Novembre
2009 La Pologne, la
Lituanie s’unissent à l’Ukraine pour créer une brigade d’intervention commune,
baptisée… Litpolukrbrig, en vue de
faciliter l’intégration future de l’Ukraine dans l’Alliance atlantique (annonce faite par le ministère de la
Défense lituanien). Une telle initiative prise par d’anciens satellites de
l’URSS et d’une certaine façon nouveaux vassaux des États-Unis, privilégiant
l’appartenance à l’Otan à celle à l’UE, risque d’apparaître à la Russie comme
une provocation. Elle peut donc être créatrice de nouvelles tensions à ses
frontières, ce qui pourrait être le but visé dans l’espoir de faire capoter le
rapprochement entre Américains et Russes d’une part, et d’instrumentaliser
d’autre part une sorte de chantage s’agissant de l’approvisionnement en gaz
russe, une des principales motivations de la recherche d’un partenariat entre
l’UE et la Russie. Aussi est-il difficile de croire que cette initiative a reçu
l’aval des autorités de Bruxelles et en particulier de M. Solana, car elle ne peut conduire qu’à une dispersion
préjudiciable des efforts de défense que veulent et peuvent consentir les pays
de l’UE en raison même de leurs capacités budgétaires
insuffisantes.
Recevant le président
Sarkozy dans sa ferme au sud de Ryad, le roi Abdhallah d’Arabie Saoudite lui a fait part de sa déception
à l’encontre du président Obama qu’il juge incapable
de parvenir à un accord de paix entre Israéliens et Palestiniens, n’ayant même
pas pu obtenir des premiers le gel des colonisations dans les territoires
occupés. Le président français, tout aussi inquiet et à juste raison du risque
de « désespérer (encore davantage) les Palestiniens et le monde musulman » que
cette absence d’intervention implique, a proposé au roi Abdallah de s’associer à
son projet de réunir prochainement à Paris une conférence internationale pour
relancer les négociations, mais celui-ci semble hésiter à s’engager, se
souvenant du sabordage par les États-Unis en 2007 de sa tentative de
réconciliation de l’autorité palestinienne et du Hamas.
La multiplication des
actes de piraterie dans l’océan Indien conduit désormais les Occidentaux à
intervenir à terre pour aider le gouvernement somalien à reprendre le contrôle
du pays, avec l’espoir de mettre fin à la guerre civile et de priver les pirates
de leurs bases. Les pays européens s’apprêtent à former de1.000 à 2.000 soldats
somaliens afin de participer à la mise sur pied d’une force gouvernementale dont
les besoins en effectifs sont évalués à 6.000 hommes.
Pour sa part, depuis
le printemps, la France forme déjà 500 de ces futurs soldats somaliens sur sa
base de Djibouti. On voit qu’ainsi est en train de se créer en Somalie un
nouveau théâtre d’opérations extérieures. D’une part, comme en Afghanistan, il
s’agit de soutenir au sol la future armée gouvernementale et, d’autre part, tout
en courant après une pacification incertaine du pays, de financer une
hypothétique restructuration de l’État et la création
d’une économie viable.
Par ailleurs, les
actes de piraterie maritime se multiplient dans d’autres régions, dans le golfe
de Guinée, où un pétrolier vient d’être attaqué au large des côtes du Bénin, et
dans les Caraïbes, deux hauts-lieux également du
trafic de la drogue dont les moyens ne cessent de se développer,
sansoublier les détroits asiatiques… La lutte contre ces
actions qui relèvent du crime organisé mobilise des moyens militaires
internationaux, et notamment européens et français, de plus en plus importants
(navires, aéronefs, voire troupes au sol), de sorte qu’il pourrait se poser
rapidement un problème de choix des priorités pour l’emploi des moyens
militaires disponibles et mobilisables, opposant interventions au sol (Opexet lutte contre le terrorisme) et
sécurisation des voies stratégiques d’approvisionnement.
Au demeurant, la vulnérabilité de
ces dernières n’est pas nouvelle, et il serait étonnant que les adversaires
déclarés des pays occidentaux ne cherchent pas à l’exploiter, en connivence avec
les organisations mafieuses qui sont leurs partenaires objectifs dans le trafic
de la drogue, à la base du financement de leurs activités. Il y a là un risque
majeur de coordination et donc de toujours plus grande nuisance, aussi bien sur
le plan stratégique que sur le plan opératif, auquel sont désormais exposées en
permanence les économies de nos pays industrialisés, qui pourraient se trouver
menacés d’asphyxie énergétique, ainsi que leurs interventions militaires dont
les lignes de ravitaillement peuvent être coupées comme on le voit actuellement
en Afghanistan.
