Conclusions
résumées sur les principales causes de l’hyper inflation
immobilière.
Aucours de la décennie, les principaux moteurs de
l’hyper inflation ont été et sont encore, à mon avis : - la faiblesse prolongée,
puis la plongée des taux d’intérêt qui ont incité les candidats acheteurs
potentiels, et en particulier des ménages, à investir dans l’immobilier en
s’endettant considérablement. La fixation de taux directeurs bas par la bce, qui
influencent les taux du crédit à l’habitat, est donc à l’origine de nos
difficultés ;
- l’endettement très fortement croissant, facteur
inflationniste des coûts et des prix des logements ;
- la recherche d’une relative sécurité de leurs
placements par les ménages, qui les a conduits à s’écarter de la bourse après la
grande bulle financière de 1999 à 2001, ainsi que d’une rentabilité minimale que
le système bancaire n’offre plus ;
- les comportements spéculatifs et l’espoir de
plus-values appréciables ;
- les aides publiques à l’investissement (dispositifs
successifs d’allègements fiscaux, prêts bonifiés, prêt à taux zéro…) destinées à
alléger les efforts de remboursement des emprunts, et qui ont poussé également
des ménages à s’endetter pour des montants plus élevés et sur de plus longues
durées ;
- la raréfaction des terrains à bâtir et la montée en
flèche de leurs prix, surtout dans et autour de grandes agglomérations, qui a
pesé sur les coûts des logements construits et qui a pu ralentir des
investissements ou les faire sortir et les éloigner de centres urbains.
La pression de la demande de logements joue un rôle
majeur dans l’hyper inflation dans les grandes agglomérations et plus
particulièrement dans la région parisienne qui attire, au détriment du reste du
pays, les investisseurs, les activités et les personnes à la recherche d’un
emploi. Là, la pression de la demande, y compris de la part d’étrangers,
contribue à faire exploser les prix. Globalement, cette pression s’est exercée
moins sur le marché des logements neufs que sur ceux des logements « d’occasion
», plus animés en raison d’une propension soutenue à la « mobilité » (changement
de résidence) des ménages. Fortes dans le secteur privé, les hausses des prix
des loyers n’ont que partiellement suivi celles des prix des logements,
particulièrement en raison des contraintes imposées aux révisions des loyers.
Par contre, lors des changements de locataires, des propriétaires « rattrapent
leur retard », anticipent les limitations à venir et relèvent copieusement les
loyers. Souvent après des travaux de rénovation et de remise aux normes
imposées, de plus en plus exigeantes, il est vrai. Quant aux loyers des
logements neufs, c’est le « marché » qui les détermine, non sans tenir compte
des prix des logements neufs et anciens. C’est principalement par ces canaux que
la fièvre des marchés du neuf et de l’ancien se transmet au marché locatif
privé, dit libre, avec quelques pertes de chaleur, heureusement. À côté de cela,
les aides personnalisées ou non au logement, qui réduisent les coûts des loyers
pour les locataires, sont vues par certains comme des aides aux bailleurs qui
permettent à ceux-ci de relever leurs tarifs. Le locatif social lui, protégé et
encadré, connaît toujours une demande pressante, mais pas le même
emballement.
Première partie
:
des points
saillants
La lutte
contre l’hyper inflation immobilière :
un objectif
prioritaire de la politique du logement ?
Cela ne ressort pas évidemment des objectifs du
ministère du Développement durable présents sur Internet au16 novembre 2010.
« La politique du logement a pour principaux objectifs de
:
- mettre en oeuvre le droit au logement opposable
;
- développer la production de logements
;
- développer une offre de logements sociaux dans les
territoires soumis à une forte tension et notamment dans les communes soumises à
l’article 55 de la loi sru ;
- favoriser l’accession populaire à la propriété
;
- mettre en oeuvre le Plan national de
requalification des quartiers anciens dégradés (pnrqad) et intensifier la lutte
contre l’habitat indigne ;
- mobiliser les acteurs du logement.
» Pourtant, les développements de la
production de logements et de l’accession populaire à la propriété requièrent
que les prix des logements ne soient pas exorbitants afin que des ménages aient
les moyens de les acquérir pour leur propre usage (ou pour les louer) ou que des
bailleurs du marché locatif s’intéressent à eux. Par ailleurs, mettre en oeuvre
le dalo paraît d’autant plus une gageure que les ressources publiques sont
épuisées.
