DOULOUREUX MYSTÈRES IMMOBILIERS

DOULOUREUX MYSTÈRES IMMOBILIERS

 

par Paul Kloboukoff

 

Conclusions résumées sur les principales causes de l’hyper inflation immobilière.

Au cours de la décennie, les principaux moteurs de l’hyper inflation ont été et sont encore, à mon avis : - la faiblesse prolongée, puis la plongée des taux d’intérêt qui ont incité les candidats acheteurs potentiels, et en particulier des ménages, à investir dans l’immobilier en s’endettant considérablement. La fixation de taux directeurs bas par la bce, qui influencent les taux du crédit à l’habitat, est donc à l’origine de nos difficultés ;

 

- l’endettement très fortement croissant, facteur inflationniste des coûts et des prix des logements ;

 

- la recherche d’une relative sécurité de leurs placements par les ménages, qui les a conduits à s’écarter de la bourse après la grande bulle financière de 1999 à 2001, ainsi que d’une rentabilité minimale que le système bancaire n’offre plus ;

 

- les comportements spéculatifs et l’espoir de plus-values appréciables ;

 

- les aides publiques à l’investissement (dispositifs successifs d’allègements fiscaux, prêts bonifiés, prêt à taux zéro…) destinées à alléger les efforts de remboursement des emprunts, et qui ont poussé également des ménages à s’endetter pour des montants plus élevés et sur de plus longues durées ;

 

- la raréfaction des terrains à bâtir et la montée en flèche de leurs prix, surtout dans et autour de grandes agglomérations, qui a pesé sur les coûts des logements construits et qui a pu ralentir des investissements ou les faire sortir et les éloigner de centres urbains.

 

La pression de la demande de logements joue un rôle majeur dans l’hyper inflation dans les grandes agglomérations et plus particulièrement dans la région parisienne qui attire, au détriment du reste du pays, les investisseurs, les activités et les personnes à la recherche d’un emploi. Là, la pression de la demande, y compris de la part d’étrangers, contribue à faire exploser les prix. Globalement, cette pression s’est exercée moins sur le marché des logements neufs que sur ceux des logements « d’occasion », plus animés en raison d’une propension soutenue à la « mobilité » (changement de résidence) des ménages. Fortes dans le secteur privé, les hausses des prix des loyers n’ont que partiellement suivi celles des prix des logements, particulièrement en raison des contraintes imposées aux révisions des loyers. Par contre, lors des changements de locataires, des propriétaires « rattrapent leur retard », anticipent les limitations à venir et relèvent copieusement les loyers. Souvent après des travaux de rénovation et de remise aux normes imposées, de plus en plus exigeantes, il est vrai. Quant aux loyers des logements neufs, c’est le « marché » qui les détermine, non sans tenir compte des prix des logements neufs et anciens. C’est principalement par ces canaux que la fièvre des marchés du neuf et de l’ancien se transmet au marché locatif privé, dit libre, avec quelques pertes de chaleur, heureusement. À côté de cela, les aides personnalisées ou non au logement, qui réduisent les coûts des loyers pour les locataires, sont vues par certains comme des aides aux bailleurs qui permettent à ceux-ci de relever leurs tarifs. Le locatif social lui, protégé et encadré, connaît toujours une demande pressante, mais pas le même emballement.

 

 

Première partie :

des points saillants

La lutte contre l’hyper inflation immobilière :

un objectif prioritaire de la politique du logement ?

 

Cela ne ressort pas évidemment des objectifs du ministère du Développement durable présents sur Internet au16 novembre 2010. « La politique du logement a pour principaux objectifs de :

 

- mettre en oeuvre le droit au logement opposable ;

- développer la production de logements ;

- développer une offre de logements sociaux dans les territoires soumis à une forte tension et notamment dans les communes soumises à l’article 55 de la loi sru ;

- favoriser l’accession populaire à la propriété ;

- mettre en oeuvre le Plan national de requalification des quartiers anciens dégradés (pnrqad) et intensifier la lutte contre l’habitat indigne ;

- mobiliser les acteurs du logement. » Pourtant, les développements de la production de logements et de l’accession populaire à la propriété requièrent que les prix des logements ne soient pas exorbitants afin que des ménages aient les moyens de les acquérir pour leur propre usage (ou pour les louer) ou que des bailleurs du marché locatif s’intéressent à eux. Par ailleurs, mettre en oeuvre le dalo paraît d’autant plus une gageure que les ressources publiques sont épuisées.