À cet égard, sur le plan opératif,
les responsables politiques et militaires de cetteOpexferaient bien de se souvenir de l’échec final de
Rommel dont les blindés furent immobilisés aux portes de l’Égypte moins par les
forces terrestres adverses que par la rupture de leur ravitaillement en
carburant du fait de la destruction en mer des deux tiers des navires chargés de
l’assurer. Le journal La Croix du 13 novembre rend compte du Congrès des droits
civiques (CRC) qui s’est tenu au Nigeria à l’initiative d’un collectif d’ONG et
qui a notamment évoqué le rôle des anciens chefs traditionnels africains dans la
traite des esclaves.
Des accusations précises ont été
formulées concernant l’aide systématique apportée par eux à la traite en
procédant à des raids et des enlèvements dans des communautés sans défense puis
à livrer leurs prises à des Européens, à des Américains et autres (Arabes ?). Il
s’agit d’une réalité gênante qui contredit bien des idées reçues, mais comme
l’indiquait l’historien Olivier Pétré-Grenouilleau,
sans minimiser la responsabilité occidentale – ce serait absurde car la demande
fait aussi l’offre -, c’est un fait établi que l’Afrique noire a été un acteur à
part entière de la traite. Ainsi estil reconnu
aujourd’hui que la traite intra-africaine (Sékou
Touré, le dirigeant guinéen, était le descendant d’esclaves maliens au Maroc
ultérieurement affranchis) a concerné près de 14 millions de personnes contre 17
millions pour la traite orientale, celle faite au profit des Arabes, et 11
millions pour la traite occidentale.
En fait, la dénonciation du CRC ne
visait pas à nourrir la polémique mais à échanger des excuses des chefs
traditionnels du Nigeria pour le rôle joué dans la traite par leurs
prédécesseurs contre l’inscription dans la constitution de la reconnaissance de
leur pouvoir local dans les villages, refusée jusqu’à présent en raison du frein
au développement qu’il constituait.
Chargés par le président Sarkozy de
réfléchir aux investissements stratégiques à financer prioritairement par un
emprunt d’État, MM. Juppé et Rocard viennent de lui
remettre leurs conclusions. Constatant le recul de la part des investissements
dans les dépenses publiques depuis 1981, deuxième façon, selon eux, de mal
préparer l’avenir après le recours à l’endettement pour financer les dépenses de
fonctionnement, ils ont cherché à définir les grandes priorités d’un nouveau
modèle de croissance « moins dépendant des énergies fossiles et davantage tourné
vers la connaissance », d’où la ventilation proposée d’une enveloppe de 35
milliards d’euros entre un axe de priorité absolue, l’enseignement supérieur, la
recherche et l’innovation, financés à hauteur de 16 milliards d’euros (45,7 % de
l’enveloppe !) et six autres axes : faire émerger la ville de demain (4,5
milliards d’euros), l’investissement dans la société numérique (4 milliards), le
développement des énergies décarbonées, le nucléaire
notamment, et une gestion efficace des ressources (3,5 milliards), la mobilité
du futur dont le développement de l’industrie aéronautique et spatiale (3
milliards), le soutien aux PME innovantes (2 milliards : est-ce suffisant ?) et
le développement des sciences du vivant dont la recherche dans le secteur de la
santé (2 milliards). Ce deuxième volet (19 milliards d’euros au total) concerne
les « secteurs et technologies où la France détient des positions fortes et qui
vont structurer notre cadre de vie des vingt prochaines années ». Bien entendu,
c’est au président Sarkozy de confirmer ou de modifier ces choix et d’en arrêter
le financement, mais personne ne peut contester qu’ils soient d’actualité et
qu’ils ne peuvent être éludés sans compromettre
l’avenir. Le financement de ces « investissements d’avenir » ne devrait
d’ailleurs pas être seulement assuré par l’emprunt. D’une part, l’État va disposer à cet effet de 13 milliards d’euros d’aide
financière remboursés par les banques, l’endettement lié au futur emprunt en
étant d’autant diminué ; d’autre part, il compte sur un effet d’entraînement
mobilisant des financements privés, locaux et européens pour porter l’effort
d’investissement au-delà de 60 milliards d’euros.