J’ai
déjà écrit ce que je pensais de la loi sdru et de ses 20 % de logements sociaux
(au minimum) dans les communes. Depuis, les finances de l’État et des
collectivités locales se sont gravement détériorées. Avec les mêmes freins,
ainsi qu’avec les difficultés techniques et sociales déjà éprouvées dans sa
réalisation, le louable et indispensable pnrqad sera une oeuvre inépuisable de
longue haleine. Et il faudra une ferme résolution et de la persévérance pour
éradiquer l’habitat indigne. La politique retenue vise en même temps
l’augmentation de la population des propriétaires et celle des ménages hébergés
dans un parc social élargi. Pris en sandwich entre les deux, le locatif privé,
de plus en plus contrôlé par les Autorités nationales et locales, d’ailleurs,
semble poussé à se tasser.
On peut aussi s’étonner de ne pas voir de lien étroit
de la politique du logement avec une politique d’aménagement du territoire. Les
projets portant sur le « Grand Paris », par exemple, renforceront encore le
pouvoir d’attraction de la capitale, non sans impacts sur les prix des
logements.
Prix des
logements prohibitifs
et fortes
disparités
Après un court refroidissement dû à la crise, les
prix des logements anciens flambent à nouveau, surtout à Paris et dans sa région
où la demande reste toujours intense. Selon les professionnels, elle excèderait
de beaucoup l’offre. Les prix sont devenus exorbitants intra muros. Dans
certains arrondissements, tels le vie, le viie et le ive, ils sont compris entre
9.500 et 10.000 euros par m² en moyenne. Dans le xixe, le xxe et le xiiie, les
moins cotés, les prix moyens sont tout de même dans une fourchette de5.300 à
5.900 € / m². Les extrêmes se situeraient à 4.840 € et à 12.440 € (afp,
09 septembre 2010). Pas étonnant que les investisseurs recherchent les
petites surfaces. La contagion gagne la petite couronne et s’étend aussi à la
grande couronne qui se peuplent et se densifient. Ces chiffres, qui datent de
septembre, sont dépassés.
Au25 novembre, les notaires prévoient que la hausse
des prix des logements anciens avoisinera + 15 % en 2010 à Paris et entre + 7 %
et + 10 % en petite et en grande couronne. Le prix moyen du m² à Paris devient
supérieur à 7.000 €. L’hyper inflation immobilière est donc de retour, en
fanfare. La bulle immobilière s’est reformée. En France, comme dans les autres
pays d’Europe, les prix sont plus élevés dans les grandes villes où les
activités progressent et où les possibilités d’emploi sont prometteuses (ou
moins maussades). Si les prix n’atteignent pas les niveaux parisiens, ils
poussent aussi aux migrations des demandeurs (et des promoteurs) vers les
périphéries et, depuis quelques années, vers des zones rurales proches ou peu
éloignées.
Les prix peuvent brûler dans les villes et les
localités possédant des attraits touristiques, balnéaires, de climat agréable et
de qualité de vie ainsi que d’environnement reconnus, qui y font affluer des
immigrants (français et étrangers), qui attirent des résidences secondaires,
celles-ci pouvant aussi devenir des résidences principales. La France
méridionale et les régions côtières sont ainsi nettement plus attractives que
l’Est, le Nord et le Centre.
Croissance et
niveaux démesurés
des prix des
logements par rapport aux revenus
Dans une note de conjoncture d’avril 2010, le Conseil
supérieur du notariat le confirme tout en montrant qu’il existe une certaine
corrélation entre les prix moyens des logements et les revenus moyens des
ménages (données actualisées à 2006) dans nombre d’agglomérations comptant plus
de dix mille foyers. Ainsi, le rapport entre le prix moyen et le revenu moyen
annuel est compris dans la fourchette étroite de 5,44 à 5,63 à Lille, Lyon,
Toulouse, Bordeaux, Nantes, Marseille et Grenoble, sept des plus grandes
agglomérations du pays. Avec ses trois millions de ménages (et 8 % des
propriétaires qui sont étrangers), Paris fait exception. Le revenu moyen (41.920
euros) y est supérieur à celui de ces sept villes et les prix plus élevés ; le
ratio examiné est de 6,34. Ce ratio, assez parlant, s’approche de 8 à Fréjus et
dépasse nettement ce seuil à Bayonne, à Menton et à Antibes où il tutoie les
8,55. Ces chiffres très élevés peuvent être rapprochés des pourcentages de
résidences secondaires dans ces lieux prisés, qui sont ici respectivement de 34
%,19 %, 37 % et 26 %.
