LES DÉFIS D’UN NOUVEAU MONDE




par Christine ALFARGE

 

« Des engagements pour l’avenir, dans un contexte mondial fragile. »

 

Confrontés à un environnement en mutation, nous devons, avec la plus grande acuité, faire preuve d’une très grande capacité d’adaptation et d’anticipation pour garder notre rang de grande puissance parmi les autres puissances internationales. Il s’agit d’une veille stratégique permanente. Faut-il rappeler qu’à son époque le Général de Gaulle fit preuve d’une clairvoyance exceptionnelle notamment au sujet de la dissuasion nucléaire dont les décisions politiques allaient engager le destin de la France comme une nation indépendante, libre et responsable de ses actes. L’une des conditions nécessaires à cette autonomie des décisions politiques résidait dans la capacité d’assumer avec ses propres moyens la défense de son territoire contre les agressions militaires directes qui remettraient en cause sa survie. 

 

La stratégie nucléaire française.

 

La politique française de défense nationale engagée dès les débuts de la Ve République, avec pour composante essentielle la force de dissuasion nucléaire, demeurera inchangée avec les successeurs du Général de Gaulle, malgré le changement de contexte international.  Les réalisations françaises au niveau de la force nucléaire, de 1960 à 1980, sont significatives, par exemple les forces aériennes stratégiques, composées de Mirage IV, les missiles balistiques, les armes nucléaires tactiques ainsi que le développement de la force océanique stratégique, décidé par le Général de Gaulle depuis mars 1968. En 1978, la construction d’un sixième sous-marin nucléaire L’Inflexible, sera ordonnée par le Président Giscard d’Estaing. Les progrès spectaculaires de l’armement nucléaire français classe la France à la troisième place des puissances nucléaires, derrière les États-Unis et l’URSS, mais avant la Grande-Bretagne. Grâce au choix du nucléaire, le Général de Gaulle a non seulement permis la construction d’une infrastructure gigantesque pour l’utilisation de l’énergie nucléaire à des fins pacifiques, mais il a réussi à obtenir la reconnaissance des Alliés ainsi qu’un statut pour la France de membre permanent au Conseil de sécurité des Nations unies parmi les cinq puissances nucléaires déclarées lui permettant de peser de tout son poids sur les relations internationales. Les polémiques au sujet de la stratégie nucléaire française considérées sous l’angle de sa crédibilité et de son efficacité, sont souvent de simples spéculations stratégiques et doivent laisser la place au vrai débat sur les besoins énergétiques de la France voire de toute la planète.

 

Quels sont les choix stratégiques énergétiques à développer ?

 

Le monde est entré dans une nouvelle ère caractérisée par des changements majeurs. D’abord, la concentration urbaine, 75 % de la population mondiale vivra dans les villes en 2040 (contre 50 % en 2006). Ensuite, la rareté des ressources, particulièrement les ressources fossiles, tout comme la nécessaire prise en compte du risque climatique, impose de « décarboner » l’énergie et donc de recourir de façon accrue au nucléaire et aux énergies renouvelables, au premier rang desquelles l’hydraulique. L’origine de la production électrique dans l’Union européenne des vingt- sept se répartit entre le nucléaire (30 %), le charbon (29 %), le gaz et le fuel (25 %), l’hydraulique (10 %) et les autres énergies renouvelables (6 %). Troisièmement, les pôles du développement mondial se sont déplacés vers l’Est et le Sud : le monde compte désormais plusieurs centres de gravité. Il n’est plus question que toutes les technologies soient aux  pays riches et que les autres les attendent. Il existe une dualité entre le réchauffement climatique qui impose de restreindre les émissions de CO2 et la démographie et le développement économique venant de Chine, d’Inde et des autres pays émergents qui font craindre des pénuries. La demande mondiale a augmenté ces dernières années de 2 % par an, elle pourrait diminuer autour de 1,5 %, si les mesures d’économies d’énergies préconisées par les gouvernements lors des sommets sont respectées. Dans un marché européen de plus en plus ouvert, les grands groupes énergétiques  s’organisent pour faire face à une concurrence qui se déploie désormais à l’échelle internationale afin de répondre à trois grands enjeux : les prix, la sécurité d’approvisionnement et le changement climatique. Au total, les grands opérateurs sont désormais conduits à investir chacun plus de dix milliards d’euros par an au service d’un projet industriel qui entre dans « l’ère du bas carbone ». 

 

La stratégie économique et financière.

 

Parmi les problèmes nécessitant également une réflexion sérieuse, la dette publique qui continue  d’augmenter, pourrait atteindre 100 % du PIB en 2015. Les déficits du commerce extérieur (3,5 % du PIB) et de la balance des paiements (3,6 du PIB) se trouvent  à des niveaux jamais atteints même lors de la crise de 1983. Le contexte international est fragile, la croissance économique mondiale peut s’effondrer à tout moment. Il est urgent pour notre pays d’avoir un débat de fond et agir sur  les leviers dont il dispose en particulier sur sa dette publique et sa compétitivité afin de redonner notamment ses lettres de noblesse à l’école, la formation des salariés et des chômeurs, la recherche dans les entreprises. Il faut porter haut les valeurs du service public, même si elle  s’apparente davantage au progrès technologique, l’innovation doit investir tout autant les champs commercial, économique et social. Enfin redonner aux métiers de l’industrie l’importance et la place qu’ils méritent.    

 

Dans un avenir à court terme, plusieurs questions se posent notamment sur les politiques industrielles à mener en France et en Europe face à la mondialisation. L’Union européenne a-t-elle les moyens de mener une politique énergétique commune ? La question militaire se pose également dans un contexte mondial chaotique où les frontières ne demeurent pas infranchissables. De quelle armée voulons- nous, pour quelle défense ? À l’instar de la pensée du Général de Gaulle, « les Alliés européens doivent conserver leur indépendance et son élément essentiel, la défense nationale, tout en prenant leurs responsabilités pour une défense commune ». Concilier les démarches environnementales avec le développement  économique et la cohésion sociale constitue un engagement pour notre avenir et celui des générations qui vont suivre. Notre souci quotidien est de répondre aux grandes questions du futur par des choix stratégiques qui sont à notre portée.

 

 




      Réagir à l'article :
 


03.04.2012
Free counter and web stats
HTML Web Counter