Sans méconnaître l’impérieuse
nécessité de donner à l’enseignement supérieur et à la recherche les moyens dont
ils ont besoin pour préparer l’avenir, on peut craindre que le projet ne soit
stérilisé par le retour à l’éternelle querelle entre recherche fondamentale et
recherche orientée ou appliquée et que les crédits ainsi gaspillés ne servent
qu’à engraisser le mammouth… L’importance de la dotation rendra encore plus
nécessaire un rigoureux encadrement de son emploi qui ne devrait d’aucune façon
être laissé à la seule initiative des bénéficiaires. D’autre part, la nécessité
de soutenir les industries nationales les plus innovantes, s’agissant en premier
des PMI des secteurs reconnus prioritaires, ne semble pas avoir été prise en
compte à un niveau suffisant.
Tandis que l’avion de transport
militaire européen, l’A 400 M s’apprête
enfin à faire ses premiers essais en vol, le ministre de la Défense vient
d’autoriser la DGA à passer la commande globale de 60 avions de combat Rafale
à Dassault Aviation, ce qui portera le nombre d’appareils commandés à 180
exemplaires sur une cible de 286 (228 pour l’armée de l’Air et 58 pour l’Aéronavale). Sur
le plan industriel, ce sont une centaine d’entreprises du secteur aéronautique
qui se trouvent concernées, dont notamment Thalès (électronique de bord), Safran
(moteurs) et MBDA (missiles), ainsi que de nombreuses PME sous-traitantes. Sur
le plan militaire, premier bémol, les livraisons « seront ajustées en fonction
des contrats à l’exportation ». Au mieux, elles devraient s’échelonner sur
quatre ans…
Où en est-on aujourd’hui ? À la
mi-novembre 2009, l’armée de l’Air ne dispose en fait
que de 44 Rafale opérationnels auxquels s’ajoutent quatre appareils F
2 en cours de mise au standard F3 et 3 appareils aux essais à Istres,
soit 51 appareils au total qui devraient être tous au standard F 3 au
printemps 2010. De leur coté, les marins disposent à ce jour de 14 F 3 «
retrofités » et d’un seul F 3 « neuf », 10
Rafale F 1 étant en attente de mise au niveau F 3 faute de
crédits.
On ne peut que craindre que ces
disponibilités réduites préludent à de nouveaux retards dans la réalisation des
cibles inscrites dans le nouveau Livre blanc pour l’Armée de l’Airet surtout pour
l’Aéronavale, voire à leur
réduction.
Décembre 2009 En application du traité de
Lisbonne ratifié non sans réserves de la part de plusieurs pays dont
l’Allemagne, l’Union européenne s’est donc donné un
président du Conseil et un ministre des Affaires étrangères en les personnes de
M. Herman Van Rompuy,
premier ministre belge (« qui n’avait jamais sollicité cette haute fonction »),
élu pour deux ans, et demi, et de Mme Catherine Ashton, travailliste proche de
M. Blair, commissaire à Bruxelles, élue pour cinq ans haut représentant de
l’Union (appellation imposée par les Britanniques),
c’est-à-dire en titre ministre des Affaires étrangères, qui sera en même temps
le numéro 2 de la Commission de Bruxelles. Il devrait s’ensuivre une nouvelle
répartition des rôles au sein du pouvoir européen mais, pour l’instant, aucun
des responsables en place ne semble vouloir céder un tant soit peu de ses
prérogatives et tous s’emploient à limiter celles dont pourrait être investi M.
Van Rompuy : « un coordinateur, davantage qu’un
président au sens strict », selon M. Buzek, président
polonais du Parlement européen. De son côté, M. Barroso, président de la Commission de Bruxelles, rappelle
que celle-ci et son président « représentent seuls l’intérêt supranational
(sic) ». Enfin, la désignation de M. Van Rompuy
et de Mme Ashton ne remet pas en cause la présidence tournante. De leur côté,
les grands pays de l’U.E., l’Allemagne, la France et
le Royaume-Uni, ne veulent pas laisser le nouveau président dialoguer sur un
pied d’égalité avec les grands dirigeants étrangers, Obama, HuJintao et Medvedev. Ils entendent rester seuls maîtres du
jeu.
Dans ces conditions, on peut se
demander si, d’entrée, le tandem Van Rompuy-Ashton
n’est pas frappé d’impuissance. C’est une question que ne peut manquer de se
poser le citoyen ordinaire. Les multiples prétendants à la gouvernance de
l’U.E. ne devraient pas continuer de s’autocongratuler sur la scène publique, mais plutôt
s’attacher à démontrer que, contrairement aux apparences, la nouvelle
architecture du pouvoir au sommet de l’U.E.
contribuera effectivement à un meilleur fonctionnement des institutions, et cela
pour un coût supplémentaire relativement faible au regard des effets obtenus.
