somme! L'autre
moitié est déposée sur seulement 10 % des comptes, qui se montent donc, en
moyenne, à environ 20.700 €, c'est à dire pas loin du plafond qui a été relevé
par les Autorités à 22.950 € en 2013.
En même temps que le livret A, la
baisse touche le livret de développement durable (LDD et ex CODEVI), dont
l'encours en juin 2013 est de 98,8 Mds. Ce sont donc 361 Mds € d'épargne qui
sont directement « impactés ». Sur un an, la pénalisation sera de - 1,8 Md €.
Principal bénéficiaire, l'État. Cela n'évitera pas aux impôts d'augmenter en
2014, soyons rassurés. Par contre, on peut craindre une révision des autres taux
« réglementés », tels ceux de l'épargne logement, déjà très faibles, avec 1,25 %
pour les CEL et 2,50 % pour les PEL (hors primes à l'emprunt)). On doit surtout
s'attendre à des baisses par les banques des taux d'intérêt des livrets soumis à
l'impôt, dont l'encours est conséquent, 178,1 Mds €, ainsi que d'autres comptes
rémunérés d'appellations diverses.
Pour décider, les gouvernants se sont
courageusement abrités derrière des « recommandations » de la BDF et une formule
« magique » de calcul que l'on n'a pas hésité à changer plusieurs fois au fil
des ans... pour qu'elle fournisse le taux du livret A le plus bas possible. Avec
la dernière version, le taux du livret A doit être égal, au choix
:
- soit à la moyenne entre le taux de
l'inflation sur les 12 derniers mois, et les moyennes annuelles du taux EURIBOR
(taux d'intérêt des emprunts interbancaires) à 3 mois et du taux EONIA (Euro
Overnight Index Average);
- soit au taux de l'inflation majoré
de + 0,25 %.
Entre janvier et août 2013, l'EONIA a
fluctué entre 0,067 % et 0,095 %. Le taux EURIBOR à 3 mois, lui, s'est situé
entre 0,22 et 0,23 %. Ces taux sont si faibles, « artificiellement », car la
Banque centrale européenne (BCE), imitant en cela la Banque fédérale américaine
(FED), maintient ses taux directeurs très bas (celui du Refi est à 0,5 %).
L'emploi de la première version
(comment a-t-elle pu être imaginée puis votée!?) aurait été très difficile à
expliquer au bon peuple. La deuxième aurait conduit à 1,05 %, l'Indice des prix
à la consommation (IPC) hors tabac et alcool de l'INSEE (pris pour représenter
l'inflation) ayant « miraculeusement » crû de + 0,8 % seulement depuis un an. Un
« effort » a été consenti « en faveur » des ménages, et le taux a été fixé à
1,25 %, sans provoquer de réactions particulièrement vives. Il est vrai que le
chef du gouvernement avait déclaré vouloir garantir le pouvoir d'achat des
Français, tout en favorisant la construction de logements sociaux et
l'investissement. Aussi, la rémunération annuelle d'un livret A moyen de 2.300 €
sera de 28,75 €. Voilà bien de quoi « garantir » son pouvoir d'achat. Merci
saint François et saint Jean-Marc ! Des épargnants s'en souviendront peut-être
encore aux élections de 2014.
En réalité, les revenus du « capital
» évoqués ci-dessus sont réduits à peau de chagrin. De plus, à l'exception des
livrets réglementés, les intérêts des placements, y compris ceux des CEL et des
PEL, sont soumis aux prélèvements sociaux (15,5 % depuis le 1er juillet 2012,
retenus à la source). Hormis les CEL et les PEL de moins de 12 ans, ils sont
passibles de l'impôt sur le revenu (le prélèvement libératoire est de 24 %
depuis 2012). Comptez ce qui reste !
Cela n'a pas empêché les taux des
prêts à l'habitat d'une durée supérieure à 1 an et inférieure à 5 ans accordés
aux ménages d'être de 3,45 %, en moyenne, en décembre 2012, et les taux des
crédits à la consommation de se chiffrer à 6,07 %, en moyenne. Pour leur part,
les taux de l'usure sont de 11,48 % pour les prêts à la consommation de plus de
6 000 €, de 16,5 % pour ceux de 3.000 à 6.000 € et de 20,29 % pour ceux de moins
de 3.000 € (source : BDF). Du côté emprunts comme du côté dépôts, les épargnants
sont perdants.
