Il
y
a des années lorsque je siégeais au Parlement européen, beaucoup faisaient leur
cet adage : « Israël vivra, Liban renaîtra, Palestine naîtra. » Le Liban a
retrouvé une paix fragile, Israël vit et nous devons veiller à ce qu’il en soit
ainsi. Demeure la Palestine. Les fées Carabosse s’ingénient avec persistance
pour que le berceau demeure vide.
Pour la première fois
depuis que Mahmoud Abbas a succédé à Yasser Arafat à la tête de l’Autorité
palestinienne, il a su acquérir une stature présidentielle. Il s’est hissé à la
hauteur d’un rôle qui semblait le dépasser. Il a forcé l’Histoire en exigeant
pour la Palestine d’être reconnue comme État à part entière par les Nations
Unies. Son peuple l’a acclamé. Peut-être et sans doute ne l’avait-il jamais fait
auparavant.
Je me souviens de
l’entretien en tête à tête que j’avais eu avec Shimon Pérès peu de temps avant
la mort d’Arafat. C’était à Jérusalem. « L’homme qu’il nous faut c’est Mahmoud
Abbas » me confiait-il en l’appelant encore Abou Mazen. Il l’eut. Mais au lieu de lui donner du grain à
moudre, de mettre un frein à la colonisation, d’aider ce modéré à conduire les
siens dans la voix de la négociation, les Israéliens se contentèrent de quelques
sourires et poignées de main. L’hypocrisie ne pouvait servir de
politique.
De fil en aiguille, Israël
arriva à se doter d’un gouvernement qui ne tient que par la grâce d’Avigdor Lieberman. L’homme qui parlait il y a quelques
années de bombarder le barrage d’Assouan et dont le rêve est d’expurger la Terre
de Palestine des Palestiniens.
L’Europe
divisée
Tandis que les grandes
manoeuvres battent leur plein aux Nations Unies, la
scène internationale s’assombrit. Tant en Europe qu’aux États-Unis. Fin
septembre se tenait à Genève le Conseil des droits de l’homme des Nations Unies.
Le débat portait sur la Palestine. Les huit membres de l’Union Européenne
composant le Conseil croyaient aboutir à une position commune. Le texte devait
autant stigmatiser le blocus de Gaza que les attaques terroristes contre Israël.
Mais, sans crier gare, nanti des instructions venues de La Haye le représentant
des Pays-Bas annonça que le texte ne recevait pas l’aval de son pays. Il
demandait que toute référence à la solution des deux états soit biffée. Un état
israélien, un état palestinien, c’était jusqu’ici la position commune à
l’ensemble de l’Union Européenne. La déclaration batave fut accueillie avec
stupeur.
Traduite aussitôt par Jean
Asselborn
, ministre des Affaires étrangères luxembourgeoises. « Je m’attendais à
beaucoup mais je n’aurais jamais pensé à ce que la solution des deux états
puisse être remise en question. » Et de conclure qu’il convient de dire
ouvertement que, s’il en est ainsi, « une politique étrangère européenne commune
est impossible ». On sait l’influence aux Pays-Bas de Geert Wilders le populiste aux « cheveux de paille », baptisé
ainsi pour sa blondeur d’un champ de blé… Résolument pro-israélien, ayant dans
sa jeunesse effectué plusieurs séjours en Israël, certains, à tort ou à raison,
voient en lui un agent du Mossad. S’il s’agissait d’un « agent dormant », voici
belle lurette qu’il est « réveillé ».
Aux États-Unis, le lobby
juif
Tandis que l’Europe se
fractionne aux États-Unis, Barak Obama mange sa
parole. L’an dernier il avait promis un état palestinien pour cette année. Le
voici à la veille d’user de son droit de veto au Conseil de Sécurité. S’agit-il
de duplicité ? Pas nécessairement. il convient plutôt
d’y voir un rapport de force entre un souhait présidentiel incapable de se muer
en volonté et la puissance de deux lobbys. L’un, communément appelé le « lobby
juif », fait la pluie et le beau temps dans la presse et ses moyens financiers
contribuent à faire et défaire les élus. Pour avoir osé demander leur
reconnaissance aux Nations Unies, les Palestiniens se voient sanctionnés. Le
Congrès a gelé une aide de 200 millions de dollars accordée à l’Autorité
palestinienne. Quant à l’action de l’ex-président Jimmy Carter en faveur de la
Palestine, elle est tenue par des membres influents de la communauté juive pour
purement et simplement antisémite.
Les Chrétiens sionistes et
Harmagedon
Mais à côté de cette
sensibilité exacerbée il existe un groupe de pression plus puissant encore si
possible. Ce sont les « Chrétiens sionistes ». Très proches de la Maison Blanche
au temps de George Bush, ils sont plus de 40 millions. Ils ont pignon sur rue à
Jérusalem. Je les ai rencontrés. L’argent et un mysticisme millénariste y
coulent à flot. Pas de salut hors d’Israël même si au jour du jugement dernier
seuls les purs seront sauvés… et parmi eux quelques juifs. Mais dans l’attente
d’Harmagedon comme me le confiait une adepte « nous
sommes les servants d’Israël». Sur la terre de Palestine il n’y a pas de place
pour les Palestiniens car cette terre à leurs yeux ne leur appartient pas. Il
s’agit de la Judée et de la Galilée des temps bibliques.
Fantasmagorique ? À vous,
à moi d’en juger. Mais ce qui ne relève pas d’un jugement mais d’un fait c’est
la puissance électorale représentée par ces « lobbys ». Qu’il s’agisse bien
d’Hilary Clinton devenue sénatrice de New York, qu’il s’agisse demain de Barak
Obama en quête de réélection, pas de salut sans leur
appui. Et voilà pourquoi votre fille est muette… et risque de le rester devant
le Conseil de Sécurité. « Indignez-vous ! » clame Stéphane Hessel. Certes. Nous
le faisons mais au Conseil de Sécurité on vote.Ce n'est pas la même chose…