 

 J’ai déjà écrit ce que je pensais de la loi sdru et de ses 20 % de logements sociaux (au minimum) dans les communes. Depuis, les finances de l’État et des collectivités locales se sont gravement détériorées. Avec les mêmes freins, ainsi qu’avec les difficultés techniques et sociales déjà éprouvées dans sa réalisation, le louable et indispensable pnrqad sera une oeuvre inépuisable de longue haleine. Et il faudra une ferme résolution et de la persévérance pour éradiquer l’habitat indigne. La politique retenue vise en même temps l’augmentation de la population des propriétaires et celle des ménages hébergés dans un parc social élargi. Pris en sandwich entre les deux, le locatif privé, de plus en plus contrôlé par les Autorités nationales et locales, d’ailleurs, semble poussé à se tasser.

 

On peut aussi s’étonner de ne pas voir de lien étroit de la politique du logement avec une politique d’aménagement du territoire. Les projets portant sur le « Grand Paris », par exemple, renforceront encore le pouvoir d’attraction de la capitale, non sans impacts sur les prix des logements.

 

 

Prix des logements prohibitifs

et fortes disparités

 

Après un court refroidissement dû à la crise, les prix des logements anciens flambent à nouveau, surtout à Paris et dans sa région où la demande reste toujours intense. Selon les professionnels, elle excèderait de beaucoup l’offre. Les prix sont devenus exorbitants intra muros. Dans certains arrondissements, tels le vie, le viie et le ive, ils sont compris entre 9.500 et 10.000 euros par m² en moyenne. Dans le xixe, le xxe et le xiiie, les moins cotés, les prix moyens sont tout de même dans une fourchette de5.300 à 5.900 € / m². Les extrêmes se situeraient à 4.840 € et à 12.440 € (afp, 09 septembre 2010). Pas étonnant que les investisseurs recherchent les petites surfaces. La contagion gagne la petite couronne et s’étend aussi à la grande couronne qui se peuplent et se densifient. Ces chiffres, qui datent de septembre, sont dépassés.

 

Au25 novembre, les notaires prévoient que la hausse des prix des logements anciens avoisinera + 15 % en 2010 à Paris et entre + 7 % et + 10 % en petite et en grande couronne. Le prix moyen du m² à Paris devient supérieur à 7.000 €. L’hyper inflation immobilière est donc de retour, en fanfare. La bulle immobilière s’est reformée. En France, comme dans les autres pays d’Europe, les prix sont plus élevés dans les grandes villes où les activités progressent et où les possibilités d’emploi sont prometteuses (ou moins maussades). Si les prix n’atteignent pas les niveaux parisiens, ils poussent aussi aux migrations des demandeurs (et des promoteurs) vers les périphéries et, depuis quelques années, vers des zones rurales proches ou peu éloignées.

 

Les prix peuvent brûler dans les villes et les localités possédant des attraits touristiques, balnéaires, de climat agréable et de qualité de vie ainsi que d’environnement reconnus, qui y font affluer des immigrants (français et étrangers), qui attirent des résidences secondaires, celles-ci pouvant aussi devenir des résidences principales. La France méridionale et les régions côtières sont ainsi nettement plus attractives que l’Est, le Nord et le Centre.

 

Croissance et niveaux démesurés

des prix des logements par rapport aux revenus

 

Dans une note de conjoncture d’avril 2010, le Conseil supérieur du notariat le confirme tout en montrant qu’il existe une certaine corrélation entre les prix moyens des logements et les revenus moyens des ménages (données actualisées à 2006) dans nombre d’agglomérations comptant plus de dix mille foyers. Ainsi, le rapport entre le prix moyen et le revenu moyen annuel est compris dans la fourchette étroite de 5,44 à 5,63 à Lille, Lyon, Toulouse, Bordeaux, Nantes, Marseille et Grenoble, sept des plus grandes agglomérations du pays. Avec ses trois millions de ménages (et 8 % des propriétaires qui sont étrangers), Paris fait exception. Le revenu moyen (41.920 euros) y est supérieur à celui de ces sept villes et les prix plus élevés ; le ratio examiné est de 6,34. Ce ratio, assez parlant, s’approche de 8 à Fréjus et dépasse nettement ce seuil à Bayonne, à Menton et à Antibes où il tutoie les 8,55. Ces chiffres très élevés peuvent être rapprochés des pourcentages de résidences secondaires dans ces lieux prisés, qui sont ici respectivement de 34 %,19 %, 37 % et 26 %.