C’est loin d’être évident !
Le richissime homme d’affaires
Pierre Bergé, excompagnon d’Yves Saint-Laurent et
ex-sponsor de Ségolène Royal, vient de s’en prendre d’une façon
singulièrement choquante au Téléthon organisé chaque année depuis1987
pour collecter des fonds destinés initialement à financer la lutte contre la
myopathie, puis également consacrés ultérieurement, par extension des
applications possibles, à celle contre les maladies génétiques en
général.
S’agissant d’une telle initiative
qui se substitue, il faut bien l’avouer, à la carence étatique, comment peut-on
oser dire que « le Téléthon parasite la générosité des Français d’une
manière populiste (sic)… que cent millions pour le Téléthon, cela
ne sert à rien… qu’une trop grande part n’est pas utilisée tout de suite, mais
donne lieu à des produits financiers » ? Comment peut-on énoncer autant de
contrevérités alors qu’il est de notoriété publique que les travaux financés par
le Téléthon ont permis des avancées très concrètes dans la thérapie non
seulement de la myopathie mais également de nombreuses autres
pathologies.
Sont actuellement en cours
trente-quatre essais thérapeutiques sur l’homme concernant trente maladies
différentes, ce qui nécessite pour chacun un investissement de plusieurs
millions d’euros qui rend indispensable le recours au Téléthon (90 % des
dons). C’est cet aboutissement porteur de grands espoirs que Pierre Bergé a
cherché délibérément à remettre en cause en utilisant des termes que ne
renieraient pas les dénonciateurs sévissant dans les pays sous
dictature.
On aurait pu s’attendre à plus
d’honnêteté intellectuelle de sa part concernant une maladie génétique dont les
malheureuses victimes n’ont d’autre responsabilité que celle d’être nées alors
que les personnes atteintes du sida, surtout dans nos pays, qu’elles soient de
comportement hétéro ou homosexuel, ont pour beaucoup une part de responsabilité
dans le malheur qui les frappe. Au demeurant, alors que les myopathes n’ont
encore actuellement aucune chance d’échapper à leur destin, le traitement du
sida, largement pris en charge par les services de Santé, a fait d’énormes
progrès assurant aux malades rémission et conditions de vie relativement proches
de la normale dans l’attente d’un prochain vaccin. De plus, et il faut le
souligner et s’en féliciter, surtout si l’on s’intéresse au sort des populations
des pays les plus déshérités, en Afrique et en Asie en particulier, dont la
contamination est due au moins en partie à la pratique du tourisme sexuel, le
nombre de personnes infectées chaque année y a fortement diminué depuis le début
de la décennie selon le dernier rapport annuel de l’Onusidaqui gère le programme des Nations
Unies de lutte contre la maladie. Pour l’Afrique subsaharienne, région la plus
touchée, ce nombre est passé de 2.300.000 nouveaux cas recensés en 2001
à1.900.000 en 2008 (encore 1.400.000 décès cette même année), ce qui est bien
entendu encore énorme, mais le progrès, essentiellement dû aux campagnes pour
l’emploi du préservatif et au traitement des femmes enceintes pour éviter la
contamination au foetus, est bien réel.
BarackObama
vient enfin de faire connaître sa stratégie pour terminer la guerre en
Afghanistan. « La sécurité des Américains est en jeu », a-t-il déclaré devant
les cadets de l’académie militaire de West Point le 1er décembre, ce qui
justifie à ses yeux l’envoi de 30.000 soldats supplémentaires sur ce théâtre
d’opération1. Assuré déjà, selon le secrétaire général de l’Alliance atlantique, le vat- en-guerre Rasmussen, d’un renforcement de la Force
internationale d’assistance à la sécurité (Isaaf)
à hauteur d’au moins 5.000 hommes2, il satisfait ainsi, du moins
apparemment, aux demandes de renforts du général McChrystal, commandant en chef des forces américaines et de
l’Otan en Afghanistan. Cependant, en même temps, le président américain, « chef
de guerre par nécessité » ainsi qu’il se définit luimême, fixe un calendrier plus propre à aider les talibans
à affiner leur stratégie dans son rapport au temps (il leur suffira d’attendre
le départ des forces américaines) qu’à convaincre les populations afghanes de se
rallier à celle de contre-insurrection que le général
McChrystal, s’inspirant de Lyautey au Maroc, voudrait
mener. En déclarant que «notre engagement ne peut être illimité », M. Obama répond aux préoccupations de son électorat et tourne
en fait le dos à une telle stratégie qui ne peut se concevoir que dans la durée
et en vue d’une permanente implantation sous forme de protectorat comme Lyautey
l’a fait au Maroc.
