Lisbonne
nous
déplaît à nous gaullistes de tradition et de conviction. Le traité et non la
ville dont la beauté à le Tage pour miroir. Construire l’Europe est en soi une
idée belle et généreuse. C’est la manière dont on s’y prend qui est contestable.
Au coeur du gaullisme on trouve l’AssociationCapital-Travail. Ce
fut son honneur et son échec car sa mise en oeuvre est demeurée à l’état
d’ébauche.
Ce
grand projet social paraît s’inscrire à l’encontre de ce qui inspire l’Union Européenne. Elle est fondée sur le principe
d’une
concurrence libre et non faussée qui,
trop souvent, ne prend pas en compte le facteur humain. Ce qui équivaut à la
guerre de tous contre tous. Faut-il dire que de traités en traités on fait
davantage fi de la souveraineté et de la solidarité. Ce constat étant posé il ne
sert à rien de nier l’évolution du monde et la réalité. Il faut aussi savoir
raison garder et se montrer équitable.
En
vertu du traité de Lisbonne l’Union s’est dotée d’un
président et d’une responsable de sa diplomatie. On peut déplorer le peu de
transparence dans laquelle s’effectuent ces désignations. Cela étant j’avoue mon
irritation devant l’accueil réservé au président de l’Union Européenne par la presse française. Je le trouve
indécent, disgustingdiraient
les Britanniques.
Jugez-en
d’après ces quelques épithètes. Ces nominations, celles d’Herman Van Rompuy et de Catherine
Ashton sont celles de « tartempion et Madame Nobody ».
Alain Duhamel à la fois pontifiant et méprisant exécute en trois mots
«
Ce n’est rien ! ».
Tout est dans le rien. Outré par un tel dédain qui fait bon marché des hommes je
suis encore plus confondu par l’ignorance des hiérarques de la presse française.
Herman Van Rompuy, un nom
imprononçable pour des oreilles françaises, le voici déjà condamné. Derrière le
nom aussi disgracieux qu’il puisse paraître il y a un homme. Disons-le tout de
suite, le choix de
l’Union
n’est pas le mien. Herman Van Rompuy n’appartient pas à ma famille politique. C’est un
démocrate-chrétien flamand. D’aucuns n’hésitent pas à dire flamingant.
Pour
le francophone de Flandres que je suis ce n’est pas une qualité inclinant à de
la bienveillance… Mais dans tous les horizons politiques on trouve des hommes
valables. Van Rompuy en est un. Sous ses aspects
austères qui le font ressembler à un séminariste qui aurait oublié de revêtir sa
soutane, l’homme a de l’humour. Il pratique autant l’art de la négociation ou il
excelle que celui du haïku,
ces
poèmes japonais où tout est exprimé en trois vers. Il est aussi l’auteur d’un
livre empli de spiritualité Le
christianisme, une pensée moderne. Intellectuel
de renom il peut se révéler tout aussi discret que redoutable dans la
négociation.
C’est
lui qu’on est venu chercher pour apaiser la crise communautaire dans laquelle
Yves Leterme avait plongé la Belgique. Il avait en
cela rallié le consensus des flamands et des francophones. Il n’a certes pas
renversé l’obstacle. Avec patience, ingéniosité, prudence, il l’a contourné et
différé les échéances. Le pays lui sait gré d’avoir, au moins pour un temps,
retrouvé un calme relatif et une certaine stabilité. Ce n’est pas rien. Van
Rompuy parti à l’Europe, Yves Leterme est revenu. Déjà les flots communautaires s’agitent.
Pour éviter la tempête le premier ministre a été flanqué d’un premier ministre bis, Jean-Luc Dehaene, celui
qui dans la politique belge a gagne le nom de « démineur ». Voilà où l’on en
est. Ce qui en résumé signifie que, de toute évidence, Herman Van Rompy ne sera pas le «
Washington de l’Europe », comme le déplore Valéry Giscard d’Estaing. De là à
laisser tomber péremptoirement qu’il n’est « rien » équivaut à une goujaterie
doublée d’une sottise.