 

À contrario, les mêmes ratios sont de 4 à Maubeuge, 3,8 à Nevers, 3,7 à Montluçon et 3,6 à Épinal, de dimensions modestes, où les revenus sont plus faibles, l’emploi plus compté, et qui ne jouissent pas d’attraits remarquables. Ce ratio croît depuis des années en France. Pour l’ensemble du pays et des ménages, il est monté de 3 en 1996 jusqu’à 4,5-5 en 2007, soit de plus de + 50 %. Cette forte hausse n’est pas imputable entièrement à l’inflation immobilière. Beaucoup de logements existants ont bénéficié d’investissements de rénovation, de modernisation, d’extension, d’amélioration substantielle, qui les valorisent. Et les exigences pour les logements neufs et rénovés: qualité, confort, isolation, dimensions… n’ont pas cessé d’augmenter. En 1978, 26,9 % des logements étaient sans confort sanitaires. En 2006, il n’y en avait plus que 1,3 %.__ Normalement, les hausses des prix se mesurent (ou s’estiment) à « qualité constante, ou inchangée ». Pour les logements, l’indice des prix des logements « anciens » (de plus de cinq ans) est l’indicateur le plus courant. Il est censé retracer l’évolution du prix moyen de tout le parc de logements. Or les observations réalisées pour établir l’indice ne portent que sur des transactions (achats– ventes) touchant 12 à 15 % du parc de logements. Nombre d’évaluations immobilières se réfèrent donc à cet indicateur avec circonspection.

 

 

La faiblesse des taux d’intérêt,

un puissant dopant de « l’engouement »

pour l’immobilier

 

Si la notion de prix de vente d’un logement semble assez claire, celle du coût pour l’acquéreur est complexe. Les trois quarts des logements sont achetés à l’aide de crédits, dont les conditions sont fortement influencées par la conjoncture économique et par les « politiques publiques ». Et il est certain qu’entre des possibilités d’emprunt à 3 % ou à 6 %, les différences du coût du crédit et, donc, du prix d’achat sont importantes. Ces différences ont aussi des incidences sur les montants et les durées possibles des emprunts en fonction de la solvabilité, des capacités de remboursement des emprunteurs. Car, pour les banques prêteuses, les annuités de remboursement sont censées ne pas excéder le tiers du montant de leurs revenus nets.

 

Ainsi, un capital de 100.000 euros emprunté à 6 % (taux fixe, annuités de remboursement constantes) sur vingt-cinq ans doit donner lieu à un montant total de remboursements (capital et intérêts) de 195.600 €. Emprunté à 3 % sur la même durée, les remboursements seront de 143.300 €. L’économie future sera alors considérable (52.300 €). Il est compréhensible que des acheteurs potentiels aient voulu profiter de la faiblesse des taux d’intérêt qui s’est prolongée depuis 2001 et qui a été fortement accentuée depuis trois ans. Dans l’exemple simplifié présent, pour un acheteur qui emprunte 100.000 € afin d’acquérir un bien (modeste) vendu à 150.000 € (un tiers d’apport personnel et deux tiers d’emprunt), l’économie future représente 34,9 % du prix d’achat.