À contrario, les mêmes ratios sont de 4 à Maubeuge,
3,8 à Nevers, 3,7 à Montluçon et 3,6 à Épinal, de dimensions modestes, où les
revenus sont plus faibles, l’emploi plus compté, et qui ne jouissent pas
d’attraits remarquables. Ce ratio croît depuis des années en France. Pour
l’ensemble du pays et des ménages, il est monté de 3 en 1996 jusqu’à 4,5-5 en
2007, soit de plus de + 50 %. Cette forte hausse n’est pas imputable entièrement
à l’inflation immobilière. Beaucoup de logements existants ont bénéficié
d’investissements de rénovation, de modernisation, d’extension, d’amélioration
substantielle, qui les valorisent. Et les exigences pour les logements neufs et
rénovés: qualité, confort, isolation, dimensions… n’ont pas cessé d’augmenter.
En 1978, 26,9 % des logements étaient sans confort sanitaires. En 2006, il n’y
en avait plus que 1,3 %.__ Normalement, les hausses des prix se mesurent (ou
s’estiment) à « qualité constante, ou inchangée ». Pour les logements, l’indice
des prix des logements « anciens » (de plus de cinq ans) est l’indicateur le
plus courant. Il est censé retracer l’évolution du prix moyen de tout le parc de
logements. Or les observations réalisées pour établir l’indice ne portent que
sur des transactions (achats– ventes) touchant 12 à 15 % du parc de logements.
Nombre d’évaluations immobilières se réfèrent donc à cet indicateur avec
circonspection.
La faiblesse
des taux d’intérêt,
un puissant
dopant de « l’engouement »
pour
l’immobilier
Si la notion de prix de vente d’un logement semble
assez claire, celle du coût pour l’acquéreur est complexe. Les trois quarts des
logements sont achetés à l’aide de crédits, dont les conditions sont fortement
influencées par la conjoncture économique et par les « politiques publiques ».
Et il est certain qu’entre des possibilités d’emprunt à 3 % ou à 6 %, les
différences du coût du crédit et, donc, du prix d’achat sont importantes. Ces
différences ont aussi des incidences sur les montants et les durées possibles
des emprunts en fonction de la solvabilité, des capacités de remboursement des
emprunteurs. Car, pour les banques prêteuses, les annuités de remboursement sont
censées ne pas excéder le tiers du montant de leurs revenus
nets.
Ainsi,
un capital de 100.000 euros emprunté à 6 % (taux fixe, annuités de remboursement
constantes) sur vingt-cinq ans doit donner lieu à un montant total de
remboursements (capital et intérêts) de
195.600 €. Emprunté à 3 % sur la même durée, les remboursements seront de
143.300 €. L’économie future sera alors considérable (52.300 €). Il est
compréhensible que des acheteurs potentiels aient voulu profiter de la faiblesse
des taux d’intérêt qui s’est prolongée depuis 2001 et qui a été fortement
accentuée depuis trois ans. Dans l’exemple simplifié présent, pour un acheteur
qui emprunte 100.000 € afin d’acquérir un bien (modeste) vendu à 150.000 € (un
tiers d’apport personnel et deux tiers d’emprunt), l’économie future représente
34,9 % du prix d’achat.
Les annuités de remboursement, elles, se montent
à5.734 €. Compte tenu des pratiques bancaires, un ménage dont les revenus
annuels nets sont de 17.200 € peut ainsi accéder au prêt désiré de 100.000 €.
