PAYS-BAS,

À PROPOS DE LIBERTÉ

 

par Paul Kloboukoff

Il reste des pays prétendument démocratiques où les droits les plus élémentaires d’hommes, de femmes, d’enfants sont foulés aux pieds, où leur vie et leur condition sont méprisées, leur pensée et leurs croyances sont réprimées. Ces dictatures sont abritées derrière le principe de non ingérence lorsque ce n’est pas leur puissance et/ou la crainte de représailles diplomatiques et économiques, d’actes de terrorisme, qui paralysent les bonnes volontés. Impossible de ne pas penser à la Chine, à la Corée du Nord, à la Birmanie, à l’Iran, au Soudan… Et l’esclavage existe encore en Haïti avec des enfants pour proies. Ailleurs, des guerres, comme au Moyen Orient, et des conflits, ethniques ou non, font trop souvent des « vainqueurs » des assassins, des tortionnaires, et des vaincus survivants des souffredouleur, des esclaves sans avenir (cf. Rwanda, Sierra Leone, Darfour…).

 

Quant aux cataclysmes naturels, ils sont d’autant plus dévastateurs que les pays et les régions touchées sont pauvres. La grande pauvreté, la misère sont des liberticides impitoyables. Et il y a plus de huit cent mille miséreux sur notre planète. En comparaison, la France, apparaît comme un havre de liberté peuplé de privilégiés, de nantis. Au plan matériel, avec les portes qu’ouvre l’opulence, au moins relative. Par nos libertés fondamentales aussi et surtout. Après des siècles de luttes, de progrès et de reculs, elles ont été solennellement inscrites dans la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme du 18 décembre 1948.

 

En France, la tendance est de voir en la Révolution de 1789, fille des Lumières, un tournant décisif. Sous l’Ancien Régime, tout était sombre, négatif. L’avènement de la République a illuminé la voûte céleste. Un peu comme lors de l’élection d’Obama aux États-Unis. La République est portée aux nues. Tout discours se doit de la brandir, pour ses bienfaits, ses valeurs, son humanisme, son progressisme…. Ce zèle en fait un fleuron de la pensée unique et un label prisé de nos élites et de nos politiciens.

 

Pour nous, Gaullistes, les mots liberté, libération et France libre, ne vont pas sans pensée pour le Général de Gaulle, sans référence à la résistance, aux combats qui nous ont permis de retrouver ce que nous avions de plus cher, notre patrie et notre liberté. Attaché à l’autodétermination des peuples, il est aussi allé à la rencontre des aspirations à l’indépendance des anciennes colonies françaises, en Afrique, en particulier. Plus de deux siècles après l’adoption de la devise « Liberté, Égalité, Fraternité », il ne s’agit plus d’abolir l’esclavage ou le servage en France, ni de délivrer des prisonniers victimes de l’arbitraire et de la tyrannie. Cette liberté est considérée comme acquise, irréversiblement. Comme il est admis (par presque tous) que nous sommes en démocratie et que celle-ci est le meilleur régime pour nous. D’autres besoins et soifs de liberté ont pris le relais dans une société plus « aisée » et « évoluée », plus complexe et de plus en plus encadrée par les lois.

 

Dans un passé récent, les événements de mai 1968, la contestation de l’ordre établi, l’inoubliable il est interdit d’interdire, l’élan libertaire alors pris, ont fait monter de plusieurs crans les désirs de changements, révolutionné les moeurs et insufflé des orientations nouvelles aux revendications de libertés. Puis, des associations ad hoc ont prospéré pour promouvoir leurs propres opinions, défendre ou revendiquer des droits en matière d’emploi, de logement, de santé, d’enseignement, de justice, d’écologie, de laïcité, d’égalité et de non discrimination (mouvements féministes, homophiles, antiracistes, pour la défense des immigrés, pour la diversité, contre la xénophobie, contre les inégalités de toutes sortes, sociales et de revenus, notamment), contre le tabac, contre l’alcoolisme… Des partis politiques n’hésitent pas longtemps à leur emboîter le pas. Aussi, influencent-elles l’évolution des opinions, des us et coutumes, des comportements.

