DES LARMES ET DES ARMES

 

par Luc Beyer de ryke,

 

« Sarko s’en va-t-en guerre mironton, mirontaine, ne sait quand reviendra ; il reviendra à Pâques… ou à la Trinité…. »

 

 

 

En cette période pascale n’est-ce pas ce qu’on est tenté de fredonner. Par la volonté du Président de la République la France est engagée sur trois terrains d’opération : l’Afghanistan, la Libye et la Côte-d’Ivoire. L’énumération suit ici la chronologie. En Afghanistan et en Côte-d’Ivoire l’armée française est engagée dans des opérations terrestres.

 

Pas en Libye.

 

La nature des interventions diffère mais partout elles se font en vertu d’un mandat des Nations unies. La France ne fait pas cavalier seul. Mais devait-elle enfourcher ce destrier guerrier ? Les avis sont partagés. D’autant qu’un péril commun guette dans les trois pays, celui de l’enlisement. En Afghanistan la France au fil des ans a perdu des hommes. Trop.

 

Les meilleurs spécialistes, y compris américains, ne voient pas d’issue. Le but recherché comme Obama le veut en Irak, c’est de rendre l’Afghanistan aux Afghans. Mais entre le pouvoir corrompu de Karzaï, les chefs des tribus en lutte pour leur pré carré et leurs champs de pavots sans oublier les Talibans retranchés dans leurs montagnes dont ils descendent pour des opérations meurtrières qui sont les Afghans auxquels « rendre » l’Afghanistan ? Laissons cette interrogation jusqu’ici sans réponse.

 

Aujourd’hui le devant de la scène est occupé par la Libye et la Côte-d’Ivoire. La Libye, après la Tunisie et l’Égypte, a connu son « printemps ». Mais le sien a éclos en armes. Les femmes étaient rares, les insurgés, Kalachnikof à la main et barbe au vent, nombreux. Le régime durement contesté a réagi plus durement encore. Le Nord tripolitain, en majorité khadafiste, a contre-attaqué et marché sur la Cyrénaïque, sur Benghazi et Tobrouk. Il y avait, il y a déséquilibre dans l’armement des uns et des autres. Un bain de sang menaçait. Il fallait agir dans l’urgence. Mais le fallait-il ? On atermoya. Puis, on décida. En mesurant l’effort, en le limitant, en le circonscrivant.

 

On peut certes invoquer mille et une mauvaises raisons à la furia francese, dont témoigna Nicolas Sarkozy. A-t-il voulu laver le « péché originel » de Michèle Alliot-Marie offrant le savoir-faire de la police française à Ben Ali ? A-t-il voulu faire oublier le « camp du drap d’or » de Khadafi à Paris ? Veut-il dissiper le voile épais de son impopularité en le lacérant, le déchirant à coups de sabre ? Il se peut. Ce n’est pas l’essentiel.

 

Des vies étaient en cause. En grand nombre. Des intérêts pétroliers aussi ne manquera-t-on pas d’ajouter avec reproche et acidité. Pourquoi le nier ? A-t-on jamais vu un État faire bon marché des intérêts qui sont les siens ? En serait-il ainsi des États-Unis, de la Russie ou de la Chine ? Qu’on me le dise. C’est qu’en ce cas je serais mal informé. Les raisons d’intervenir me semblent fortes. Je puis, néanmoins, comprendre ce qui pouvait faire hésiter. Le choix a été fait. Dès lors la pire des choses serait de s’arrêter au milieu du gué. Nous aurions tout perdu. Nos adversaires triompheraient et nos amis circonstanciels et incertains ne nous pardonneraient jamais leur abandon. Les Libyens demeureraient dressés les uns contre les autres mais tous agoniraient la France. Est-ce cela que nous voulons ? N’oublions pas non plus ce troisième front qu’on semble ignorer, la révolte berbère dans le djebel Nefoussa. J’y fus en décembre et eus maille à partir avec la sécurité libyenne pour m’être arrêté à Ifren.

 

Désormais, une fois que le principe de l’intervention a été décidé, le vin tiré, il faut le boire. En s’accordant aisément sur le fait qu’il ne s’agit pas d’un grand cru mais d’un vin aigre qui laisse et laissera un arrière-goût amer.

 

Et la Côte-d’Ivoire ?

 

Se trouve-t-on engagé dans une nouvelle péripétie tumultueuse et sanglante d’une France-Afrique à laquelle on s’était juré de tourner le dos ? Là encore ne déplaçons pas la question. Les événements sont ce que nous savons. Aux yeux des instances internationales Alassane Ouattara a gagné les élections. Dans une attitude de déni qui est celle de Laurent Gbagbo ce qui est en jeu c’est l’acceptation d’un partage de pouvoir. En Côte-d’Ivoire et au-delà ailleurs en Afrique.

 

Pour la France un état de fait justifie son intervention, l’emportant sur tous les arguments aussi valables qu’ils puissent être. Douze mille Français vivent en Côte-d’Ivoire. La France a le droit, le devoir de protéger ses ressortissants. Elle le fait. Voilà pourquoi, à mes yeux, toutes les critiques peuvent être émises mais, dans le cas présent, la politique du Président de la République est celle de la France.

 
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14.04.2011
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