La
cas Salah Hamouri
Si
je revendique de l’équité lorsqu’on juge le nouveau président de l’Union, je crois que la même règle doit être observée
lorsqu’on évoque le président de la république française. Comme la plupart des
gaullistes qui se revendiquent de la pensée du Général, je suis critique à
propos de Nicolas Sarkozy. L’homme est intelligent, habile. Il a du savoir-faire
et manie le verbe avec aisance. Le tout ne suffit pas à faire une politique. À
mes yeux, la conduite des réformes, dont certaines sans doute s’avèrent
nécessaires, conduisent à une déstructuration sociale. C’est un autre débat. Je
voudrais parler d’un aspect de la politique sarkozienne extrêmement positif. Le président se souvenant
peutêtre de l’antique invocation CivisRomanussumse
porte au secours des citoyens français en difficulté dans le
monde.
Ce
fut le cas d’Ingrid Bettencour ; des équipages
capturés par les pirates somaliens ; les humanitaires « perdus » au Tchad ; la
Française soupçonnée de complicité avec le grand banditisme au Mexique ; ClothildeReiss, victime de la
juridiction arbitraire des mollahs ; le soldat Shalit,
prisonnier du Hamas. Avec diligence, à défaut de toujours se faire entendre,
Nicolas Sarkozy est intervenu ou continue d’agir pour les cas non résolus. Pour
tous, sauf un. Celui de Salah Hamouri. Qui est-il ? Né
à Jérusalem en 1985 il est de mère française et de père palestinien. Sa mère,
Denise Hamouri-Guidoux, originaire de Bourg-en-Bresse,
est professeur de français à Jérusalem. Son fils, ancien élève des Frères de
Lassalle, a entamé des études de sociologie à l’université de Bethléem. Études
interrompues lorsque, le 13 mars 2005, il est arrêté au point de contrôle de
Qualquillya. Arrêté et inculpé. Il est accusé d’être
un membre influent du Front Populaire de Libération de la Palestine, le F.P.L.P.
Plus sérieux, on le soupçonne de participer à un complot tendant à assassiner le
rabbin Ovadia Youssef, chef spirituel
duShass, un
des partis politiques importants en Israël.
Ce
sont des intentions que lui prête la justice militaire. La matérialité des faits
se résume à l’avoir vu passer en voiture devant la maison du rabbin. Il fait
trois ans de préventive. Son avocate l’informe du marché qu’on lui propose :
qu’il plaide non-coupable et il écope de quatorze ans
de prison où, s’il s’avoue coupable sept ans ! Pris à la gorge il plaide…
coupable. Le 7 juillet dernier sa demande de mise en liberté provisoire a été
rejetée. Il faudra attendre février 2010 pour en introduire une
nouvelle.
Nicolas
Sarkozy n’a jamais voulu recevoir la mère de Salah, la laissant aux mains de
fonctionnaires subalternes. À la suite de nombreuses interventions il en a
touché un mot à Benjamin Netanyahou qui l’a rembarré
sèchement. Puisqu’il a plaidé « coupable », la cause est entendue… Jusqu’au jour
récent où François Cluzet, en direct à la télévision,
a clamé son indignation à propos de la détention depuis déjà quatre ans de Salah
Hamouri dont peu de monde se préoccupait.
Toujours
à la télévision, Jean-François Coppé, généralement
plus sûr de lui, avouait tout ignorer. De même que le présentateur de
France
2, Laurent
Delahousse. S’il entend se montrer fidèle à lui-même,
Nicolas Sarkozy se doit de se saisir avec détermination de ce dossier comme il
le fait, avec raison, de celui du caporal Shalit. La
sélectivité est à proscrire. Je souhaiterais voir des parlementaires de gauche
intervenir à propos de Shalit et des parlementaires de
droite revendiquer la libération d’Hamouri. L’équité,
la justice commandent d’appeler à la libération
des deux. Nous le faisons.