par Luc BEYER de
RYKE
La lecture de « l’Huma » (L’Humanité)
l’autre jour aurait pu se confondre avec celle de l’Osservatore romano, le moniteur officiel du Vatican. Une
page entière était consacrée au discours du pape François et à son appel à un
jour de jeûne pour la Syrie.
Dans un grand moment d’émotion et
d’éloquence il s’est écrié deux fois « Plus jamais la guerre !
».
Son invocation faisait songer à celle
d’Aristide Briand aux lendemains du carnage de 14-18 « Arrière les canons,
arrière les mitrailleuses ! ».
À l’époque on comparaît souvent Llyod George, l’Anglais, et Aristide Briand, le Français. Du
premier on disait qu’il savait tout et ne comprenait rien, du second qu’il ne
savait rien et comprenait tout.
Du pape François, si on peut
rapprocher son appel de celui du laïc pacifiste et
socialiste
Aristide Briand, on écartera par
contre l’exemple de Llyod George car le jésuite qu’est
le pape allie savoir et compréhension. Est-ce dire qu’il peut être entendu ? «
Le pape, combien de divisions ? » ironisait Staline.
Et si l’on peut associer Briand et
François, l’autre François qui se trouve à l’Élysée se veut lui le chef du parti
de la guerre. Il y a sans doute de bonnes raisons pour cela, Bachar el Assad pouvant figurer,
avec tout le déshonneur qui s’y attache, dans le Gotha des tyrans et des
dictateurs.
L’ivresse des
armes
Mais le condamner et le stigmatiser
n’empêche pas de réfléchir. Sorti de l’ENA, François Hollande est sûrement plus
intelligent que le laisse paraître sa photo désormais célèbre ou on pourrait le
croire le « ravi » du village. Pourtant son impétuosité guerrière l’a pris au
piège. Ce fut grisant pour lui d’être chef de guerre au Mali et ceint des
lauriers d’un triomphe à l’africaine.
La situation n’est pas comparable.
Refuser un vote de l’Assemblée nationale pour attendre celui du Congrès des
Etats-Unis, je ne sais pas si l’on avait vu cela sous la Ve république pourtant
si soumise depuis quelques années aux ukases et volontés d’outre-Atlantique ?
Encore pourrait-on et peut-on agir en accord avec les Nations Unies si cela
s’avère possible. Mais Hollande, comme on le clamait avant Sedan, est de ceux
pour qui aucun bouton de guêtre ne manque à nos
soldats.
Il est prêt à lâcher des missiles
sans l’aval des Nations unies pour complaire sinon devancer les
États-Unis.
Le Proche-Orient
écartelé
C’est prendre la responsabilité
écrasante de déstabiliser toute la région. Nous avons un monde arabe totalement
écartelé aux intérêts contradictoires et enchevêtrés. À tel point qu’on ne
retrouve pas toujours les protagonistes là où on s’attend qu’ils soient. À titre
d’exemple, l’Arabie Séoudite veut abattre Assad ; la Turquie aussi parce qu’elle veut étouffer dans
l’œuf le nouvel État kurde qui s’est installé en Syrie ; l’Égypte par contre, la
Tunisie et l’Algérie sont opposées à une intervention ; quant aux Palestiniens
ils ne disent mot et leurs représentants à l’étranger ont pour consigne de se
taire. ; ce qui reste de la Libye est prêt à voler au
secours des islamistes en Syrie ; quant au Liban, il demeure à travers le
Hezbollah l’allié de Bachar. Et l’Iran ? Il constitue
le navire amiral du chiisme et donc le protecteur du régime syrien. Mais le
nouveau dirigeant – et donc le guide Khamenei – semblent rechercher une
conciliation avec Obama et les États-Unis. Une
cacophonie !
Et puis François Hollande et les
interventionnistes ont-ils songé aux opposants d’Assad
s’ils arrivent au pouvoir ? La majorité sont des
islamistes. Ceux-là que la France combat au Mali. Que sera, si cela arrive, le
sort des chrétiens et des minorités en Syrie ? Les laissera-t-on égorger et
brûler leurs églises ? Cela au moins pourrait inciter à réfléchir avant
d’embraser tout le Proche-Orient. Ce qui ne constitue en aucun cas un
blanc-seing pour la cruauté du régime.
Un accord
nécessaire
Le happy end se trouve dans les films
américains. Trop rarement dans la vie. Comment sortir de la crise et mettre au
pas le régime syrien ? À condition que l’on y parvienne il faudra passer
inéluctablement par un accord international. La soupe à la grimace du G20 fut
loin d’une mythique potion magique et François Hollande n’est pas Panoramix. Que cela plaise ou non il faudra s’en
accommoder.
N’est-ce pas Winston Churchill et son
visage de vieux dogue mâchonnant un cigare qui disait préférer à la guerre la
négociation dans une formule demeurée célèbre : « Plutôt que ‘’ war, war, war’’, je réponds ‘’talks, talks, talks’’
».
Écoutons la
leçon.
⁂
PS – L’horreur a ses post-scriptum.
C’est encore au Proche-Orient qu’elle s’écrit. Cette fois en Irak. On pense ce
que l’on veut des Moudjahidines du Peuple opposants iraniens au régime des
mollahs réfugiés en Irak. Déjà celui de Sadam...
Celui-ci renversé le camp d’Achraf où ils vivaient fut
peu à peu vidé par la force. Même si les Moudjahidines ont cessé d’être inscrits
parmi les organisations terroristes tant pour l’Europe que pour les États-Unis.
La plupart ont été transférés dans une enceinte très improprement surnommé «
Camp de la Liberté » aux alentours de Bagdad. Une centaine d’entre eux ont été
laissé à Achraf pour vendre ce qui pouvait l’être et
mettre la clef sous la porte. Cela alors que les autorités irakiennes, il y a
environ deux semaines, leur avaient coupé l’eau et les vivres. Voici que sans
qu’on sache pourquoi ni qui précisément la moitié d’entre eux se sont vus les
mains liées dans le dos et abattus.
Un massacre qu’il importe de
dénoncer. D’autant plus que les Moudjahidines aussi tourmentés furent-ils dans
un passé lointain comptent des amitiés dans nombre de municipalités françaises.
À chacun d’évaluer le rôle qui leur appartient mais un crime reste un crime et
doit être dénoncé.