 

Dans une certaine mesure, elles font la loi. Elles peuvent aussi la contester et pousser à ne pas la respecter, se montrant alors peu soucieuses des droits des autres, du droit de propriété, par leur soutien de squatters, par exemple. Il est vrai qu’à partir du moment où une action est « collective », c’est-à-dire d’un groupe de personnes partageant de mêmes intérêts supposés ou non, une compréhension particulière (pas de vagues !), voire de la sympathie lui est accordée. C’est le cas de grèves accompagnées d’occupation d’entreprises et de séquestration de dirigeants. Du moment que c’est pour la bonne cause ! La loi n’est pas appliquée de la même façon qu’à des individus isolés. Liberté à géométrie variable, donc. « RAS, cette nuit dans l’Hexagone. Une centaine de voitures incendiées. Pas plus que d’habitude ». Pas d’auto défense et omerta. On s’habitue à tout, aux vols, aux destructions, aux brutalités commises lors d’échauffourées et au quotidien.

 

Par des casseurs, par des voleurs, par mesure de rétorsion, par vengeance ou pour exprimer son « mal vivre », ses frustrations. Pour des délinquants, l’impunité est une bonne prime à la casse. Des zones de non droit sont entre les mains du banditisme, de mafias, de bandes, de vendeurs de drogue, de voyous qui terrorisent les habitants et font fuir les entrepreneurs. Des écoliers et leurs maîtres sont agressés par des élèves armés ou des bandes des quartiers. La criminalité et les violences aux personnes augmentent. Les Autorités sont débordées, la loi est impuissante. La sécurité régresse, la liberté recule. Les gardes à vue (huit cent mille en 2009) comportent des abus. Elles seront réformées. Les réticences à l’encontre de la « vidéo protection » s’estompent, les citoyens se résignant à cette forme de liberté surveillée, faute de mieux. Et la prévention n’est pas au rendez-vous ou n’est pas plus efficace que la répression. Place à la « pédagogie ». Bon courage, braves gens !

 

Deux volontés ont jusqu’ici imprégné nos lois. Préserver la démocratie, en assurer la pérennité, et mettre les individus et les acteurs économiques et sociaux hors d’état de nuire… à d’autres membres de la société. Cela peut expliquer le caractère répressif de notre arsenal juridique et administratif chargé davantage de prévenir et de sanctionner les actes jugés délictueux, dangereux, que d’ouvrir et de baliser de nouveaux espaces de liberté ou de récompenser la bonne conduite, les actes vertueux, exemplaires. Pour la Justice, le citoyen est un justiciable, pour le fisc, c’est un redevable, sur la route et en stationnement, c’est un contrevenant en sursis. Montesquieu disait « La liberté est le pouvoir de faire tout ce que les lois permettent » (cf. Wikipédia). Je dirais plutôt « ce qu’elles n’interdisent pas ». Et il paraît que «personne n’est censé ignorer la loi ». Foutaise ! Il y a tant de lois, compliquées, entrecroisées, sujettes à interprétations, à controverses et à changements qu’aucun « érudit » juriste n’est capable d’en faire le tour. Rien n’est incontestable. Le citoyen lambda, lui, est perdu dans un fouillis inextricable. Il se voit ficelé, emmailloté, engainé, saucissonné, enfermé dans une toile d’araignée géante sans contours, sans limites. Est-ce indispensable pour lui assurer la liberté, la sécurité et la sérénité dans notre société démocratisée, européanisée, mondialisée ? Cet excès est un aveu d’incapacité à juguler des maux souvent récurrents. Des moyens juridiques existants ne sont pas mobilisés, pour des raisons démago politiques. Et au jeu du « respect des procédures », les relaxes abondent, la justice et la liberté dépendent d’erreurs d’instruction et des performances des défenseurs.