Mieux vaut des cigales que des
fourmis
Hélas, l'épargne est déconsidérée en
France et découragée par les gouvernants. Il vaut mieux être cigale que fourmi
et dépenser pour faire « tourner la machine et créer des emplois ». Plutôt que
de rendre l'épargne logement attrayante, par exemple, afin que les ménages
acheteurs aient moins à emprunter, puis à rembourser (principal et intérêts), on
préfère les pousser à emprunter plus, avec moins d'apport personnel, sur de plus
longues durées. Conséquence: pour rembourser, ils doivent épargner... davantage
encore. Mais, cette « épargne de remboursement, de désendettement », pourtant
massive, échappe à la vue de nos « analystes » et de nos gouvernants. Ils font
l'impasse sur cette épargne forcée, qui conduit à réduire la consommation
présente et à venir. La pratique de la dépense qui anticipe sur des revenus et
des capacités de remboursement futures hypothétiques a été promue à l'excès
tandis que l'épargne volontaire ou de nécessité était mise à l'index.
L'endettement public ne suffisait pas; il fallait aussi surendetter les ménages. Un franc succès, d'après la BDF
!
Ainsi , la dette des ménages a plus que
doublé en dix ans, de 2002 à 2012, pour atteindre 1 140 Mds €, soit 85 % de leur
Revenu disponible brut (1 340 Mds) et 56% du PIB, contre seulement 35,6 % en
2002 (sources: INSEE et BDF).
En 2011, 50 % des ménages étaient
endettés: 32 % pour l'habitat, 29 % pour la consommation, 10% pour les
deux.
En juin 2013, l'encours brut des
crédits aux particuliers est de 978 Mds €, pour plus de 80% en crédit à
l'habitat.
Sur les 220.836 dossiers déposés aux
Commissions de surendettement en 2012, 194.866 ont été jugés recevables, soit +
64,2 % de plus que dix ans auparavant. Et les crédits renouvelables font des
ravages.
Les pourfendeurs de l'épargne
financière refusent de voir le rôle que celle-ci joue, dans tous les cas et sous
toutes ses formes, dans le financement de notre économie. Mise à la disposition
des organismes financiers (banques, assurances, Caisse des Dépôts (CDC)...),
elle permet à ceux-ci de prêter aux entreprises, à l'État, aux Établissements
publics, aux collectivités locales et aux ménages emprunteurs.
Et
la grande majorité des ménages
épargnants peuvent, à juste titre, déplorer d'être captifs, otages d'un système
financier qui, avec le concours orchestré de l'État et de la BCE, leur laisse
très peu de choix (malgré la multiplication des intermédiaires financiers et de
leurs formules « attractives » calquées les unes sur les autres)... et les
rémunère mal. En prime, ils sont présentés comme des « rentiers qui ne prennent
aucun risque », voire « qui s'engraissent sur le dos de la société
».
Et la crise s'incruste, avec son gros
lot du chômage, de baisses et de menaces sur les salaires et les retraites,
d'agressions fiscales... et un avenir incertain, inquiétant, devant lequel les
discours et les « pronostics » oiseux des gouvernants révèlent avant tout leur
impuissance.
Pas anormal, alors, que l'épargne de
précaution augmente, notamment pour compenser la baisse et la faiblesse des taux
d'intérêt.
De nombreux épargnants avaient
déplacé des avoirs vers leurs livrets A et leurs LDD en fin 2012 et en 2013,
lorsque le Gouvernement a relevé les plafonds des dépôts, afin de drainer
davantage d'argent vers la CDC. Combien considéreront qu'on les a attirés dans
un guet-apens pour mieux les tondre ?
L'assurance vie aussi dans la ligne
de mire
Combien seront tentés de réduire
leurs avoirs sur ces livrets? Pour les placer où? Les taux qu'offrent les
comptes en euros de l'assurance vie (AV) ont beaucoup baissé. Et les plus-values
(pv) liquidées sont taxées si les comptes ont moins de
8 ans et si les pv sont supérieures à 4.600 € pour une
personne et 9.200 pour un couple. Au-dessus de ces montants, à 8 ans ou plus, la
taxation est de 7,5 %. Entre 4 et 8 ans, la taxation des pv est de 15 %. À moins de 4 ans, la taxation est de 35 %.