 

Les annuités de remboursement, elles, se montent à5.734 €. Compte tenu des pratiques bancaires, un ménage dont les revenus annuels nets sont de 17.200 € peut ainsi accéder au prêt désiré de 100.000 €. Avec un taux d’intérêt de 6 %, les remboursements devraient être de 7.823 € par an, ce qui exigerait que le revenu annuel de l’emprunteur ne soit pas inférieur à 23.500 €. Dans ces conditions, moins de ménages aux revenus modestes sont éligibles à cet emprunt. Conjointement, la baisse des taux d’intérêts favorise l’allongement des durées d’emprunt car elle permet de réduire les annuités de remboursement. Ainsi, la même somme empruntée à 3 % sur quinze ans entraîne des annuités de remboursement de 8.361 €, et par conséquent la nécessité de disposer d’un revenu d’au moins 25.081 € (contre 17.200 € avec l’emprunt à vingt-cinq ans). Tout acheteur devrait raisonner et calculer en termes de taux d’intérêts réels, en tenant compte de l’inflation à venir et de l’évolution future de ses revenus, qui vont diminuer chaque année la valeur réelle de la charge de ses remboursements. C’est indispensable s’il veut emprunter à taux révisable. Pour l’emprunteur classique, à taux fixe, si l’inflation se maintient durablement autour de 2 %, par exemple, le précédent taux d’emprunt de 3 % sera de 1 % en valeur réelle. Si l’inflation dépasse le taux de l’emprunt, l’emprunteur remboursera, en termes réels, moins que ce qu’il a emprunté. Cela s’est produit, lors de périodes de forte inflation, et c’est ce que l’investisseur espère en général. L’inverse a été observé aussi, pénalisant ceux qui avaient emprunté lorsque les taux étaient hauts.

 

Aujourd’hui, l’inflation mesurée par l’Indice des prix à la consommation est assez faible et les taux d’intérêt du marché sont au plus bas. Nous sommes plongés dans une crise financière internationale de grande ampleur et une Europe monétaire qui se craquelle et vacille, dans une France surendettée, ainsi que dans une bulle immobilière qui ne veut pas dire son nom. Dans un tel contexte, tout investissement est spéculatif. L’attrait pour l’immobilier, malgré les prix atteints, s’explique d’ailleurs en partie parce qu’à côté des placements boursiers et dérivés il apparaît moins spéculatif et moins chargé d’incertitudes. Il est vrai que l’on n’a pas cessé de nous répéter que ce qui s’était passé aux États-Unis ne pouvait pas se produire chez nous.

 

Exactement pour les mêmes raisons, peut être pas, mais notre Indice 440 s’est bien effondré sans prévenir les experts après l’éclatement de la bulle financière des années 1999 à2001. Une bulle que les bas taux d’intérêts et l’endettement « pas cher » avaient contribué à gonfler. Personnellement, je ne peux me forcer à l’optimisme, à croire à un « atterrissage en douceur » des prix immobiliers. Oui, l’investissement immobilier est un placement à risque, plus fort dans la région parisienne que presque partout ailleurs. Les prix ne peuvent pas « monter jusqu’au ciel », ai-je déjà entendu.

 

L’hyper inflation en région parisienne :

à qui la faute ?

 

Les gouvernements qui se sont succédés depuis les années1980 n’ont pas conduit de politique d’aménagement du territoire raisonnée et suivie. Après avoir écouté avec bienveillance ou componction des cantiques louant la décentralisation, ils ont d’abord laissé s’intensifier la concentration urbaine, particulièrement autour de Paris, et favorisé l’implantation des entreprises créatrices d’activités et d’emplois dans la région. Les déséquilibres avec la plupart des régions se sont aggravés et la désertification de « l’intérieur » du pays s’est accélérée. Puis est venu, épousé et poussé par les gouvernants actuels, le « concept » du Grand Paris avec « l’ambition » de placer Paris dans le marché concurrentiel (au moins pour la taille) des capitales européennes et, pourquoi pas, mondiales. Il est bon d’attirer des personnes productives et performantes, des investisseurs et des capitaux. Et il faut densifier, avec des tours, pour économiser des kilomètres de réseaux, se serrer les uns contre les autres pour avoir moins froid et faire des économies d’énergie, entend on prononcer sans sourire. Des arrivants dans Paris et ses banlieues, il n’en manque pas, avec la poursuite de l’immigration interne à la France à la recherche d’un travail, et le concours de l’immigration externe. Pas forcément des profils correspondant à ceux attendus. Il y a aussi des sociétés financières ou commerciales étrangères qui s’installent pour mieux « pénétrer » dans le pays et ses plus proches voisins. Qu’à cela ne tienne, mieux vaut chez nous que chez ces derniers.