 

En ce moment, une avalanche de nouveautés et de remises en cause est déclenchée par la volonté élyséenne de réformer. Tout changement ici bas est positif à priori s’il vient de là haut, et doit être gravé dans les tables de la loi. L’expérience nous a pourtant montré de grandes inspirations et dispositions, considérées comme géniales à l’époque, au moins par les promoteurs réformateurs au pouvoir, comme les préretraites, la retraite à soixante ans, les 35 heures… sur lesquelles on est revenu dès l’alternance en raison de leur nocivité présumée. Pour sa part, le « législateur », c’est-à-dire une minorité politique qui monopolise la majorité des sièges au Parlement, ne manque pas, de son propre chef ou sous les pressions, de faire du Gouvernement et des collectivités locales de futurs hors-la-loi, en votant des textes contraignants qu’il leur est impossible de respecter. Deux exemples : la loi DALO (Droit au logement opposable), sans doute dénommée ainsi parce qu’elle fait le jeu des oppositions, et la loi SRU (Solidarité et rénovation urbaine) qui, prônant la mixité sociale, veut forcer les communes à réserver au moins 20 % de leur parc entier à des logements sociaux.

 

Dans un pays où moins de 40 % des ménages paient un loyer et 57 % sont propriétaires (en 2006). Dans certaines communes, c’est bien plus. Cherchez l’erreur ! Et des élus locaux acquittent des amendes pour échapper à l’ardente obligation. Une forme de liberté sous caution (non remboursable), somme toute. Il faut dire que la mode est de ressasser que « la France est un pays riche » (endettement mis à part), « c’est la cinquième puissance mondiale ». En propageant de tels clichés le pouvoir cherche à rassurer ses ouailles, à les flatter. Pour ceux qui réclament plus de social, de nouveaux droits… de dépenses publiques, c’est du pain béni. « On n’a pas le droit ni d’avoir faim ni d’avoir froid ». Oui, il faut faire reculer la pauvreté. Toujours. C’est aussi ouvrir plus de libertés dans la population. En combien de temps la France peut-elle atteindre un objectif qui ressemble à un idéal, sachant que, selon les chiffres officiels, il y aurait13 % (environ huit millions) de personnes « pauvres » dans ce pays riche.

 

Le sentiment de liberté connaît ainsi des limites et des restrictions, qui ne semblent pas toutes du second ordre, et il n’exclut pas les critiques. En matière de liberté d’expression et de comportement, des divergences et des confrontations peuvent être fortes, voire explosives. La neutralité a quitté les terrains de jeu et il n’y a pas d’arbitres. Il y a surtout des partisans d’une thèse ou de son opposée, ou d’autres thèses encore. Car, après J.- P. Sartre, il est bien porté d’être « engagé », de choisir son camp, ou son clan, et de le soutenir mordicus. Les intellectuels, les vedettes du spectacle et les médias ont ouvert et déblayé le chemin. Bon nombre de débats sont biaisés, décousus et stériles ou inutiles. Et les médias adorent les « duels ». L’émission télévisée du jeudi 14 janvier sur l’identité nationale en a fait la démonstration. Désertion du socialiste V. Peillon, querelles, affrontements entre deux antagonistes présents, un UMP et une Front National, occasion de se frotter sur l’immigration, de se défouler sur les irréguliers ou clandestins, sur les passeurs, ainsi que sur le port de la burqa. Un voile intégral sans relation avec la religion islamique nous a-t-on encore assuré avec force. Laïcité à la française oblige. Et on nous a ré-expliqué qu’il fallait avant tout protéger les femmes, leur liberté, leur honneur et leur intégrité.

 

Accessoirement, on pourrait aussi les reconnaître et les dévisager comme tout un chacun. Démenti instantané par les interviews de femmes voilées qui ont affirmé que le port de la burqa était leur choix personnel, lié à leur religion. Ceci n’est qu’un exemple de l’usage de la langue de bois au service d’une politique de l’autruche qui a peur de faire face à certains problèmes et pousse à détourner ou à fermer les yeux. Les problèmes en question non traités, contournés, s’amplifient, s’aggravent, pourrissent. Cette attitude demande de la « pédagogie » pour être bien comprise du bon peuple, un peu niais, comme l’on sait. Des politiciens, des médias, des associations et des célébrités usent d’une méthode éprouvée, l’insistante répétition. Avec ces serviteurs et la « communication », la volonté d’une minorité peut être imposée au grand nombre. Des sanctions des contrevenants sont inscrites dans la loi si le législateur a pu parachever son oeuvre. Il en vient aussi de la censure et du tri sélectif de médias, d’attaques verbales, de l’opprobre, des blâmes de « bien pensants », avec le concours desquels s’est ancré le « politiquement correct ».

