La France se meurt.
Jeune homme ne troublez pas son agonie». On connait le mot adressé par Renan au
jeune Barrès. Ne serait-on pas tenté de le redire ou de le paraphraser au
lendemain des régionales? Près d'un français sur deux n'a pas voté. Dans
certaines banlieues, telles celles qui entourent Paris en Seine Saint Denis, le
taux d'abstention atteint les 75 %. Toute idéologie politique mis à part, que
l'on y adhère on qu'on la combatte, où est le temps de «la banlieue rouge» ! à
l'époque une partie de la classe ouvrière croyait au «grand soir» et
aux«lendemains qui chantent». L'illusion s'est évanouie. Elle avait généré bien
des fanatismes et des intolérances. Mais elle mobilisait les énergies dans la
foi d'un avenir meilleur.
Nous gaullistes nous avons
connu aussi la ferveur des foules rassemblées. La France était notre passion et
notre raison d'être. Elle avait un visage. Celui de l'homme qui, au moment ou
tout semblait perdu, n'a jamais désespéré. Avec le recul, et la propension
peut-être à idéaliser le passé, on se dit que, malgré tout, les choses étaient
plus simples. Les idéaux pairaissaient mieux définis, les choix mieux établis,
les espérances mieux ressenties.
Question
sociale
Aujourd'hui le
désanchantement s'est généralisé. Ce n'est pas l'apanage de la France seule. Les
peuples d'Europe éprouvent le sentiment de ne plus maîtriser leur destin. Ils
ont à faire face à des problèmes qui s'additionnent et les submergent. L'emploi
fuit plus rapidement que les gains d'un salarié, l'abbé Pierre a des disciples
pour reprendre son appel au logement pour des sans-abri et sans-papier toujours
plus nombreux, l'insécurité grandit, nourrie par la misère qui génère la
violence. On pourrait continuer à l'infini. La question sociale est au coeur du
désarroi de la société. On a pu a juste titre dénoncer et stigmatiser la
caricature du socialisme et sa dérive totalitaire. Ce n'est pas pour exalter un
capitalisme qui ne voit dans l'homme qu'un outil et une
marchandise.
Le Général de Gaulle là
aussi était un visionnaire lorsqu'il plaida, aves des hommes tel que René
Capitant, pour une association Capital-Travail. Le grand échec du gaullisme fut
de n'avoir pas su ou pu la mettre en oeuvre.
Quelles réformes ?
Aujourd'hui on entend parler des réformes. Vibrionnant le Président de la
République se multiplie, s'agite et ... échoue. Désavoué il charge son chef de
cabinet François Fillon d'annoncer que les réformes seront menées à bien quoi
qu'il arrive. Tout au plus évoque-t-il une «pause» à la veille de l'élection
présidentielle. Pense-t-il sérieusement que les Français se laisseront prendre à
cette astuce. Doit-on, du résultat des élections, déduire que la France refuse
toute réforme. Elle est partagée. Ce qui semble évident c'est que pour réussir
une réforme il faut l'expliquer et convaincre. Ce n'est pas le
cas.
La politique sarkosyenne
est tenue pour antisociale par de larges couches de la population. Les chômeurs,
les «fins de droits», ne cessent de faire croître les bataillons de la misère.
C'est ainsi que naissent les révolutions. Qu'on ne se méprenne pas. Dans
l'histoire on a connu bien des révolutions. Elles étaient causées par
l'injustice, par la volonté de créer un ordre social plus équitable. à notre
époque la révolution pourrait signifier un chaos terrifiant. Sans but véritable,
face à un adversaire protéiforme comme le sont les
multinationales.
Tout ceci bien entendu
n'est que projection hypothétique pour un avenir incertain. Se protéger Un
avenir né d'un présent ou les peuples voient les politiques qui les gouvernent
impuissants devant les faits économiques. Nous assistons à un nouveau partage du
monde. L'Europe compte de moins en moins. Le partenaire- ou adversaire - des
états-Unis c'est la Chine. Une Chine qui envahit nos marchés, conquiert des
industries qui jusque là faisaient notre richesse et notre fierté. Le péril
jaune existe. Ce n'est pas celui dénoncé un peu naïvement au début du XXe siècle
par le capitaine Daurit dans des livres à couverture rouge et bordé d'un liseré
d'or allignés à côté des Jules Verne dans nos bibliothèques de jeunesse. Le
péril est économique. Personne ne parait en mesure de le conjurer ni de vouloir
établir devant lui des barrières protectrices. Si demain, après-demain, le monde
politique avait le courage de se ressaisir, il retrouverait la confiance
aujourd'hui évanouie.
Mais le peut-il et le
veut-il ? Qui nous apportera la réponse ? Notre survie en
dépend.