 

Dans la région parisienne, plus encore que dans les autres agglomérations, la raréfaction et la montée vertigineuse des prix des terrains à bâtir grèvent lourdement les coûts de la construction. Le phénomène est reconnu et souligné avec insistance. Les collectivités locales et l’État s’efforcent, avec de grandes difficultés, de « libérer » un peu de place. Des cos deviennent plus permissifs, des terrains sont fractionnés pour démultiplier le nombre des habitations, des maisons individuelles sont remplacées par des immeubles… Bref, livrer le peu de terrains qui restent et densifier à tire larigot sont deux moyens privilégiés de limiter l’hyper inflation foncière. Mais nos gouvernants feignent d’ignorer que la « sur inflation » parisienne découle en grande partie de l’hyper domination de la capitale au sein du pays et que les écarts avec la province ne feront que s’accroître s’il n’y a pas un changement radical de politique. Cela implique d’abord que l’État aide plus résolument à attirer les investisseurs et les forces vives dans et autour d’autres pôles répartis sur le territoire, en mobilisant des ressources qu’il concentre peut-être trop sur Paris et sa région, notamment dans l’urbanisme et l’habitat.

 

La France n’est plus seule à « contrôler »

le marché immobilier national

 

La possibilité d’emprunter de l’argent pas cher, permise par des taux d’intérêt faibles est un des facteurs déterminants de l’inflation immobilière que nous connaissons depuis2003, avec une petite pause née de la « grande » crise et de la rétention par les banques d’une partie de leurs disponibilités. Depuis, l’hyper inflation revient au galop. Selon le baromètre des taux du Crédit immobilier, les « meilleurs » crédits à taux fixe se paient en octobre 2010 de 2,94 % à dix ans, à 3,30 % à vingt-cinq ans et à 4 % à trente ans. Les taux « très désavantageux » s’étagent de 3,85 % à dix ans jusqu’à 4,37 % à trente ans. Avec l’inflation, même « maîtrisée », les taux d’intérêt réels sont descendus exceptionnellement bas. Pourquoi ? Principalement parce qu’ils suivent d’assez près l’évolution de l’indice de référence euribor (taux de rémunération des échanges interbancaires en euros sur des durées de un à douze mois). Celui-ci s’est traîné au ras des marguerites entre 2,2 % et 2,5 % (moyennes annuelles) de 2002 à2005, est remonté à 3,1 % en 2006, s’est élevé, pas trop haut, entre 4 % et 5 % pendant les années sombres 2007 et 2008 avant de chuter brutalement à 1,2 % en 2009. Son parcours a avoisiné celui de l’eonia (taux au jour le jour), autre référence influente, qui est même descendu jusqu’à0,7 % en 2009.

 

Les niveaux de ces indices sont très dépendants des taux directeurs de la Banque centrale européenne, et particulièrement de son taux de refinancement, le Refi. Ils ont suivi les variations du Refi décidées par les gouverneurs de la BCE. Le Refi, que ces derniers avaient fixé à 4,25 % le 5 septembre 2001, a été descendu par étapes jusqu’au palier de 2,7 %, atteint le 11 décembre 2002. Avec des oscillations de faible amplitude, il a été maintenu entre2 % et 3 % jusqu’au 9 août 2006. Puis, il a été monté jusqu’à un palier de 4,25 % atteint le 9 juillet 2008. Le 15 octobre2008, la descente a été amorcée, menant rapidement jusqu’au taux de 1 % toujours en vigueur aujourd’hui. Le taux le plus faible depuis les débuts de l’euro. Il importe donc de retenir ici que les taux des crédits à l’habitat français (comme ceux d’autres pays de l’UE) sont fortement tributaires de décisions prises à Bruxelles et à Francfort. En fixant ses taux directeurs, la BCE ne se soucie pas spécialement des conséquences sur l’immobilier… bien que son premier objectif officiel soit de prévenir ou de réduire l’inflation. Mais, surtout pas dans l’immobilier (et sur les marchés boursiers). Pour sa part, notre indice national des prix ne veut pas connaître l’inflation immobilière. Nous observons aussi que les taux d’intérêt sont des agents privilégiés de la BCE pour la défense de l’euro sur les marchés financiers internationaux. Alors, pour solutionner nos angoissants et douloureux problèmes immobiliers, il serait intéressant que nos dirigeants se penchent aussi sur ces questions… vitales.