Ainsi, un rendement brut annuel de 2,8 % (courant) peut descendre à 2,59 %, 2,38
% ou 1,82 % suivant la durée de l'immobilisation avant
liquidation.
En outre, les « avantages » fiscaux
successoraux de l'AV sont dans la ligne de mire. Et les gouvernants caressent
l'idée de pousser au déplacement des avoirs détenus sur de « gros » comptes en
euros (plus de 500.000 €) vers des comptes titres (à risques) porteurs
d'actions, c'est à dire vers le financement d'entreprises. Les gros comptes des
« récalcitrants » pourraient perdre l'avantage de la taxation des plus-values à
7,5 %. Devant une telle perspective, les assureurs (qui comptent aussi de
grandes banques) sont montés au créneau, alertant sur le fait que les comptes en
euros de l'AV avaient pour vocation de financer la dette publique... et qu'il
serait inapproprié d'assécher cette source, actuellement très avantageuse pour
l'État, d'ailleurs.
Recul en vue ? Probablement! Mais,
une partie du mal est déjà faite. La confiance dans l'assurance vie a pris un
coup... Malencontreux, au moment où une nouvelle « réforme » des retraites
mijote et qu'il n'est pas déraisonnable de penser que nous allons inévitablement
vers une augmentation de la part de la capitalisation dans les retraites. Est-il
vraiment judicieux de malmener l'épargne, particulièrement dans ces
circonstances ?
Il faut également savoir qu'une «
grande réforme » du Code des assurances se prépare, dans une grande discrétion,
en discussion avec le petit monde de la Finance. Elle pourrait intervenir avant
la fin de l'année. Les assureurs pourraient être amenés à jouer le rôle de
banquiers et à prêter directement aux entreprises. « Bercy rêve de voir les
assureurs prêter 90 milliards d'euros aux PME », titrait Le Monde Éco &
Entreprise le 9 juillet, avec un sous-titre: « Les compagnies d'assurance
pourront faire crédit aux entreprises, jusqu'à 5 % de leur bilan ». Avant de
passer à l'acte, il serait bon que chacun s'interroge (en relation avec l'UE, à
toutes fins utiles) sur l'engrenage dans lequel on veut mettre le doigt, dans
l'urgence, semble-t-il. Pas de panique! Ne disait-on pas « À chacun son métier
et les vaches seront bien gardées ». Et une telle intervention dans l'assurance
peut-elle se passer d'autres changements dans le système financier, de la «
grande réforme » qui devait y remettre de l'ordre ?
Investissement productif et logement
locatifc : c'est mieux quand l'exemple vient d'en
haut
Des gouvernants disent souhaiter
qu'organismes financiers et particuliers « investissent » davantage en actions,
dans l'appareil productif, et dans le logement locatif. Encore faudrait-il, au
minimum, que les réglementations, la fiscalité et les prélèvements sociaux
soient stables... et plutôt encourageants que punitifs. Il faudrait aussi que
les dividendes par action versés soient motivants pour le public. J'ai montré
qu'il n'en était rien, chiffres à l'appui, dans un article de septembre 2012
intitulé: "Marchés, investisseurs, le changement, c'est maintenant ". Et si l'on
peut se réjouir que le CAC 40 soit remonté à 4.000 points en août 2013, il ne
faut pas oublier qu'il était au-dessus de 6.000 points en 2000-2001. Tous les
détenteurs d'actions n'enregistrent pas de mirobolantes plus-values, bien au
contraire. La bourse reste très imprévisible. Les meilleurs coups semblent
toujours réservés aux initiés.
L'examen des patrimoines récemment
publiés, grâce à M. Cahuzac, du chef de l'État et des
37 membres du Gouvernement révèle que ces « investisseurs » ont dédaigné ce type
de placement « à risques » citoyen. Seuls quelques-uns d'entre eux ont des
portefeuilles titres. L'assurance vie n'est la tasse de thé que de quelques «
seniors » qui ont souscrit des (confortables) contrats. Presque tous ont une
préférence très marquée pour « l'investissement dans la pierre ». C'est plus
sûr, et compte tenu de l'hyper inflation immobilière depuis plus de 15 ans (voir
ci-après), nettement plus juteux... sans doute. Des résidences principales, des
résidences secondaires pour partie d'entre eux, tertiaires, pour quelques-uns.