Avec un taux d’intérêt de 6 %, les remboursements devraient être de 7.823 € par
an, ce qui exigerait que le revenu annuel de l’emprunteur ne soit pas inférieur
à 23.500 €. Dans ces conditions, moins de ménages aux revenus modestes sont
éligibles à cet emprunt. Conjointement, la baisse des taux d’intérêts favorise
l’allongement des durées d’emprunt car elle permet de réduire les annuités de
remboursement. Ainsi, la même somme empruntée à 3 % sur quinze ans entraîne des
annuités de remboursement de 8.361 €, et par conséquent la nécessité de disposer
d’un revenu d’au moins 25.081 € (contre 17.200 € avec l’emprunt à vingt-cinq
ans). Tout acheteur devrait raisonner et calculer en termes de taux d’intérêts
réels, en tenant compte de l’inflation à venir et de l’évolution future de ses
revenus, qui vont diminuer chaque année la valeur réelle de la charge de ses
remboursements. C’est indispensable s’il veut emprunter à taux révisable. Pour
l’emprunteur classique, à taux fixe, si l’inflation se maintient durablement
autour de 2 %, par exemple, le précédent taux d’emprunt de 3 % sera de 1 % en
valeur réelle. Si l’inflation dépasse le taux de l’emprunt, l’emprunteur
remboursera, en termes réels, moins que ce qu’il a emprunté. Cela s’est produit,
lors de périodes de forte inflation, et c’est ce que l’investisseur espère en
général. L’inverse a été observé aussi, pénalisant ceux qui avaient emprunté
lorsque les taux étaient hauts.
Aujourd’hui, l’inflation mesurée par l’Indice des
prix à la consommation est assez faible et les taux d’intérêt du marché sont au
plus bas. Nous sommes plongés dans une crise financière internationale de grande
ampleur et une Europe monétaire qui se craquelle et vacille, dans une France
surendettée, ainsi que dans une bulle immobilière qui ne veut pas dire son nom.
Dans un tel contexte, tout investissement est spéculatif. L’attrait pour
l’immobilier, malgré les prix atteints, s’explique d’ailleurs en partie parce
qu’à côté des placements boursiers et dérivés il apparaît moins spéculatif et
moins chargé d’incertitudes. Il est vrai que l’on n’a pas cessé de nous répéter
que ce qui s’était passé aux États-Unis ne pouvait pas se produire chez
nous.
Exactement pour les mêmes raisons, peut être pas,
mais notre Indice 440 s’est bien effondré sans prévenir les experts après
l’éclatement de la bulle financière des années 1999 à2001. Une bulle que les bas
taux d’intérêts et l’endettement « pas cher » avaient contribué à gonfler.
Personnellement, je ne peux me forcer à l’optimisme, à croire à un «
atterrissage en douceur » des prix immobiliers. Oui, l’investissement immobilier
est un placement à risque, plus fort dans la région parisienne que presque
partout ailleurs. Les prix ne peuvent pas « monter jusqu’au ciel », ai-je déjà
entendu.
L’hyper
inflation en région parisienne :
à qui la faute
?
Les gouvernements qui se sont succédés depuis les
années1980 n’ont pas conduit de politique d’aménagement du territoire raisonnée
et suivie. Après avoir écouté avec bienveillance ou componction des cantiques
louant la décentralisation, ils ont d’abord laissé s’intensifier la
concentration urbaine, particulièrement autour de Paris, et favorisé
l’implantation des entreprises créatrices d’activités et d’emplois dans la
région. Les déséquilibres avec la plupart des régions se sont aggravés et la
désertification de « l’intérieur » du pays s’est accélérée. Puis est venu,
épousé et poussé par les gouvernants actuels, le « concept » du Grand Paris avec
« l’ambition » de placer Paris dans le marché concurrentiel (au moins pour la
taille) des capitales européennes et, pourquoi pas, mondiales. Il est bon
d’attirer des personnes productives et performantes, des investisseurs et des
capitaux. Et il faut densifier, avec des tours, pour économiser des kilomètres
de réseaux, se serrer les uns contre les autres pour avoir moins froid et faire
des économies d’énergie, entend on prononcer sans sourire. Des arrivants dans
Paris et ses banlieues, il n’en manque pas, avec la poursuite de l’immigration
interne à la France à la recherche d’un travail, et le concours de l’immigration
externe. Pas forcément des profils correspondant à ceux attendus. Il y a aussi
des sociétés financières ou commerciales étrangères qui s’installent pour mieux
« pénétrer » dans le pays et ses plus proches voisins. Qu’à cela ne tienne,
mieux vaut chez nous que chez ces derniers.