 

Une nouvelle forme de lapidation menace. Impressionnés, meurtris, encerclés, pressés et parfois culpabilisés, des récalcitrants finissent par craquer. Ils s’autocensurent, rectifient leurs positions ou ils se taisent. Mais, des grondements se font entendre car, finalement, la proportion d’insatisfaits augmente tandis que la popularité de l’omni président décline. Pourtant il n’est pas l’unique penseur en cause. Un anticléricalisme grinçant est de bon aloi. On peut prendre du plaisir à se gausser de l’Église catholique, du pape et de leur conservatisme rétrograde, du déclin de la chrétienté. C’est sans risque et plutôt bien vu de la haut ainsi que de la gauche. Comme d’effacer les traces du passé et de la morale chrétienne dans nos références et nos lois pour leur substituer un ordre technocratique réaliste et politicien présumé correct, porteur d’une nouvelle bible adaptable aux circonstances, aux évolutions européistes, mondialistes et capitalistes en ce moment, où qu’elles conduisent, aux pensées uniques que l’on désire implanter. Par contre, il est mal vu de regarder de travers l’islam en France (ou de France), ses pratiques, ses lieux de culte et ses fidèles. Exprimer à visage découvert son opinion sur le sujet, si elle n’est pas conforme, des réticences ou des réserves, peut être mal interprété, condamnable, dans un milieu (population et dirigeants) très sensible, qui redoute le terrorisme, des attentats (cf. Vigipirates), des représailles, des fatwas comme celles prononcées contre Salman Rushdie puis contre le caricaturiste Danois irrévérencieux.

 

Et puis, il y a l’Irak, l’Afghanistan… Il n’est pas recommandé, non plus, de se montrer contrarié par l’immigration, par son empreinte sur l’évolution démographique, sociale et culturelle en France. Il est bon d’avoir mauvaise conscience, de culpabiliser et d’être repentant à l’égard des anciennes colonies, d’être en faveur du métissage et ne pas être soupçonné ou, pire, accusé de racisme, d’antisémitisme, de xénophobie. Le parler et le faire doivent être amendés en conséquence. C’est insuffisant pour les uns. Ce sont des restrictions à la liberté d’expression pour d’autres. Le « débat » sur l’identité nationale, trop focalisé sur l’islam et l’immigration, a fait entendre des citoyens d’habitude silencieux se lâchant et faisant connaître leurs observations, leurs positions. Horreur, « la boîte de Pandore a été ouverte » ! La pensée imposée et la langue de bois ont aussi d’autres terrains d’élection. Vive les libertés sexuelles et familiales, halte au machisme et à l’homo phobie.

 

Avis prudents et réservés, ouverts si possible, sur l’efficacité des préservatifs contre la propagation du SIDA et sur la contraception, les personnes concernées seraient mal informées, ainsi que sur les deux cents mille avortements annuels recensés en France. Prudence et fidélité sont des stupidités. Réjouissance devant le recul des mariages et la montée des divorces, devant les poussées des PACS et des unions libres, qui promettent une plus grande stabilité des couples et des jours meilleurs à leurs descendances. Vive les familles décomposées et recomposées, qu’on appelle maintenant « nouvelles familles ». Il faut bien remplacer les « anciennes », usées, démodées. Bravo à la profusion de familles monoparentales, à la promotion des mariages homo, des adoptions d’enfants par des couples du même sexe, aux mères et grand-mères porteuses, etc.