Le cumul des mandats l'encourage peut-être.
N'est-il pas hautement souhaitable
que nos gouvernants exemplaires donnent l'exemple? L'État et les collectivités
locales sont bien actionnaires. Alors, suivant leurs guides, de nombreux
Français regarderont la bourse avec moins de suspicion et s'engageront plus dans
cet investissement porteur d'avenir et/ou de rêve.
Devant un tel afflux de capitaux
privés français, il sera moins indispensable de vendre les bijoux de famille
industriels, les trésors culturels et touristiques... à de riches étrangers,
d'aller quêter aux quatre coins du globe à la recherche d'investisseurs Libyens,
Qataris, Indiens, Chinois... auxquels on déroulera le tapis rouge et devant
lesquels on s'agenouillera en présentant d'alléchantes listes d'avantages
fiscaux et d'autres aides nationales et locales... parce qu'ils viennent pour
créer des emplois pour nos chômeurs, et non pour faire des profits tant que les
conditions s'y prêtent. La France deviendra moins dépendante et aura plus
d'assurance. Fin du rêve?
« Et si la relance passait par
l'actionnariat individuel » titre un article d'Aldo Sécurant sur Les Echos.fr le 16 août. Il y rappelle que les
étrangers détenaient déjà 42,4 % du capital des sociétés cotées en 2010. Les
ménages épargnants français, eux, sont négligés quand ce n'est malmenés. Malgré cela, les épargnants en actions (y compris
les détenteurs de fonds d'actions et les souscripteurs d'assurances vie en
unités de compte) sont engagés à hauteur de 1.100 milliards d'euros. Ils
pourraient peut-être faire mieux, si on changeait d'attitude envers
eux.
L'indice officiel des prix à la
consommation représente mal l'inflation
L'IPC n'est pas approprié pour
revaloriser le taux du livret A, ainsi, d'ailleurs que de bien d'autres
grandeurs, tels les salaires, les pensions, les minima sociaux... ni même pour
représenter l'inflation.
Première anomalie grave, il ne prend
pas en compte les coûts des investissements des ménages constitués par leurs
achats de logements neufs et d'occasion. Pourtant le nombre annuel de ces
derniers varie entre 700.000 et 900.000, dont plus des deux tiers sont « anciens
». Le montant total des transactions concernées (non chiffré) est bien supérieur
à celui de la Formation brute de capital fixe (FBCF) des ménages, évaluée par la
Comptabilité nationale à 121,5 milliards d'euros en 2012 (contre1.130 pour
l'ensemble des dépenses de consommation individuelle). En effet, la FBCF ignore
les achats et ventes entre ménages et se concentre sur les investissements en
nouveaux logements ainsi qu'en travaux d'amélioration.
Et l'indice des prix des logements
anciens, principal indicateur en la matière, a été multiplié en France par 2,45
entre le quatrième trimestre 1998 et le quatrième trimestre 2012. Pendant la même temps, celui des appartements à Paris a été multiplié
par 3,53. Il est clair que face à ces hausses géantes l'épargne besogneusement
accumulée, sur les livrets A, les LDD, les comptes et plans d'épargne
logement... perd énormément de son pouvoir d'achat.
Ensuite, l'indice des prix à la
consommation (IPC) sous-estime les niveaux et les hausses de coûts réels que
connait une grande partie de la population (des épargnants, notamment). Compte
tenu des fluctuations annuelles de l'IPC, pour le vérifier, il est plus
significatif de regarder les chiffres que nous donne l'INSEE sur la période
assez longue de 1998 à juillet 2013. En 15 ans, l'augmentation de l'indice
d'ensemble (censée représenter l'inflation) n'a été que de + 27,1 %. Le même
indice sans les boissons alcoolisées et le tabac (BAT, dont les prix ont crû de
+ 85,3 %) sert de référence pour le livret A. Il montre une hausse de seulement
+ 24,9 %. Taxer et retaxer les BAT, y compris la
bière, ne fait pas monter l'indice de référence. Un bon filon, donc, qui a
encore de l'avenir !
