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LE 11 NOVEMBRE
1940,
Hommage à la
résistance de la jeunesse française
Par Christine
ALFARGE
« Le 11 novembre 1940, bravant l’interdiction des
autorités occupantes, des lycéens et des étudiants étaient venus manifester au
pied de l’arc de Triomphe, à travers un hommage aux combattants de la Grande
Guerre, leur foi dans le destin de la France ».
Le déclin de la France.
Entre le 10 mai 1940 et le 14 juin 1940, la France
vient de s’effondrer en un mois dans un chaos inimaginable et dans l’ignorance
des enjeux réels du conflit en cours. La débâcle de ces jours terribles qui
précédèrent l’armistice du 22 juin 1940 montre un vide extraordinaire, les
institutions ont disparues et Paris est occupé, outragé par les drapeaux ennemis
placés sur tous les monuments. Plus tard, les premiers résistants sortiront de
l’ombre.
Que s’est-il passé ce jour là ?
Ce fameux 11 novembre 1940, aura lieu la
première manifestation de résistance de lycéens et étudiants dont Pierre
Lefranc, actuel président de la Fondation Charles de Gaulle et grand témoin de
notre temps, fut l’un des organisateurs. Après l’appel du 18 juin 1940, ces
jeunes gens furent les premiers à se dresser avec courage contre l’occupant au
péril de leur vie. Visés par les paroles de Pétain, ils se demandent ce qu’ils
doivent faire, selon Pierre Lefranc : « Nous étions peu nombreux,
par peur des manifestations, le recteur de l’académie de Paris avait fermé les
facultés ce jour là. Alors comment manifester, où aller pour rappeler la
victoire ? Les jours précédant le 11 novembre 1940, les premiers tracts
seront diffusés rue Saint Jacques à la faculté de droit, puis dans de nombreux
lycées parisiens notamment Janson de Sailly, Condorcet et Henri IV, appelant à
manifester le jour de l’armistice. Cela va se répandre assez rapidement à
d’autres cours, par petits groupes débarquant du métro. Les allemands buvaient
des bières sur les terrasses des Champs-Elysées. L’atmosphère était étudiante,
jusqu’à ce que cela se complique avec une patrouille allemande qui procédait à
des tirs en l’air et nous lançait des grenailles dont une me fut fatale. Je fus
blessé et embarqué dans un camion avec d’autres manifestants jusqu’à l’hôtel
Continental, où sous le coup d’intimidations, nous étions contraints d’écouter
un discours en français sur la collaboration. Puis nous sommes conduits en
direction de l’hôtel Majestic, lorsque nous essayons de sauter du camion en vain
car je me suis retrouvé très vite en cellule de prisonnier de droit commun à la
prison de la santé. Le lendemain, malgré les propos angoissant d’un gardien sur
le sort qui m’était réservé, je me tiens digne en pensant qu’il était moins
difficile d’être en groupe que seul. Au bout d’un mois, je fus transféré à la
prison de Fresnes, où je me demandais ce que j’allais devenir et chose
inattendue, je bénéficiais peu de temps après d’une levée d’écrou qui me ramena
chez mes parents avec une très sévère remontrance de mes professeurs qui
me reprochaient d’avoir manqué des conférences ce qui n’allait pas jusqu’au
renvoi, mais me valut des mauvaises notes. »
L’état d’esprit des français en 1940.
Malheureusement, à cette période Pétain avait une
grande aura, l’opinion était pour lui. Il n’y avait aucun signe en faveur du
gaullisme. Cependant, ce 11 novembre 1940 allait être le déclic de la révolte,
l’opinion ne commençait-elle pas à changer ? La veille, on pouvait lire
dans plusieurs journaux qui n’étaient naturellement pas en faveur de la
résistance du pays, un communiqué de la préfecture de police
indiquant : « Les administrations publiques et les entreprises
privées travailleront normalement le 11 novembre à Paris et dans le département
de la Seine. Les cérémonies commémoratives n’auront pas lieu. Aucune
démonstration publique ne sera tolérée ». Cela donnait sans aucun
doute encore plus de relief à la manifestation qui allait suivre en fin
d’après-midi de cette journée mémorable. Dans un élan patriotique, environ 2500
jeunes participeront à ce premier acte de résistance collectif et significatif
face à l’occupant, à leur côté des anciens combattants et toute une foule
diverse se massant vers les Champs-Elysées lanceront des appels destinés au
Général de GAULLE. Une centaine d’arrestations auront lieu dont 90
lycéens.
1940, année de ténèbres et de
sursauts.
L’histoire et la réalité n’ont-elles jamais été aussi
manichéennes que pendant cette année de ténèbres et de sursauts ? Les
causes de cette débâcle s’inscrivaient avant tout dans les choix archaïques des
principaux chefs de l’armée qui parlaient notamment de « simple
évènement de guerre », voulaient ignorer le rôle des divisions blindées ou
de l’aviation de bombardement, la vitesse de déplacement des troupes a
également fait la différence, d’autres derrière Pétain et Weygand préparaient
déjà l’armistice. Les fondements même de la nation, ses valeurs morales,
basculaient dans une profonde incertitude. L’aveuglement de la classe politique
dans son ensemble qui ne percevait pas les véritables enjeux de cette période,
dans une IIIème république touchant à sa fin, voulait un changement profond du
système politique. Dans la classe parlementaire, très rares furent ceux qui
avaient compris que le vote des pleins pouvoirs à Pétain le 10 juillet 1940 à
Vichy, allait mettre fin aux principales libertés. En face, il y avait Londres,
Churchill et de GAULLE, les opérations clandestines commençaient à s’organiser
ainsi que les tout premiers réseaux. Sur les premiers ralliements et la bravoure
de la jeunesse française qui remontaient le moral du pays, Pierre Lefranc nous
livre à ce sujet : « Lorsque Maurice Schumann raconta au Général de
GAULLE ce qui c’était passé le 11 novembre 1940 à Paris, ce dernier fut très ému
car il y avait une réponse publique qui lui avait réchauffé le cœur. Par la
suite, le Général créera l’école des cadets de la France
libre ».
De cette tragédie de 1940, de ce drame humain vécu
comme une humiliation, il restera une grande leçon pour l’éternité de ce que
tour à tour les hommes ont prouvé, pour certains par leur lâcheté, pour les
autres par leur courage, leur lucidité et leur résistance.
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