ARMÉES : L’URGENCE D’UN EFFORT
NATIONAL
par Henri Pinard-Legry, président de
l’ASAF1.
« Tant que la
Patrie n’est pas directement menacée, l’opinion répugne aux charges
militaires…
»
Charles
de Gaulle.
Comme chaque année, le chef
d’état-major des armées et les trois chefs d’état-major des armées de terre, mer
et air ont été auditionnés par les députés de la commission de la défense
nationale. Ces chefs, dont les hommes mènent plusieurs opérations de guerre,
présentaient aux élus de la nation l’état des armées, les difficultés qu’elles
rencontrent, les engagements militaires en cours, et répondaient à leurs
questions.
L’affaiblissement des
armées
Malgré les termes convenus
habituels dans ce genre d’exercice, les chefs d’état-major ont tous fait part
des graves problèmes auxquels ils sont confrontés.
En effet, comment taire la
disparition progressive de capacités opérationnelles essentielles telles que le transport aérien tactique
dont les avions ont près d’un demi-siècle et les hélicoptères lourds sont à bout
de potentiel ?
Comment dissimuler le faible
taux de disponibilité de matériels majeurs qui oscille, en métropole, entre 50
et 60%, taux anormalement bas en raison de leur extrême vétusté et de l’insuffisance des ressources
financières affectées à leur maintien en condition ?
Comment masquer que les coupes budgétaires remettent en
question l’effort annoncé dans le
livre blanc et planifié il y a moins de 2 ans afin de remettre à niveau
l’équipement de l’armée de terre
?
Comment occulter qu’après
l’envoi de 3 avions de patrouille maritime dans le Sahel suite à la prise en otage de plusieurs Français,
il ne reste guère plus de 3 appareils de ce type disponibles pour assurer les missions de
surveillance maritime qui sont leur première raison d’être
?
Par ailleurs, ces députés,
experts des questions de défense, ont pu mesurer la dégradation très importante
du niveau d’instruction et de formation des forces à l’exception de celles
affectées à la dissuasion nucléaire et aux unités engagées en Afghanistan. Mais
pour 95% des armées, c’est aujourd’hui la pénurie : diminution du nombre
d’heures de vol pour les pilotes, réduction du nombre de jours à la mer ou sur
le terrain, disparition quasi complète de l’entraînement des hélicoptères
d’attaque et de transport avec les troupes au sol ; les exemples ne manquent
malheureusement pas.
C’est en fait à une
paupérisation généralisée des armées qu’on assiste ; elle se traduit au quotidien par une dégradation
accélérée des casernements et par une diminution drastique des moyens
d’instruction dans les unités.
Dans ces conditions, faut-il
s’étonner que les jeunes engagés, privés des moyens d’exercer correctement leur
métier de soldat, de marin ou d’aviateur, soient moins nombreux à renouveler
leur contrat initial? Cette situation est d‘autant plus préjudiciable qu’elle
entraîne une rotation accélérée des personnels et un moindre niveau opérationnel
des unités, tout en obligeant à un effort considérable de recrutement et de
reconversion.
Par ailleurs, la
réorganisation considérable en
cours, avec une diminution de 54 000 personnels d’ici à 2015, risque de ne pas
générer les économies escomptées. De plus, elle affaiblit la cohésion des
formations militaires et
déstabilise les armées en séparant la fonction opérationnelle de la
fonction soutien. Bref, les réductions budgétaires envisagées pour 2011-2013,
risquent de fragiliser davantage les armées.
L’urgence d’un effort national
Lors de son audition, le chef
d’état-major des armées a rappelé les paroles du Président de la République,
chef des armées : « la Défense est le fer de lance de notre diplomatie, de notre
sécurité et de notre rang ».
Les moyens dont dispose
aujourd’hui la Défense ne sont plus en cohérence avec les exigences d’une telle
réalité. Alors pourquoi poursuivre systématiquement la réduction du budget
consacré à la défense de notre pays et l’affaiblissement inévitable de nos
forces armées alors que les menaces imprévisibles, multiples, sournoises,
deviennent chaque jour plus palpables ?
« Les dividendes de la paix »,
formule médiatico-démagogique chère aux politiciens plus qu’aux hommes d’Etat,
ont privé les armées des moyens qui leur auraient permis de placer notre pays en
position de leader. Si la France veut conserver son rang tant en Europe que dans
le monde, elle doit non seulement assainir ses finances publiques - ce sera par
un effort de tous les Français -
mais il lui faut aussi cesser de croire qu’elle peut le faire en
affaiblissant sa défense.
Après avoir parlé avec des
soldats français actuellement soignés à l’hôpital militaire PERCY, le Premier
Ministre a confessé que « …ces dix blessés m’ont donné un formidable message
d’espoir et une très grande leçon de courage… ».
Il n’y a guère de plus bel
éloge adressé à des soldats. Mais encore faut-il qu’après les mots, il y ait les
actes.
- Association
de Soutien à l’Armée Française, http://www.asafrance.fr/