 

Tout le monde n’est pas adepte du « jeunisme » ambiant et convaincu par toutes les justifications familiales et sociales des méfaits de jeunes, désoeuvrés, étudiants ou écoliers. Pour en minimiser la portée, la gravité et alléger ou repousser des condamnations. L’insécurité est jugée telle dans le lycée de Vitry-sur-Seine où la grève des enseignants se poursuit, que ceux-ci réclament le doublement du nombre des surveillants qui sont déjà onze pour mille cinq cents élèves. Un surveillant pour soixante-huit élèves ! Faut-il transformer l’école en univers carcéral… pour ne pas avoir à sanctionner, par peur de troubles que la fermeté pourrait susciter ? Mieux vaut reculer pour mieux sauter. Ce qui ne va peut-être pas tarder. À côté de cela, des jeunes ne se sentent pas libres parce qu’ils vivent chez leurs parents, à la charge de ceux-ci. Et les parents ? A-t-on aussi pleinement conscience de la perte de liberté et de la dépendance qu’entraînent la vieillesse, les handicaps et certaines maladies ? Et que penser de la liberté des personnes, des ménages qui ne peuvent subvenir à leurs besoins, qui ne peuvent vivre sans l’aide d’autrui, de la société ?

 

La pensée unique s’épanouit dans l’écologie et l’environnement, avec des incongruités comme les droits à polluer « échangeables » (et pourquoi pas des points de permis de conduire échangeables ?), les poids lourds en ville, dans la protection de la faune et de la flore, dans les énergies renouvelables, avec des moulins à vent subventionnés et des agro carburants détaxés. Elle s’extasie sur les vertus du « vélib », du Grand Paris, du gigantisme, de la concentration urbaine et de la désertification ailleurs, services publics compris. Pour diriger le quidam, les gouvernants usent à profusion d’incitations positives et négatives. Les réductions fiscales, les primes (de l’emploi à la casse), les bonus et les malus sont des stimulants remarquables ! « Tu avais besoin de changer de voiture ? » « Non, mais il fallait que je profite de la prime de mille euros ». Dans ce cas, évidemment ! Des personnes sont même très perméables à la publicité, à la propagande, à ce qui peut guider leurs actes et leurs opinions. De bons clients pour les penseurs uniques !

 

Par ailleurs, l’endettement, nerf et arme fatale de la croissance, sévit en France, en Europe et dans le monde occidental. Il est mal vu d’épargner. Pour consommer et faire tourner la machine, le citoyen est poussé à s’endetter. Pour acheter un logement, il peut en prendre jusqu’à trente ans. Des crédits qu’il devra s’échiner à rembourser et qui le priveront longtemps de liberté. Dans le cas de l’État et des collectivités locales, ce sont les générations futures qui paieront, dit-on. L’énorme dette publique entrave la liberté d’action de la France et sale toujours plus l’addition fiscale des contribuables. Parler de rigueur est provocateur et suicidaire. Pourtant, avec les obligations souscrites à Maastricht, les gouvernants avaient pris de « bonnes » résolutions. Ils voulaient un euro fort. Ils l’ont eu. Ils s’en sont plaints. Avec la crise, l’explosion des déficits publics et des dettes, la faiblesse de l’Espagne, du Portugal, celle de la Grèce sous perfusion, l’euro a été attaqué et a reculé. Il est menacé… et l’Union européenne (UE) aussi. Nous sommes à la merci des marchés financiers et du grand capitalisme, États, multinationales, gros actionnaires, dirigeants de groupes et de sociétés qui spéculent, se sucrent et accaparent les fruits de la croissance et du travail. Non sans mépris pour des travailleurs, auxquels la concurrence, les pressions sur les salaires, les délocalisations et la mobilité, vers la Hongrie ou l’Inde, par exemple, peuvent faire penser au servage.