Il y a là une contradiction
fondamentale avec l’annonce d’un début de retrait des forces américaines et
alliées dans dix-huit mois, leur intervention se limitant par ailleurs à
sécuriser la phase de transition au terme de laquelle les Afghans
devraient être capables de sécuriser leur propre gouvernance. M. Obama, qui vise sans nul doute un second mandat
présidentiel, ne peut pas s’aliéner son électorat démocrate et pacifiste, ce qui
l’a conduit à une sorte de compromis en retenant trois dates de principe qui
combinent à la fois envoi des renforts demandés par les militaires et annonce
d’un désengagement progressif à partir de juillet 2011 :
- dès décembre 2009, début de
l’envoi des renforts ;
- fin août 2010, achèvement de leur
déploiement en Afghanistan, étant entendu que celui-ci dépendra
;
.- juillet 2011, début du retrait
des forces américaines.
Un tel calendrier ne laisse que
dix-huit mois au général McChrystal pour redresser une
situation actuellement très compromise et pour parvenir à « désorganiser,
démanteler et vaincre al-Qaïda en Afghanistan et au
Pakistan », ce qui demeure l’objectif premier de l’intervention américaine
et la justifie sur le double plan du droit et de l’éthique, selon
l’argumentation développée par le président américain à l’occasion de la remise
de son prix Nobel de la paix à Oslo… D’autre part, le succès de la stratégie de
contreinsurrection que souhaite mettre en oeuvre le
général américain est lié à une pleine coopération - qui est loin d’être acquise
- avec le Pakistan et son armée, de part et d’autre de la frontière. Dans ces
conditions, les choses étant ce qu’elles sont, en zone tribale notamment, on
peut se demander s’il ne s’agit pas pour lui d’une « mission impossible » ! Aux
proches échéances annoncées par le président Obama,
son homologue afghan oppose par ailleurs, de son côté, un délai d’au moins
quinze ans avant que les forces de sécurité de son pays soient en mesure de
contrôler pleinement la situation. Il n’en était qu’à cinq ans lors de sa
prestation de serment après sa discutable réélection.
Cette surenchère en forme de
chantage rend encore plus difficile la conciliation des deux approches …,
d’autant que, autre considération qui s’impose pour apprécier la capacité des
Américains à poursuivre plus longtemps un tel effort de guerre, le coût de
celui-ci. Le coût supplémentaire résultant de l’envoi des nouveaux renforts est
en effet évalué à quelque 30 milliards de dollars par an sur la base d’un coût
unitaire d’un million de dollars par soldat déployé (sic), et il ne
paraît guère compatible avec la réduction du déficit budgétaire américain à
laquelle s’est engagé le président.
Cependant, si, comme la majorité des
experts en convient, cette guerre ne peut pas être gagnée militairement, les
Américains et leurs alliés ne peuvent pour autant se permettre de perdre la face
en se retirant du théâtre d’opération afghan sans avoir neutralisé au moins pour
un temps la pression exercée par les talibans. Il est vraisemblable que cette
neutralisation passera par le regroupement des populations dans des villages
organisés en autodéfense… comme au Vietnam, comme en Algérie, et sans davantage
de succès à terme, mais l’échec ne sera imputable qu’aux Afghans eux-mêmes
(cqfd)… , de sorte que pourraient être ainsi évités
selon certains les effets pervers d’un départ décidé unilatéralement, présenté
par la partie adverse comme une victoire de l’Islam
sur l’Occident, avec toutes les conséquences qui en
découleraient … Sacré enjeu !
Tout le monde - aussi bien les
experts financiers et les écologistes que les dirigeants politiques - aime à
dire que demain rien ne pourra être comme avant, mais le citoyen ordinaire n’a
pas le sentiment que les choses bougent pour autant. En fait, il lui semble même
que l’on cherche plus les effets d’annonce qu’à sortir effectivement des
errements dénoncés. Sans doute, les médias montrent-ils chaque jour, en
particulier dans le domaine de la construction des maisons individuelles et des
immeubles collectifs, des réalisations qui ont toutes l’ambition de répondre aux
besoins en énergie des occupants par production autonome d’électricité et
isolation. De même pour l’eau, entre récupération des eaux de pluie et forage
d’un puits. Tout cela est certes fort édifiant, mis à part une esthétique
parfois douteuse et plus ou moins en harmonie avec l’environnement, mais, hors
un engouement qui relève au moins pour partie d’un effet de mode, il n’est pas
certain que cet habitat qui suppose une aide financière publique importante soit
économiquement généralisable.