Dans l'IPC, les prix des produits
alimentaires ont crû de + 33,7 %, ceux des logements, eau, gaz, électricité de +
53 %, ceux des transports, de + 45,4 %, de l'éducation de + 41,6 %, ceux des
hôtels, cafés, restaurants de + 44,6 % et ceux des autres biens et services, de
+ 38,5 %, dont + 52,7 % pour la protection sociale et + 35,4 % pour les
assurances. On peut donc comprendre le sentiment largement partagé que l'IPC
sous-estime l'inflation. Même si l'on est prêt à admettre que les prix de
l'ameublement et de l'équipement ménager ont crû de + 17,4 % et que ceux de la
médecine de ville et du paramédical ont augmenté de + 22,3 %. Cela en 15
ans.
Ces produits pris ensemble pèsent
presque 80 % de la consommation dans l'IPC (hors BAT). Globalement, toujours
selon l'INSEE, leurs prix ont augmenté de + 33,9 %. Nous sommes loin des+ 24,9 %
officiels.
Quelques groupes de produits jouent
des rôles « efficaces » de ralentisseurs providentiels de
l'IPC
Merci aux Chinois et aux autres
exportateurs asiatiques, en 15 ans, les prix des articles d'habillement et des
chaussures n'auraient crû que de + 12,8 % jusqu'en juin 2013, avant les soldes,
et auraient baissé de - 1,7 % selon les chiffres de juillet 2013, pendant les
soldes... avec un impact « ralentisseur » de - 1,8 % sur l'IPC ce dernier mois.
Le même phénomène se produit lors des soldes d'hiver. Pourtant, si les articles
soldés n'ont pas pu être écoulés à leurs prix « antérieurs », peut être trop
élevés, en définitive, ces articles n'ont-ils pas été « liquidés » à leur juste
prix et non « moins cher » ? Des habits et des chaussures aux prix « abaissés »,
voire « cassés » sont souvent des fins de séries, des articles démodés, de goût
et/ou de qualités médiocres. Et les « contrefaçons » rendent une évaluation
crédible des variations des prix plus difficile encore.
Les communications sont un
ralentisseur performant. Les prix des services de télécom auraient baissé de -
33,5 %, en 15 ans, ce qu'il est difficile de lire dans nos factures, qui
comportent une part croissante d'abonnements qui augmentent plus qu'ils ne
baissent. Mais, plus encore, ce sont les équipements de téléphonie et de
photocopie qui interpellent. Leurs prix auraient été divisés par 7,7 ! Très
difficile à croire... sans le voir.
Questionnement analogue pour les
équipements audio...et informatiques, dont les prix auraient été divisés par
3,7. On parle enfin d'obsolescence programmée pour réduire la durée de vie des
équipements de toute nature (y compris articles ménagers et automobiles)... qui
fait dépenser plus, tout en baissant des tarifs. On ne parle pas assez de la
consommation « forcée » avec l'achat d'équipements aux multiples fonctionnalités
qui ne
serviront pas, notamment par ce qu'elles sont
inutiles, trop complexes et/ou contraignantes pour de nombreux « utilisateurs ».
C'est vrai de téléphones « intelligents » ou non, d'ordinateurs, d'appareils
photos... et de voitures « suréquipées » dont les pubs nous submergent à la
télé. Et la vente de biens dont on n'a qu'un usage partiel, réduit, se
généralise et s'amplifie. Évidemment, avec un surcoût pour les nombreux
sous-utilisateurs, auxquels on n'offre pas d'autre choix. Pour ces raisons, et
d'autres qui conduisent le quidam à changer plus souvent de matériel et désirer
augmenter sa puissance, parce que les réseaux de télécoms sont plus encombrés,
voire saturés, par exemple, je ne peux pas croire à des baisses de « coûts réels
» aussi prononcées que celles retenues dans l'IPC.
Toujours est-il que l'impact baissier
de ces services et surtout équipements sur l'IPC est de - 3,8
%.
Nous devons regretter que la plupart
de ces articles baissiers soient importés et coulent notre
industrie.