 

 

 

 

Des stimulants français temporaires

et changeants

 

Le ptz apporte son concours à la baisse des taux d’intérêt, en profitant aux ménages aux revenus modestes (ce qui est louable). Les Autorités font aussi leur possible pour favoriser les transactions, « mutualiser » les risques liés aux remboursements des emprunts afin de les garantir, et les organismes de prévoyance (retraite, complémentaire santé…) aiment réserver une partie des cotisations encaissées pour apporter des aides dans le même sens. Parallèlement, l’appétit des investisseurs est aiguisé à l’aide de dispositifs temporaires d’allègements fiscaux, tels le Périssol, puis le Robien, puis le Scellier (en cours de modification), qui ont profité davantage aux promoteurs immobiliers qu’aux investisseurs particuliers. Les crédits d’impôts sur une partie des intérêts versés par les acheteurs, aides traditionnelles en France, sont en disgrâce, car considérés comme inefficaces, parce que les banquiers n’en tiennent pas compte dans l’évaluation des revenus des candidats emprunteurs… et injustes à l’égard des plus pauvres. Aussi, un ptz + (ou renforcé) va se substituer au ptz et aux crédits d’impôts. Pour combien de temps ? De leur côté, les aides allouées par la CAF pour atténuer les charges d’amortissement des accédants éligibles (APL accession) semblent devoir être maintenues.

 

 

 

 

 

 

Une croissance affolante de l’endettement

des ménages pour l’habitat

 

« Pour acheter le même logement ancien, avec le même taux d’effort initial et avec le même apport personnel en proportion du revenu, un ménage qui se serait endetté sur 14 ans en 2000 aurait dû s’endetter sur vingt-sept ans en 2006 et trente et un ans en 2008 (vingt-quatre ans en 2009 grâce à la baisse des prix des logements et à la diminution des taux d’intérêt » (insee, 2010). C’est une façon d’expliquer l’allongement des durées des emprunts et la très forte montée de l’endettement des ménages. Celle-ci est spectaculaire et inquiétante. Le taux d’endettement de l’ensemble des ménages qui était de50,9 % (du revenu disponible) en 1998 est monté à 75,3 % en 2009. Soit + 48 % en onze ans. Le taux d’endettement des seuls acquéreurs de logements est nettement plus élevé.

 

Indicateur révélateur, le montant total de l’encours des crédits à l’habitat accordés aux ménages a été relativement stable, puis en progression modérée de 1993 à 1998 (niveau : 263,5 milliards €). Il a bondi à partir de 1999 jusqu’à 2001 (334,6 milliards) et s’est encore accéléré pour atteindre 710 milliards en fin 2008. L’encours s’est accru de + 446,5 milliards entre 1998 et 2008 ; la hausse est de + 169 %. Elle est encore plus forte que celle des prix des logements anciens (+ 135 %). La croissance de l’encours des crédits à l’habitat accordés aux sociétés non financières (promoteurs, autres investisseurs) a été bien moindre : + 82% sur les dix ans de1998 à 2008, jusqu’à un montant 165,4 milliards.

 

Ces chiffres soulignent bien le rôle important joué par les ménages dans le soutien de l’inflation immobilière. L’endettement pour l’achat d’un logement en augmente le coût, puisque le montant total des annuités de remboursements dépasse, souvent de beaucoup, celui de l’emprunt contracté. Au moment de la revente de son bien, le propriétaire va essayer de récupérer sa mise et de majorer le prix de cession en conséquence. Ce facteur inflationniste ne doit pas être sous-estimé, surtout lorsque l’endettement est lourd et croît, comme chez nous.

 

 

Suite de l'article de Paul Kloboukoff

dans notre numéro de février :

Seconde partie :

Dans le dédale des marchés de l’immobilier.

 
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18.01.2011
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