Le seul côté réellement positif des
réflexions en cours réside dans la prise de conscience maintenant générale des
gaspillages sans frein auxquels ont conduit les excès de la société de
consommation, avec toutes leurs conséquences sur l’environnement. Ce n’est
pourtant qu’un premier pas, certes fondamental, mais qui reste sans portée
réelle au regard des mesures d’urgence et des modifications de comportement
qu’appellerait selon les experts une lutte efficace contre le réchauffement
climatique. En effet, ces mesures ne vont pas d’elles-mêmes. Il faut être
conscient que leur application poserait des problèmes économiques et sociaux
quasi impossibles à résoudre, du moins dans l’immédiat, d’où un obstacle majeur
à leur mise en oeuvre. Le tourisme de masse constitue à cet égard un exemple des
plus significatifs. C’est devenu, comme on sait, une industrie florissante (hors
crise) qui assure à de nombreux pays, la France entre autres, des rentrées
importantes qui contribuent à l’équilibre de leur balance
commerciale.
Cependant cette industrie ne se
limite pas à l’accueil des touristes sur les sites visités. S’y ajoutent les
moyens de transport pour parvenir à ceux-ci, avions, bateaux, trains et autres
véhicules terrestres, qu’il faut en amont fabriquer, ce qui montre toute
l’ampleur du secteur économique. Il fait vivre beaucoup de gens et, comme on
peut le voir, il est sensible aux aléas climatiques et économiques.
Ainsi, conséquence de la crise
actuelle, plusieurs commandes d’avions ont été récemment résiliées aux dépens de
Boeing et Airbus … D’autre part, à l’heure où l’on veut faire payer au voyageur
la quantité de CO2 émise du fait de son transport, on ne peut que souligner le
double impact négatif de celui-ci en termes de pollution et de consommation d’un
produit pétrolier en voie de raréfaction… De plus, sur le plan de l’éthique, on
ne peut oublier que le tourisme de masse contribue à la destruction des
patrimoines nationaux, culturels (folklorisation des
rituels en Afrique) et matériels, traités comme des « biens de consommation » au
sens commercial, donc de fait destructibles. Il est bien évident que les pays
concernés ne sont pas prêts à renoncer à la manne touristique ni même à assortir
leurs prestations de contraintes écologiques. À voir leurs efforts de marketing
pour venir au devant des désirs de leur clientèle, c’est même tout le contraire
qui se passe. Ce qui vaut pour le tourisme peut pratiquement être étendu aux
autres secteurs économiques, à l’agriculture par exemple, s’agissant de fruits
et légumes que le caractère saisonnier de leur production sous notre climat ne
permet pas d’en assurer l’offre sur les étals toute l’année
…
On se trouve ainsi placé à l’échelle
mondiale devant un détournement des avancées techniques à des fins exclusivement
mercantiles, et on ne peut que déplorer le caractère non vital de ces activités
qui enferment les populations des pays en recherche (plutôt qu’en voie !) de
développement dans des économies totalement artificielles au regard des carences
dont elles souffrent, notamment dans les domaines de l’alimentation et de la
santé. Comment passer de ce système économique, à peine freiné dans son
emballement par la crise, à un développement durable, soucieux tout à la fois de
préserver la planète et d’améliorer les conditions de vie des populations les
plus défavorisées, et cela sans provoquer ailleurs des vagues de licenciements,
c’est le problème qu’auront à résoudre solidairement les dirigeants politiques
de tous les pays et que manifestement ils n’ont pas su prendre en réelle
considération à Copenhague.
1.Ces renforts tripleront les effectifs
du corps expéditionnaire américain par rapport à ce qu’ils étaient lors de la
prise de fonction du président Obama
!
2. On parle de 7 000, mais le
chiffre ne sera définitivement arrêté que fin janvier à Londres. Comme les
autres pays engagés en Afghanistan, et d’autant plus qu’elle vient de se voir
attribuer un des deux commandements stratégiques de l’Otan, la France ne devrait
pas pouvoir en rester plus longtemps à son refus d’envoyer de nouvelles
troupes.