Dans la région parisienne, plus encore que dans les
autres agglomérations, la raréfaction et la montée vertigineuse des prix des
terrains à bâtir grèvent lourdement les coûts de la construction. Le phénomène
est reconnu et souligné avec insistance. Les collectivités locales et l’État
s’efforcent, avec de grandes difficultés, de « libérer » un peu de place. Des
cos deviennent plus permissifs, des terrains sont fractionnés pour démultiplier
le nombre des habitations, des maisons individuelles sont remplacées par des
immeubles… Bref, livrer le peu de terrains qui restent et densifier à tire
larigot sont deux moyens privilégiés de limiter l’hyper inflation foncière. Mais
nos gouvernants feignent d’ignorer que la « sur inflation » parisienne découle
en grande partie de l’hyper domination de la capitale au sein du pays et que les
écarts avec la province ne feront que s’accroître s’il n’y a pas un changement
radical de politique. Cela implique d’abord que l’État aide plus résolument à
attirer les investisseurs et les forces vives dans et autour d’autres pôles
répartis sur le territoire, en mobilisant des ressources qu’il concentre
peut-être trop sur Paris et sa région, notamment dans l’urbanisme et
l’habitat.
La France
n’est plus seule à « contrôler »
le marché
immobilier national
La possibilité d’emprunter de l’argent pas cher,
permise par des taux d’intérêt faibles est un des facteurs déterminants de
l’inflation immobilière que nous connaissons depuis2003, avec une petite pause
née de la « grande » crise et de la rétention par les banques d’une partie de
leurs disponibilités. Depuis, l’hyper inflation revient au galop. Selon le
baromètre des taux du Crédit immobilier, les « meilleurs » crédits à taux fixe
se paient en octobre 2010 de 2,94 % à dix ans, à 3,30 % à vingt-cinq ans et à 4
% à trente ans. Les taux « très désavantageux » s’étagent de 3,85 % à dix ans
jusqu’à 4,37 % à trente ans. Avec l’inflation, même « maîtrisée », les taux
d’intérêt réels sont descendus exceptionnellement bas. Pourquoi ? Principalement
parce qu’ils suivent d’assez près l’évolution de l’indice de référence
euribor (taux de rémunération des échanges interbancaires en euros sur
des durées de un à douze mois). Celui-ci s’est traîné au ras des marguerites
entre 2,2 % et 2,5 % (moyennes annuelles) de 2002 à2005, est remonté à 3,1 % en
2006, s’est élevé, pas trop haut, entre 4 % et 5 % pendant les années sombres
2007 et 2008 avant de chuter brutalement à 1,2 % en 2009. Son parcours a
avoisiné celui de l’eonia (taux au jour le jour), autre référence
influente, qui est même descendu jusqu’à0,7 % en 2009.
Les niveaux de ces indices sont très dépendants des
taux directeurs de la Banque centrale européenne, et particulièrement de son
taux de refinancement, le Refi. Ils ont suivi les variations du Refi
décidées par les gouverneurs de la BCE. Le Refi, que ces derniers
avaient fixé à 4,25 % le 5 septembre 2001, a été descendu par étapes jusqu’au
palier de 2,7 %, atteint le 11 décembre 2002. Avec des oscillations de faible
amplitude, il a été maintenu entre2 % et 3 % jusqu’au 9 août 2006. Puis, il a
été monté jusqu’à un palier de 4,25 % atteint le 9 juillet 2008. Le 15
octobre2008, la descente a été amorcée, menant rapidement jusqu’au taux de 1 %
toujours en vigueur aujourd’hui. Le taux le plus faible depuis les débuts de
l’euro. Il importe donc de retenir ici que les taux des crédits à l’habitat
français (comme ceux d’autres pays de l’UE) sont fortement tributaires de
décisions prises à Bruxelles et à Francfort. En fixant ses taux directeurs, la
BCE ne se soucie pas spécialement des conséquences sur l’immobilier… bien que
son premier objectif officiel soit de prévenir ou de réduire l’inflation. Mais,
surtout pas dans l’immobilier (et sur les marchés boursiers). Pour sa part,
notre indice national des prix ne veut pas connaître l’inflation immobilière.