 

La France a confirmé avec entrain l’abandon d’une partie de sa souveraineté, de notre liberté de décider par nousmêmes (peuple français) de notre sort. Elle a perdu sa liberté budgétaire en prenant des engagements, qu’elle ne peut d’ailleurs pas tenir. En outre, inacceptable, liberticide est, à mon avis, l’obligation de se prosterner devant l’UE telle qu’elle se construit, sans pouvoir proposer d’alternatives. Alternant au pouvoir, l’UMP et le PS ont mis la main sur la France, monopolisé les sièges parlementaires français et européens, marginalisant les autres partis et entravant les relations directes entre les citoyens français, les autres européens et l’Union. L’entourloupe sarkozienne de la ratification du traité de Lisbonne par le Parlement français restera dans les annales comme une privation de liberté fondamentale des citoyens, la négation de leur droit à l’autodétermination.

 

En attendant de prochains élargissements dont la majorité des Français ne veulent pas. Ce type de trahison politicienne ne se limite pas aux questions européennes. Les promesses préélectorales tiennent mal devant les injonctions des partis et leurs oukases internes. Les citoyens ne se retrouvent plus dans leurs élus. Malaise ! D’autant plus grave que le pouvoir se délocalise, quitte Paris pour Bruxelles et Francfort, s’européanise, s’éloigne davantage des populations. La démocratie directe et de proximité recule. Le rôle de tous les intermédiaires obligés va donc sans doute augmenter.

 

L’effondrement des économies de l’URSS et des autres États socialo communistes a consacré la puissance et la gloire du système capitaliste et ouvert une autoroute à la mondialisation. En France, la vérité révélée selon laquelle ce système enrichit inévitablement les riches, appauvrit fatalement les pauvres et creuse profondément les inégalités (ce qu’il est difficile de prouver avec les statistiques existantes) a survécu et pris de l’ampleur, motivant une augmentation de la redistribution des revenus destinée à éviter les explosions sociales et à conserver le système en activité. Car, pour l’opinion (et ceux qui la font) c’est, malgré tout, le moins mauvais système pour la croissance. Jusqu’ici, « la droite » était censée se préoccuper et s’occuper en priorité de la croissance, créatrice d’emplois et de revenus. « La gauche », plus habituée au statut d’opposant « progressiste » mettait davantage en avant le social et la redistribution. La crise a peut-être aidé nos gouvernants à réaliser que la croissance française leur échappait. Vu les difficultés d’imaginer et de réussir une politique gagnante de croissance et d’emploi, on peut comprendre que l’UMP ait voulu être plus présente, plus active, plus mordante dans les domaines sociaux et culturels, pour compenser l’impuissance économique. Le débauchage de personnalités de gauche en vue, les marocains et les missions qui leur sont confiées feraient ainsi partie, avec les déficits publics, des moyens retenus pour effectuer ce grand redéploiement vers des terrains de prédilection de la gauche.

 

Un virage qui n’exclut en rien la solidarité élyséenne envers la Finance et le grand capital. Au contraire. Nos politiciens sont experts pour ménager la chèvre et le chou, non sans contradictions. Aussi, l’interventionnisme public cohabite avec le « libéralisme » à la française. Il restreint les libertés avec des lois, des régulations d’origine nationale et européennes, des Hautes autorités et d’autres instances de décision et d’arbitrage. Il aide les gros de la finance et de l’industrie, sans le dynamisme, les succès, le civisme et l’abnégation desquels la France ne serait pas une telle puissance mondiale. Il poursuit les privatisations, juteuses pour les repreneurs, au détriment des services publics et de leurs usagers. Libéralisme et liberté : quel rapport ?

 

La démocratie à laquelle les Français tiennent ne doit pas servir de paravent pour imposer à une partie de la population, contre son gré, ce que désirent d’autres et/ ou ceux qui détiennent le pouvoir. La liberté perd de sa lisibilité et se complique dès lors que la France s’abandonne dans une UE mondialiste, d’une part, et que la diversité démographique, sociale et culturelle devient un objectif, d’autre part. A côté de la volonté de pouvoir penser, s’exprimer et vivre sans se plier à une pensée unique, les préoccupations matérielles montent au premier rang. Pour de nombreux citoyens, la libération est en priorité de sortir de la crise et de remédier aux excès du système actuel (ou s’en extirper), associée à la promesse de l’amélioration de l’emploi et des conditions de vie.

 

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10.03.2008

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