Nous devons aussi nous demander si
les acquéreurs et utilisateurs principaux de ces produits « technologiques »
sont bien les épargnants populaires titulaires de livrets A. Pas si
sûr!
Parmi les autres produits baissiers
de l'IPC, se distinguent aussi les médicaments et appareils médicaux. En 15 ans,
leur prix moyen aurait baissé de - 18,5 %, impactant l'indice global de – 3 %.
Cette baisse est plus que suspecte, malgré le report d'une partie de la
consommation vers des génériques, si l'on tient compte des centaines de
médicaments à « service médical rendu (SMR) insuffisant » qui ont été déremboursés. De 2002 à 2011, 369 d'entre eux ont été
totalement déremboursés et 117 remboursés à 15 %. Et
le mouvement continue. Or, pour le patient, le prix d'un produit déremboursé jusque-là remboursé à 15 % par la Sécu augmente
de + 17,6 %. S'il était remboursé 30 %, la hausse du prix est de + 42,9 %.
Comment l'IPC tient-il compte de ces hausses de coût, puisque les prix de vente
des produits concernés n'ont, en principe, pas bougé ?
De leur côté, les diminutions qui
sont effectuées par la Sécu, sous l'appellation « franchise à retenir » ou «
participation forfaitaire », sur les remboursements de médicaments (0,50 € par
unité), ainsi, d'ailleurs sur ceux des actes médicaux (1 € pour la consultation
d'un médecin et pour un acte technique, 0,50€ par soin infirmier...), réduisent
les montants des dépenses remboursées par la Sécu et augmentent considérablement
ceux pris en charge par les ménages (directement ou via les mutuelles ou
assurances santé qu'ils paient... cher). Exemple 1: deux médicaments payés au
pharmacien 5,82 €, remboursés à 65 % par la Sécu reviennent au patient 2,04 €.
Franchises déduites, leur coût est de 3,04 €. La majoration du prix pour lui est
de presque + 50 %. Exemple 2 : avec un seul médicament, nettement plus cher, à
20 €, toujours remboursé à 65 %. Avant franchise, il revient au patient à 7 €.
Avec franchise (si l'on peut dire), il revient à 7,50 €. La majoration est de +
7,1%.
La baisse des prix des médicaments
adoptée dans l'indice ne me convainc donc absolument pas.
En conclusion, une évaluation de la
hausse des prix équitable pour un calcul du taux du livret A doit prendre en
compte le coût de l'investissement en acquisitions de logement par les ménages,
d'une part, et chiffrer les impacts des produits « ralentisseurs » de l'IPC de
façon réaliste, d'autre part.
Sur Les Echos.fr, le 22 août, dans
l'article « Pourquoi nous devons repenser les théories macroéconomiques »,
Pascal Gaudron aborde ces questions de manière plus
large: « Ainsi, la faible inflation aux États-Unis était le produit du déficit
du commerce extérieur en raison des importations de biens de consommation de
pays émergents. La structure économique se détériorait, alors que les
indicateurs restaient au vert. Nous avons donc appris qu'un faible taux
d'inflation n'est pas obligatoirement le produit d'une "bonne" politique
monétaire, mais le résultat de déséquilibres économiques majeurs. En fait, la
stabilité monétaire n'est plus le cadre d'analyse le plus approprié. En
situation de crise profonde, il faut étudier la stabilité
financière afin d'intégrer dans l'analyse les
fortes variations des prix des actifs {notamment des logements}. Ces derniers
sont alimentés par des déséquilibres, mais aussi par les politiques très
accommodantes des autorités monétaires luttant contre la
crise.
Cette analyse s'applique parfaitement
à la situation en France. Puissent nos gouvernants s'en
inspirer.
À quoi sert le changement incessant
du taux du livret A, un placement stable
La BDF fournit d'intéressantes
informations sur les Indices de prix à la consommation harmonisés (au niveau
européen). Pour la France, en « glissement » (variation) sur 12 mois, les
hausses ont été de + 2,2 % en septembre 2012, puis de + 1,5 % en décembre 2012
et de + 08 % en avril 2013. En moyennes annuelles, les hausses de prix ont été
de + 2,3 % en 2011 et de + 2,2 % en 2012. Alors pourquoi fallait-il se hâter, se
précipiter, pour abaisser le taux du livret A à 1,25 %. D'autant plus que l'IPC
va augmenter plus vite à nouveau vu les annonces de hausses de prix, de
l'énergie, notamment, de la TVA et d'autres impôts et charges qui grèvent les
prix... qui ne cessent d'affluer.
