LA FRANCE LIBRE ET SA MONNAIE EN 1943

 

Par Christine ALFARGE

 

Je suis heureuse de vous présenter un des très rares exemplaires du franc Graziani 1943 aluminium, que je garde précieusement afin d’honorer la mémoire des combattants à travers cette monnaie emblématique de la France Libre constituée des Français (officiers, soldats ou simples citoyens) courageux et volontaires à la suite de l’Appel du 18 juin 1940 du Général de Gaulle, afin de poursuivre le combat contre l’ennemi aux côtés des alliés britanniques, jusqu’en Afrique du nord.

On peut y distinguer l’inscription REPUBLIQUE FRANCAISE sur une face avec un buste drapé de la République aux cheveux courts à gauche coiffé d’un bonnet phrygien orné d’une cocarde tricolore, sous une couronne composite de blé, chêne et olivier nouée par un ruban ; sous le ruban on peut y lire MORLON. Sur l’autre face, figure l’inscription LIBERTE - EGALITE / FRATERNITE et 1 / FRANC, en deux lignes au-dessus du millésime encadré de deux cornes d’abondance symétriquement opposées. Cette monnaie frappée à quatre mille quatre cents exemplaires a été gravée et fabriquée en Algérie française. Les allemands ayant détruit le convoi lors de leur acheminement ces derniers n’ont jamais été mis en circulation. Au paravent pour inaugurer l’événement, quelques pièces avaient été distribuées symboliquement à certains hauts fonctionnaires de l’état français, ce qui explique l’existence et la rareté de cette pièce d’un Franc 1943 en aluminium de 1,3 g.




« Les forces armées ralliées à la France libre, appelées Forces Françaises Libres (FFL) participeront à de nombreux combats en Afrique. Lors du débarquement allié en Afrique du nord, quatre cents volontaires civils arrêteront Juin et Darlan et, par le putsch du 8 novembre 1942, neutraliseront pendant quinze heures le 19e corps d’Armée du gouvernement de Vichy, permettant ainsi aux Alliés de débarquer et d’encercler Alger, sans opposition avant la capitulation le soir même de cette ville. »

En 1943, c’est la combinaison de trois éléments qui aboutira à la conquête du pouvoir algérois par les hommes à la Croix de Lorraine et donnera son importance à cette période que ce soit pour la libération de la France ou la personnalité de Charles de Gaulle qui se dessine. On assistera à l’unification de la résistance intérieure sous le drapeau gaulliste et la dégradation du mythe vichyste lors du débarquement allié en Afrique du nord, sous la pression toujours plus forte des américains vis-à-vis de l’homme de Londres.



«…La résistance, qui est au cœur de la mystique gaulliste… », écrivait Winston Churchill.

Le 12 février 1943, Jean Moulin qui pendant de longs mois avait pris la tête au nom du Général de Gaulle de l’ensemble des organisations de résistance, revint en Angleterre, en même temps que le général Delestraint, chef de l’Armée secrète. Ils auront tous les deux de nombreux contacts avec les responsables du Comité national français et les chefs militaires britanniques, notamment le 21 février avec le chef de l’état-major impérial britannique, le général Alan Brooke. Le même jour, le Général de Gaulle remettra la décoration de l’ordre de la Libération à Jean Moulin et le nommera « commissaire en mission » (membre du Comité national), il lui confiera ce qui sera sa dernière mission avec pour contenu des instructions essentielles dans la mesure où elles réunissaient l’insurrection interne (réunifiée le 11 novembre 1942) et l’organisation extérieure de juin 1940 sur un sol étranger. En voici quelques lignes :

« Jean Moulin devient le seul représentant permanent du général de Gaulle et du Comité national pour l’ensemble du territoire métropolitain. Il doit être créé, dans les plus courts délais possibles, un Conseil de la Résistance unique pour l’ensemble du territoire métropolitain et présidé par Jean Moulin. Ce conseil de la Résistance assurera la représentation des groupements de résistance, des formations politiques résistantes et des syndicats ouvriers résistants. Le rassemblement doit s’effectuer sur la base des principes suivants :

contre les Allemands, leurs alliés et leurs complices, par tous les moyens et particulièrement les armes à la main ;

contre toutes les dictatures et notamment celle de Vichy, quel que soit le visage dont elle se pare ;

avec de Gaulle, dans le combat qu’il mène pour libérer le territoire et redonner la parole aux Français.

… Le Conseil de la Résistance forme l’embryon d’une représentation nationale réduite, conseil politique du Général de Gaulle à son arrivée en France… »

Ce texte est capital, parce qu’il proclame l’hégémonie de l’homme de Londres et bientôt d’Alger en ces premiers mois de 1943, année charnière d’où émergera la France de la Libération. Le « Conseil National de la Résistance » sera constitué à Paris sous la présidence de Jean Moulin. Il réunira les représentants des mouvements de résistance, des partis et des syndicats et demandera la formation d'un Gouvernement Provisoire à Alger, présidé par le Général de Gaulle. Celui-ci arrivera à Alger le 30 mai 1943, et le 3 juin, le Gouvernement provisoire de la République française sera créé, préparant la mise en place des pouvoirs à la Libération.

 

© 25.06.2012