Nous observons aussi que les taux d’intérêt sont des agents privilégiés de la
BCE pour la défense de l’euro sur les marchés financiers internationaux. Alors, pour solutionner nos angoissants et douloureux
problèmes immobiliers, il serait intéressant que nos dirigeants se penchent
aussi sur ces questions… vitales.
Des stimulants
français temporaires
et
changeants
Le ptz apporte son concours à la
baisse des taux d’intérêt, en profitant aux ménages aux revenus modestes (ce qui
est louable). Les Autorités font aussi leur possible pour favoriser les
transactions, « mutualiser » les risques liés aux remboursements des emprunts
afin de les garantir, et les organismes de prévoyance (retraite, complémentaire
santé…) aiment réserver une partie des cotisations encaissées pour apporter des
aides dans le même sens. Parallèlement, l’appétit des investisseurs est aiguisé
à l’aide de dispositifs temporaires d’allègements fiscaux, tels le Périssol,
puis le Robien, puis le Scellier (en cours de modification),
qui ont profité davantage aux promoteurs immobiliers qu’aux investisseurs
particuliers. Les crédits d’impôts sur une partie des intérêts versés par les
acheteurs, aides traditionnelles en France, sont en disgrâce, car considérés
comme inefficaces, parce que les banquiers n’en tiennent pas compte dans
l’évaluation des revenus des candidats emprunteurs… et injustes à l’égard des
plus pauvres. Aussi, un ptz + (ou renforcé) va se substituer au ptz
et aux crédits d’impôts. Pour combien de temps ? De leur côté, les aides
allouées par la CAF pour atténuer les charges d’amortissement des accédants
éligibles (APL accession) semblent devoir être maintenues.
Une croissance affolante de
l’endettement
des ménages pour
l’habitat
« Pour acheter le même logement ancien,
avec le même taux d’effort initial et avec le même apport personnel en
proportion du revenu, un ménage qui se serait endetté sur 14 ans en 2000 aurait
dû s’endetter sur vingt-sept ans en 2006 et trente et un ans en 2008
(vingt-quatre ans en 2009 grâce à la baisse des prix des logements et à la
diminution des taux d’intérêt » (insee, 2010). C’est une façon
d’expliquer l’allongement des durées des emprunts et la très forte montée de
l’endettement des ménages. Celle-ci est spectaculaire et inquiétante. Le taux
d’endettement de l’ensemble des ménages qui était de50,9 % (du revenu
disponible) en 1998 est monté à 75,3 % en 2009. Soit + 48 % en onze ans. Le taux
d’endettement des seuls acquéreurs de logements est nettement plus
élevé.
Indicateur révélateur, le montant total
de l’encours des crédits à l’habitat accordés aux ménages a été relativement
stable, puis en progression modérée de 1993 à 1998 (niveau : 263,5 milliards €).
Il a bondi à partir de 1999 jusqu’à 2001 (334,6 milliards) et s’est encore
accéléré pour atteindre 710 milliards en fin 2008. L’encours s’est accru de +
446,5 milliards entre 1998 et 2008 ; la hausse est de + 169 %. Elle est encore
plus forte que celle des prix des logements anciens (+ 135 %). La croissance de
l’encours des crédits à l’habitat accordés aux sociétés non financières
(promoteurs, autres investisseurs) a été bien moindre : + 82% sur les dix ans
de1998 à 2008, jusqu’à un montant 165,4 milliards.
Ces chiffres soulignent bien le rôle
important joué par les ménages dans le soutien de l’inflation immobilière.
L’endettement pour l’achat d’un logement en augmente le coût, puisque le montant
total des annuités de remboursements dépasse, souvent de beaucoup, celui de
l’emprunt contracté. Au moment de la revente de son bien, le propriétaire va
essayer de récupérer sa mise et de majorer le prix de cession en conséquence. Ce
facteur inflationniste ne doit pas être sous-estimé, surtout lorsque
l’endettement est lourd et croît, comme chez nous.