Les États-Unis
se sont lancés, à grande échelle, dans l’exploitation du gaz et du pétrole de
schiste sur leur territoire national.
L’effet visible
et immédiat est la division par deux du coût de ces matières premières pour les
utilisateurs. Cet abaissement des coûts entraîne un mouvement de relocalisation
d’activités productrices sur le sol américain.
Le propos n’est
pas d’animer (ou d’envenimer) le débat sur le bien-fondé ou non de
l’exploitation de ces mêmes matières premières qui sommeilleraient en quantité
dans notre sous-sol, mais de s’interroger de la possible influence sur
l’orientation de la politique étrangère des États-Unis engendré par cette
nouvelle donne énergétique.
Nous savons tous
que les interventions militaires américaines hors de leurs frontières sont
motivées, plus ou moins, officiellement par le souci de « sécuriser » les
sources d’approvisionnement en matières premières, le tout sous la pression des
lobbies pétroliers et militaro-industriel. Ces nouvelles ressources dont il est
dit qu’elles rendront les États-Unis auto suffisants, voire exportateurs nets de
ces ressources à l’horizon 2020 (demain en quelque sorte) pourraient, me
semble-t-il, engendrer une révision de la politique étrangère des États-Unis
pour les raisons exposées ci-après.
Il n’est
évidemment pas question de sous-estimer, ni le poids économique des deux
secteurs mentionnés dans le PIB américains, ni la puissance de leurs lobbies et
ce pour quelques années encore, mais certains éléments méritent d’être pris en
considération.
1. On vient de
le voir, la dépendance des États-Unis vis-à-vis des sources d’approvisionnements
« abroad » se réduit à grande vitesse.
2. Le déficit
budgétaire américain va devoir être réduit. L’importance du budget de la défense
en fait, de ce point de vue, une cible de choix pour les amateurs de réduction
de déficits. Le processus en est à ses débuts. Le budget 2013 (525,4 milliards
de $ contre 530 milliards de $ en 2012), est en baisse, certes très légère (-0.1
%) mais l’inflexion par rapport aux années passées, est notable.
3. Le montant
des opérations de guerre est en baisse de 25 %. Il passe de 115,1 à 88,5
milliards de $ (fin du conflit en Irak, réduction des effectifs en Afghanistan,
etc.).
4.
L’opinion publique américaine, qui ne comprend pas pourquoi ses « boys » vont se
faire tuer sur des théâtres d’opérations qu’ils auraient le plus grand mal à
situer sur une mappemonde, se fait plus critique.
5.
Le Defense Strategic Guidance publié par le Pentagone le 5 janvier
2012 titrait « Sustaining US Global Leadership
Priorities for 21 st century
Defense » résumait l’enjeu : dans le contexte de
pression budgétaire qui impose des priorités, comment maintenir l’efficacité
stratégique et la puissance militaire des États-Unis.
Les
États-Unis ont-ils encore comme priorité première de « sauver le monde » et
au-delà en sont-ils capables ? Est-ce un hasard si, dès son installation à la
Maison Blanche Barak Obama à pris la direction de
l’Asie, devenue région prioritaire pour la diplomatie américaine et si, à
l’horizon 2020, 60 % des bâtiments de l’US Navy seront
stationnés en Asie ?
Dans
ce contexte, est-il si absurde d’imaginer un scénario qui conduirait les
États-Unis à se retirer, volontairement ou involontairement (Iran, Irak, Koweït)
d’un certain nombre de théâtres d’opérations devenus moins stratégiques du point
de vue de l’approvisionnement en matières premières ?
Le
mouvement s’opère depuis trois ou quatre ans quand bien même des troupes (pardon
des « conseillers ») restent sur le terrain. L’aire de jeu semble se réduire,
tout particulièrement au Moyen-Orient.
Dès
lors les Européens devront bien finir par s’interroger sur le rôle qu’ils vont
avoir à jouer dans une région qui est à leur porte.
La
question mérite, me semble-t-il, quelques réflexions.