CORSE, LABORATOIRE DE LA RÉPUBLIQUE :

PROJET DE RÉFORME CONTITUTIONNELLE

 

par Marie-Dominique ROUSTAN-LANFRANCHI

Une fois de plus, il ressort des travaux de la collectivité territoriale de Corse (CTC) que notre île pourrait servir de laboratoire de la République.

En effet, malgré une situation de crise économique et sociale grave, un contexte local gangréné par l’affairisme mafieux et la violence, des prises de position gouvernementales défavorables, la CTC s’obstine dans son projet d’une énième réforme statutaire, qui réserverait un sort particulier à la Corse dans la Constitution, alors que rien ne le justifie. Cette réforme est nourrie uniquement par les revendications des mouvements nationalistes, sous couvert de tenir compte de nos spécificités (comme s’il n’en existait pas dans d’autres régions de l’hexagone !), faux prétexte, mais fer de lance de leur triptyque : une langue, un peuple, une nation ! Cela passe par la recherche d'un consensus à tout prix autour des mesures suivantes, sur lesquelles les élus de Corse vont très prochainement être appelés à se prononcer :

Statut de citoyen-résident : Il ne résoudrait en rien les problèmes fonciers pour lesquels il suffit d’exploiter l’arsenal de textes existants, sans besoin de changer les institutions. La finalité du projet, incompatible avec nos principes républicains d’égalité, est d’introduire un droit de propriété à géométrie variable, une citoyenneté à double vitesse, prélude à la citoyenneté corse. Langue corse : Le bilinguisme relève du domaine culturel. C’est dans ce cadre, et dans le respect de la liberté de choix, que doit être appréhendé l’enseignement de la langue corse. Sa survie dépend de la volonté de chacun et non de la contrainte pour tous ! Que l’école accompagne le volontarisme c’est une bonne chose ! Qu’elle serve des arrière-pensées anti-françaises serait inconcevable ! La co-officialité est une exigence politique d’ordre idéologique, le levier pour mettre en place un enseignement par immersion destiné à reléguer le français au rang de langue subalterne, et à aboutir à la corsisation des emplois.

Accroissement des compétences y compris législatives : Au motif d’adapter les lois nationales à des spécificités régionales, on voudrait faire sauter les garde-fous de l’unité républicaine qui a ses propres exigences non négociables. Si des aménagements sont nécessaires, ils peuvent trouver leur place dans le dispositif du rapport État/Région, sans recourir à une réforme de la Constitution !

La commission Carcassonne, chargée, par les stratèges de la CTC, de plancher sur la faisabilité du leur projet - dont nous ne cessons de dire qu'il est anticonstitutionnel - a sérieusement freiné leurs illusions, en particulier celles visant à un statut de type néo-calédonien (article 74 de la Constitution), et suggère pour conférer un peu plus d’autonomie à la Corse de la faire passer dans la catégorie des collectivités territoriales d’outre-mer (article 73).

C’est ne pas mesurer le symbole de rupture d’appartenance pleine et entière de notre île à la nation française, car elle n’a jamais été une de ses colonies. Son histoire, son aire culturelle, sa proximité géographique du continent, sa place dans la France de 1789, de Napoléon, ou de la Résistance à l’occupant, ne peuvent en aucun cas l’apparenter aux ex DOM-TOM.

Il faut arrêter avec cette manie du réformisme institutionnel. En trente ans nous en sommes déjà à trois statuts particuliers, tous présentés comme la condition sine qua non du bien-être de la Corse. Ils n’ont rien changé à notre quotidien, à

l’exception d’améliorations structurelles notables dues essentiellement aux deux milliards d’euros du PEI alloués par l’État. Un quatrième statut ne rendrait les Corses ni plus riches ni plus heureux. Il servirait uniquement la stratégie des séparatistes, en attendant la prochaine « avancée », qu’ils ne manqueraient pas de réclamer dans dix ans.

La réelle finalité de ceux qui veulent se couper de la République est de devenir des potentats locaux bénéficiant de tous les pouvoirs. Les conséquences pour la Corse seraient désastreuses : situations d’inégalité, problèmes sociaux, précarité grandissante (la Corse devant se passer de la solidarité nationale), politique clientéliste galopante, grave affaiblissement de la démocratie (pas de contre-pouvoir, dépenses sans aucun contrôle, risque de voir des bandes organisées exercer des pressions sur les élus). Sans la protection de l’État, la Corse serait livrée ainsi à la merci de quelque uns, aux désordres et à toutes sortes de dérives...

Le temps est venu de dire non ! Les professions de foi électorale des élus républicains de la CTC

ne faisaient pas état de leur intention de revenir sur des questions institutionnelles, d’autant que les électeurs ont rejeté en 2003 le principe d’une collectivité unique. Il faut avoir présente à l’esprit la stratégie des petits pas de ceux pour qui chaque réforme constitue « une étape de plus vers l’indépendance ». Les élus républicains n’ont pas été mandatés pour soutenir de telles revendications, et l’on attend d’eux qu’ils répondent aux vraies priorités que sont le développement économique de notre île, et le soutien dû à l’État dans la lutte contre toutes les formes de violence !

Ainsi, de nouveau en Corse, les valeurs de la République sont à défendre ! Elles le sont d’autant plus, que le projet de la CTC pourrait servir le courant de fond de ceux qui, dans notre pays, militent pour une Europe des régions, un courant qui grandit au fur et à mesure qu’avance la décentralisation.

Non au projet antirépublicain de la Collectivité de Corse ! Non à tout projet qui pourrait remettre en cause nos fondamentaux et la manière dont s’est construite la nation française ! Non au démantèlement de la République !

 
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12.05.2013
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