De 2007 à août 2013, le taux du
livret A a été modifié 11 fois! Est-il justifié de le
changer aussi souvent ? Pour le soumettre à des fluctuations « conjoncturelles
»... des soubresauts, des caprices de prix à la consommation et des décisions de
la BCE ? La masse des dépôts est relativement stable, une épargne de long terme peu réactive aux variations du taux. Alors, c'est
pour en maintenir la valeur au ras des pâquerettes, trimestre après trimestre,
en affichant (dans la formule du calcul) que l'épargne ne mérite d'être
rémunérée qu'à un taux de 0,25 % supérieur à l'Inflation (officielle). Le but
poursuivi par ces révisions n'est visiblement pas de préserver le « pouvoir
d'achat » de l'épargne concernée, mais de procurer des ressources bon marché à
l'État et aux CL, via la Caisse des Dépôts en particulier (voir aussi mon
article de février 2008 : « Livret A: les petits épargnants paient pour le
logement social »).
« Où va l'argent du livret A ?
»
C'est le titre d'un article d'août
2013 sur figaro.fr qui présente, avec des données de sources CDC et BDF, la
répartition et l'usage de l'argent collecté à l'aide des Livret A, LDD et LEP
(encours de 265,2 Mds €).
Les banques disposent de 35 % de
cette manne. Elles en prêtent 28 % aux micro-entreprises et aux PME et 3,5 %
pour la rénovation thermique des logements anciens.
65 % de l'argent est centralisé aux
fonds d'épargne de la CDC. Sur ces ressources, 48 % vont au financement du
logement social et de la politique de la ville, 45 % sont placés sur les marchés
financiers (28 % en dettes d'État et 1 % en autres placements) et 7 % sont
prêtés aux collectivités locales et aux hôpitaux.
Etait-il urgent d'accroître encore de
+ 2 Mds, par la baisse des taux des livrets, le pactole de la CDC, qui avait
déjà bénéficié de substantielles rallonges, acquises partiellement au détriment
des autres dépôts auprès des banques avec les deux relèvements des plafonds en
2012 et 2013? Ce n'est pas évident du tout. Selon Jean-Paul Chifflet, président de la Fédération Bancaire Française
(FBF), « ... la Caisse n'utilise pas l'excédent des liquidités dont elle a
hérité: au total, elle affiche un excédent de 110 milliards d'euros. De ce
montant, le Président de la République a promis que 50 milliards d'euros nous
seraient restitués d'ici la fin de l'année afin que nous puissions continuer à
financer l'économie. » (Les Echos du 29 juillet 2013). Politique financière de
gribouille? Les relèvements des plafonds ont été surdimensionnés par rapport aux
besoins de la CDC. Alors on s'apprête à rendre aux banques une partie de ce qui
leur a été retiré par les déposants. Et il clair que les relèvements
supplémentaires du plafond du livret A promis par François Hollande sont très
improbables. D'ailleurs, on peut se demander pourquoi le Gouvernement a décidé
ces relèvements et fait ces promesses. En effet, selon l'article « Les assureurs
à la rescousse du crédit aux PME » (Le Monde du 9 juillet 2013) : « Il y a du
point de vue du gouvernement trop d'argent investi dans
l'épargne
de précaution (essentiellement sur le
Livret A et l'assurance vie) et pas assez dans le financement des entreprises et
des PME. ». Moins de précipitation et plus de cohérence ne seraient pas
inutiles.
À noter aussi que le dispositif Duflot d'incitation fiscale à l'investissement locatif, bel
exemple d'instrument qui chasse trop de lièvres à la fois, semble avoir failli
au premier trimestre 2013. Les achats de logements neufs par les investisseurs
ont reculé de – 23 % par rapport au premier trim. 2012. Cela pourrait se
prolonger, notamment si les nombreuses conditions et restrictions qu'il impose
ne sont pas « assouplies, allégées », modifiées. La CDC pourrait donc être
encore moins sollicitée que
prévu.